Les cancers du rein d`aspect kystique A propos de 14

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Progrès en Urologie (1991), 1
Les cancers du rein d’aspect kystique
A propos de 14 observations
D. ROSSI (1), E. GHAZAROSSIAN (3), C. COULANGE (2), F. BLADOU (1),
D. DISTEFANO (4), J. MASSANDE (1)
(1) Service d’Urologie, Hôtel-Dieu (Pr. Serment), Marseille, France (2) Service d’Urologie Timone (Pr. Rampal),
Marseille, France (3) Service d’Urologie, Hôpital Nord (Pr. Richaud), Marseille, France
(4) Service de Radiologie Timone (Pr. Kasbarian), Marseille, France
NOS OBSERVATIONS
Matériel
RESUME
Quatorze patients (11 hommes et 3 femmes) ont été
opérés d’un cancer du rein d’aspect kystique. Sous
cette dénomination nous avons regroupé :
Les auteurs présentent 14 observations de cancers
du rein d’aspect kystique ayant posé des difficultés
diagnostiques pré et per-opératoires. Si l’échographie est devenue l’examen de première intention,
la tomodensitométrie est à l’heure actuelle l’examen diagnostique le plus performant. Il faut être
prudent quand on pose le diagnostic de kyste bénin
compliqué et la persistance d’images douteuses
doit conduire à l’exploration chirurgicale. L’examen histologique extemporané pour être fiable doit
int éresser la t otalité de la t umeur kys tique. La
néphrectomie polaire avec examen extemporané
est donc l’atti tude diagnostique préopératoire à
recommander devant un “kyste suspect”. Le traiteme nt curati f de ce s cancer s es t l a c las s ique
néphrectomie élargie.
6 adénocarcinomes nécrosés de stade I,
7 adénocarcinomes à forme kystique se répartissant en :
- 6 adénocarcinom es entièrement kys tis és
(forme kystique vraie des cancers du rein), dont 2
stades I et 1 stade II.
- 1 adénocarcinome encéphaloïde de stade I
inclu dans cette série du fait de son hypodensité
(hémorragie intratumorale) évoquant une tumeur
pseudo-liquidienne.
La moyenne d’âge était de 53 ans (extrêmes 29 et
76 ans).
La tumeur étai t s ituée 7 fois au niveau du rein
gauche et 7 fois au niveau du rein droit.
Progrès en Urologie (1991), 1
La localisation sur le rein était :
- Pôle supérieur : 8 fois.
- Pôle inférieur : 4 fois.
- Situation médiorénale : 2 fois.
Dans la maj orité des cas, le diagnostic radiologique de cancer du rein pose peu de problèmes.
Cependant, en cas de tumeur d’as pect kystique,
l’hésitation diagnostique peut persister à l’issue du
bilan radiologique et parfois même au terme de
l’expl orat ion chi rurgical e. Nous rapportons 14
observations de cancers d’aspect kystique nous
ayant posé des probl èm es diagnostiques. Cett e
étude nous permet de faire le point sur la stratégie
diagnostique et thérapeutique devant un kyste atypique du rein.
Les circonstances de découverte
Elles sont résumées dans le Tableau 1. On note que
les s ignes les plus fréquents sont l’hématurie (5
fois), l’existence d’une masse palpable du flanc (3
fois) et la survenue de douleurs (2 fois).
Manuscrit reçu le 11 avril 1991
1
Tableau 1. Circonstances de découverte des cancers du
rein d'aspect kystique.
- Hématurie totale
- Masse palpable
- Lombalgies rebelles
- Fièvre au long cours
- Echographie systématique
pour traumatisme
- Infection urinaire
- Augmentation de volume
d'un kyste connu
Tableau 2. Les résultats des différents examens radiologiques.
5 fois
3 fois
2 fois
1 fois
Examens
U.I.V.
10 examens
complets
1 fois
1 fois
1 fois
RESULTATS DES DIFFERENTES
EXPLORATIONS
1. Les explorations radiologiques
Doute
diagnostique
7
0
3
Echographie
12 examens
0
1
11
Scanner
10 examens
2
6
2
1
3
Artériographie
5 examens
Les conclusions des différents examens sont résumées dans le Tableau 2. Dans 10 cas c’est l’U.I.V.
qui a été demandée de première intention. Dans 4
cas, l’échographie a été le premier examen pratiqué et elle a été immédiatement suivie par la réalisation d’une tomodensitométrie sans U.I.V. préalable.
Diagnostic évoqué
Kyste bénin
Cancer
1
cas au moins un critère évocateur de malignité :
paroi épaisse prenant le contraste (2 fois), plages
hyperdenses (2 fois), tumeur hypodense sans injection mais prenant le contraste (1 fois), végétations
intrakystiques (3 fois).
a) L’U.I.V.
- Image douteuse : 2 fois. Il s’agissait d’un kyste à
paroi épaisse, sans prise de contraste et d’un kyste
cloisonné sans prise de contraste.
Un examen complet avec néphrotomographies
précoces n’a en fait été réalisé que 10 fois. Dans
7 cas, aucun élément ne permettait d’évoquer un
cancer. Dans 3 cas “douteux” il existait soit une
ma ss e pare nchymat eus e ne prenant pas l e
contraste mais dont la forme était irrégulière, soit
un aspect grignoté d’un calice en regard du kyste.
- Kyste bénin compliqué : 2 fois. Les images étaient
celles de kystes bénins avec quelques foyers hyperdenses ne prenant pas le contraste. Dans ces 2 cas le
contexte clinique (syndrome lombaire douloureux et
fébrile évoquant u n k yste infecté et traumatisme
d’un kyste rénal s’accompagnant d’hématurie et à
l’origine d’une hémorragie intrakystique) a fait porter à tort le diagnostic de kyste bénin compliqué. La
persist an ce des images (Fi gures 2 et 3) mal gré
l’amélioration de la sympto matolo gie clinique a
conduit à l’exploration chirurgicale.
b) L’échographie
Réalisée 12 fois, elle n’a jamais conclu à une
lésion bénigne. Dans 1 cas l’irrégularité de la
paroi et la présence de zones hétérogènes intrakystiques ont fait affirmer le diagnostic de cancer
nécrosé. Dans 11 cas l’échographiste n’a pas pu
conclure car il s’associait à l’image liquidienne
rassurante :
e) L’artériographie rénale
- Une paroi épaisse (1 cas).
- Des cloisons intrakystiques (1 cas).
Ell e n’a été pratiquée que chez 5 patients . Ell e
nous a aidés à donner un diagnostic exact dans
quatre cas. Une fois les images étaient typiques
d’un cancer (Figure 4) et trois fois l’étude attentive
- Des échos intrakystiques (9 cas) (Figure 1).
c) La tomodensitométrie avec injection
des clichés a montré une vascularisation régulière
très fine d’une petite zone de la paroi kystique
(Figure 5).
Elle a été réalisée 10 fois. Les résultats étaient :
- Cancer très probable : 6 fois. Il existait dans ces
2
2. La ponction
I. Le malade est toujours vivant 1 an après la
découverte des métastases osseuses.
Elle n’a été réalisée que 4 fois et elle a ramené un
liquide brunâtre ou franchement hématique. La
cytologie pratiquée sur les 4 prélèvements n’a été
positive qu’une fois. La kystographie a montré
dans un cas une paroi irrégulière (Figure 6).
- 10 patients vivants, sans signes cliniques ou paracliniques d’évolution.
Dan s cette courte série, il nous a été impossible
d’établir une corrélation entre la survie et le type histologique d’adénocarcinome rénal d’aspect kystique.
3. L’exploration chirurgicale
Tous nos patients ont été opérés. L’opérateur avait
jugé en peropératoire la lésion franchement néoplasique dans 4 cas et d’aspect douteux dans 10
cas. Chez 4 de ces 10 patients un examen histologique extemporané a été réalisé. Il a conclu dans 3
cas à un cancer (néphrectomie élargie) et dans un
cas à un kyste multiloculaire. Chez ce patient la
néphrectomie polaire a été complétée par une
néphrectomie élargie dès la connaissance du résultat histologique définitif. Bien nous en prit, car il
existait des lésions néoplasiques sur le rein resté en
place. Les différentes interventions réalisées sont
résumées dans le Tableau 3.
DISCUSSION
1. La pathogénie
Si les cancers entièrement nécrosés du rein (6 de
nos observations) donnent des images kystiques
d’interprétation difficile, ils ne posent pas de problèmes de pathogénie. Il n’en est pas de même des
vraies formes kystiques du cancer du rein (7 de
nos observations).
Ces formes kystiques du cancer du rein représenteraient 15% des cancers du rein (13). Dans notre
expérience, seuls un tiers de ces cancers kystiques
nous ont posé de réels problèmes diagnostiques.
LA SURVIE
La pathogénie de ces cancers a été étudiée sous
deux angles différents par G IBSON et H ARTMAN :
Parmi nos 14 patients opérés, 2 ont été perdus de
vue. Sur les 12 revus avec un recul moyen de 4 ans
(extrêmes 6 mois et 7 ans) on note :
a) GIBSON (11) distingue 4 types d’ass ociations
d’un cancer et d’un kyste dans un même rein :
- 1 décès en rapport avec un cancer O.R.L. survenu
2 ans après la néphrectomie élargie.
Type I : Il existe deux lésions bien distinctes : un
kys te s éreux et un cancer s oli de, s ans rapport
mutuel mais situés dans le même rein. Il s’agit probablement d’une pure coïncidence (9). Ce type ne
pose pas de vrais problèmes diagnostiques.
- 1 évolut ion mét astat ique avec localis ati ons
osseuses 3 ans après la néphrectomie élargie. Il
s’agissait d’un cancer entièrement nécrosé de stade
Type II : Il représente la forme kystique du cancer du rein. C’est le type le plus fréquent.
Tableau 3. Les différentes interventions réalisées.
Type III : Le microcancer nait dans la paroi
externe d’un kyste séreux.
NEPHRECTOMIE ELARGIE : 13 cas
Type IV : Le kyste naît au vosinage de la tumeur.
Pour G IBSON , la tumeur donnerait naiss ance au
kyste par compression artérielle ou tubulaire.
- 11 de première intention
- 2 de seconde intention :
- 1 après néphrectomie polaire
- 1 après kystectomie
NEPHRECTOMIE POLAIRE : 1 cas
Les types III et IV sont exceptionnels (0,3 à 0,7%
pour S TEG). Dans notre série de 14 cancers d'aspect kystique, nous avons retrouvé :
Rein unique
* 1 cancer de type III.
* 6 cancers de type II au sein desquels les foyers
3
de nécrose étaient peu nombreux ou absents.
tique et son intérêt comme examen de dépistage est
actuellement estompé par l'échotomographie.
* 6 adénocarcinomes entièrement nécrosés.
* 1 cancer inclassable. Il s' agissait d'un cancer
encéphal oïde dont l 'as pect très hypodense évoquant un kyste était le fait d'une hémorragie intratumorale d'origine traumatique.
b) HARTMAN (13) évoque 4 types de mécanismes à
l'origine du développement kystique des cancers
du rein :
* Développement intrinsèque de kystes multiloculaires. Cette forme serait retrouvée dans 40% des
cancers kystiques.
* Développement intrinsèque d'un kyste uniloculaire ou cystadénocarcinome. Cette forme représenterait 30% des cancers kystiques. Il existe souvent une nécrose centrale.
* Nécrobiose kystique du cancer. Elle est retrouvée
dans 20% des cas. Le contenu kystique est nécrotico-hémorragique.
* La cancérisation secondaire de l'épithélium d'un
kyste bénin serait beaucoup plus rare.
2. La symptomatologie clinique
L'hématurie était présente dans un tiers de nos cas.
Pour DORÉMIEUX (7) elle serait secondaire à une
nécros e intratumoral e. Ceci ne s' es t pas vérifié
dans notre série puisque chez les 5 patients consultant pour hématurie, un seul présentait un adénocarcinome au sein duquel prédominaient des éléments de nécrose. Quoiqu'il en soit, une hématurie
ne doit jamais être attribuée à un kyste simple non
compliqué. STEG (34) rapporte seulement 57 hématuries attribuables à un kyste si mple sur 1342
malades étudiés. La majorité des auteurs (1, 23)
s'accordent à réfuter tout lien de causalité entre
hématurie et kyste bénin du rein.
3. L'imagerie des cancers du rein d'aspect kystique
L'imagerie de ces cancers est classiquement d'interprétation difficile.
a) L'urographie intraveineuse
Elle n'est pas à notre avis un bon examen diagnos-
4
Les néphrotomographies précoces visualiseraient
parfois (22) en cas de cancer nécrosé une coque
péritumorale épaisse et irrégulière ou encore l'absence de signe de l'éperon avec une rétraction du
parenchyme rénal au contact du syndrome tumoral.
Comme dans tout cancer du rein il faudra être
attentif à une altération de la néphrographie tubulaire et à une irrégularité même minime de la paroi
d'un calice signant l' envahiss ement de la voie
excrètrice. Dans notre série nous n'avons jamais
retrouvé de calcifications tumorales dont les tissus
nécrosés et hémorragiques auraient tendance naturellement à s'imprégner. Devant une tumeur kystique, le risque de néoplasie serait de 20% en présence de calcifications périphériques et de 87% en
cas de calcifications centrales (6, 10).
b) L'échotomographie
Réalisée chez 12 de nos patients, elle n'a affirmé le
diagnostic de cancer que dans un cas. Cependant
11 fois elle a eu le mérite de nous inciter à poursuivre les investigations comme cela doit être le
cas quand les critères stricts de bénignité ne sont
pas remplis (14, 27).
Les cancers du rein d'aspect kystique donnent classiquement des images de structure mixte :
- masse souvent sphérique mais à bords épais et
irréguliers,
- présence d'échos intrakystiques,
- renforcement postérieur insuffisant par rapport à
la taille du kyste,
- calcifications péri et surtout intrakystiques.
La littérature (29, 33) fait état de 10 à 17% d'erreurs diagnostiques. Cette marge d'erreur se réduit
avec l'expérience plus grande de l'échographiste et
la qualité de l'échographe. Enfin l'échographie permet de surveiller de manière anodine les modifications de volume et de structure d'une image kystique préexistante. Chez un de nos patients surveillé régulièrement pour un kyste a priori bénin,
les modifications de structure de l'image liquidienne et de sa paroi, ass ociées à une augmentation
rapide du volume, nous ont conduits à propos er
une exploration chirurgicale qui a révélé l'existen-
ce d'un cancer. Une modification isolée du volume
d' une i mage li qui di enne pure n' es t pas pour
MURPHY (23 un signe évocateur de malignité. Elle
devra à notre avis inciter l'échographiste à rechercher des modifications de structure passées inaperçues et à envisager un complément d'exploration.
tic de "traumatisme" du kyste avait alors été évoqué. L'absence de modification de l'image au cours
du temps nous a conduits à réaliser une exploration
chirurgicale. Il ne s'agissait pas d'un kyste hémorragique après traumatisme mais d'un cancer du rein
très hypodense.
En conclusion, le mérite de l'échographie est d'être un
examen anodin qui, devant une image liquidienne
atypique, incite à poursuivre les investigations radiologiques. Cet examen de première intention devrait
voir ses capacités diagnostiques s'améliorer avec l'arrivée sur le marché d'appareils à très haute définition.
d) L'artériographie sélective de l'artère rénale
Elle a perdu la première place avec la venue du
scanner et de l'échotomographie (2, 29). Réalisée
seul ement 5 fois elle a montré chez 4 de nos
patients des signes évocateurs de cancer alors que
le doute persistait après le scanner chez 2 de ces
patients.
c) L'examen tomodensitométrique
L'étude de la littérature (8, 28, 29) fait de cet examen le meilleur moyen diagnostique des cancers
du rein d'aspect kystique. Les images les plus évocatrices seront obtenues en angioscanner (3, 25) :
Son rôle bien que réduit n'est pas nul surtout dans
les cas difficiles. DANA (5) a étudié les possibilités
et les limites diagnostiques de l'artériographie dans
les cancers nécrosés du rein. Le problème se pose
surtout chez les malades qu'il classe dans le groupe
4, c'est-à-dire les cancers entièrement nécrosés et
totalement avasculaires. Aucune néovascularisation tumorale n'est visible et aucune opacification
de la masse n'apparaît au temps néphrographique.
Il faut alors attacher une extrême importance à
l'étude de la partie extériorisée de la masse à la
recherche d'une artère même très fine mais étendue
nettement en dehors du parenchyme. Le test à l'angiotensine optimaliserait la visualisation d'une vascularisation pathologique. La série de C URET (4)
confirme l'intérêt diagnostique de l'artériographie
dans les cas difficiles puisqu'il ne retrouve que 7%
de faux négatifs.
- atypie vasculaire au niveau du plan de raccordement de la tumeur nécrotique avec le parenchyme
sain,
- rehaussement hétérogène des tissus tumoraux et
hypodensité des plages de nécrose,
- kyste à paroi épaisse prenant le contraste avec
limites hétérogènes. LÉPINARD (18) a rapporté 6
observations de kystes bénins à paroi épaisse et à
contenu liquidien. La paroi, bien qu'épaisse, était
avasculaire et sa densité ne se rehaussait pas lors
de l'injection de produit de contraste,
- présence de foyers intrakystiques de densité tissulaire élevée. Cependant, une densité spontanée
supérieure à celle du parenchyme sain avoisinant
ne permet pas d'affirmer un cancer. Pour SANDLER
(32), un kyste bénin contenant un liquide riche en
calcium ou en protéines peut donner une image
tomodensitométrique hyperdense tout en remplissant tous les autres critères de bénignité. De même
des kystes hémorragiques contenant des caillots
(26, 36) peuvent être à l'origine d'une densité élevée et hétérogène. Dans ce cas, la densité s'élèverait les premiers jours puis diminuerait progressivement pour atteindre une densité de type liquidien
du fait de la désintégration des caillots (37). Chez
un de nos patients, une image régulière de densité
hétérogène mais inférieure à la densité du parenchyme sain avoisinant avait été découverte lors de
l'exploration d'un traumatisme du rein. Le diagnos-
En conclusion, bi en que l'artériographie ne soit
plus un examen de première intention, la qualité et
la finesse des informations données sur la vascularisation de la coque tumorale peuvent en cas de
difficulté compléter les données de l'examen tomodensitométrique. De plus, l'étude de la vascularisation du rein est utile pour réaliser une néphrectomie polaire qui permettra l'analyse histologique
extemporanée de la totalité de la tumeur kystique.
e) L'imagerie par résonance magnétique nucléai re (19, 20)
Elle n'a pas fait la preuve de sa supériorité par rapport à la tomodensitométrie. La faible intensité du
signal intrakystique recueilli en mode T1 semble
être un critère fiable de bénignité.
5
Analyse histologique extemporanée de
la pièce de néphrectomie partielle
Echographie + Scanner
Forte suspicion de cancer
Cancer
Doute diagnostique
Exploration chirurgicale
Bénin
Complément d'explorations
Ponction
I.R.M.
Néphrectomie élargie
- Sangl. ou brunâtre
- ± Augm. Lipides
- ± Cytologie >0
<0
Histologie définitive
Artériographie
Doute
Cancer
<0
Bénin
Surveillance
Surveillance
Figure 7. Algorithme devant une suspicion échographique de tumeur rénale d'aspect kystique.
Figure 8. Algorithme au cours de l'exploration chirurgicale d'une tumeur.
f) La ponction
maligne. En effet, KLEIST (17) présente 17 cancers
kystiques ponctionnés avec dans 8 cas un liquide
clair rassurant.
Les différents éléments à prendre en considération
sont :
- l'aspect du liquide,
- sa composition chimique,
- la cytologie,
- l'image obtenue par kystographie.
L'étude de la composition chimique du liquide de
ponction doit être orientée vers le dosage du taux
de lipides et de cholestérol (17, 34). En effet des
taux élevés seraient évocateurs de malignité.
Quant à la cytologie, là encore, elle n'a de valeur
que positive. Un seul de nos 4 patients présentait
un résultat positif. Ce petit nombre de patients n'est
absolument pas significatif, cependant la littérature
confirme les résultats décevants de l'examen cytologique (16, 17, 34). Enfin, la ponction percutanée
d'une tumeur maligne peut transformer une lésion
de stade I en stade II.
L'aspect brunâtre ou franchement hémorragique est
inquiétant. Ceci a été le cas chez nos 4 patients
ponctionnés. STEG (34) rapporte seulement 6 cas
de ponction hémorragique vraie sur 415 kystes
bénins poncti onnés. P o u r J A C K M A N N (15) une
ponction hémorragique vraie ne se rencontre que
dans 0,3 à 5% des kystes bénins. Si tous les auteurs
s'accordent à dire qu'une ponction hémorragique
est très évocatrice de cancer (12, 35), un liquide de
ponction clair ne permet pas d'éliminer une lésion
Cependant, pour STEG (34) : "Il apparaît peu vraisemblable, pour ne pas dire improbable, qu'un can-
7
cer à forme kystique ou bien qu'un cancer développé dans la paroi d'un kyste, ne s'accompagne ni
d'hémorragie intrakystique, ni de desquamation de
cellules néoplasiques, ni d'irrégularités pariétales".
en droit d'accorder à la néphrectomie partielle en
mat ière de cancer kystique du rei n. L'étude de
MA R S H A L L (21) montre que l'énucléati on d'une
telle tumeur laisse persister dans plus de 40% des
cas un résidu tumoral. De plus, dans 20% des cas
(24), il existe un cancer infraclinique associé sur le
même rein à distance du cancer connu. Notre attitude est donc de proposer une néphrectomie élargie
complémentaire.
LE DIAGNOSTIC PER-OPERATOIRE ET
SES CONSEQUENCES
Le diagnostic per-opératoire, même avec l'aide de
l'examen histologique extemporané, est parfois
aussi difficile que le diagnostic pré-opératoire.
Cette étude nous conduit à proposer un algorythme
décisionnel :
Certains éléments macroscopiques per-opéra t o i r e s
sont très évocateurs de malignité (31) :
- devant une suspicion échographique de tumeur
rénale d'aspect kystique (Figure 7),
- Richesse de la vascularisation périkystique et en
particulier de la vascularisation veineuse.
- au cours de l'exploration chirurgicale d'une telle
tumeur (Figure 8).
- Epaisseur et irrégularité de la paroi kystique.
Tout kyste bénin "compliqué" est a priori suspect.
Malgré les progrès de l'imagerie la chirurgie reste
souvent l'ultime recours. Il faut cependant savoir
que si le doute persiste après l'examen tomodensitométrique, l'exploration chirurgicale retrouvera un
cancer dans 40% des cas (19).
- Présence de calcifications.
- Liquide intrakystique sanglant, brunâtre ou noirâtre.
- Présence de bourgeons ou de végétations intrakystiques.
BIBLIOGRAPHIE
La biopsie extemporanée peut être prise en défaut
comme ce fut le cas dans une de nos observations.
Cette difficulté d'interprétation est due au fait que
la néoplasie peut siéger à un endroit limité sur la
paroi du kyste et que l 'analyse histologique est
gênée par la présence d'éléments nécrotiques. Le
diagnostic de certitude ne pourra donc pas être le
fait d'une biopsie extemporanée aveugle mais d'une
analyse de la totalité de la paroi kystique ou mieux
de la pièce de néphrectomie polaire si celle-ci est
réalisable (14).
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Le traitement du caancer du rein est la néphrectomie élargie. La conduite à tenir vis-à-vis d'un kyste
suspect est à l'image des hésitations diagnostiques.
En cas de doute, il paraît raisonnable (14, 30) de
pratiquer une néphrectomie partielle emportant la
base du kyste permettant ainsi un examen extemporané ou différé de la totalité de la tumeur. Si le
diagnostic histologique de cancer n'est connu qu'à
distance de l a néphrectomie partielle, l'attitude
ultérieure sera dictée par la confiance que l'on est
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Cystic renal cancers. Report of a series of 14 cases
The authors present 14 cases of renal cancers with a
cystic appearanc e raising pre and intraoperative dia gnostic difficulties. Although ultrasonography has beco me the first-line investigation, computed tomography is
now the most accurate diagnostic examination. The dia gnosis of complicated benign cyst must be proposed very
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cautiously and the persistence of doubtful images justi fies surgical exploration. In order to be reliable, frozen
section histological examination must include all of the
cystic tumour. Polar nephrectomy with frozen section
examination is therefore the recommended intraoperati ve diagnostic procedure in a case of suspicious cyst. The
curative treatment of these cancers is classical radical
nephrectomy.
diagnostiche prima e durante l'operazione. Se l'ecogra fia è divenuta l'esamo di prima intenzione la tomodensi tometria è attualmente l'esame diagnostico il più effi ciente. Bisogna essere prudenti quando si pone la dia gnosi di cisti benigna complicata e la persistenza di
ammagini dubbie deve condurre all'esplorazione chirur gica. L'esame istologico eseguito sul momento per esse re affidabile deve interessare la totalità del tumore cisti c o . L a ne froc tomia polare c on e same e seguito sul
momento è dunque l' attitudine diagnostic a da racco mandare durante l'operazione in caso di "cisti sospetta".
La cura di questi cancri è la classica nefrectomia estesa.
____________________
ZUSAMMENFASSUNG
Das zystische Nierenzellkarzinom.
____________________
Die Autoren berichten über 14 Fälle eines zystisc hen
Nierenzellkarzinoms, de ren Diagnose sow ohl prä- als
auch intraoperativ problematisch war. Auch wenn die
Sonographie die primäre Untersuchungsmethode dars tellt, ist die Computertomographie derzeit diagnostisch
wegweisend. Die Diagnose einer komplizierten, jedoch
benignen zystischen Raumforderung muss im fortgesetz te n Z weife lsfall notwe ndige rweise die c hiru rg i s c h e
Ex p l or at i on
zur
Fo l ge
ha b e n.
E in e
Schnellschnittuntersuchung muss dann k onsequenter we ise de n ge sam te n zy st isc he n T umor umfa sse r.
Demzufolge sollte im Falle einer suspekten zystisc hen
R a u m f o rd e ru ng i m N i e re n p o l b e r e i c h e in e
N i e re n t e i l re s e k ti o n e r f ol g e n. Al s k ur a ti v e
Behandlungsmassnahme eines Karzinoms gilt unverän dert die klassische erweiterte Nephrektomie.
____________________
RESUMEN
Cancer del rinon con aspecto de quiste : a proposito
de 14 casos.
Las dificultades diagnosticas pre y peroperativas de 14
cancer con aspecto de quiste son presentadas. Si la eco grafia es el prime ro exame n, la tomodensitometria es
actualmente el examen diagnostico el mas util. En caso
de diagnostico de quiste benigno complicato, la pruden cia es necesaria. La persistencia de imagenes dudosas
debe conducir a una exploracion quirurgica. El examen
histologico extemporaneo debe analizar la totalidad del
tumor quistico. Asi, la nefrectomia polar con e xamen
extemporaneo aparece como la mejor actitud en caso de
quiste sospechoso. El tratamiento curativo de estos can cer es la clasica nefrectomia ensanchada.
____________________
RIASSUNTO
Cancri del rene d'aspetto cistico.
Gli autori presentano 14 osservazioni di cancri del rene
d'aspetto cistic o che hanno presentato de lle difficoltà
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Légendes des figures
Figure 1. Echotomographie d'un cancer kystique du
rein montrant la pré sen ce de nom breux échos au
sein d'une image liquidienne.
Figure 2. Tomodensitométrie rénale droite réalisée
chez un patient hospitalisé en urgence pour un syn drome douloureux et fébrile de la fosse lombaire
droite. Le diagnostic initial a été celui de kyste bénin
infecté. Il s'agissait en fait d'un cancer kystique.
Figure 3. Tomodensitométrie rénale droite chez un
patient hospitalisé pour traumatisme de la fosse lom baire droite avec hématurie . Le diagn ostic initial a
été celui de "traumatisme" du kyste. Il s'agissait en
fait d'un cancer kystique.
Figure 4. Artériographie rénale gauche montrant un
syn drome de masse av ec hy pe rvascularisation . La
tomodensitométrie avait visualisé une petite végéta tion à l'intérieur d'un kyste parfaitement liquidien.
Figure 5. Artériographie rénale gauche montrant
une fine vascularisation de la paroi d'un kyste classé
comme bénin après l'exame n tomodensitométrique.
Ce kyste avait été à l'origine de deux épisodes héma turiques.
Figure 6. Kystographie montrant l'irrégularité de la
paroi d'un cancer à forme kystique.
Figure 7. Algorythm e dé cisionn el préopé ratoire
devant une tumeur kystique du rein.
Figure 8. Algorythm e dé cisionn el pe ropé ratoire
devant une tumeur kystique du rein.
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