Université René Descartes Année 2016 Mémoire pour l’obtention du Diplôme Inter Universitaire de Pédagogie Médicale Guillaume Lezmi Evaluation de l’enseignement de l’asthme aigu grave par simulation Directrice Dr Alice Hadchouel-Duvergé 1 Résumé Depuis le début de l’année universitaire 2015-2016, la faculté de médecine René Descartes a rendu obligatoire l’enseignement par simulation de certains items du programme d’études médicales pour les étudiants en DFASM2. L’effet de cet enseignement sur l’acquisition des compétences cliniques et des connaissances théoriques des étudiants n’a pas été évalué. L’objectif principal de cette étude préliminaire était d’évaluer l’impact de l’enseignement par simulation de l’asthme aigu grave (AAG) de l’enfant sur les compétences cliniques des étudiants. L’objectif secondaire était d’examiner l’impact de cet enseignement sur les connaissances théoriques des étudiants. Un groupe d’étudiants en DFASM2 ayant suivi l’enseignement théorique pédiatrique normalement dispensé à la faculté de médecine et l’enseignement par simulation l’AAG de l’enfant a été comparé à un groupe d’étudiants ayant suivi l’enseignement pédiatrique théorique habituel et un autre enseignement par simulation. Les compétences cliniques des étudiants ont été mesurées par un score clinique (score maximal = 13) obtenu après examen clinique réalisé auprès d’un enfant hospitalisé pour AAG. Les connaissances théoriques ont été évaluées en comparant les notes obtenues par les étudiants des deux groupes à l’examen de pédiatrie de la faculté. Dix-neuf étudiants ont été inclus (six étudiants exposés à l’enseignement par simulation et 13 étudiants non exposés). Six patients hospitalisés pour AAG ont été examinés (âge = 7.25 ans [4.5-14.9]). Les scores cliniques obtenus par les étudiants exposés et non exposés étaient comparables (1.5 [- 0.755.6] vs 2.5[1.5-4], p = 0.96, respectivement). Le diagnostic d’AAG a été porté par 2 étudiants du groupe exposé et 3 étudiants du groupe non exposé (p = 0.69). Le diagnostic d’asthme aigu sans préciser la sévérité a été porté par 1 étudiant exposé et 2 étudiants non exposés (p = 1.0). La fréquence respiratoire a été rapportée par aucun étudiant exposé et par 1 étudiant non exposé. La saturation en oxygène en air ambiant ou le besoin en oxygène du patient n’ont été mesurés par aucun étudiant. Le retentissement hémodynamique (absence de marbrure, ou extrémités chaudes, ou tension artérielle normale ou temps de recoloration cutané < 3 secondes) a été évalué par 4 étudiants exposés et 7 non exposés (p = 0.65). Les notes obtenues aux deux dossiers pédiatriques de l’examen de la faculté étaient comparables entre les étudiants exposés et non exposés (p = 0.28 et p = 0.89, respectivement). Cinq étudiants exposés avaient attribué la note globale de 5/5 à l’enseignement par simulation, 1 étudiant exposé n’avait pas noté cet enseignement. Les compétences cliniques et théoriques des étudiants ayant effectué l’enseignement par simulation de l’asthme aigu grave de l’enfant semblent comparables à celles des étudiants n’ayant pas effectué cet enseignement. Une analyse portant sur un échantillon plus large d’étudiants devrait permettre de confirmer ou d’infirmer ce résultat préliminaire. 2 Mots clés : simulation, asthme aigu grave, enfants, évaluation, compétences cliniques. Introduction Au cours de ces dernières années, la faculté de médecine René Descartes a enrichi ses méthodes pédagogiques en introduisant un module d’enseignement par simulation de certains items. Le terme Simulation en santé correspond à l’utilisation d’un matériel physique (mannequin, interface de simulation), ou virtuel (jeux sérieux) pour reproduire des situations ou des environnements de soin, dans le but d’enseigner des procédures diagnostiques et thérapeutiques et de répéter des processus, des concepts médicaux ou des prises de décision (1). Grâce à ces différents outils de formation, l’étudiant est exposé à des situations réalistes, et peut s’entraîner à la prise en charge de situations diverses, en particulier urgentes ou graves, sans risque, de manière répétée. L’enseignement par simulation permet également le développement de compétences non techniques grâce l’existence de mise en situation en groupes : travail en équipe, communication entre intervenants. A la faculté de médecine René Descartes, cet enseignement s’effectue au sein du Laboratoire Universitaire Médical d’Enseignement basé sur les technologies Numériques et de Simulations (iLumens). Il est désormais intégré à l’enseignement dispensé aux étudiants en 2ème année du Diplôme de Formation Approfondie en Sciences Médicales (DFASM2). L’enseignement global au cours de cette année d’étude est dispensé par pôles. Trois pôles sont au programme (pôles 4, 5 et 6), chaque pôle est enseigné pendant un trimestre, à chaque trimestre la promotion est répartie dans chacun des 3 pôles. Le pôle 4 comprend les enseignements de pédiatrie et d’hématologie, le pôle 5 comprend les enseignements de Psychiatrie, Neurologie, ORL, Stomatologie et Ophtalmologie ; le pôle 6 comprend les enseignements de Gynécologie-Obstétrique, Urologie et Néphrologie. Les étudiants changent de pôle à chaque trimestre avec un parcours défini en début d’année. Concernant la simulation, à la fin de chaque trimestre, un tiers des étudiants est randomisé pour passer une demi-journée à iLumens et y bénéficier d’un enseignement pour le pôle 4, ou 5, ou 6. La randomisation a lieu en début d’année pour toute la promotion, de sorte que toute la promotion aura bénéficié en fin d’année d’un enseignement par simulation au sein d’un des 3 pôles. Dans le cadre du pôle 4, l’enseignement par simulation concerne la pédiatrie uniquement et comporte quatre ateliers d’une heure. Un des ateliers met en situation les étudiants pour la prise en charge d’un asthme aigu grave (AAG) chez un nourrisson de 10 mois à partir d’un mannequin haute-fidélité. L’impact de l’enseignement de l’AAG par simulation sur l’acquisition par les étudiants des compétences cliniques et des connaissances théoriques est inconnu. Une meilleure connaissance de l’effet de cet enseignement sur l’acquisition des compétences cliniques permettrait de mieux l’adapter aux besoins des étudiants, de l’améliorer, et supporterait un éventuel élargissement de ce type d’enseignement à d’autres pôles. 3 Objectifs L’objectif principal de ce travail était d’évaluer l’impact de l’enseignement par simulation de l’AAG sur les compétences cliniques des étudiants en DFASM2. L’objectif secondaire était d’évaluer l’impact de cet enseignement sur les connaissances théoriques des étudiants en DFASM2. Méthodes Enseignement de la crise d’asthme Dans le cadre de ce travail, il avait été convenu avec les enseignants d’Ilumens au début de l’année 2016, qu’au cours des deuxième et troisième trimestre 2016, les étudiants en DFASM2 participant à l’enseignement par simulation pédiatrique devaient effectuer un atelier d’une heure sur l’AAG de l’enfant (Annexe 1). Au cours de cet enseignement, ils étaient formé à reconnaitre les signes de détresse respiratoire aigüe (polypnée, signes de lutte respiratoire, cyanose) sur un mannequin hautefidélité de 10 mois présentant un AAG (sibilants auscultatoires, frein expiratoire, désaturation en oxygène), sans retentissement hémodynamique. Recrutement des étudiants Les étudiants régulièrement inscrits en DFASM2 à la faculté de médecine René Descartes au cours de l’année universitaire 2015-2016 ont été recrutés sur la base du volontariat, par message d’information envoyé sur leur adresse électronique. Le message indiquait qu’il leur était proposé de se présenter à l’hôpital Necker pour une évaluation de leurs compétences cliniques, dans le cadre d’un travail portant sur l’évaluation de l’enseignement par simulation. Critères d’exclusion Les étudiants redoublant et les étudiants ayant effectués un stage de leur externat dans un service de pneumologie pédiatrique étaient exclus de l’analyse. Evaluation des compétences cliniques Afin d’évaluer les compétences cliniques des étudiants, il leur a été proposé d’examiner un enfant (218 ans) hospitalisé pour Asthme Aigu Grave (AAG) dans les services de Pneumologie et d’Allergologie Pédiatriques, de Pédiatrie Générale, dans l’Unité de Soins Continus Médicaux et Chirurgicaux (USC), ou dans l’Unité d’Hospitalisation de Courte Durée (UHCD) du Centre d’Urgence et de Diagnostic Rapide de l’hôpital Universitaire Necker-Enfants Malades. Les étudiants disposaient de 10 minutes pour examiner un patient (interrogatoire et examen clinique) en présence de l’investigateur. Ils étaient préalablement informés qu’il leur serait demandé de 4 proposer un diagnostic immédiatement au décours de cette mise en situation. Les étudiants ne savaient pas dans quel service le patient était hospitalisé, et ne connaissaient pas le motif d’hospitalisation. Immédiatement après que l’étudiant et l’investigateur aient quitté la chambre du patient, l’investigateur demandait aux étudiants de décrire oralement leur examen clinique et de proposer un diagnostic. Les éléments cités par l’étudiant et objectivement recherchés lors de l’examen clinique, étaient relevés dans le but d’établir son score clinique. Ce score était établi à partir d’une grille de compétences comportant des items quotés +1, +2, -2 (Annexe 2). A chaque fois qu’il citait un item de la grille, ou que cet item avait objectivement été recherché à l’examen, l’étudiant marquait 1 ou 2 points. Le score maximal était de 13. Cette grille de compétences avait été établie par les Dr Lezmi et Hadchouel-Duvergé, pneumologues pédiatres dans le service de Pneumologie et d’Allergologie Pédiatriques de l’hôpital Necker. Elle comportait des items cliniques consensuels d’évaluation d’un patient ayant un AAG (2) : mesure de la fréquence respiratoire (FR) et de la saturation en oxygène en air ambiant (ou des besoins en oxygène du patient), reconnaissance des sibilants, auscultation cardiaque, évaluation hémodynamique. En outre, le Dr Hadchouel-Duvergé avait participé en tant qu’enseignante à l’atelier de simulation pédiatrique portant sur l’AAG. Au moins un parent ou représentant légal de l’enfant était présent lors de l’examen clinique. L’investigateur principal était également présent, s’assurait du bon déroulement de l’examen, n’était d’aucune aide pour l’étudiant, et n’entrait en contact avec lui d’aucune manière. Description des patients examinés Les patients âgés de 2 à 18 ans et hospitalisés pour un AAG dans les services de Pneumologie et d’Allergologie Pédiatriques, de Pédiatrie Générale, dans l’USC, ou à l’UHCD du Centre d’Urgence et de Diagnostic Rapide de l’hôpital Universitaire Necker-Enfants Malades ont été examinés. Le diagnostic était confirmé par le médecin sénior en charge du patient. Le sénior responsable du patient et le médecin investigateur étaient d’accord sur le diagnostic et l’examen clinique. Au moment de l’évaluation, tous les patients étaient polypnéiques, oxygéno-dépendants, présentaient au moins deux signes de lutte respiratoire (tirage, balancement thoraco abdominal, battement des ailes du nez) et étaient stables sur le plan hémodynamique (pas de marbrure, température des extrémités chaudes, tension artérielle normale, pouls centraux perçus, temps de recoloration cutanée < 3 secondes). Les traitements en cours et le monitoring des patients n’étaient pas modifiés lorsque les étudiants examinaient le patient. Evaluation des compétences théoriques 5 Afin de déterminer si l’enseignement par simulation de la crise d’asthme pédiatrique avait un effet sur les connaissances théoriques pédiatriques générales des étudiants, les notes obtenues à l’examen écrit de pédiatrie de la faculté ont été comparées entre les étudiants exposés et non exposés à l’enseignement de l’AAG pédiatrique par simulation. Evaluation de la satisfaction Depuis la mise en place de l’enseignement par simulation, un questionnaire de satisfaction est systématiquement envoyé à tous les étudiants en DFASM2 après leur atelier par courrier électronique. Chaque questionnaire comporte 40 items évalués par une échelle de Likert. La note globale attribuée par l’étudiant à l’enseignement par simulation de l’AAG pédiatrique a été retenue pour mesurer la satisfaction des étudiants. La note maximale était de 5/5. Constitution des groupes Les groupes ont été constitué a posteriori, au moment de l’analyse statistique des données. Lors de l’évaluation clinique, l’investigateur ne savait pas si l’étudiant évalué avait reçu ou non l’enseignement de l’AAG pédiatrique par simulation. Le groupe exposé était constitué d’étudiants inscrits en DFASM2 ayant participé au cours de l’année universitaire 2015-2016 à l’enseignement de la crise d’asthme de l’enfant par simulation. Le groupe contrôle était constitué d’étudiants non exposés à cet enseignement. Analyses statistiques Les variables quantitatives sont expirimées en médiane (25ème-75ème percentile). Les scores cliniques obtenus par les étudiants et les notes obtenues aux examens de pédiatries ont été comparées par le test non paramétrique Mann-Whitney. Une valeur de p < 0,05 était considérée significative. Les data ont été analysées grâce au logiciel GraphPad Prism version 5.03 (GraphPad Software, Inc., San Diego, CA). Résultats Caractéristiques des étudiants inclus Dix-neuf étudiants en DFASM2 ont été inclus, 6 exposés et 13 non exposés. Cinq des six étudiants exposés avaient rempli le questionnaire d’évaluation de l’enseignement par simulation et avaient attribué la note de 5/5 à la question « quelle note globale attribuez-vous à cet atelier ?». 6 Six étudiants avaient effectué un stage de leur externat en pédiatrie à l’hôpital Necker (4 en pédiatrie générale, 1 en Réanimation Néonatale, 1 dans l’Unité d’Immunologie Hématologie), 3 dans le groupe exposés et 3 dans le groupe non exposé (p = 0.28). Caractéristiques des patients examinés Six patients hospitalisés pour AAG ont été examinés (âge = 7.25 ans [4.5-14.9]). Un patient était hospitalisé à l’UHCD, 2 à L’USC, et 2 dans le service de Pneumologie et d’Allergologie Pédiatriques. Tous étaient scopés (fréquence respiratoire, saturation en oxygène, fréquence cardiaque, tension artérielle), et tous recevait de l’oxygène, en lunette nasale ou au masque à haute concentration, de 3 à 8 litres/minute. Trois patients recevaient une aérosolthérapie de Salbutamol continue au moment de l’évaluation clinique. Aucun ne présentait de défaillance cardiaque ou hémodynamique. Evaluation des compétences cliniques Les scores cliniques obtenus par les étudiants exposés et non exposés étaient comparables (1.5 [- 0.755.6] vs 2.5[1.5-4], p = 0.96, respectivement) (fig 1). Les scores cliniques des étudiants ayant effectué un stage en pédiatrie pendant leur externat étaient comparables à ceux des étudiants n’ayant pas effectué de stage en pédiatrie (3.5 [1.6-6.1] vs 2.5 [0-3.5], p = 0.25, respectivement). Les scores cliniques obtenus par les étudiants exposés ayant effectué un stage en pédiatrie (n = 3) étaient comparables à ceux obtenus par les étudiants non exposés et n’ayant pas effectué de stage en pédiatrie (n = 16), (6.6 [2.7-7] vs 2.2 [0.75-3.6], p = 0.29, respectivement). Le diagnostic d’asthme aigu sans préciser la sévérité a été porté par 1 étudiant exposé er 2 étudnaits non exposés (p = 1.0). La fréquence respiratoire a été rapportée par aucun étudiant exposé et par 1 étudiant non exposé (p = 0.57). La saturation en oxygène en air ambiant n’a été mesurée par aucun étudiant, de même, aucun étudiant n’a évalué le besoin en oxygène des patients. Le retentissement hémodynamique (absence de marbrure, ou extrémités chaudes, ou tension artérielle normale ou temps de recoloration < 3 secondes) a été évalué par 4 étudiants exposés et 7 non exposés (p = 0.65). p = 0.96 Score clinique obtenu 8 6 4 2 0 -2 Exposés Non exposés Figure 1. Score clinique obtenus par les étudiants des deux groupes. 7 Evaluation des compétences théoriques Les notes obtenues à l’examen de pédiatrie par les étudiants exposés ou non étaient comparables : 12.8 [12.3-13.6] vs 12 [11.7-13.5], p = 0.28 pour le dossier progressif 1 et 12.6 [12.2-13.6] vs 12.9 [1214.2], p = 0.89 pour le dossier progressif 2. Il n’existait pas de corrélation entre les scores cliniques et les notes obtenues aux deux dossiers progressifs de l’examen (non montré). Discussion Nous avons évalué l’effet de l‘enseignement par simulation de l’AAG pédiatrique sur l’acquisition des compétences cliniques (reconnaissance d’un AAG chez un enfant hospitalisé) et des connaissances théoriques (notes obtenues à l’examen de pédiatrie de la faculté) sur un échantillon d’étudiants en 5ème année de médecine. L’aptitude à reconnaitre un AAG était comparable entre les étudiants ayant effectué l’enseignement par simulation de l’AAG pédiatrique et les étudiants n’ayant pas effectué cet enseignement. L’aptitude à reconnaitre la sévérité de l’exacerbation, à mesurer les constantes vitales (FR et Saturation en air ambiant ou besoin en oxygène) et à évaluer le retentissement hémodynamique étaient identiques entre les 2 groupes. Enfin, les notes obtenues lors de l’examen de pédiatrie de la faculté ne différaient pas entre les 2 groupes. A notre connaissance, cette étude est la première à évaluer l’impact de l’enseignement par simulation de l’AAG sur les compétences cliniques d’étudiants en médecine en situation réelle auprès de patients. Dans cette étude, l’évaluation portait sur l’aptitude à reconnaitre un AAG chez un patient hospitalisé dans un service de pédiatrie. La plupart des études évaluant l’effet des enseignements par simulation sont effectuées sur des mannequins haute-fidélité (3-5). Ce type d’évaluation est très reproductible, mais comporte plusieurs biais car il s’effectue au sein d’une structure d’enseignement et évalue une situation artificielle et proche de celle proposée lors des ateliers de simulation. L’étudiant évalué n’est donc pas confronté à la réalité clinique du patient malade dans une structure de soins. Cependant, si l’AAG se prête à ce type d’évaluation, ce n’est pas le cas des autres situations notamment d’urgence vitale ou de chirurgie. Notre évaluation comporte un biais lié à la variabilité des patients examinés et au stress que peut engendrer une telle mise en situation. Le biais de non reproductibilité des situations cliniques proposées est compensé par le fait que le score clinique utilisé repose sur des items objectifs (mesure de la FR, de la TA, du besoin en oxygène, du temps de recoloration cutané) ou indispensables à l’évaluation de tout patient en détresse respiratoire (auscultation cardiaque, recherche des signes de lutte respiratoire) quel que soit son âge. Le biais lié au stress induit est discutable car d’une part les étudiants évalués étaient informés qu’ils allaient examiner un patient et d’autre part ils sont 8 confrontés quotidiennement à des patients hospitalisés depuis le début de leur externat. En outre, afin de réduire la variabilité inter-observateurs, un seul investigateur a évalué l’ensemble des étudiants. Les méta-analyses ayant évalué l’efficacité de l’enseignement par simulation indiquent que ce type d’enseignement a des effets modestes sur les compétences auprès des patients, mais les études sont très hétérogènes, et peu ont porté sur des étudiants en situation d’examiner un enfant malade (6,7). Notre étude semble renforcer ce constat en montrant l’absence d’effet de l’enseignement par simulation de l’AAG sur la reconnaissance d’un AAG en situation réelle. En particulier, à l’exception d’un étudiant, la FR et la saturation ou le besoin en oxygène n’ont été mesuré par aucun étudiant évalué. Lors du débriefing, il était systématiquement demandé aux étudiants si ces paramètres avaient été mesurés mais non cités. Les étudiants confirmaient qu’ils n’avaient pas mesuré ces paramètres. Il semble donc que bien que le diagnostic d’AAG ait été rapporté par 5 étudiants, le diagnostic de gravité n’était fondé chez aucun étudiant. De plus, la présence de sibilants ou d’un frein expiratoire n’ayant été rapportée que chez 2 étudiants ayant diagnostiqué l’AAG, le diagnostic d’asthme aigu semble également mal justifié chez 3 étudiants. Plus généralement, l’enseignement par simulation n’améliore pas la recherche des données objectives de l’examen clinique (FR, saturation, fréquence cardiaque), ni la reconnaissance des signes plus subjectifs (bruits auscultatoires, frein expiratoire, des signes de lutte). Au cours du débriefing, les étudiants ont plusieurs fois rappelé que ces symptômes leur sont habituellement transmis dans les cas cliniques qu’ils effectuent couramment, et qu’ils n’ont pas l’habitude de les chercher. Ils reconnaissaient cependant l’importance des données objectives tant pour l’élaboration du diagnostic, que pour le suivi de l’évolution clinique, ou la transmission d’information entre médecins. Notre étude confirme également l’absence de lien entre la satisfaction exprimée face à un enseignement son efficacité. Les notes obtenues à l’examen écrit sont comparables entre les deux groupes, cependant aucun dossier ne portait spécifiquement sur l’AAG. Notre projet de recherche ne prévoyait pas d’évaluer les connaissances théoriques sur l’asthme à partir d’une évaluation spécifique type cas clinique, questions rédactionnelles ou à choix multiples. La limite principale de notre étude est la petite taille de l’échantillon inclus. Nos résultats sont préliminaires et l’inclusion d’un nombre plus important d’étudiants devrait permettre de les confirmer ou de les infirmer. En outre, il existait un biais de recrutement car les étudiants étaient inclus sur la base du volontariat. Une étude prévoyant l’évaluation clinique systématique post simulation d’un échantillon d’étudiants tiré au hasard permettrait de limiter ce biais. Le nombre d’étudiants à inclure est cependant non mesurable car aucune étude de ce type n’a été réalisée. D’autre part, l’enseignement évalué a duré 1 heure et ne rentrait pas dans le cadre d’un programme formation spécifique de la détresse respiratoire aigue. Il était proposé avec d’autres ateliers comme la prise en charge d’un choc septique ou la réalisation d’une ponction lombaire chez l’enfant. Il est possible que 9 l’ajout d’autres séances, ou qu’un programme dédié comportant plusieurs séances soit plus efficace sur l’acquisition des compétences cliniques. En outre, le couplage systématique de la simulation et de la mise en situation au lit du malade pourrait améliorer les performances cliniques des étudiants. Beaucoup d’étudiants avaient exprimé que l’évaluation en condition réelle les avait confrontés à leurs limites, et qu’ils avaient l’impression d’avoir progressé à l’issue de l’évaluation. De plus, le scénario de l’enseignement par simulation évalué ne mettait pas les étudiants en situation devant un patient hospitalisé pour AAG après le début de sa prise en charge. Cependant, l’un des objectifs de cet enseignement était de « reconnaitre la crise d’asthme », les patients examinés avaient des symptômes caractéristiques, et le sénior responsable ainsi que l’investigateur étaient d’accord sur le diagnostic et l’examen clinique. L’évaluation d’un patient avec AAG, avant toute prise en charge, au moment de son arrivée dans un service d’urgences pédiatriques aurait été plus proche du scénario proposé lors de l’enseignement par simulation, mais ce type d’étude n’est pas faisable pour des raisons éthiques. Enfin, les évaluations ont eu lieu sur plusieurs jours et bien qu’il avait été demandé aux étudiants évalués de ne pas communiquer le contenu de l’évaluation, il est possible que certains d’entre eux aient été informé avant l’évaluation. En résumé, notre étude montre qu’il est faisable d’évaluer les compétences cliniques des étudiants au lit d’un patient hospitalisé pour AAG. Il semble que l’enseignement par simulation de l’AAG de l’enfant, tel que proposé actuellement, n’améliore pas la capacité à reconnaitre de manière objective un AAG chez les étudiants en 5ème année. Un programme couplant simulation et évaluation clinique en situation réelle pourrait être plus efficace sur l’acquisition des compétences cliniques des étudiants que l’enseignement d’une heure proposé actuellement. Références 1. Granry JC, Moll MC. Rapport de mission. Etat de l’art (national et international) en matière de pratiques de simulation dans le domaine de la santé dans le cadre du développement professionnel continu (DPC) et de la prévention des risques associés aux soins. HAS 2012. 2. Marguet C, Michelet I, Couderc L, Lubrano M. Management of acute asthma exacerbation in childhood: French recommendations. Arch Pediatr 2009;16(6):505-7. 3. Drummond D, Arnaud C, Thouvenin G, Guedj R, Grimprel E, Duguet A, de Suremain N, Petit A. An innovative pedagogic course combining video and simulation to teach medical students about pediatric cardiopulmonary arrest : a prospective controlled study. Eur J Pediatr 2016;175:767-774. 4. Adler M, Trainor JL, Siddall VJ, McGaghie WC. Development and evaluation of high-fidelity simulation case sceanrios for pediatric resident education. Ambul Pediatr 2007;7:182-186. 10 5. Zhang MY, Cheng X, Xu AD, Luo LP, Yang X. Clinical simulation training improves the clinical performance of Chinese medical students. Med Educ Online 2015;20:28796. 6. Ilgen JS, Sherbino J, Cook DA. Technology-enhanced simulation in emergency medicine: a systematic review and meta-analysis. Acad Emerg Med 2013 Feb;20(2):117-127. 7. Technology-enhanced simulation and pediatric education: a meta-analysis. Cheng A, Lang TR, Starr SR, Pusic M, Cook DA. Pediatrics 2014;133(5):e1313-23. 11 Annexe 1. Description de l’atelier de simulation sur l’AAG. Crise d’asthme (nourrisson) Vue d’ensemble du scénario Service de soins : urgences pédiatriques Groupe cible : étudiants en D3 Durée estimée du scénario : 10 min Débriefing : 20 min Bref résumé Nourrisson de 10 mois amené aux urgences par sa maman (ou son papa) pour gêne respiratoire évoluant depuis quelques heures. Il est enrhumé depuis 2-3 jours ATCD : 2 épisodes de bronchiolite simple à 6 et 8 mois. Jamais d’hospitalisation. Pas d’ATCD familial Vue d’ensemble du scénario 12 Le nourrisson arrive en détresse respiratoire aigüe avec tachypnée et signes de lutte. L’auscultation met en évidence des sibilants et dans ce contexte le diagnostic de crise d’asthme doit être rapidement évoqué. L’infirmière facilitatrice a déjà scopé l’enfant, l’a mis en proclive et la sat est au départ à 96% et l’enfant désature rapidement. La CAT doit comprendre la mise en proclive, sous oxygène et le début des nébulisations de ventoline. Objectifs pédagogiques Généraux : vérifier les connaissances des étudiants en vue de l’ECN Spécifiques au scénario : reconnaître la crise d’asthme, mettre en condition le patient, débuter le traitement, informer la famille 13 Préparation du scénario La section « Préparation du simulateur » décrit la manière de préparer le simulateur de façon à ce qu’il soit fidèle à l’historique du patient et afin d’augmenter le réalisme. La liste de l’équipement et des médications fait référence à ce que doit utiliser l’étudiant dans le scénario. Néanmoins, il est recommandé de laisser à disposition d’autres équipements compatibles avec les ressources locales. Préparation du simulateur Mannequin SimBaby HF, scopé, en couche Nombres de participants Rôles des étudiants : 3 jeunes internes Rôle de formateur : 2 formateurs pour gérer le mannequin et observer les apprenants, 2 facilitateurs (1 parent et 1 infirmier(e)) 14 Transmissions Heure : 18h Situation : box des urgences pédiatriques Liste de l’équipement Dispositifs médicaux Divers Couche pour le mannequin Scope FC FR Sat Prise à oxygène Lunettes à oxygène, masque MC et HC Masque pour aérosol Matériel de perfusion Stéthoscope Téléphone Ambu + masque nourrisson pour ventiler SHA Médicaments et sérums Ventoline Celestene Documents Carnet de santé Radio de thorax (distension simple) Environnement Diagnostic Box des urgences Crise d’asthme sévère 15 Les signes cliniques Tachypnée, signes de lutte, cyanose en /s de 85% de sat, toux, pleurs, sibilants bilatéraux, pas de fièvre Informations complémentaires Informations patient : Lucille Date de naissance : 20/01/2014 Poids : 10 kg Taille : 72 cm Sexe : F Antécédents : 2 bronchiolites à 6 et 8 mois Référentiels / Recommandations d’experts Référentiel de pédiatrie de Paris Descartes, item asthme, objectifs : diagnostiquer un asthme chez l’enfant de moins de 36 mois, identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge Pistes pour le débriefing Gestion de la situation d’urgence et du stress qu’elle peut engendrer Gestes systématiques = mise en condition du patient Connaissances testées par ce scénario (cf référentiel) : un dia avec les take-home messages 16 Progression du scenario – 1ère possibilité Configuration moniteur Mannequin Patient Messages Tousse Signes de lutte avec tirage Sibilants bilatéraux diffus à l’auscultation Interventions étudiants (ce que l’on aimerait voir…) Présentation Interrogatoire Lavage des mains Auscultation État initial: FR=50 FC=130 TA=90/55 SpO2=96% Dès le début du scénario, une tendance est lancée pour faire désaturer et augmenter la FR et FC du patient Cyanose si désat<85%, Signes de lutte toujours Mise en proclive et oxygène Tester la mise en condition du patient La sat remonte si l’oxygène a été mis Mais les sibilants et les signes de lutte persistent Diminuer un peu la FR, remonter la sat : déjà réglée par la tendance. Aérosol de béta-2 Amélioration après aérosol Diminuer un peu la FR, remonter la sat : déjà réglée par la tendance. Réévaluation de l’état de l’enfant qui est stable ! ne pas oublier de remettre le breathing pattern et le chest rise en normal manuellement A ce stade initial le diagnostic de crise d’asthme doit être posé Connaître le traitement de la crise d’asthme Réévaluer régulièrement le patient pendant une prise en charge d’urgence Fin du scénario 17 Progression du scenario – 2ème possibilité Configuration moniteur Mannequin Patient État initial: FR=50 FC=130 TA=90/55 SpO2=96% Tousse Signes de lutte avec tirage Sibilants bilatéraux diffus à l’auscultation Interventions étudiants (ce que l’on aimerait voir…) Présentation Interrogatoire Lavage des mains Auscultation Messages Dès le début du scénario, une tendance est lancée pour faire désaturer et augmenter la FR et FC du patient Cyanose si désat<85%, Signes de lutte toujours Si les étudiants ne font rien L’enfant continue à se dégrader et bout de 7 min, il commence à s’épuiser avec bradycardie et bradypnée Au bout de 7 min, une nouvelle tendance est lancée avec chute FC, FR et Sat A la fin de la tendance (sur 2 min) : sat à 63%, FR à 15 et FC à 50. Faire descendre manuellement la FR et la sat si besoin car on ne peut pas descendre plus bas avec la tendance Oxygène ou ventilation au masque si la bradypnée est profonde Débuter la réanimation cardio-respiratoire Amélioration après ventilation à l’ambu Une tendance d’amélioration est lancée permettant de corriger la sat, FR et FC Mais les sibilants et les signes de lutte persistent Aérosol de béta 2 Connaître le traitement de la crise d’asthme A ce stade initial le diagnostic de crise d’asthme doit être posé 18 Amélioration après aérosol Diminuer un peu la FR, remonter la sat : déjà réglée par la tendance. Réévaluation de l’état de l’enfant qui est stable ! ne pas oublier de remettre le breathing pattern et le chest rise en normal manuellement Réévaluer régulièrement le patient pendant une prise en charge d’urgence Fin du scénario 19 Annexe 2 : score clinique Questions posées : Décrire l’examen clinique du patient. Quel diagnostic proposez-vous ? Item évalué Note Evaluation des signes cliniques de détresse respiratoire Mesure la fréquence respiratoire 1 Note la saturation en oxygène en air ambiant (ou 1 évalue les besoins en oxygène si sous oxygénothérapie) A recherché les différents signes de lutte, sait les montrer et les nommer : - Tirage intercostal 1 - Balancement thoraco-abdominal 1 - Battement ailes nez 1 Auscultation cardio-pulmonaire Reconnaît des sibilants 2 Reconnaît un frein expiratoire 1 Ausculte les bruits du cœur 1 Evalue la tolérance hémodynamique (mesure TA, 1 prend pouls centraux, évalue température cutanée ou présence de marbrure ou Temps de recoloration cutanée) Diagnostic proposé Exacerbation d’asthme sévère 2 Exacerbation d’asthme sans préciser la gravité 1 Autre -2 20