- Les ressources des particuliers :
Cette seconde forme de ressources comprend trois aspects : les cotisations des membres adhérents,
les participations financières directes des bénéficiaires à l’aide reçue et enfin ce que l’on nomme
l’appel à la générosité publique.
Les cotisations, pour représenter une ressource significative dans le budget associatif, supposent un
nombre important d’adhérents. Les associations d’action sociale sont réputées, voire raillées, pour
avoir peu d’adhérents. Parfois, le total des adhérents se résume aux seuls administrateurs. Certains
mesurent la qualité de la vie associative au nombre de personnes versant une cotisation. C’est là une
vision réductrice qui résume le dynamisme de la vie et du projet associatifs à des questions de
volume. Il n’est pas certain que l’objet spécifique des associations d’action sociale entraîne des
nombres conséquents d’adhésion. La configuration de ces organisations spécifiques est marquée par
la complexité des questions traitées et la haute technicité des réponses. Ces aspects contrecarrent
une massification des adhésions. Cependant, il ne faut pas écarter trop vite la question de la qualité
des adhérents. Traditionnellement, les adhérents sont soit des personnes qualifiées (associations
notabilaires), soit des parents (associations de parents d’enfants handicapés), soit des militants
d’une cause sociale (associations inspirées de l’éducation populaire) ou spirituelle (associations
issues des mouvements congréganistes), soit des professionnels ou des fonctionnaires (associations
parapubliques)[1]. Ouvrir le plus largement possible les adhésions à la société civile est une
manière d’enraciner l’action dans son tissu social et humain. De même, donner la possibilité
d’adhérer aux salariés permet de modifier les rapports sociaux dans l’entreprise en mettant au
premier plan le projet et sa définition partagée. Enfin, autoriser l’adhésion des usagers eux-mêmes
est une manière de refonder radicalement la gouvernance associative pensée alors comme un espace
de coopération entre toutes les parties prenantes. Nous voyons que la ressource constituée par les
cotisations recouvre à la fois une question quantitative – plus le montant des cotisations est élevé,
plus l’association est autonome – et une question qualitative – plus il y a des adhérents nombreux et
divers, plus l’association est indépendante. Cette caractéristique est assez répandue dans le secteur
associatif (culture, sport, loisirs), trop rare pour les associations d’action sociale.
La contribution des usagers au coût du service qui leur est rendu est déjà une réalité. Dans les
Etablissements d’Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes (Ehpad), les résidents financent
leurs frais de séjour, en moyenne, à plus de 50% des coûts. Dans les Centres d’Hébergement et de
Réadaptation Sociale, la participation des hébergés est proportionnelle à leurs revenus, tout comme
dans les foyers pour adultes handicapés, etc. Cette participation n’est pas une hérésie. Elle peut
s’interpréter comme une preuve de respect et de dignité envers les personnes. L’action sociale ne
fait pas l’aumône aux personnes accompagnées. Cependant, ce fait doit être décrypté avec
discernement. Nous voyons bien que le montant sollicité dans les Ehpad dépasse parfois les
ressources disponibles des personnes et que l’intervention de l’aide sociale ne couvre pas toutes les
situations. Le risque est alors de voir un système assuranciel privé se substituer au régime de
sécurité sociale, renvoyant chacun à disposer de services dont la qualité sera proportionnelle à ses
moyens personnels, à son niveau de solvabilité. Les riches n’ont pas besoin d’action sociale ! N’est-
ce pas plutôt sous l’angle de la responsabilité individuelle et collective que doit s’envisager la
participation directe des usagers au financement des actions ? La responsabilité individuelle engage
les moyens privés dont dispose la personne, dans la limite de ses capacités. La responsabilité
collective engage la solidarité de la société et suppose l’égalité de traitement pour tous. Le symbole
de cette solidarité réside, en France, dans le principe de l’inconditionnalité qui est un fondement
républicain[2]. Valoriser la contribution des usagers aux prestations fournies par les associations ne
réduit pas ces dernières à une fonction commerçante, ni les bénéficiaires à un rôle de clients. Pour
réduire la prestation à un produit marchand, il faut que le vendeur ait comme motivation principale
de gagner de l’argent. Les associations d’action sociale, non-lucratives, ont comme motivation
première de répondre aux besoins des personnes et des groupes sociaux. C’est cela qui introduit une
dynamique d’échange qui autorise, entre usagers et professionnels, le contrôle réciproque de l’usage
des fonds, la co-construction des actions et la recherche commune de leur efficience.