Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie – Bilan des données scientifiques
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Il n’existe pas de définition et encore moins de critères diagnostiques unani-
mement acceptés de la dyscalculie. Le terme même de dyscalculie n’est pas
universellement utilisé pour désigner le trouble. Le terme de « dyscalculie de
développement », introduit par Kosc (1974), est utilisé par Badian (1983),
Shalev et Gross-Tsur (1993 et 2001) ainsi que par Butterworth (2005).
D’autres auteurs parlent de difficultés en arithmétique (arithmetic difficulties)
comme Lewis et coll. (1994) ou encore de troubles des apprentissages en
mathématiques (learning disabilities in mathematics) comme Geary et Hoard
(2005). Ce même auteur emploie souvent les termes de handicap en mathé-
matiques (mathematic disabilities, MD, ou mathematically disabled children) de
même que Rourke (arithmetic disabilities, Rourke, 1993) ou Silver et coll.
(1999). Jordan emploie pour sa part le terme de difficultés en mathémati-
ques (mathematic difficulties, Jordan et coll., 2003b). Ces auteurs parlent-ils
de la même chose ? Pour Butterworth (2005), il convient de distinguer les
études sur la dyscalculie développementale des études expérimentales sur les
causes des difficultés d’apprentissage des mathématiques. En effet, les secon-
des adoptent comme limite d’inclusion, le 20e, le 25e, parfois le 35e centile
sur des épreuves standardisées de mathématiques alors que les études de pré-
valence font état de 5 à 7 % d’enfants dyscalculiques. Toutefois, les études
épidémiologiques portant sur la dyscalculie développementale utilisent elles
aussi des épreuves de performance en arithmétique pour classer les individus,
le taux de 5 à 7 % dépendant seulement de critères fixés a priori (par exem-
ple, avoir deux ans de retard dans une échelle standardisée de performance).
Ceci est lié au fait que la définition usuelle de la dyscalculie est très grande-
ment circulaire. Le premier, Kosc (1974) la définit comme « un trouble struc-
turel des habiletés mathématiques dont l’origine est génétique ou liée à un
problème congénital affectant les aires cérébrales qui sont le substrat anatomo-
physiologique direct de la maturation des habiletés mathématiques sans trouble
simultané des fonctions mentales plus générales ». Pour Temple (1992), il
s’agit « d’un trouble des compétences numériques et des habiletés arithméti-
ques qui se manifeste chez des enfants d’intelligence normale qui ne présentent
pas de déficits neurologiques acquis ». En dehors du fait que ces définitions
écartent les problèmes liés à un faible niveau intellectuel ou à des troubles
apparaissant suite à des problèmes de type neurologique venant perturber un
développement jusque-là normal, le seul critère d’inclusion demeure la fai-
blesse des acquisitions numériques et arithmétiques. Conscient de ce problème
et du fait que, dès lors, les problèmes de prévalence se résument à la définition
de critères a priori, l’un d’inclusion portant sur le niveau de performance en
arithmétique en dessous duquel on parlera de dyscalculie, l’autre d’exclusion
portant sur un niveau intellectuel minimal requis (en terme de QI), Butte-
rworth (2005) suggère une approche alternative reposant sur des critères quali-
tatifs et l’adoption de la définition proposée par le UK Department for Education
and Skills. Selon cet organisme, la dyscalculie serait « un état qui affecte la
capacité à acquérir des habiletés arithmétiques. Les élèves dyscalculiques peu-
vent avoir des difficultés à comprendre les concepts numériques simples, une