PDF 1.57 Mo - Ordre des dentistes du Québec

publicité
MÉMOIRE DE
L’ORDRE DES DENTISTES DU QUÉBEC
PRÉSENTÉ À LA COMMISSION DE LA SANTÉ
ET DES SERVICES SOCIAUX
CONCERNANT LE PROJET DE LOI N° 10 :
Loi modifiant l’organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des
services sociaux notamment par l’abolition des agences régionales
28 octobre 2014
Ordre des dentistes du Québec
800, boul. René-Lévesque Ouest, bureau 1640
Montréal (Québec) H3B 1X9
Téléphone : 514 875-8511 ou 1 800 361-4887
Télécopieur : 514 875-9248
Courriel : [email protected]
Site Web : www.odq.qc.ca
Direction générale
Ordre des dentistes du Québec
28 octobre 2014
Projet de loi no 10
Présentation
L’Ordre des dentistes du Québec tient à remercier la Commission de la
santé et des services sociaux de lui donner l’occasion de lui faire part
de ses réflexions relativement au projet de loi no 10, Loi modifiant
l’organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services
sociaux notamment par l’abolition des agences régionales.
Être invité ici aujourd’hui dans le cadre de cette réflexion majeure
représente pour l’Ordre la reconnaissance des instances politiques de
l’importance de la santé buccodentaire dans la santé globale d’un
individu et de la médecine dentaire dans la médecine en général. Nous
sommes heureux de ce constat et nous offrons notre collaboration
entière à leur intégration généralisée au sein du réseau.
La réforme proposée est imposante. Son fondement, qui a pour objet
la modification des structures, a des objectifs louables. Favoriser et
simplifier l’accès aux services pour la population, contribuer à
l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins et accroître
l’efficience et l’efficacité du réseau, voilà autant de valeurs auxquelles
l’Ordre des dentistes adhère.
La pratique des dentistes est organisée, de façon générale, en
parallèle du réseau des établissements publics. Il demeure que la
bouche est un élément essentiel du corps humain et que les affections
buccodentaires ont une incidence directe sur la santé des personnes et
des populations.
Le programme public de soins administré par la Régie de l’assurance
maladie du Québec (RAMQ) n’offre pas une couverture complète des
soins buccodentaires. La médecine dentaire, pour cela et pour d’autres
motifs, dont plusieurs sont liés à une méconnaissance de l’impact
d’une bonne santé buccodentaire, est restée en quelque sorte en
marge du programme de soins de santé.
Ordre des dentistes du Québec
2
Projet de loi no 10
Malgré cette distance, les dentistes sont des partenaires à part entière
de la santé des Québécois, c’est pourquoi l’Ordre profitera au
maximum de sa présence pour faire état des problématiques de santé
liées à l’absence ou à l’insuffisance de l’attention donnée à la santé
buccodentaire. Nous souhaitons que nos commentaires s’inscrivent
dans la démarche de restructuration administrative envisagée par le
ministre de la Santé et des Services sociaux.
Nous vous soumettons des options qui visent non seulement la
réduction de certains coûts, mais aussi l’amélioration de la santé de
nos concitoyens.
Nous n’avons pas l’expertise pour discuter de tous les aspects
administratifs de la réforme. Toutefois, nous sommes en mesure de
nous prononcer sur des aspects qui nous concernent intimement.
D’entrée de jeu, nous pouvons dès maintenant vous faire part d’un
constat que nous avons dressé au fil des années.
Il faut investir davantage dans la prévention afin de réduire les besoins
en soins curatifs et de contrôler ainsi la croissance des coûts de santé.
Une approche préventive dont l’intensité serait modulée et adaptée en
fonction des clientèles vulnérables serait certainement plus efficiente.
L’Ordre des dentistes adhère à une démarche qui s’inscrit dans une
vision à long terme d’amélioration de la santé. Cette réforme ne doit
pas se limiter uniquement à une réduction des coûts engendrés pour
fournir des services à la population.
Nous voyons dans cette démarche une possibilité de réduire les coûts
en augmentant le niveau de santé buccodentaire de la population.
Cette démarche pourrait se traduire par des répercussions positives
sur la santé globale, un meilleur accès à des soins de base pour des
clientèles vulnérables ainsi qu’une meilleure santé pour nos enfants,
nos jeunes adultes et nos aînés.
Nous voyons l’occasion de repenser notre système de santé dans une
optique de santé.
Ordre des dentistes du Québec
3
Projet de loi no 10
La santé buccodentaire : partie
politique nationale de santé
intégrante
d’une
Nous comprenons que le ministre vise une restructuration
administrative qui pourrait se traduire par une uniformisation des
politiques de santé. Si notre perception est fondée, il pourrait, en
conséquence, y avoir une amélioration de l’accès aux soins
buccodentaires.
Par exemple, nous avons pu constater et même documenter que les
soins d’hygiène de base pour certaines clientèles dépendantes du
réseau de la santé sont le fruit d’initiatives locales ou régionales
soutenues par certains gestionnaires ainsi que par des efforts de
professionnels et d’aidants naturels impliqués.
Nous souhaitons que la restructuration soit l’occasion pour le ministre
d’adopter des orientations claires pour l’ensemble du réseau, qui
pourraient permettre une meilleure organisation des services dentaires
au sein des établissements du réseau de la santé.
L’intégration d’un plus grand nombre de dentistes et d’hygiénistes
dentaires au sein de l’ensemble des établissements du réseau et des
équipes médicales est essentielle à une offre de services de base en
médecine dentaire adaptée aux besoins de ces clientèles. Cette
organisation des services devra nécessairement favoriser une
meilleure utilisation des ressources existantes afin d’améliorer la
qualité de vie de clientèles moins bien desservies présentement.
L’Ordre des dentistes considère qu’il est essentiel d’intégrer la santé
buccodentaire dans une politique nationale de santé. Les règles du jeu
ont avantage à être précisées et soutenues par les autorités.
Personnes en perte d’autonomie
Les patients admis dans les établissements de soins de longue durée
doivent bénéficier, de façon systématique, d’un examen et d’un
diagnostic buccodentaire lors de leur admission.
Ordre des dentistes du Québec
4
Projet de loi no 10
Les problèmes de santé dentaire sont énormes chez les patients en
perte d’autonomie, avec des répercussions évidentes sur leur santé et
leur qualité de vie. Des soins de toute nature leur sont assurés, il doit
en être de même pour ceux qui préviennent la douleur dentaire,
l’infection et la malnutrition.
Non seulement le dossier dentaire devrait faire partie du dossierpatient, mais un protocole de soins et de suivi en matière d’hygiène
devrait être adopté pour chaque résident. L’Ordre s’explique mal
qu’aucune directive spécifique en ce sens n’existe présentement.
Nul ne peut ignorer que le piètre état de la bouche d’un patient
hospitalisé ou d’une personne en perte d’autonomie a un effet direct
sur sa santé, sa longévité, sa qualité de vie et, disons-le, sur les coûts
de santé qui, inévitablement, se répercutent sur le système public.
On parle d’infections, de malnutrition, de problèmes respiratoires et
digestifs, donc de services médicaux et hospitaliers engendrés par un
manque d’accès à des soins buccodentaires.
Certaines régions ont la chance de compter sur des dentistes et des
médecins qui collaborent en complémentarité. Ces initiatives doivent
se répandre partout au Québec et ne pas être laissées au hasard des
budgets particuliers.
Pour atteindre une meilleure pénétration des programmes préventifs
dont les effets sur le système ne peuvent être que positifs pour tous,
nous demandons au ministre de soutenir une sensibilisation de tout le
réseau par l’expression d’une volonté claire d’intégration de mesures
visant la santé buccodentaire.
L’allègement des structures ne doit pas servir seulement à en réduire
les coûts. Il peut marquer le début d’une vision nouvelle de la santé,
qui est bien plus que les soins aux malades. L’Ordre des dentistes et
ses membres sont prêts à collaborer à l’effort commun.
Il vous faut ouvrir des portes, car il est possible de donner accès à des
services dentaires aux clientèles desservies par les établissements.
Ordre des dentistes du Québec
5
Projet de loi no 10
En même temps, c’est la population qui aura accès à des soins
certainement plus adaptés à sa condition, et cela rejoindra plusieurs
des objectifs exprimés à l’article 1 du projet de loi, soit :
1. favoriser et simplifier l’accès aux services;
2. améliorer la qualité et la sécurité des soins;
3. accroître l’efficacité et l’efficience du réseau.
Première ligne
Les dentistes sont des professionnels de première ligne qui peuvent
grandement contribuer aux services et les rendre plus efficaces. Afin
que le bon professionnel offre le bon service au bon moment et au bon
endroit, les dentistes devraient aussi être présents dans plusieurs des
établissements du réseau public. Leur intégration doit être favorisée et
soutenue par les instances gouvernementales.
Pour y parvenir, nous recommandons qu’un responsable des soins
dentaires soit désigné dans chaque région administrative afin de
répondre au ministre de l’application et de l’efficacité des mesures de
santé publique et d’accès aux soins édictées par le gouvernement.
Dans cette optique, il sera opportun de favoriser de façon tangible les
rapports entre des dentistes en cabinet et le réseau de la santé. Par
exemple, il s’avère souvent ardu pour les dentistes d’obtenir pour leurs
patients des analyses de laboratoire ou des consultations avec des
médecins spécialistes. Les degrés de collaboration varient d’un centre
à l’autre, selon ce qui apparaît résulter de directives adoptées de façon
plus ou moins arbitraire.
Il ne semble exister aucune politique globale qui puisse uniformiser le
traitement des demandes et des recommandations provenant de
dentistes. Il est par ailleurs regrettable que des soins ne soient fournis
que dans certaines régions et dans certains établissements.
Ordre des dentistes du Québec
6
Projet de loi no 10
Dossier santé Québec
Nous profitons de cette tribune pour réitérer que, dans un contexte
d’uniformisation et d’intégration des joueurs clés pour l’amélioration de
la qualité, il est urgent que les dentistes obtiennent toutes les
autorisations d’accès (consultation, écriture et référence) aux six
domaines du Dossier santé Québec afin de pouvoir partager avec les
autres intervenants les renseignements de santé jugés essentiels aux
services de première ligne et au continuum de soins.
Les dentistes posent des diagnostics qui doivent être communiqués à
d’autres professionnels de la santé. Nous n’avons pas à exposer la
pertinence pour tous les intervenants, surtout ceux qui sont appelés à
poser des diagnostics, à prescrire des médicaments et à exécuter des
traitements invasifs, d’avoir accès à l’historique médical et
pharmaceutique permanent d’un patient et de ne pas avoir à le refaire
à chaque occasion, au risque qu’il soit incomplet.
Nous évoquions plus haut la pertinence de constituer un dossier
complet pour les patients en établissement. Il ne faut plus ignorer
cette réalité : il en va de la qualité, de la sécurité et de l’efficacité des
services.
Taux de fluorure dans l’eau potable
Puisqu’il est question de politique de santé, nous ne pouvons que
réitérer l’importance de voir de façon urgente à l’ajustement du taux
de fluorure dans les eaux de consommation.
La carie dentaire est la plus répandue de toutes les maladies
chroniques. Il s’agit d’un problème de santé publique. Elle atteint les
plus jeunes plus que toute autre affection connue. Par contre, elle peut
être réduite de façon radicale, quel que soit l’âge, par l’ajustement du
taux de fluorure dans les eaux de consommation.
Ordre des dentistes du Québec
7
Projet de loi no 10
La carie est une épidémie bien réelle, et malheureusement les efforts
pour l’enrayer, en termes d’actions de santé publique, sont
insuffisants.
Assurer et payer les soins est essentiel, mais la prévention, qui
représente la lutte à la maladie, l’est tout autant. À l’heure actuelle,
nous détenons suffisamment de connaissances pour faire la
démonstration que des mesures relativement simples et peu coûteuses
peuvent avoir des effets directs sur la maladie et, évidemment, sur le
coût des soins.
La fluoration est reconnue par l’Organisation mondiale de la Santé. Le
Centers for Disease Control and Prevention, un organisme américain,
l’a citée comme l’une des dix plus importantes mesures de santé
publique du 20e siècle.
La fluoration n’est pas appuyée seulement par des regroupements de
dentistes. En août 2014, l’Association américaine de médecine
pédiatrique faisait état de statistiques voulant que la fluoration ait
réduit le taux de carie de 29 % et que chaque dollar investi dans la
fluoration de l’eau se traduise par des économies de l’ordre de 38 $.
Plus près de nous, l’Académie canadienne de médecine pédiatrique a
publié en 2014 un document percutant concernant la santé dentaire
des enfants. « La fluoration de l’eau est une réalisation à la fois
importante et rentable de la santé publique, et c’est la mesure la plus
efficace pour prévenir la carie », peut-on y lire.
Aux États-Unis, 20 % des États ont légiféré afin de rendre la fluoration
obligatoire. Là-bas, la fluoration des eaux est une réalité, et non une
exception, et elle a fait ses preuves dans les communautés qui en
bénéficient. Quelque 210 millions de citoyens américains ont accès à
de l’eau fluorée, de même que 76 % de nos voisins de l’Ontario.
Malheureusement, le défaut d’agir fait des victimes innocentes : les
personnes vulnérables, dont les enfants.
L’Ordre des dentistes va poursuivre ses efforts de sensibilisation et
d’information.
Ordre des dentistes du Québec
8
Projet de loi no 10
Le gouvernement doit appuyer de façon non équivoque cette mesure
de santé publique pour contrer l’argumentation démagogique qui
alimente les inquiétudes et les peurs des citoyens de bonne foi. La
promotion de la prévention, dont le fluor, est une composante
nécessaire.
Prévention
Dans la mesure de ses moyens, l’Ordre des dentistes est prêt à
appuyer et à participer à toute réforme qui aura pour effet d’améliorer
la santé de nos concitoyens par l’accroissement de l’accessibilité, de
l’efficacité, de l’efficience, de la qualité et de la sécurité des services.
Nous respectons la volonté du ministre de participer à l’assainissement
des finances publiques.
Les éléments que nous soumettons à votre réflexion apparaissent
comme des évidences pour l’Ordre des dentistes, tant en regard de
leur signification dans la réduction des coûts que de l’amélioration de
la santé globale.
Entreprendre et réaliser une réforme administrative, dont le but
ultime, est l’augmentation de la qualité des services de santé par une
revue de leur gestion doit être une occasion de repenser les
programmes. Le programme de soins dentaires conçu pour le grand
public doit être réévalué afin que la prévention en fasse partie. Nous
n’en démordons pas.
L’Ordre des dentistes soutient que la prévention en santé dentaire
devra être incluse dans une politique nationale de santé et dans le
programme national de santé publique présentement en révision. Ce
dernier devrait faire une grande place au fait, incontournable, que la
santé buccodentaire peut contribuer directement ou indirectement à la
santé de la population.
En médecine dentaire, la prévention a des effets observables à court
terme.
Ordre des dentistes du Québec
9
Projet de loi no 10
Bien que le volet curatif des actes couverts ne soit pas une portion
majeure des budgets de la santé, il est encore consacré à des
interventions dont l’incidence aurait pu diminuer si le programme de
soins avait été accompagné de mesures préventives.
Conclusion
L’Ordre des dentistes réitère son offre d’agir en partenaire à part
entière et à contribuer de la façon la plus efficace possible au mieuxêtre de la population. À cet égard, il souhaite être consulté et il offre
sa plus entière collaboration pour toute question où son expertise
pourra être utile, dans tout domaine touchant la santé.
Considérant les lacunes importantes dans l’organisation des services
buccodentaires au Québec, l’Ordre des dentistes du Québec
recommande au ministre :
1. D’élaborer une politique de santé buccodentaire et de
l’inclure dans sa politique nationale de santé et dans son
programme de santé publique.
2. D’intégrer dans cette politique la prévention pour contrer
les maladies buccodentaires et s’assurer d’inclure
l’ajustement du taux de fluorure dans les eaux de
consommation dans l’ensemble des actions de santé
publique.
3. D’adopter des orientations claires concernant l’organisation
et l’intégration des services buccodentaires au sein des
établissements du réseau, au même titre que l’ensemble
des services de santé. On ne peut dissocier la bouche du
corps humain.
4. Enfin, pour des raisons de sécurité et de qualité des soins,
donner aux dentistes toutes les autorisations d’accès aux
six domaines du Dossier santé Québec.
Ordre des dentistes du Québec
10
Projet de loi no 10
L’Ordre des dentistes du Québec vous remercie de l’invitation qui lui
permet de partager sa vision et vous réitère son engagement et sa
disponibilité pour intégrer par tout moyen utile la santé buccodentaire
dans la santé globale.
Ordre des dentistes du Québec
11
Téléchargement