Le tournant 9 - depression.ch

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LE TOURNANT
Informations sur la dépression et les troubles anxieux I Numéro 9
PA GE 3 I TROUBLES PANIQ UES
PA GE 4 I TROUBLES PA NIQ UES
PAGE 8 I THÉRAPIE COMPORTEMENTALE
Apprendre à vivre avec la peur
de la peur
Les troubles paniques – une lourde
entrave pour les personnes atteintes
Récit d’une personne atteinte
Interview du Prof. Gregor Hasler
Des thérapies comportementales
pour modifier les schémas de
pensée perturbateurs
Un entretien avec le Dr Christine Poppe
Lundbeck (Schweiz) AG
Dokument letztmals geprüft:
27.12.2012
É D I TO R I A L
SOMMAIRE
É D I TO R I A L
2
T RO U B L E S PA N I Q U E S
3
«J’ai appris à gérer
ma maladie»
Une victime parle de ses
attaques de panique
3
Votre opinion nous est précieuse 4
Participez et gagnez!
Lorsque la peur et la panique
dominent notre vie
Interview du Prof. Gregor Hasler
4
Livre:
Comment se débarrasser
d'anxiété et dépression
6
Traitement médicamenteux:
7
Comprimés, gouttes ou perfusion?
THÉRAPIE COMPORTEMENTALE 8
Thérapie comportementale –
Pour s’en sortir soi-même
Interview du Dr Christine Poppe
8
Reprendre pied
progressivement dans la vie
10
EN BREF
12
Adresses d’entraide et liens
12
Impressum
12
Chères lectrices,
Chers lecteurs,
Q
ui n’a jamais ressenti de la nervosité à la veille
d’un examen, de l’anxiété à l’approche d’un
voyage important ou encore la peur de la mort?
Rien de plus normal. Mais qu’en est-il lorsque la
peur tourne à la panique et que le quotidien est
tout à coup le siège de crises permanentes? Simone
M.*, 25 ans, sait ce que cela signifie de vivre continuellement dans la «peur de la peur». Sa première
attaque de panique est survenue à l’âge de 16 ans. A
l’époque, elle ne se doutait guère que d’autres allaient suivre. En 2006, lors de la
coupe du monde de football en Allemagne, elle fut prise d’une attaque si violent
qu’elle dut être transportée en urgence à l'hôpital. De là, elle fut adressée à un psychiatre. En page 3, elle raconte comment elle a surmonté cette période douloureuse
et appris à vivre avec sa maladie.
Nous avons souhaité rencontrer le Prof. Gregor Hasler, Professeur de recherche en
soins psychiatriques et en psychiatrie sociale à l’université de Berne, pour savoir
exactement ce que sont les troubles paniques. En page 4, vous pourrez découvrir où
se situent les limites entre la peur normale et la peur pathologique, comment la
maladie se manifeste, et quels peuvent être les causes et les facteurs déclenchants
des troubles paniques. Le Prof. Gregor Hasler expose les différents traitements en
mesure d’aider les patients à mener de nouveau une vie normale.
La thérapie comportementale est l’une des options de traitement des troubles anxieux et des troubles paniques. Le Dr Christine Poppe, spécialiste FMH en psychiatrie et
en psychothérapie, s’y consacre de manière intensive. L’entretien en page 8 vous
dévoile notamment en quoi une thérapie comportementale peut s’avérer une aide
pour le patient, dans quelle mesure elle est une forme d'autogestion et quelles en
sont les différentes techniques. Trois exemples montrent par ailleurs comment la thérapie comportementale peut aider les malades à reprendre pied progressivement dans
leur vie. Pour en savoir plus, lisez cet article, en page 10 et 11.
Dans cette nouvelle édition, nous avons à cœur, cette fois encore, de vous fournir des
informations précieuses et utiles sur les dépressions et les troubles anxieux. Nous
vous souhaitons une lecture captivante.
PD Dr Rico Nil
Medical Director
Lundbeck (Suisse) SA
* Le nom a été modifié
2
«J'ai appris
ma maladie»
T RO U B L E S PA N I Q U E S
à gérer
S I M O N E M.* S E
QU’ELLE FUMAIT
S O U V I E N T E N C O R E E X AC T E M E N T D E S A P R E M I È R E AT TAQ U E D E PA N I Q U E .
A 16
ANS, ALORS
D E L A M A R I J UA N A C H E Z D E S A M I S , E L L E F U T P R I S E D ’ U N E C R I S E D E TAC H Y C A R D I E Q U I D U R A
PRÈS DE DEUX HEURES.
C’ É TA I T
UN SENTIMENT HORRIBLE.
ELLE
E N I M P U TA L A R E S P O N S A B I L I T É À L A D RO G U E
E T S E J U R A D E N E P L U S JA M A I S E N A R R I V E R L À .
A
ujourd’hui étudiante de 25 ans,
Simone M. ne savait pas à l’époque
que d’autres attaques allaient suivre.
Déclenchées non pas par des drogues ou
d’autres événements mais – comme elle
le sait aujourd’hui – par «la peur de la
peur». La deuxième attaque survint pendant les vacances. Elle était partie en
Espagne avec deux collègues. Après une
fête, elle ressentit de nouveau cette
accélération du rythme cardiaque. On
n’arrivait plus à dormir, était sans appétit. Ce doit être l’alcool, pensa-t-elle, et
consulta un médecin à son retour. On
lui fit un électrocardiogramme pour
savoir si tout était en ordre du côté du
cœur. Cet examen ne révéla aucun problème, pas plus que celui effectué par
l’oto-rhino-laryngologiste. Pendant les
quatre années qui suivirent, elle ne but
plus une seule goutte d’alcool.
Simone M. quitta la maison de ses
parents et se chercha une chambre à
proximité de l’université. Elle débuta ses
études. Au bout d’un an, à l’approche
des examens, elle constata qu'elle avait
commencé ses révisions trop tard. Sa
crainte des examens augmenta encore
après la coupe du monde de football à
laquelle elle était allée assister en Allemagne avec ses parents. L’attaque suivante se produisit, laissant ses parents
désemparés. Après un séjour au service
des urgences, elle vécut «la période la
plus dure » de toute sa vie. «J’avais terriblement peur et je ne cessais de pleurer.» Elle respirait difficilement et «ne
souhaitait plus vivre.» Simone M. ne se
présenta pas aux examens.
Le médecin des urgences l’adressa à un
psychiatre. C’est à ce moment seulement qu’elle put mettre un nom sur ses
attaques: attaques de panique, une
forme de troubles anxieux. Simone M.
débuta alors une thérapie comportementale, associée à des médicaments.
Elle consultait son médecin une fois par
semaine. Au début du traitement, elle
n’osait plus se retrouver au milieu d'autres personnes. Elle évitait tous les rassemblements. Au bout de deux semaines, son état s’améliora. Après les vacances semestrielles, elle reprit ses études. Son ami de l’époque et surtout sa
mère l’aidèrent à retrouver un quotidien
sans peur. Lentement, elle prit consci-
«Je
ne souhaitais
plus vivre»
ence du fait que les attaques de panique
survenaient toujours à l’approche d'événements particuliers: un voyage à New
York, un séjour linguistique en Espagne.
Avant chaque voyage, la peur la tenaillait: «Que faire si j’ai une attaque de
panique dans un lieu qui ne m’est pas
3
eur
anique
nt
T RO U B L E S PA N I Q U E S
notre vie
LA
P E U R N O U S AC C O M PA G N E TO U T AU L O N G D E N OT R E V I E : P E U R D E S E X A M E N S , D E L A M A L A D I E , D E L A D É P E N -
DA N C E , D E S R I S Q U E S E N V I RO N N E M E N TAU X E T D E L A M O RT .
LORSQU’ELLE SE TRANSFORME EN
PA N I Q U E E T Q U E N OT R E Q U OT I D I E N E S T A S S I É G É PA R D E S AT TAQ U E S P E R M A N E N T E S , A L O R S E L L E D E V I E N T PAT H O L O G I Q U E . I S S U E S D E N U L L E PA RT , C E S AT TAQ U E S D E PA N I Q U E S E P RO D U I S E N T S A N S R A I S O N A P PA R E N T E . E N O R M E
E N T R AV E , E L L E S M E N AC E N T D ' É TO U F F E R L A V I E . N O U S E N PA R L O N S AV E C L E P RO F E S S E U R G R E G O R H A S L E R .
blement et sueurs froides, vertige et parfois nausées. Mon environnement me
semble alors très éloigné, ce qui accroît
encore la peur. J’ai la sensation que je vais
bientôt perdre tout contrôle, que je pourrais devenir fou et mourir d'un arrêt cardiaque. Au bout de 10 minutes, ces sensations sont extrêmes et puis, sans que je
fasse quoi que ce soit, mon état s’améliore. Face à une telle attaque, je pense
souvent qu’il me faut fuir.» Mais les personnes atteintes de trouble panique ne
souffrent pas uniquement de ces attaques, elles sont dans l’angoisse permanente qu’une nouvelle attaque survienne.
Certaines ressentent cette peur de la peur
comme plus grave et plus pesante que les
attaques elles-mêmes.
Où sont les limites entre la peur normale et pathologique?
La peur, et la panique, sont des sentiments humains tout à fait normaux. La
peur n’est pathologique qu’à partir du
moment où elle devient un fardeau et
C’ E S T
NORMAL.
entraîne de lourdes entraves dans la vie de
la personne concernée.
Combien de personnes sont atteintes?
Davantage les femmes ou les hommes?
Un tiers de la population a déjà vécu une
attaque de panique et environ 4 pour cent
ont souffert une fois au moins dans leur
vie d’un trouble panique accompagné
d'attaques répétées à l’origine d’une souffrance réelle. Les femmes sont deux fois
plus souvent concernées que les hommes.
Quel rôle jouent les facteurs génétiques?
Quel est le pourcentage de cas causés
par des événements traumatiques?
Environ 30 pour cent des facteurs de risque sont d'origine génétique. Un tiers
P O RT R A I T
Le Prof. Gregor Hasler travaille depuis le 1er janvier 2010 en tant que professeur
de recherche en soins psychiatriques et en psychiatrie sociale, sans chaire, à
l’université de Berne. Gregor Hasler (41 ans) a grandi à Lucerne et a étudié la
médecine à l'université de Zurich. Il a suivi une formation de psychiatre et de
psychothérapeute FMH à la Clinique Hohenegg de Meilen, à la policlinique
psychiatrique de l'hôpital universitaire de Zurich et au National Institute of
Mental Health de Bethesda, aux Etats-Unis. Des prix nationaux et internationaux lui ont été attribués en récompense de ses travaux de recherche. Il a
notamment reçu en 2008 le prix d’encouragement de l’Institut Lundbeck pour
des travaux de recherche exceptionnels dans le domaine de la psychiatrie clinique.
5
T RO U B L E S PA N I Q U E S
LIVRE !
Comment se débarrasser de l’anxiété et de la dépression
Dans la vie, il arrive qu’on subisse des chocs (divorce, perte d’emploi, deuil…) ou
qu’on se sente mal «sans raison»? Parfois, on est envahi par l’impression désagréable qu’un drame est imminent. Ou encore, on se sent à bout de nerfs, on
souffre d’insomnies ou de fatigue chronique. Comme pour trois millions de
Français, ces symptômes sont peut-être l’expression d’un trouble anxieux ou
d'une dépression. Basé sur de nombreux témoignages, ce livre clair et concret
aborde ces troubles avec beaucoup de délicatesse et aide à réagir.
• Peut-on se passer de médicaments?
• Quelles sont les causes des troubles anxieux?
• Quel est le traitement adapté?
• Comment combattre la dépression par soi-même au quotidien?
Ce livre permet d’apprendre à être enfin soi-même et à se débarrasser pour toujours de son mal-être.
environ des patients déclare que des événements traumatiques ont joué un rôle
essentiel dans l'apparition du trouble.
L’asthme, le tabagisme, la consommation
de caféine et le stress psychologique sont
autant d’autres facteurs tenant une place
importante dans le développement et la
persistance du trouble panique.
Le trouble panique est-il la conséquence ou l’un des aspects d'autres affections telles que dépressions, troubles
obsessionnels compulsifs, etc., ou se
produit-il isolément?
Environ 70 pour cent des personnes touchées souffrent d’un autre trouble psychique, le plus souvent d'une dépression ou
d’un trouble obsessionnel compulsif. On
ignore si le trouble panique est la cause
ou la conséquence de l’autre maladie. Les
différents troubles ont vraisemblablement
des causes communes et se produisent de
ce fait de manière concomitante. En cas
de dépression, les attaques de panique
sont généralement le signe que la personne atteinte réagit plutôt mal au traitement standard. Il est alors indispensable
de faire appel à un spécialiste en psychiatrie.
Quels sont les symptômes du trouble
panique? Sont-ils toujours identiques
ou varient-ils d’un cas à l’autre?
Les symptômes varient d’un cas à l’autre.
Pour certains patients, les symptômes
physiques, difficulté à respirer, tachycardie, sudation, etc. sont dominants. Pour
d’autres, ce sont plutôt les symptômes
psychologiques, peur de devenir fou ou de
tiers
population
attaque
«Environ un
de la
a déjà vécu une
L’auteur Shirley Trickett se consacre depuis des années aux personnes anxieuses
et dépressives. Sa méthode, simple et originale, a déjà aidé de nombreux malades.
Comment se débarrasser de l’anxiété et de la dépression de Shirley Trickett,
Leduc.S Éditions, broché 158 pages, ISBN: 978-2-84899-260-0
6
de panique»
mourir. Les symptômes peuvent également se modifier d’une attaque à l’autre.
Sur le plan thérapeutique, il est important
de savoir si ces patients sont en hyperventilation − s'ils respirent trop vite et
T RO U B L E S PA N I Q U E S
trop profondément. En général, les personnes en crise n’en ont pas conscience.
En présence d’une hyperventilation, les
exercices respiratoires se sont révélés des
mesures psychothérapeutiques efficaces.
La fuite est l’une des réactions à l’attaque de panique. Certaines personnes
évitent les lieux ou situations où ces
troubles anxieux peuvent survenir. La
personne atteinte peut-elle s’en sortir
elle-même? Quand faut-il faire appel à
un médecin?
La fuite est une réaction ancestrale face à
la peur et au danger. En cas d’attaque de
panique, elle n’a aucun sens puisqu’il n’y
a pas de facteur déclenchant externe. En
fuite
réaction
peur et au
danger»
«La
est une
ancestrale face à la
fait, les patients n'évitent pas les lieux où
les attaques peuvent survenir – elles peuvent survenir n’importe où − mais les
lieux où ils ne peuvent fuir, ou bien où ils
sont susceptibles d’avoir honte s'ils sont
pris d'une attaque, donc les lieux publics.
Pour certains, il est important d’être proches d’un service d’urgence ou encore
d'un cabinet médical.
Comment et pendant combien de
temps doit-on traiter ces troubles?
La durée des thérapies est variable, elle
peut être de quelques semaines ou de
quelques années. Un terme y est mis lorsque le patient sait mieux gérer sa peur,
qu'il ne se sent plus entravé dans sa vie et
n’est plus contraint d’adopter des comportements d’évitement. L’absence totale
de peur n'est pas un objectif de traitement raisonnable.
œuvre une thérapie comportementale
ou associer les deux?
Cela dépend pour beaucoup du souhait
du patient ou de la patiente. Les deux
méthodes ont fait leurs preuves et présentent une efficacité similaire. Pour le
traitement psychothérapeutique, le
patient doit être motivé et travailler activement sur ses problèmes. Les résultats
obtenus sont alors souvent durables.
Lorsqu'un patient ne réagit pas suffisamment à l’une ou l’autre des méthodes, la
psychothérapie peut être combinée à un
traitement médicamenteux. Ce dernier
repose sur l’administration d’antidépresseurs. Les anxiolytiques (tranquillisants)
conviennent uniquement dans les phases
aiguës. En principe, ils ne doivent pas être
pris plus de deux semaines.
Comment les proches, les amis, les
accompagnants peuvent-ils aider les
personnes atteintes de trouble panique?
Ils doivent inciter le patient à recourir à
un traitement. En présence de comportements d’évitement, ils peuvent l’aider à
recouvrer ses libertés perdues − séance
«Pour le traitement
TRAITEMENT
MÉDICAMENTEUX:
Comprimés, gouttes ou perfusion?
Le plus souvent, les antidépresseurs
sont prescrits sous forme de comprimés. Cependant, ils sont également
disponibles en gouttes ou en perfusion. Quels sont les avantages et quels
en sont les inconvénients?
Comprimés: c’est le mode d’administration le plus courant. Plus ils sont
petits, plus ils sont faciles à avaler.
Comprimés et capsules sont normalement avalés avec un peu d'eau. Ce
mode d’administration présente toutefois un inconvénient pour les
patients ayant des problèmes de
déglutition. Les comprimés de type
lingual permettent de remédier à ce
problème. Ils fondent sur la langue et
peuvent être avalés avec la salive.
Gouttes: les antidépresseurs sous
forme liquide sont agréables à avaler,
ils peuvent être finement dosés.
Perfusion: Seuls quelques antidépresseurs sont disponibles sous forme de
perfusion. Leur utilisation est rare et
répond à des critères très spécifiques.
psychothérapeutique
patient
motivé»
le
doit être
de cinéma, trajet en tram et train, présence dans des lieux publics. Comme le
stress, le tabagisme, la consommation de
caféine sont des facteurs de risque, les
proches peuvent également contribuer à
la réduction du stress, à l’arrêt du tabagisme ou à la baisse de la consommation de
café.
Quand le traitement médicamenteux
est-il indiqué, quant faut-il mettre en
7
Thérapie
s’en
soi-mêm
T H É R A P I E C O M P O RT E M E N TA L E
Pour
IL
EST POSSIBLE D ’ APPRENDRE À GÉRER LES SENTIMENTS DOULOUREUX , LES COMPORTEMENTS PROBLÉMATIQUES ET LES
SCHÉMAS DE PENSÉE NÉGATIFS .
C HRISTINE P OPPE ,
«L A
MÉDECIN - CHEF DE LA
Qu’entend-on par thérapie comportementale ?
La thérapie comportementale est une
méthode psychothérapeutique cherchant,
sur la base de conclusions scientifiques et
théoriques de la psychologie et des neurosciences, à expliquer l’origine et la persistance de troubles psychiques et d’en déduire
des approches pour le traitement. Cette
méthode est axée sur la maîtrise des problèmes actuels du patient compte tenu de
l’évolution de son passé, ainsi que de ses
traits de caractère. Le patient est invité à
collaborer activement, notamment en adoptant de nouveaux modes de comportement
ou par le biais d’exercices à domicile. L’objet
de la thérapie comportementale est d’apporter une aide au patient pour qu'il s'en
sorte lui-même.
Existe-il différentes formes de thérapie
comportementale?
Il existe différentes techniques de thérapie
comportementale qu’il peut être judicieux
d’associer. Ainsi peut-on citer le recours à
8
THÉRAPIE COMPORTEMENTALE EST UNE FORME D ’ AUTOGESTION », DÉCLARE
C LINIQUE
DE JOUR DU
S ANATORIUM K ILCHBERG .
des exercices, utilisé pour les patients dépressifs, comme la mise en place ciblée d'activités agréables dans le courant de la journée,
ou encore l’entraînement à l’exposition,
destiné au traitement des troubles anxieux et
des troubles obsessionnels compulsifs, dont
le but est d’affronter des situations anxiogènes et d'apprendre de nouvelles techniques
de maîtrise. Autres méthodes importantes,
les techniques cognitives dont l’objet est de
contrôler et de modifier les schémas de pensée et les maximes de vie nuisibles – voir
tout en noir et blanc ou vouloir tout faire
parfaitement. Il existe également des programmes d’entraînement complexes visant à
améliorer la gestion des sentiments pénibles
ou des états de tension, ainsi qu’à renforcer
la confiance en soi et les capacités de communication. Les jeux de rôle y sont souvent
utilisés.
Quel est l’objet des thérapies comportementales?
En début de thérapie, il s’agit tout d’abord
d’établir une relation de confiance avec le
patient, de renforcer ses côtés positifs et de
créer avec lui un climat de compréhension
face à ses problèmes. A partir des objectifs
du patient, un programme thérapeutique
individuel sera élaboré avec sa collaboration,
le but étant de développer de nouvelles perspectives de vie compte tenu de ses ressources et de ses points forts. Parmi les objectifs
envisageables, on peut citer une meilleure
gestion des problèmes psychiques et des difficultés de l’existence, leur maîtrise, la résolution de conflits non résolus et l’édification
d’une prophylaxie anti-rechutes.
Pour quels troubles psychiques cette thérapie est-elle indiquée?
De manière générale, les techniques de thérapie comportementale peuvent être appliquées à de nombreux troubles psychiques. Il
existe aujourd’hui des programmes thérapeutiques bien établis, traitant spécifiquement les troubles anxieux et les troubles
obsessionnels compulsifs, les dépressions et
les troubles de l'alimentation. La méthode
pourra être adaptée au cas par cas aux
T H É R A P I E C O M P O RT E M E N TA L E
pied
Reprend
progressiv
la vie
dans
O BLIGATION
DE RÉUSSITE , SURMENAGE , REVERS DE LA VIE
–
IL EXISTE D ’ INNOMBRABLES CAUSES AUX TROUBLES PANI -
QUES ET ANXIEUX QUI ENTRAVENT PARFOIS MASSIVEMENT LE QUOTIDIEN .
A INSI
QUE LE DÉMONTRENT LES TROIS
EXEMPLES SUIVANTS , UNE THÉRAPIE COMPORTEMENTALE PEUT APPORTER UNE AIDE RÉELLE AUX PERSONNES ATTEINTES
ET LEUR PERMETTRE DE REPRENDRE PIED DANS LA VIE .
Lorsque l'obligation de réussite engendre la panique
Sportif, en bonne santé physique, Andreas
M.* est un brillant manager de 40 ans.
Pourtant, depuis des années, il lutte contre les angoisses et crises de panique qui
l’envahissent dans les ascenseurs, les tunnels étroits et les longs vols en avion.
Jusqu’à présent, ces peurs ont certes peu
entravé sa vie car il a toujours su éviter
les facteurs déclenchants. Ainsi prend-il
par exemple l’escalier plutôt que l’ascenseur. Mais un changement d’emploi le
contraint désormais à effectuer de longs
voyages. Au cours d'un vol vers l'Asie, une
angoisse le submerge subitement, accompagnée de nervosité, de difficultés respiratoires, palpitations cardiaques, tremblements, sueurs, troubles digestifs et du
sentiment de perdre le contact avec la
réalité allant jusqu'à la peur de mourir.
Pour la première fois, il a recours à des
tranquillisants. Depuis, il se sent nette-
10
Il répertorie précisément ses phases d’angoisse, ce qui aide la thérapeute à lui
montrer comment les surmonter. Elle lui
explique notamment la différence entre
les
symptômes d'un infarctus du myocarDésireux de retrouver une vie normale, il
de et une accélération du rythme cardiava consulter dans un service ambulatoire
pour maladies psychiques. Diagnostic: ago- que due à un effort physique intense. A
l’étape suivante, ils se préparent ensemble
raphobie (phobie des espaces libres et des
à des exercices d’exposition et se rendent
lieux publics). La thérapeute lui explique
sur des lieux qu’Andreas M. évitait jusque le stress peut déclencher des crises
d’angoisse accompagnées de visions d’hor- qu'alors. Andreas M. réapprend à gérer ses
angoisses. Il constate qu’il est en mesure
reur. Pour lutter contre cette phobie, elle
lui suggère de suivre une thérapie compor- de supporter ces situations, en dépit de
son mal-être, et que les réactions au
tementale.
stress diminuent d'elles-mêmes sans
Divers entretiens lui permettent d’analyser qu’aucune catastrophe se produise. Au
début, l’anxiété est encore intense. Au fil
son comportement. Andreas M. constate
alors qu’il s’est soumis à une obligation de du temps, il parviendra à prendre les
ascenseurs sans crainte et ira même jusréussite tout au long de sa vie. Il voulait
qu’à
se réjouir du prochain vol de vacanêtre parfait, reconnu, ne tenant jamais
compte de ses propres besoins. Grâce à des ces. Au cours des séances de thérapie suiexercices de relaxation, il apprend à respec- vantes, il essaie de comprendre pourquoi
ter davantage les besoins de son organisme il n’a cessé de se soumettre à cette obligation de réussite et comment prendre
et à contrôler sa respiration pour se calmieux
soin de lui-même à l’avenir. Sur
mer.
ment entravé dans sa vie quotidienne, une
situation qui est par ailleurs source de conflits au sein de son couple.
re
ement
son nouveau lieu de travail, constater
qu'on lui témoigne de l’estime sans qu’il
soit obligé de faire des efforts démesurés
le rend fier.
Les revers de la vie – des facteurs
déclenchants
Marlis B.*, employée de 55 ans, est
envoyée dans une clinique psychiatrique de jour par son médecin de famille
pour le traitement de ses angoisses et
de sa dépression. L’année précédente a
été difficile. Elle a dû subir une opération et prendre en charge son père malade. De plus, elle a perdu son emploi. Le
tout, sans soutien de la part de son partenaire.
Depuis six mois, elle souffre de crises de
panique s’accompagnant de bouffées de
chaleur, de suées, nausées, difficultés
respiratoires et de tremblements, ainsi
que de crispations internes et du sentiment de ne plus être à la hauteur. Elle a
peur de perdre connaissance ou de mourir subitement d’une crise cardiaque. Elle
s’est coupée de son cercle d’amis et ne
sort plus que très rarement de la maison. Elle a peur de l'avenir, ne ressent
T H É R A P I E C O M P O RT E M E N TA L E
plus ni énergie ni joie. Dormant mal, elle
est souvent fatiguée dans la journée.
L’alcool – contre la peur
La clinique de jour diagnostique une agoraphobie s’accompagnant d’un trouble
panique, et une légère dépression. Pour
améliorer aussi rapidement que possible
son humeur et l’aider à surmonter ses
angoisses, les médecins lui prescrivent un
antidépresseur. Trois semaines après le
début du traitement, son état s’est déjà
amélioré. Au cours des entretiens avec le
psychologue, elle apprend à mieux gérer
sa peur de la maladie. Elle commence à
considérer les palpitations cardiaques et
les tremblements comme des réactions
normales de l’organisme au stress, qui
disparaissent d’elles-mêmes et ne l’empêchent pas d’être en société. Lorsque la
peur la submerge, elle se concentre sur le
sol et contrôle sa respiration. Ainsi parvient-elle à supporter les situations de
stress.
Jeune homme en bonne santé physique,
Heinz D.* arrive à la clinique, envoyé par
son médecin de famille. Un traitement
médicamenteux a certes permis de réduire
les angoisses dont il souffre mais pas de les
éliminer totalement. L’étudiant fait état de
sa grande difficulté à aller vers les autres,
de sa crainte qu’on le trouve bizarre et
ennuyeux, qu'on le critique ou le rejette. Il
explique son malaise dès lors qu’il a la sensation d’être le point de mire, par exemple
s’il arrive en retard ou entre seul dans un
café. D’un côté, il se contraint à affronter
ses peurs, de l’autre, il évite les situations
susceptibles de les déclencher. Pour se
donner le courage de faire face à certains
événements, il boit de l’alcool. Dans les
entretiens avec le psychologue, il révèle
qu'enfant, il manquait déjà d’assurance.
Aujourd’hui, ses peurs entravent ses études
et le retiennent également de s’engager
dans une relation de couple.
Les entretiens thérapeutiques révèlent
que Marlis B. a toujours vécu avec un profond sens du devoir, qu’elle s’est toujours
soumise aux autres mais s’est toujours
sentie en retrait, dévalorisée. Elle commence à réfléchir à la manière dont elle
pourrait développer son autonomie et
s’affirmer davantage. Dans le cadre d’un
entraînement visant à renforcer la confiance en soi, elle apprend à exprimer ses
propres aspirations, ses besoins et ses
sentiments. Le thérapeute l’encourage à
reprendre ses anciennes activités de loisir,
cueillette des champignons et vélo, et à
entretenir à nouveau des contacts. Au
cours des entretiens de couple, elle réussit
à demander davantage de soutien à son
partenaire et à réfléchir avec lui à leur
avenir. En fin de traitement, elle pose,
avec le thérapeute, les premières pierres
pour la recherche d’un travail.
Au bout de trois mois, Marlis B. peut quitter la clinique de jour. Pour stabiliser ses
résultats et accompagner sa recherche
d’emploi, elle poursuit la thérapie avec un
psychologue indépendant pendant quelques mois encore.
Heinz D. souffre d’une phobie sociale, tel
est le diagnostic. Il opte pour une thérapie
individuelle et de groupe en ambulatoire.
Comment s'explique sa maladie? Heinz D.
a grandi dans une famille où régnaient des
principes moraux très stricts. Lorsque son
père est tombé malade et que son grandpère est décédé, il lui a manqué le soutien
émotionnel qui lui était nécessaire.
Pendant ses études, il a beaucoup exigé de
lui-même. La rupture avec son amie l’a
déstabilisé. Au cours de la thérapie, il prend
conscience de l’influence nuisible de pensées négatives comme «je suis bizarre» sur
son comportement. Il apprend donc à se
motiver et à réussir en adoptant un état
d’esprit positif («Je vais essayer»). Dans le
groupe, il s’aperçoit que les autres l’apprécient, ce qui a un impact positif sur l’estime qu’il se porte. Progressivement, il
recommence à nouer de nouveaux contacts. Ses angoisses s’atténuent lorsqu’il se
concentre sur la conversation et sur son
interlocuteur au lieu de se focaliser sur les
symptômes physiques de sa peur. Il décide
alors de passer un semestre à l’étranger. Ce
n’était pas facile pour lui, mais il se sentait
bien, rapporte-t-il.
* Tous les noms ont été modifiés.
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