2013-01-24
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DISTINGUER LA
MALADIE DÉPRESSIVE
DE LA DÉMENCE
CHEZ LA PERSONNE
ÂGÉE
Un défi clinique
Marcel Boily, md
Février 2013
OBJECTIFS
Mettre en évidence les symptômes communs aux deux pathologies et
tenter de comprendre l’origine de cette ressemblance
Démarche diagnostique claire
Plan de traitement approprié
QUELQUES RÉFLEXIONS
ÉPIDÉMIOLOGIQUES
La dépression et la démence ont une prévalence élevée chez les
personnes âgées
Dans le cas de la dépression: aux cas diagnostiqués chez les jeunes
adultes s’ajoutent ceux d’apparition tardive
La démence est une maladie fréquente chez les âgés. Dans le cas de la
maladie d’Alzheimer, par exemple, l’âge est le principal facteur de
risque. La prévalence de la maladie, qui est de 5 à 10% à 65 ans atteint
20 à 40% chez les 85 ans
DEUX VIGNETTES CLINIQUES
MONSIEUR C.D.
69 ans, célibataire, à la retraite depuis 20 ans
Vit seul, possède un chien qui lui tient compagnie
Sort à tous les jours (piste de course…)
Se dit moins bien depuis deux semaines
Perte d’appétit et de poids, irritable, att. de panique, peur du cancer
Douleurs chroniques
Selon nièce: détérioration depuis un an (mémoire…)
ATCD: dépression résistante en 1983, traitée finalement avec sismo
Impression: Dépression majeure
Suggestion: admission, compléter évaluation, sismo
MONSIEUR C.D.
Vu en psychogériatrie
Vu seul, rapporte des difficultés depuis quelques semaines
Insomnie, perte d’appétit et de poids, diminution de la mémoire, retard
psycho-moteur
Anxiété (attaques de panique), dysthymie, irritabilité, sentiments
d’impuissance et de désespoir
Apathie, Anhédonie, Anergie
Début sub-aigu de la maladie
Impression et suggestions idem
MONSIEUR C.D.
Attente de transfert en psycho-gériatrie
Investigation en neuro-psychologie et scan cérébral
Diagnostic de démence
Chien euthanasié, maison mise en vente et attente de relocalisation
Histoire revisitée avec monsieur et sa nièce: antécédents, début sub-
aigu, symptômes dépressifs, atteinte cognitive
Hypothèse de travail: dépression, sismo proposée
Patient refuse: découragé, apathique, ne lui reste qu’à attendre la mort
Consentement donné par la nièce, patient se laisse faire.
Décès en 2008
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MONSIEUR C.D.
Le fait de trouver des signes d’atteinte
cognitive ne signifie pas qu’il n’y a pas
de dépression. Surtout chez des
patients ayant des antécédents de
maladie dépressive.
MONSIEUR J.T.
Patient de 74 ans, vit seul, mais il a une copine
Référé pour éléments dépressifs et atteinte cognitive
Consultation initiale: altération marquée de la fluidité
verbale…détérioration de la mémoire récente…MMSE à 21/30
Anxiété importante avec panique…dysthymie…séquelles d’un conflit de
travail qui l’a forcé à la retraite sans qu’il ne puisse toucher sa pleine
pension, atteinte à sa réputation
MONSIEUR J.T.
Impression: début de démence…trouble anxio-dépressif non spécifique
Investigation complétée n’amène pas de modification à l’hypothèse
diagnostique
Diagnostic annoncé à Monsieur et à son fils
Suggestion: optimiser le traitement avec anti-dépresseur et
introduction de donepezil
Visites subséquentes: amélioration sur tous les plans, tant sur le plan
psychiatrique que cognitif, en particulier retour à une fluidité de langage
normale
MONSIEUR J.T.
Vérifications régulières des fonctions cognitives. Patient stable
MMSE et MOCA 30/30, en harmonie avec le niveau de fonctionnement
observé par les proches de monsieur
Remise en question du diagnostic de démence, puisque les inhibiteurs
de cholinestérase n’aident généralement pas à rétablir les fonctions
cognitives complètement… tout au plus 15 % des patients montrent-ils
une légère amélioration dans les trois premiers mois de traitement
Par contre, les symptômes cognitifs associés à la dépression peuvent se
résorber avec un traitement efficace de la maladie dépressive
Discussion avec monsieur et son fils et arrêt du donepezil
MONSIEUR J.T.
Catastrophe
Reprise des symptômes cognitifs au niveau de la première consultation
Détérioration maintenue malgré la reprise de donepezil
Symptomatologie psychiatrique accrue, épisodes de psychose, périodes
de confusion en rapport avec abus d’alcool
Consternation et sentiment de culpabilité
MONSIEUR J.T.
Le fait qu’il y ait des symptômes
dépressifs ne signifie pas qu’il y a
absence de démence
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LA DIFFICULTÉ DE DIFFÉRENCIER
DÉPRESSION MAJEURE ET DÉMENCE CHEZ
LE PATIENT Â
Similitude de la présentation clinique: partage des symptômes
La nature de la dépression chez le patient âgé, en particulier la
dépression à début tardif
Latteinte cognitive fait partie de la dépression (pseudo-démence…)
Les symptômes comportementaux et psychiatriques font partie de la
démence au même titre que les pertes cognitives, et peuvent la
précéder de deux ans
Chevauchements patho-physiologiques
D’OÙ PROVIENT CE PARTAGE DES
SYMPTÔMES?
Ce sont deux maladies cérébrales
Les symptômes observés sont la conséquence de dysfonctions
cérébrales
Des mécanismes patho-physiologiques similaires semblent être en cause
dans les deux maladies
LA NATURE DE LA DÉPRESSION CHEZ LA
PERSONNE ÂGÉE
La maladie dépressive de l’adulte âgé peut ressembler en tous points à
celle du jeune adulte. En particulier quand il y a des antécédents
personnels de maladie dépressive, et/ou qu’il y a diathèse familiale
positive de maladie dépressive
Existe aussi ce qu’on appelle une maladie dépressive à début tardif. En
général, cette dépression a ceci de particulier qu’elle est souvent
diagnostiquée chez des patients qui n’ont pas d’histoire antérieure de
dépression, chez des patients dont la diathèse familiale est négative, et
elle s’accompagne souvent d’atteintes cognitives. Le concept de
dépression vasculaire qui a été de l’avant à la fin des années 90 en est
une bonne représentation
TROUBLES COGNITIFS: MANIFESTATION
FRÉQUENTE DES TROUBLES PSYCHIATRIQUES
DU VIEIL ÂGE
Ils font partie du phénotype de plusieurs maladies psychiatriques des
sujets âgés
Atteinte de la mémoire épisodique, de la mémoire de travail, de la
vitesse de traitement de l’information, de la capacité d’attention et de
concentration, perte d’inhibition, difficultés de langage, atteinte des
fonctions exécutives
Un mot sur la dysfonction exécutive
ASSOCIATION TROUBLES PSYCHIATRIQUES ET
TROUBLES COGNITIFS
La psychopathologie du sujet âgé contribue au risque de développer le
déclin cognitif
Latteinte cognitive interagit avec les troubles psychiatriques pour
accélérer le vieillissement cérébral
Spira & al. AJGP décembre 2012
Byers & al. AJGP août 2012
CHEVAUCHEMENTS PATHO-
PHYSIOLOGIQUES
Pertes neuronales
Dysrégulation des systèmes noradrénergiques, sérotoninergiques,
cholinergiques et dopaminergiques
Le vieillissement s’accompagne de problèmes de santé qui perturbent
certains systèmes physiologiques ayant des impacts sur le
fonctionnement cognitif et psychologique
Revue de quelques hypothèses
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LE STRESS OXYDATIF
!
L’INFLAMMATION
!
L’AXE HYPOTHALAMO-HYPOPHYSO-SURRÉNALIEN L’HIPPOCAMPE
!
L’HIPPOCAMPE GLUCOCORTICOIDES ET ATROPHIE CÉRÉBRALE
Diminution de l’utilisation (uptake) du glucose
Augmentation de l’activité des acides aminés excitatifs
Inhibition de la potentialisation à long terme
Suppression de la neuro-genèse dans le gyrus denté
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LA DÉPRESSION VASCULAIRE
!
UNE ÉTUDE INTRIGANTE
Intégrer les résultats d’études différentes
Dar-Nimrod & al. AJGP décembre 2012
APOE4 et Alzheimer
Éléments modulateurs autres que génétiques
Traits de personnalité et FFT
Névrosisme, Extroversion, Ouverture à l’expérience, Agréabilité, Conscience
Rôle modulateur du névrosisme et de l’extroversion
Utilité clinique?
CHEVAUCHEMENTS PATHO-
PHYSIOLOGIQUES: CONCLUSION
Perte de volume cérébral associée au vieillissement, à l’altération des
fonctions cognitives, aux troubles psychiatriques
Lésions de la matière blanche, déficits corticaux pré-frontaux,
dysfonctions fronto-striales, déficits cingulés antérieurs et postérieurs
ont tous été impliqués dans des dysfonctions cognitives et des troubles
psychiatriques chez les personnes âgées
Les systèmes neurophysiologiques typiquement associés aux
symptômes psychiatriques peuvent aussi influer sur les systèmes neuro-
cognitifs et vice-versa
La dépression de l’âge avancé, le trouble cognitif léger et la démence ne
représentent-ils pas un continuum clinique de la même maladie?
LE PATIENT AU BUREAU
Raison de la visite
Description des symptômes
P: provoqués par…soulagés par
Q: quels sont-ils? Affectifs, cognitifs…souvent les deux
R: rayonnement sur le fonctionnement, sur AVDs et AVQs…sévérité
S: risque de suicide
T: le temps…période d’apparition, depuis quand, constance des symptômes, premier
épisode ou non…
Lexamen et l’investigation
MALADIES PHYSIQUES
Douleurs chroniques
Troubles du sommeil
Diabète
Arthrite et autres collagénoses
Accidents cérébro-vasculaires et maladies cardiaques
Infections virales (mononucléose, HIV)
Cancers digestifs (pancréas…)
Hyperthyroidie, insuffisance surrénalienne
Maladies dégénératives du système nerveux central
Anémie (déficits en B12, acide folique, néoplasies)
Abus d’alcool
MÉDICAMENTS
Bêta bloqueurs
Antagonistes des canaux calciques
Interféron
Clonidine et autres hypotenseurs
Corticostéroides et stéroides anabolisants
Narcotiques
Métoclopramide
Benzodiazépines
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