Alcool et seniors

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Alcool et seniors
Bernard Gibour
Intersecteur d’Alcoologie du Hainaut
CH Saint-Amand-les-Eaux
A- Des spécificités liées à l’âge
B- Boire trop, c’est combien ?
C- Les modalités du mésusage
d’alcool chez le senior
D- Les conséquences du
mésusage d’alcool…
E- Les signes d’alerte d’un
mésusage d’alcool…
A- Des spécificités liées à l’âge
B- Boire trop, c’est combien ?
C- Les modalités du mésusage
d’alcool chez le senior
D- Les conséquences du mésusage
d’alcool…
E- Les signes d’alerte d’un
mésusage d’alcool…
A.1.
A.2.
A.3.
A.4.
des représentations ancrées
une vulnérabilité physiologique
des pathologies et des traitements
des évènements de vie déstabilisants
A- Des spécificités liées à l’âge
Les seniors d’aujourd’hui sont issus d’une
génération où la consommation d’alcool était
particulièrement valorisée et ancrée dans la vie
quotidienne et, cela, dès l’enfance…
Avec le modèle dominant d’une consommation
« alimentaire »
A.1. des représentations ancrées
A.1. des représentations ancrées
Avec l’âge, la quantité d’eau dans le corps diminue
(diminution de la masse musculaire)
diminution de
l’espace de diffusion de l’alcool
En vieillissant, les cellules hépatiques, responsables de la
dégradation de 90% de l’alcool consommé, fonctionnent
plus lentement
ralentissement de l’élimination
À quantité égale d’alcool consommé, l’alcoolémie est plus
élevée chez le senior et sa décroissance est plus longue
Les effets de la consommation sur le
comportement sont plus rapides, plus prononcés
et durent plus longtemps
A.2. Une vulnérabilité physiologique
L’état de santé de la personne âgée influence
directement sa tolérance à l’alcool : les effets de
l’alcool s’ajoutent à un équilibre devenu
précaire et à une mobilité qui se réduit
Alcool majorant les troubles? Alcool
responsable des troubles?
La personne âgée, fréquemment polymédiquée,
présente un risque accru d’ interactions
alcool/médicaments
A.3. des pathologies et des traitements
Passage à la retraite,
Eloignement des enfants,
Isolement social,
Maladie invalidante et/ou douloureuse,
Affaiblissement des capacités,
Présence au domicile d’un conjoint invalide,
Décès de proches ( conjoint et/ou amis),
Intégration d’une maison de retraite…
…sont des évènements qui sont intimement liés à
l’avancée en âge et qui constituent des « ruptures »
par rapport à l’état antérieur
A.4.
des évènements de vie déstabilisants
Ces ruptures, a fortiori si elles se cumulent, sont
génératrices de mal-être existentiel et de
souffrance psychique (ennui, anxiété,
fléchissement de l’humeur, troubles du
sommeil…)
Ce mal-être peut facilement conduire la personne
âgée à augmenter sa consommation d’alcool, à la
recherche d’effets apaisants et relaxants
Alcool = « béquille », « refuge », tranquillisant
« facile » … pour faire face (ou se soustraire
momentanément) à une réalité devenue trop
pesante…
A.4.
des évènements de vie déstabilisants
Représentations fortement ancrées,
physiologie modifiée, pathologies
associées et traitements, évènements de
vie vécus douloureusement…
…sont autant de facteurs qui, pour peu
qu’ils soient combinés, font du senior une
personne hautement vulnérable aux effets
de l’alcool et à ses possibilités de
mésusage
A.1. + A.2. + A.3 + A.4 = risque
A- Des spécificités liées à l’âge
B- Boire trop, c’est combien ?
C- Les modalités du mésusage
d’alcool chez le senior
D- Les conséquences du mésusage
d’alcool…
E- Les signes d’alerte d’un
mésusage d’alcool…
B.1. en situation ordinaire, chez l’adulte
« sain »
B.2. chez la personne âgée
B- Boire trop, c’est combien?
Il n’existe pas de frontière précise entre une
consommation
à
risque
faible
et
une
consommation excessive ; néanmoins l’OMS
donne un certain nombre de repères pour que la
consommation d’alcool demeure « anodine »
B.1.En situation ordinaire, chez l’adulte sain
L’Oms conseille:
Pour l’usage régulier, de ne pas dépasser :
◦ 3 verres standard / jour pour un
◦ 2 verres standard / jour pour une
Pour l’usage ponctuel, de ne pas dépasser 4
verres standard par occasion
Et de respecter au moins un jour par semaine
sans alcool
B.1.En situation ordinaire, chez l’adulte sain
Ces seuils sont à réduire en cas de:
•
Vulnérabilité individuelle (enfants, adolescents,
personnes âgées, maladie…)
•
Situations spécifiques (conduite automobile, tâches
demandant une parfaite maîtrise psychomotrice et/ou
l’exercice de responsabilités, prise de médicaments…)
Certaines situations nécessitent même un non-usage
strict : c’est le cas de la grossesse, par exemple.
Plus on s’écarte de ces limites, plus les risques sont
importants…
B.1.En situation ordinaire, chez l’adulte sain
Compte tenu des facteurs de vulnérabilité liés à
l’âge, il est conseillé :
Après 60-65 ans de réduire la consommation d’alcool
en-deçà des préconisations valables pour l’adulte :
◦ Pas plus de 2 verres/jour pour un homme
◦ Pas plus de 1 verre/jour pour une femme
◦ Pas plus de 3 verres en une seule occasion
Après 80-90 ans ou chez le sujet âgé malade:
moins de 1 verre par jour ? Voire 0 ??
B.2. Chez la personne âgée
A- Des spécificités liées à l’âge
B- Boire trop, c’est combien ?
C- Les modalités du mésusage
d’alcool chez le senior
D- Les conséquences du mésusage
d’alcool…
E- Les signes d’alerte d’un
mésusage d’alcool…
C.1. consommation d’alcool et avancée en
âge
C.2. modalités du mésusage selon
l’ancienneté des troubles
C.3. modalités du mésusage selon
l’intensité du trouble
C- Les modalités du mésusage
d’alcool chez le senior
On constate habituellement:
une diminution globale des quantités d’alcool
consommées
une augmentation du nombre de non-consommateurs
(de 10 à 40 % des personnes âgées)
un choix des boissons assez spécifique : vin et bières
surtout ; moins de spiritueux
Mais aussi :
une augmentation du nombre de consommateurs
réguliers d’alcool (>20 % des personnes âgées)
C.1.consommation d’alcool et avancée
en âge
Chez les personnes âgées, on distingue :
Les mésusages à début précoce :
pérennisation de difficultés qui existaient avant l’avancée
en âge ; personnes qui ont souvent été en lien avec le
dispositif de soins en alcoologie, qui ont parfois vécu des
périodes plus ou moins longues d’abstinence, mais dont la
consommation chronique et excessive d’alcool a souvent
fragilisé l’état de santé.
Ce type de mésusage concernerait 2/3 des cas rencontrés
C.2. modalités du mésusage selon
l’ancienneté des troubles
Les mésusages à début tardif :
Il s’agit le plus souvent de mésusages « réactifs »,
consistant en une recherche répétée d’effets
soulageants, avec l’attente de franchir plus facilement
(ou de s’abstraire de) la situation nouvelle induite par la
sénescence (avec son lot fréquent de pertes…)
Ce type de consommation d’alcool est souvent caché à
l’entourage, restant longtemps « silencieux »(sans
ivresse, sans trouble manifeste du comportement, au
début du moins…)
Ce type de mésusage concernerait 1/3 des cas.
C.2. modalités du mésusage selon
l’ancienneté des troubles
On distingue habituellement:
L’usage à risque : toute consommation d’alcool
supérieure aux seuils recommandés de sécurité mais qui
n’a pas encore entraîné de dommages
L’usage nocif ou abus
: toute consommation
supérieure aux seuils de l’OMS, ayant déjà entraîné au
moins un dommage (d’ordre médical, psychologique,
relationnel, social..), sans qu’il y ait de dépendance ;
Après 65 ans, ce type de mésusage concernerait 13% des
hommes et 8% des femmes (?, car très peu d’études
épidémiologiques…)
C.3. modalités du mésusage selon
l’intensité des troubles
La dépendance : elle se caractérise par :
◦ Perte de la maîtrise des consommations :
La consommation s’impose à la personne et devient une préoccupation
centrale dans la vie quotidienne du sujet (craving)
◦ Installation progressive à l’insu de la personne :
les plaisirs liés à la consommation s’estompent ; le recours à
l’alcool devient une solution auto-thérapeutique récurrente
◦ Tolérance à l’alcool :
nécessité d’augmenter progressivement les doses d’alcool pour
continuer d’obtenir les mêmes effets
◦ Apparition possible de symptômes psychologiques et/ou physiques à
l'arrêt de la consommation (syndrome de sevrage)
◦ Retour à une consommation modérée très difficile, voire impossible
C.3. modalités du mésusage selon
l’intensité des troubles
Il est difficile d’estimer précisément la prévalence
de la dépendance chez les personnes âgées,
d’autant qu’avec l’avancée en âge la
symptomatologie est souvent moins bruyante
(moins de symptômes physiques de manque,
moins d’accidents de sevrage…)
Selon les rares études épidémiologiques, on
retrouverait, après 65 ans, 1 à 2% des hommes
concernés et 0,5 % des femmes : c’est
certainement largement sous-estimé…
C.3. modalités du mésusage selon
l’intensité des troubles
A- Des spécificités liées à l’âge
B- Boire trop, c’est combien ?
C- Les modalités du mésusage
d’alcool chez le senior
D- Les conséquences du
mésusage d’alcool…
E- Les signes d’alerte d’un
mésusage d’alcool…
D.1.
D.2.
D.3.
D.4.
D.5.
D.6.
alcool
alcool
alcool
alcool
alcool
alcool
et
et
et
et
et
et
chutes
troubles cognitifs
sommeil
dépression
santé
médicaments
D- Les conséquences du mésusage
d’alcool chez le senior
Après 60 ans, le mésusage d’alcool en
service d’urgence se présente par :
◦ Une intoxication alcoolique aigüe : 48 %
◦ Un syndrome de sevrage alcoolique : 22 %
◦ Un trouble de l’humeur : 15 %
Le symptôme d’ appel est :
Une chute : 42 %
Un tableau confusionnel : 14 %
Onen SH. Et Al. Alcohol abuse and dependance in elderly
emergency ; Arch. Gerontol. Geriatr. 2005
Les chutes représentent le principal motif d’hospitalisation
en urgence pour raison traumatique chez les personnes
âgées.
Les études montrent la plus grande fréquence de ces
chutes chez les femmes et confirment le poids de la
consommation d’alcool sur ce risque traumatique. Le risque
est d’autant plus important que le patient âgé a tendance
à associer des tranquillisants à l’alcool.
Chaque bilan de chute devrait poser la question de
l’alcool ; au moindre doute, l’éthylométrie peut être
utile pour amorcer le dialogue…
D.1. Alcool et chutes
L’alcool est neurotoxique (plutôt que neuroprotecteur comme
on l’entend quelquefois..)
Il est source de troubles cognitifs autonomes (syndromes de
Korsakov et de Gayet-Wernicke), longtemps réversibles si un
sevrage complet peut être obtenu mais pouvant également
conduire à un tableau de démence complète
Il est aussi inducteur d’aggravation cognitive ou de troubles
du comportement chez les personnes présentant une maladie
d’Alzheimer ou apparentée
Les troubles de mémoire débutants
représentent une forte incitation à réduire les
consommations, voire à entreprendre un sevrage
D.2. Alcool et troubles cognitifs
L’alcool est très souvent utilisé pour faciliter le
sommeil…
Or, il est à l’origine d’une déstructuration du
sommeil:
◦
◦
◦
◦
il
il
il
il
facilite l’endormissement mais…
entraîne une réduction de la durée du sommeil profond
provoque des réveils fréquents et précoces
favorise les ronflements…
L’absence de prise en compte de difficultés de
sommeil peut favoriser le renforcement des
pratiques d’alcoolisation chez la personne âgée
D.3. Alcool et sommeil
Les relations entre abus d’alcool et dépression sont
complexes:
◦ En cas de mal-être, l’alcool agit dans un premier temps
comme un euphorisant, induisant de brefs moments de
bonne humeur
◦ À moyen terme, la répétition de sa consommation est au
contraire « dépressogène », entraînant désintérêt, tristesse,
irritabilité, troubles du sommeil et de l’appétit…
Chez le sujet âgé, les symptômes dépressifs sont
difficiles à différencier des plaintes qui peuvent
exister à cet âge-là : troubles de la mémoire et de la
concentration, douleurs, fatigue, comportement agressif ou,
au contraire, attitude régressives…
D.4. Alcool et dépression
Les deux troubles -dépression et mésusage d’alcooltendent à s’aggraver mutuellement
L’alcool, par ses propriétés désinhibitrices, peut
faciliter un passage à l’acte suicidaire
◦ Sur 10 000 suicides répertoriés chaque année, près d’1/3
concernent les + de 65 ans (en particulier les hommes
après 85 ans)
Quand une dépression est associée à un mésusage
d’alcool, il est important de prendre d’abord en
compte le problème alcool afin d’éviter au maximum
l’activation du processus suicidaire; les
antidépresseurs ne seront indiqués que
secondairement.
D.4. Alcool et dépression
Bénéfices potentiels à consommer de l’alcool ?
◦ Chez l’homme de plus de 50 ans, la consommation de
vin en petite quantité (1 verre/jour) serait associée à des
effets bénéfiques au niveau coronarien, pour une à deux
décennies (valide ni avant 50 ans, ni après 70 ans)
Risques : alcoolopathies et/ou dépendance
◦ L’alcool, même en petites quantités, est impliqué dans
de nombreuses maladies (HTA, maladies du foie, certains
cancers…); il diminue la résistance aux maladies
infectieuses, rend plus difficiles les interventions
chirurgicales…
D.5. alcool et santé
Il n’y a aucune légitimité à encourager
une personne âgée à boire de l’alcool pour
réduire son risque de maladie cardiaque…
Maintenir une activité physique régulière, ne
pas fumer, avoir une alimentation équilibrée…
sont des atouts bien plus efficaces pour rester en
forme !!
D.5. alcool et santé
L’alcool entre en interaction avec bon nombre de
médicaments et en modifie les effets.
L’alcool peut :
◦ Diminuer ou amplifier l’effet du médicament (antihypertenseur,
anticoagulant, anesthésique, antidiabétique, antiépileptique…)
◦ Retarder l’élimination du médicament et contribuer au
développement de lésions hépatiques (paracétamol…)
◦ Augmenter les effets secondaires du médicament (antiinflammatoire, aspirine…)
◦ Provoquer des troubles comme des nausées, des
vomissements, des céphalées ( avec les antibiotiques…)
◦ Augmenter l’effet sédatif d’un médicament et provoquer une
baisse de vigilance favorisant le risque de chute (tranquillisant,
somnifère, antidépresseur, antihistaminique, sirop antitussif ou
antalgique codéiné…)
D.6. alcool et médicaments
Les personnes âgées consomment d’avantage de
médicaments que les personnes plus jeunes.
Avec l’avancée en âge, les processus
d’élimination sont plus lents, aussi bien pour
l’alcool que pour les médicaments.
Les personnes âgées présentent un
risque accru d’interaction alcoolmédicament
D.6. alcool et médicaments
A- Des spécificités liées à l’âge
B- Boire trop, c’est combien ?
C- Les modalités du mésusage
d’alcool chez le senior
D- Les conséquences du mésusage
d’alcool…
E- Les signes d’alerte d’un
mésusage d’alcool…
Le repérage du mésusage d’alcool chez la
personne âgée n’est pas facile…
◦ Les quantités consommées sont souvent
trompeuses car plus modérées que chez les plus
jeunes
◦ La personne âgée (et/ou son entourage) méconnaît
souvent les risques de la consommation liée à
l’avancée en âge ou minimise les consommations
par peur, par honte…
◦ Il est parfois compliqué de différencier les effets
toxiques de l’alcool des troubles habituellement liés
à l’avancée en âge
E- Les signes d’alerte d’un mésusage d’alcool
C’est plutôt la multiplicité des signes d’alerte
chez la personne âgée qui doit faire évoquer la
possibilité d’un mésusage d’alcool :
◦
◦
◦
◦
◦
◦
◦
◦
◦
Troubles du caractère, irritabilité, agressivité
Tendance à l’isolement
Difficultés dans la gestion de la vie quotidienne
Troubles de l’humeur, anxiété, troubles du sommeil
Troubles mnésiques
Confusion mentale
Troubles du comportement, incurie, dénutrition
Chutes répétées, accidents , fractures
Réaction inattendue à un médicament (psychotrope)…
« la puce à l’oreille »
E- Les signes d’alerte d’un mésusage d’alcool
L’utilisation des marqueurs biologiques (GGT,
VGM, CDT…) ne constitue pas un moyen fiable
pour repérer un mésusage d’alcool chez la
personne âgée : les problèmes de santé liés à l’âge et
les traitements médicamenteux viennent souvent perturber
l’analyse des résultats
La parole reste le meilleur vecteur,
en veillant à un questionnement ouvert et sans jugement…
E- Les signes d’alerte d’un mésusage d’alcool
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