Figure 1. James Clerk Maxwell (1831–1879) ELECTROMAGNETISME EQUATIONS DE MAXWELL D’APRÈS LES TOMES I & II DE LANDAU ET LIFCHITZ ANDRÉ M. GLAIZE 11/2005 (ANNÉE DE LA PHYSIQUE) EM 10 REV D 12/10 Equation de Maxwell – Synthèse de l’électromagnétisme et de la théorie de la lumière. Présentation d’un point de vue historique & chronologique Cette présentation se compose de deux parties : la première qui introduit les équations de Maxwell selon la chronologie classique est inspirée principalement par les “Lectures on Physics”de Richard P.Feynman (1964) et des excellents livres de M. Bertin, J.P. Faroux et J. Renault (Dunot) ainsi que celui de A. Moussa et P. Ponsonnet (A. Desvigne). La deuxième partie est la reprise intégrale en unités SI des cours de physiques théoriques de Lev Davidovitch Landau et Evguéni Lifchitz Edition de Moscou (1989) : les trois chiffres entre parenthèses (I, a, b) font référence aux formules du Tome I “Mécanique” et les deux chiffres (a, b) font référence aux formules du Tome II “Théorie des champs”. La première partie reprend la chronologie historique des découvertes de l’EM depuis la loi de Coulomb, la loi de Biot et Savart, le théorème dAmpère et la loi de l’induction de Faraday, aboutissant à la première synthèse de l’EM par Maxwell en formalisant la notion de champ, puis par l’ajout du courant de déplacement pour aboutir aux équations complètes de l’EM. Cela conduit à la découverte des radiations EM et à l’identification de la lumière comme un phénomène EM. Dans la deuxième partie les équations de l’EM seront déduites depuis 1 les principes généraux variationnels selon le formalisme 4-D relativiste. Cette approche fait apparaı̂tre la profonde unité du champ EM et permet d’obtenir les équations tensorielles du champ indépendantes d’un quelconque système de coordonnée (principe de covariance) analogues aux équations d’Einstein pour la Relativité Générale en gravitation. En particulier le tenseur d’énergie-impulsion développé en détail dans la théorie EM permet de faire un pas important en vue d’un développement vers la théorie de la Relativité Générale. . . En résumé le fil conducteur est le suivant, pour la première partie : Expériences → Lois de l’EM → Equations de Maxwell → Principe d’invariance de Lorentz. Pour la deuxième partie : Principe d’invariance de Lorentz et principe de moindre action → Equations de Maxwell → Lois de l’EM. Forces Electriques Imaginons une force comme la gravitation, qui varie selon une loi inverse du carré des distances mais qui est environ 1036 plus puissante (un milliard de milliards de milliards de milliards) et avec une autre différence, il y a deux sortes de “matières”, une positive et une négative. Deux “matières” identiques se repoussent et deux “matières” opposées s’attirent, alors que la force de gravitation est toujours attractive. Qu’arriverait-il lorsque l’on les mélange ? Une accumulation de charges positives et de charges négatives se repousserait avec une énorme force dans toutes les directions. Cependant un mélange de charges négatives et positives se comporterait de façon complètement différent. Le résultat serait que les énormes forces se neutraliseraient et formeraient un ensemble rigide et entre deux objets similaires il ne resterait aucune attraction ou répulsion résiduelle. Cette force existe, il s’agit de la force électrique. Avec ces énormes forces mises en jeux il est facile de voir comment la matière peut être aussi résistante. Un point important à noter est que sans cette énorme différence entre la force de gravitation et la force électrique, nous ne serions pas là pour en parler, car l’univers serait un univers en miniature et la durée de vie dune étoiles moyenne comme le soleil serait trop courte pour permettre l’évolution d’êtres aussi complexes que les humains (4.7 milliards d’années). Avec un rapport de 1030 au lieu de 1036 , au lieu de vivre pour 10 milliards d’années une étoile moyenne vivrait environ 10000 ans ! Dans notre univers il faut en fait considérer une planète de la taille de Jupiter (318 fois la masse de la terre) pour que la gravitation –faible mais toujours additive– commence à supplanter les forces électriques et comprimer la matière et donc à rapprocher de façon plutôt inconfortable les électrons et les protons mais pas assez pour amorcer une réaction de fusion. Ceci explique la taille des étoiles : le rayon du soleil est d’environ 2 secondes lumière, (presque le double du rayon du système terre-lune pour donner l’échelle !), sa masse est 3,3 105 fois la masse de la terre, soit 2 1030 kg. Forces magnétiques Le fait que la force électrique, comme la gravitation décroisse selon l’inverse du carré des distances entre les charges est ce qu’on appelle loi de Coulomb. Mais ce n’ai plus vrai quand les charges sont en mouvement. Les forces électriques entre charges en mouvement dépendent du mouvement de ces charges. Une partie de ces forces est appelée la force magnétique. C’est en fait un aspect des effets électriques, c’est pourquoi le sujet est appelé 2 “électro-magnétisme”. En fait la force F~ sur une charge e se déplaçant avec une vitesse ~v est donnée par la formule dite de Lorentz 1, publiée en 1895 : ~ + ~v × B) ~ F~ = e(E ~ étant le champ électrique et B ~ le champ magnétique local à la charge e. Un exemple clasE sique est la force magnétique d’attraction ou de répulsion entre deux conducteurs parallèles ~ du conducteur 1 sur parcourus par un courant I (voir Figure 2). Le champ magnétique B Force magnétique entre conducteurs parallèles I Conducteur 1 D F I Conducteur 2 Champ Magnétique B produit par 1 Figure 2. Conducteurs parallèles parcourus par un courant I le conducteur 2 est dirigé vers le bas (flèche vue par l’empennage) selon la règle du “tirebouchon de Maxwell”. La direction de la force F~ est donnée par le “bonhomme d’Ampère” placé sur le conducteur 2 : le courant I pénètre par ses pieds et sort par sa tête, il regarde ~ et la force F~ est sur sa gauche. Donc si les courants sont de même sens, les l’induction B, deux conducteurs s’attirent selon une force F~ tel que : ~ F = e · dl · B = I · l · B F = e~v · B l étant l’élément de longueur dt ~v étant la vitesse des charges e à l’intérieur du conducteur 2. Parce que l’apparition du phénomène magnétique est lié au mouvement de charges, pour un observateur chevauchant la charge en mouvement, le champ magnétique simplement disparaı̂t. Cela pour dire que le magnétisme est réellement un effet relativiste (Einstein – relativité restreinte 1905). Dans le cas de deux charges en mouvement parallèle entre eux, on peut penser que la correction relativiste à effectuer due à leur mouvement serait de l’ordre 1 Le symbole × est utilisé pour le produit vectoriel, le symbole ∧ étant réservé à l’algèbre extérieure, néanmoins en 3-D ces produits sont identiques, donc dans ce cas ils sont tout à fait interchangeables. 3 de v 2 /c2 . Cette correction doit correspondre à la force magnétique. Mais que penser de l’expérience de l’attraction (ou répulsion) entre deux fils parallèles et parcouru chacun par le même courant I ? La force magnétique est la seule force en jeux, et elle n’apparaı̂t pas du tout être une simple correction relativiste. De plus si l’on calcule la vitesse moyenne des électrons dans le fil, elle est d’environ de 10-4 m/s soit un rapport v 2 /c2 d’environ 10-25 . (pour mémoire c = 3 108 m/s) sûrement une correction négligeable ! mais non, quoique la force magnétique est dans ce cas 10−25 plus faible que la force électrique entre les électrons en mouvement, parce que l’effet électrique a complètement disparu due à l’équilibre pratiquement parfait des charges positives et négatives – le fils a le même nombre de protons que d’électrons. L’équilibre entre forces électriques et donc supérieur à une précision d’une part pour 1025 , et l’effet relativiste, correspondant à la force magnétique est le seul qui subsiste. Il devient l’effet prépondérant. C’est donc la quasi–parfaite annulation de l’effet électrique qui permet à l’effet relativiste (à savoir le magnétisme) d’être étudié et les équations – de l’ordre de v 2 /c2 d’être découvertes, bien que les savants à cette époque ignoraient la nature du phénomène. Et c’est pourquoi les loi de l’EM n’ont pas changées quand la relativité est apparue. Ces lois, contrairement à celles de la mécanique (de Newton), étaient déjà correctes à une précision de v 2 /c2 . Comment tout a commencé ? Parmi les phénomènes étudiés par les Grecs, il y en avait deux étranges : de l’ambre (elektron) frotté était capable de soulever de petit bouts de papyrus et une mystérieuse roche provenant de la province de Magnésie en Théssalie attirait le fer (et ceci 800 avant JC). Les matériaux magnétiques étaient d’une grande importance pour construire des boussoles depuis des temps très ancients. Ceci est en effet reflété dans l’appellation anglaise pour le minerai “lodestone” qui signifie “leading stone”. La première étude systématique du magnétisme et de l’électricité a été publiée en 1600 par William Gilbert (1544–1603) dans son ouvrage “De Magnete, Magneticisque Corporibus, et de Magno Magnete Tellule” le sujet principal de son traité étant le magnétisme terrestre. Il assimile la terre à un barreau aimanté et définit la notion de pôles. Entre 1770 et 1785 Charles–Augustin Coulomb réalise une délicate expérience d’interaction électrostatique pour établir la loi qui porte son nom. A la suite des expériences du biologiste Luigi Galvani (il observa la contraction de pattes de grenouilles touchées simultanément par deux métaux différents), en 1800, Alessandro Volta construit la première pile électrique, ce qui conduit à disposer pour la première fois d’une source de courant électrique constant. En 1812, Siméon-Denis Poisson publie son fameux “Mémoire sur la distribution de l’électricité à la surface des corps conducteurs”. Jusqu’à 1820, l’électricité et magnétisme apparaissent comme deux phénomènes complètement indépendants. Une avance expérimentale cruciale est faite en 1820 quand Hans–Christian Oersted (1777–1851) démontre qu’il y a toujours un champ magnétique associé à un courant électrique, ceci marque la naissance de l’EM. Dès que cette découverte est annoncée, Jean–Baptiste Biôt (1774–1862) et Félix Savart (1791–1841) précisent la valeur du champ magnétique à une distance r d’un élément dl parcouru par un courant I. Peu après André–Marie Ampère (1775-1836) complète la loi de Biôt et Savart et fonde l’électrodynamique. Tout va ensuite très vite, les expériences de Faraday (1791–1867) le conduisent au crucial concept de lines de force et de champ. Convaincu que les lois de la nature possèdent une symétrie, puisqu’un courant produit un champ magnétique, il doit être possible de produire un courant à partir d’un champ magnétique. Il découvre 4 l’induction en 1831, date considérée comme l’origine de l’électrotechnique moderne. Ensuite vient James Clerk Maxwell qui réalise la synthèse de l’EM en établissant dès 1864 le groupe d’équations qui portent son nom et en publiant son célèbre “Treatise on Electricity and Magnetism” en 1873. Il fut le premier à identifier la lumière aux vibrations électromagnétiques. Ses idées, difficiles à saisir dans ses écrits originaux, furent reprises et explicités en Angleterre par Oliver Heaviside et Francis Fitzgerald et en Allemagne par Heinrich Hertz. Ce dernier, encouragé par Helmholtz, prouve l’existence des ondes EM en 1887 après environ une dizaine d’années de recherche. Cependant malgré la confirmation des ondes EM par Hertz il faudra encore de nombreuses années pour que la théorie de Maxwell soit pleinement acceptée et enseignée dans les universités. (Reproche que fait Einstein à son professeur Heinrich Weber en 1900 alors professeur au Polytechnicum de Zurich). Electrostatique. Loi de Coulomb - introduction à la notion de “champ” Entre deux charges e et e0 à une distance d, il existe une force F~ telle que : F~ = 1 ee0 ~u 4π0 d2 Formule de Coulomb d’action à distance Introduisant la notion de champ selon Faraday suite à ses fameuses expériences (en particulier avec de la limaille de fer pour mettre en évidence les lignes de force des aimants), nous écrirons cette même la loi sous la forme : ~ ~ = 1 e ~u F~ = e0 E avec E 4π0 d2 ~ est par définition le champ électrostatique crée par la charge e au point ou se trouve Ou E la charge e0 . De prime abord cette “dichotomie” de la formule de Coulomb peut paraı̂tre artificielle. Il ~ substitue à la notion d’action à distance entre les n’en est rien : l’introduction du champ E charges e et e0 (ce que Faraday ne pouvait admettre – cette notion étant pour lui absurde) la notion d’action locale. La justification de ce concept de champ est liée au fait expérimental que sa connaissance locale, en un point M, suffit à décrire les phénomènes électrostatiques qui s’y produisent, sans que l’on soit obligé de faire appel à la description détaillée des sources des champs : des sources différentes, donnant au point M de l’espace le même champ, produisent en ce point les mêmes effets électrostatiques. Mais il y a plus, la justification est donnée par la théorie unifiée de l’EM de Maxwell où un champ électrique et un champ magnétique peuvent se propager à travers l’espace en l’absence complète de charges, ainsi le champ posséde une existence physique tout à fait indépendante. Il en est de même pour le champ de gravitation terrestre où le champ ~g , tel qu’il produit une force P~ = m~g , est par définition selon la loi inverse des carrés de Newton : GMt GMt ~u puisque P~ = m 2 ~u 2 d d Le premier travail de Maxwell, “On Faraday’s Lines of Force” a été de formaliser la notion de champ vague de Faraday en un solide mathématique concept sous forme de vecteurs, flux, circulation, potentiels, etc. (et ceci par analogie avec la circulation d’un fluide ou la distribution de chaleur dans un solide, etc.) ~g = 5 Champ de vecteurs En fait il apparaı̂t que deux notions fondamentales sont suffisantes pour décrire toutes les lois de l’électricité et du magnétisme, ce sont les notions de flux de vecteurs et de circulation de vecteurs. (1) flux d’un vecteur à travers une surface : ~ à travers un élément dS d’une surface S le On appelle flux du vecteur champ E produit : ~ · ~n dS (~n étant le vecteur unité sur la normale de dΦ = E dS cos α ou encore dΦ = E l’élément dS). RR ~ · ~n dS Le flux total étant Φ = E (2) Circulation d’un vecteur le long d’un chemin AB : ~ le long d’un élément dl ∈ à AB est égale à : Par définition la circulation de E ~ · dl · cos α ou bien dW = dl · E ~ · ~t avec ~t le vecteur unité porté par la tangente dW = E en M sur dl. R ~ · ~t dl La circulation totale étant W = c E ~ représente le travail élémentaire de la force F~ Physiquement pour une force F~ , dW = F~ · dl ~ sur le parcours dl. Maintenant quels sont les vecteurs représentatifs du champ électro-magnétique ? Depuis Newton les lois de la physique consistent à étudier les forces agissantes sur la matière par expérimentation et de les expliquer par la théorie. Revenons à la formule de Lorentz de l’expression de la force F~ agissante sur une charge e en mouvement animée d’une vitesse ~v : ~ + ~v × B) ~ F~ = e(E ~ est appelé champ électrique (et non électrostatique) -Volt/m Le vecteur E ~ est appelé champ magnétique -Tesla ou Weber/m2 - (anciennement induction Le vecteur B magnétique). Ce sont donc les vecteurs représentatif cherchés. Cependant deux autres vecteurs sont nécessaires pour décrire l’EM, en particulier pour décrire les champs dans la matière : ~ excitation magnétique - Amp/m - (anciennement champ magnétique) est - le vecteur H ~ ~ (dans le vide) avec tel que B = µ0 H µ0 perméabilité du vide = 4π10−7 Henry/m ~ = 0 E ~ Coulomb/m2 avec - le vecteur induction électrique D 1 Farad/m 36π109 ~ et D, ~ ce qui n’est pas très réaliste car Certain auteurs évitent de mentionner les vecteurs H ~ est toujours présent et utilisé dans la littérature (comme champ magnétique !). au moins H De plus l’utilisation de ces quatre vecteurs permet d’éviter l’introduction de la vitesse de la lumière dans les équations de l’electro-magnétisme et donc leur donne une forme plus élégante, cependant certain pourront y voir un camouflage qui cache l’interdépendance physique des relations avec c ? Cela est due au fait que 0 µ0 c2 = 1, car c vitesse de la lumière dans le vide, est définie par la combinaison de deux constantes : une électrique, 0 permitivité du vide = 6 l’autre magnétique. Cette vitesse apparaı̂t donc avoir la même valeur indépendamment de tout repère 0, x, y, z en quelconque mouvement : c= √ 1 = 3 · 108 m/s 0 µ0 comme il sera établie à partir des équations de Maxwell. ~ : la formule du flux Un autre point par exemple en faveur de l’utilisation du vecteur H d’énergie (Watt/m2) transporté par une onde plane par unité de surface est donnée par le vecteur de Poynting qui se trouve être égal à : ~ ~ ~ ×H ~ (Watt/m2 ) ou E × B ou encore 0 c2 E ~ ×B ~ P~ = E µ0 ~ et H, ~ et ce ne Les unités sont quand même plus évidentes en utilisant les deux vecteurs E sera pas le seul exemple, pour s’en convaincre, il suffit d’écrire : P = Volt/m x Amp/m = Watt/m2 ! Magnétostatique. Loi de Biot et Savart Nous avons vu que le champ magnétique est défini par son action sur une particule chargée en mouvement tel que : ~ F~ = e ~v × B Cette action se caractérise par une force F~ , agissant sur la particule animée d’une vitesse ~v (le référentiel d’étude est galiléen ou d’inertie). On constate les propriétés suivantes : Il existe une direction privilégié ~u de la vitesse ~v pour laquelle la force s’annule. Pour une ~ direction de vitesse quelconque, la force est perpendiculaire à la fois à ~v et B. Propriété de symétrie : Remarquons tout d’abord que, pour un système mécanique, le système symétrique par rapport à un plan Π quelconque est physiquement réalisable, les vecteurs définissant les positions de deux points correspondants dans les deux problèmes étant à chaque instant symétriques par rapport au plan Π. De façon plus explicite, soit en prenant une origine O dans le plan Π: r(t) = OM et r’(t) = OM’ les vecteurs définissant les positions de deux points correspondants, nous écrivons r0 (t) = rs (t) où rs (t) est le symétrique de r(t) par rapport au plan Π ; cette relation est vraie à chaque instant t : il s’agit d’une identité. On déduit alors du principe fondamental de la mécanique, f = mγ : d2 r0 d2 rs f 0 = m 2 = m 2 = fs dt dt autrement dit, les forces agissantes sur deux points correspondants sont symétriques par rapport au plan Π. Cette propriété fondamentale des systèmes vis-à-vis d’une symétrie par rapport à un plan s’étant à presque tous les phénomènes physiques, sauf certaines expériences de physique atomique. Pour appliquer ces considérations au champ magnétique, il convient de remarquer que la définition de B comporte un produit vectoriel, de sorte que l’orientation de B dépend de 7 celle du trièdre de référence. Un tel vecteur est appelé pseudo-vecteur (ou vecteur axial 2 ) par opposition aux vrais vecteurs (ou vecteurs polaires) dont l’orientation ne dépend pas de l’orientation des trièdres. Considérons alors un problème physique où intervient un champ Le transformé du champ B est l’opposé de son symétrique n∏ Pla f ’ = fS f BS B M’ M v O v’ = vS B’ B’ = - BS Figure 3. Symétrie par rapport à un plan magnétique B et le problème symétrique par rapport à un plan Π (voir Figure 3) ; soit B 0 le champ magnétique dans le problème symétrique. Supposons que B agisse sur une particule de charge e animée dune vitesse v ; nous écrirons : ~ (1) F~ = e ~v × B Dans le problème symétrique, la force s’interprétera à l’aide du champ magnétique B 0 tel que: ~ 0 (2) F~ = e v~0 × B Or la symétrie par rapport au plan Π appliquée à la relation (1), donne entre les symétriques des vecteurs la relation : ~s (3) F~ = −e v~s × B le signe venant du produit vectoriel. Or f 0 = fs et v 0 = vs ; la comparaison de (2) et (3) donne : ~ 0 = −B ~s B Conclusion : lorsqu’une situation physique est décrite à l’aide dun champ magnétique B, la situation symétrique par rapport à un plan Π est décrite à l’aide du champ B 0 , opposé du symétrique de B par rapport à ce plan. 2 Dans le cas d’une rotation d’un corps solide autour d’un axe passant par son centre de gravité, la définition du vecteur moment cinétique est donnée par un produit vectoriel et son orientation est fonction de la définition du trièdre de référence. 8 Application. Revenons à l’exemple du fil infini parcouru par un courant I, et considérons le plan Π défini par le point M et le fil. Une symétrie par rapport à ce plan laisse le problème physique inchangé ; le champ B 0 , opposé du symétrique de B par rapport au plan Π, doit être identique à lui-même. Ceci n’est possible que si B est perpendiculaire à Π. Nous retrouvons ainsi la direction de B. Nous retrouverons ces notions de vecteur polaire et axial à propos du tenseur du champ EM. Loi de Biot et Savart. Soit un circuit filiforme C, orienté, parcouru par un courant permanent d’intensité I. Il Loi de Biot et Savart I C dl P(x0,y0,z0) u B M(x,y,z) La direction de B est celle du produit vectoriel (dl x u) Figure 4. Loi de Biot et Savart ~ est un élément ~ (voir figure 4). Si dl crée en un point M de l’espace un champ magnétique B ~ M en M est donné par l’intégrale curviligne : du circuit au point P, le champ magnétique B I ~ dl × ~u µ0 ~ I BM = 4π r2 Avec r = M P , ~u = M P/r où rayon vecteur unité sur MP. ~ M est donné par l’intégrale sur un contour fermé de l’expression Remarque : B ~ × ~u µ0 I dl 4π r2 ~ comme le champ magnétique contribution élémentaire, que l’on désigne souvent par dB, ~ Ce point de vue est incorrect car on ne peut isoler un morceau d’un crée par le courant I dl. circuit et le considérer comme parcouru par un courant permanent. ~ (flux conserCette définition conduit à une propriété importante du champ magnétique B ~ à travers cette surface vatif) c’est à dire que pour une quelconque surface fermée, le flux de B 9 est nul (Le flux rentrant est égal au flux sortant). En analyse vectorielle cette propriétée se ~ = 0. traduit par la relation div B A titre d’exercice (et dû au fait que ce calcul est rarement explicité dans les cours) nous allons effectuer ce calcul qui permet de bien saisir l’action d’un opérateur en un point M différent du point P d’intégration. Les coordonnées de P (x0 , y0 , z0 ) sont les variables d’intégration, celles de M (x, y, z) des paramètres. Pour calculer la divergence de B(M ) nous devons dériver l’expression précédente par rapport aux coordonnées x, y, z du point M ; cette opération ne modifie pas la courbe d’intégration C et nous écrivons : ! I ~ × ~u µ I dl 0 ~ (M ) = div B div(M ) 4π r2 Nous devons donc calculer : ~ × ~u dl r2 div(M ) ! = div(M ) ~ × ~r dl r3 ! ~ = (dx0 , dy0 , dz0 ) et ~r = (x − x0 , y − y0 , z − z0 ). avec dl Calculons tout d’abord le produit vectoriel : ~i ~k ~j ~ × ~r = dx0 = dl dy dz 0 0 x − x0 y − y0 z − z0 ~i[dy0 (z − z0 ) − dz0 (y − y0 )] = ~iA ~j[dz0 (x − x0 ) − dx0 (z − z0 )] = ~jB ~k[dx0 (y − y0 ) − dy0 (x − x0 )] = ~kC d’où l’expression dont la divergence doit être prise : ~ × ~r dl A B C = ~i 3 + ~j 3 + ~k 3 3 r r r r Calculons le premier terme : avec r = [(x − x0 )2 + (y − y0 )2 + (z − z0 )2 ]1/2 ∂ ∂x A r3 La dérivation se fait à y, x, P (x0 , y0 , z0 ) et dl fixés. Seul r−3 dépend de x. Posons r = ∂r u0 2(x − x0 ) x − x0 = √ = = , ∂x 2r r 2 u ∂r y − y0 = ∂y r et d’où : ∂ ∂x et donc le premier terme : − A r3 = −3Ar−4 ∂r 3A(x − x0 ) =− ∂x r5 3(x − x0 )[dy0 (z − z0 ) − dz0 (y − y0 )] r5 10 ∂r z − z0 = ∂z r √ u: pour le deuxième terme : − 3(y − y0 )[dz0 (x − x0 ) − dx0 (z − z0 )] r5 pour le troisième terme : 3(z − z0 )[dx0 (y − y0 ) − dy0 (x − x0 )] r5 Maitenant si l’on fait le Σ des trois termes on trouve que la somme est identiquement nulle, ~ est à flux conservatif, que l’on écrit : ce qui prouve que le champ B ZZZ ZZ ~ ~ dV = 0 B dS = div B − S V ce qui se traduit par : ZZ ~ dS = B2 S2 − B1 S1 = 0 B S ~ n’a pas de sources formées de Cette propriété est liée fondamentalement au fait que B “charges magnétiques” mais seulement des sources constituées de courants ou de dipôles magnétiques quasi ponctuelles assimilables à des charges en rotation. ~ se referment toujours sur ellesDonc pour les situations physiques les lignes de champ de B mêmes. Nota : un rappel d’analyse vectorielle se trouve dans le chapitre suivant. Application de la formule de Lorentz. Effet Zeeman (1896) L’explication de l’effet Zeeman (normal) par la formule de Lorentz fut un succès majeur (peut-être le plus important) de la physique théorique des années 1890. De plus l’étude de ce phénomène s’explique par les propriétés de symétrie du champ magnétique, ce qui a conduit à inclure cette étude dans ce document extraite du cours d’Optique de G. Bruhat (1965). La décomposition des raies simples. Le type le plus simple d’effet Zeeman est celui que fournissent les raies simples, comme par exemple les raies de la série de Balmer de l’hydrogène. (1) Si l’observation a lieu dans le sens même du champ magnétique (à travers un canal percé dans les pièces polaires, on constate que l’établissement du champ dédouble la raie primitive (Fig 5 a) en 2 composantes G et D (Fig 5 b). (2) Si l’on observe maintenant dans une direction perpendiculaire à celle du champ magnétique : la raie est alors décomposé par le champ en un triplet (Fig 5 c), dont la composante centrale π occupe la position de la raie non soumise au champ, tandis que les composantes latérales σ occupent les positions des 2 composantes D et G de l’observation longitudinale. C’est ce qu’on appelle le triplet normal. Les 3 composantes sont polarisées rectilignement, la composante centrale π transporte des vibrations parallèles à la direction du champ, les composantes latérales σ des vibrations perpendiculaires à cette direction : ce sont ces directions de vibration que représentent les flèches de la figure 5 c. 11 Effet Zeeman et symétrie du champ magnétique - Triplet normal Z Σ2 a B=0 I Σ1 o B G B σ b D y Π π B Violet x λ σ c Rouge Figure 5. Effet Zeeman (normal) Phénomène de Zeemann et symétrie du champ magnétique. La symétrie des phénomènes décrits ci-dessus est bien la symétrie caractéristique du champ magnétique. Nous savons que la symétrie d’un champ magnétique B dirigé suivant Ox est celle d’un mouvement circulaire du plan yOx (Fig. 5 dessin de gauche): c’est la symétrie d’un courant circulaire I créant le champ. Observons le faisceau émis dans la direction Ox, la lumière ne se propageant que par vibrations transversales, ce faisceau ne transporte que les 2 vibrations circulaires Σ1 et Σ2 . L’une de ces vibrations étant de même sens que I, et l’autre de sens inverse, elles doivent subir de la part de B des actions de sens opposé : c’est bien ce que l’on observe, puisqu’on a un doublet, symétrique par rapport à la raie initiale, dont les 2 composantes, d’intensité I égales, sont polarisées circulairement en sens inverses, la composante de plus courte longueur d’onde étant toujours constituée par des vibrations de même sens que le courant magnétisant; c’est ce que représentent schématiquement les flèches circulaires de la figure 5 b. Observons maintenant le faisceau transmis perpendiculairement au champ, dans la direction Oy : il transporte d’une part la vibration Π, qui donne la composante centrale π du triplet normal, vibrant parallèlement au champ, et d’autre part les composantes suivant Oz des 2 vibrations Σ1 et Σ2 , qui donnent les 2 composantes σ du triplet normal, vibrant perpendiculairement au champ, et occupant la même place que les vibrations du doublet de l’observation longitudinale. La composante π correspond directement à la vibration Π, et a l’intensité I; chacune des composantes σ, projection sur l’axe Oz d’une des vibrations Σ1 ou 12 Σ2 , ne transporte que la moitié I/2 de l’intensité de l’une de ces vibrations : ce sont bien là des faits observés. L’étude de l’effet Zeeman a pour but la recherche des variations de longueur d’ondes subies par les vibrations Π, Σ1 et Σ2 en lesquelles est décomposée la vibration initiale. Théorie de Lorentz. La découverte de Zeeman fut immédiatement interprété par Lorentz dans la théorie alors admise, que nous appelons aujourd’hui, par opposition aux théories quantiques, la théorie classique. Dans cette théorie, la vibration lumineuse émise par un atome reproduit exactement le mouvement de l’électron dans l’atome, et ce mouvement est un mouvement pendulaire, s’effectuant sous l’action d’une force quasi-élastique, i.e. d’une force centrale F = −kr proportionnelle à la distance r de l’électron au centre des forces O. Les trois composantes Π, Σ1 et Σ2 sont alors les trois composantes en lesquelles on peut décomposer ce mouvement pendulaire, et leurs modifications sous l’action du champ magnétique B sont les modifications apportées au mouvement de l’electron par la force qu’exerce sur lui le champ B. Considérons d’abord le mouvement correspondant à la composante Π : la vitesse de l’électron y est à chaque instant parallèle à B, et cette force est constamment nulle. Conformément à l’expérience, la théorie indique que la composante Π ne subit aucune modification . Considérons maintenant le mouvement circulaire Σ2 de même sens que le courant I, et soit ν sa fréquence en l’absence de champ; sa vitesse angulaire ω est 2πν, son accélération centripète est ω 2 r = 4π 2 ν 2 r, et la fréquence ν est liée au coefficient k de la force quasi-élastique F = −kr par la relation : 4π 2 ν 2 rm = kr ou k = 4π 2 ν 2 m Etablissons le champ B : le mouvement prend une fréquence ν2 , la vitesse angulaire devient 2πν2 , la vitesse linéaire v = 2πν2 r, et l’accélération 4π 2 ν22 r ; cette accélération est produite par la force F = −kr, à laquelle s’ajoute une force EM f = veB = 2πν2 reB, cette dernière force, normale au champ B et à la vitesse v, est aussi portée par le rayon de la trajectoire et est dirigée vers le centre. L’équation du mouvement est donc : 4π 2 ν22 rm = kr + 2πν2 reB ou 4π 2 ν22 m = k + 2πν2 eB En remplaçant k par sa valeur on obtient : 2πm(ν22 − ν 2 ) = ν2 eB ou ν2 1 e B ν2 + ν 2π m Or la variation de fréquence δν = ν2 − ν est toujours très faible : on peut donc au second membre remplacer ν2 /(ν2 − ν) par 1/2, et l’on obtient ainsi la variation de fréquence δν de la composante Σ2 : B e δν = 4π m La variation ainsi calculée est proportionnelle au champ B et indépendante de la fréquence initiale ν. De plus elle est positive : la composante Σ2 , de même sens que le courant magnétisant, est toujours déplacée vers les grandes fréquences. Le même raisonnement peut être répété pour la composante Σ1 : la force est alors dirigée vers l’extérieur de la circonférence; on trouve alors une diminution de la fréquence ν − ν1 ν2 − ν = 13 égale en valeur absolue à l’augmentation ν2 − ν de la composante Σ2 . La différence de fréquence que nous venons de calculer est ce que l’on appelle l’écart du triplet normal ; dans l’echelle des nombres d’ondes σ = 1/λ (à ne pas confordre avec ~k vecteur d’onde = 2π/λ), cet écart est : e B δσ = m 4πc Calcul du rapport e/m à partir de l’effet Zeeman. Au lieu de déduire l’écart du triplet normal de la formule de Lorentz, on peut au contraire déterminer expérimentalement cet écart et déduire de la formule le rapport e/m de la charge de l’électron à sa masse. La mesure fournit la différence δλ des longueurs d’onde qui correspond à la différence δσ des nombres d’ondes ; de la relation σ = 1/λ, on en déduit δσ = −δλ/λ2 , et l’on a en valeur absolue : 4πc δλ e = 2 m λ B Application numérique. Pour un champ magnétique B de 3 Tesla et une longueur d’onde λ de 5000 Å, l’écart 2 δλ des composantes extrêmes du triplet est de l’ordre de 0.7 Å. Avec ces valeurs numériques on peut donc calculer le rapport e/m de l’électron avec une très bonne approximation, en effet : e 4 × π × 3 × 108 × 0.35 × 10−10 = 1.759 1011 C/kg = −7 2 m (5 × 10 ) × 3 Conclusion. Historiquement (i.e. à partir de 1896) cette valeur aurait pu permettre de découvrir une nouvelle particule de masse extrêmement faible (à savoir l’électron), comparée aux autres particules déjà connues par exemple au noyau d’hydrogène (le plus léger à l’époque). En effet puisque la charge de l’électron était déjà estimée à un Faraday (96500 C) divisé par le nombre d’Avogadro (6.023 1023 ) soit 1.6 10-19 C, introduit dans la formule on trouve une masse de 9.1 10-31 kg. Comparé au noyau d’hydrogène (proton) dont la masse est pratiquement 1 g divisé par le nombre d’Avogadro soit 16600 10-31 kg, cela fait donc un rapport de masse de 1824 (les valeurs les plus récentes donnent un rapport de 1836). Il est surprenant de constater qu’à l’époque ni Zeeman, ni Lorentz n’ont fait de commentaire sur cette large valeur de e/m ; ni l’un ni l’autre n’ont découvert l’électron. J.J. Thomson découvrira l’électron en 1897 3. 3 Pour l’histoire détaillé de cette effervescente période lire “Inward Bound” d’Abraham Pais (1986). 14