NOTE DE PRESENTATION DU CARACTERE SCIENTIFIQUE DE LA MANIFESTATION Jeudi 4 octobre 2012 Hôtel Fumé – Amphithéâtre Pierre Bourdieu Journée d’études LES USAGES DU TRAVAIL DE PIERRE BOURDIEU (1930-2002) EN SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES En décembre 2011, le conseil de l’UFR Sciences Humaines et Arts de l’Université de Poitiers a décidé d’attribuer des noms à différents lieux du site de l’Hôtel Fumé. A cette occasion, le nom de Pierre Bourdieu a été attribué à l’amphithéâtre 172. Pour inaugurer cet amphithéâtre, le département de sociologie propose d’organiser une journée d’études destinée à l’ensemble des personnels et étudiants de l’UFR SHA. Cette journée, intitulée « Les usages du travail de Pierre Bourdieu en sciences humaines et sociales » aura lieu le jeudi 4 octobre. Pierre Bourdieu Sociologue, né en 1930 à Denguin (Pyrénées-Atlantiques), mort en 2002 à Paris, Pierre Bourdieu, ancien élève de l’École normale supérieure, est agrégé de philosophie. D’abord maître de conférences à l’Université de Lille (1961-1964) puis directeur d’études à la VIe section de l’École pratique des hautes études (1964-2001) et professeur-titulaire de la chaire de sociologie au Collège de France (1981-2001), il a fondé les revues Actes de la recherche en sciences sociales et Liber. Il fut également directeur de collection aux Éditions de Minuit et au Seuil. Lauréat de la médaille d’or du CNRS en 1993, il est l’auteur d'une théorie sociologique critique dont la force empirique et la portée scientifique ont fait de lui le sociologue le plus cité et discuté au monde. Il est également, avec Michel Foucault, une des grandes figures de l’intellectuel engagé au XXème siècle. Cette journée d’études s’inscrit dans une double actualité : l’inauguration de l’amphithéâtre 172 de l’UFR SHA de l’Université de Poitiers – premier amphithéâtre de France ainsi dénommé, et le 10ème anniversaire de la mort de Pierre Bourdieu. Après les multiples hommages qui lui ont été rendus cette année, tant dans le monde académique que dans la presse et l’édition, les enseignants-chercheurs du département de sociologie de l’Université de Poitiers ont jugé important de proposer un éclairage à la fois original et pluridisciplinaire sur son travail intellectuel. 1 Une journée d’études pluridisciplinaire Cette journée d’études accompagne l’inauguration de l’amphithéâtre Pierre Bourdieu (ancien amphithéâtre 172), qui sera celui de l’UFR Sciences Humaines et Arts. C’est pourquoi elle est pensée dans un esprit pluridisciplinaire, avec des intervenants issus non seulement des différents domaines de la sociologie, mais aussi de l’histoire, de la philosophie, de l’anthropologie et de la science politique. Le premier objectif de la journée est donc de revenir sur les usages du travail de Pierre Bourdieu dans des disciplines variées. La présence de chercheurs d’horizons différents est de nature à intéresser un public élargi, tant du côté des personnels de l’UFR que du côté des étudiants. En outre, ce parti-pris est un moyen de rendre justice à l’étendue des appropriations scientifiques de l’œuvre de Pierre Bourdieu et d’encourager le « travail » et le « voyage » des concepts et des méthodes au-delà des frontières disciplinaires dans lesquels ils ont été constitués. En somme, cette journée d’études est conçue comme une rencontre scientifique ouverte et stimulante, loin des hommages académiques à visée strictement exégétique. Le deuxième objectif de cette journée est directement lié au premier dans la mesure où il consiste à échapper à une présentation figée de l’œuvre de Pierre Bourdieu pour en proposer, à l’inverse, une approche dynamique, qui laisse une place importante aux aspects concrets et vivants de son travail. Un partenariat avec la Fondation Pierre Bourdieu permettra ainsi d’exposer des photographies inédites du sociologue « en action ». Il s’agira également de projeter des vidéos et de recueillir des témoignages auprès de chercheurs qui l’ont bien connu et ont travaillé à ses côtés. « Faire vivre » le travail de Pierre Bourdieu Loin d’épouser les formes convenues de la cérémonie inaugurale ou de l’hommage pontifiant, cette journée se présente comme une invitation à « faire vivre » le travail de Pierre Bourdieu en réinvestissant sa production théorique et ses pistes de recherche, mais aussi en réfléchissant aux conditions d’une science engagée. Une telle ambition sera servie par un programme à la fois exigeant et accessible, assuré par des intervenants de renom. Après la présentation de la journée par le Président de l’université, il s’agira de présenter des éléments biographiques, des photographies et des extraits filmés de Pierre Bourdieu, afin de le rendre accessible à celles et ceux qui ne le connaissent pas encore. Sociologue, directeur de recherche émérite au CNRS (au Centre Européen de Sociologie et de Science Politique – Paris 1), Gérard Mauger présentera ensuite certaines lignes de force de la pensée de Pierre Bourdieu en la rapportant à la trajectoire sociale de cet intellectuel de première génération, fils d’un employé des postes, élevé dans un village du Béarn et devenu professeur au Collège de France. Gérard Mauger, dont les recherches sur la jeunesse, la déviance, les classes populaires et les pratiques culturelles1 sont marquées par la rencontre et 1 Parmi sa longue bibliographie, on peut retenir Les bandes, le milieu et la bohème populaire. Études de sociologie de la déviance des jeunes des classes populaires (Belin, 2006), Histoires de lecteurs (Nathan, 1999) ou Rencontres avec Pierre Bourdieu (Le Croquant, 2005). 2 le travail avec Pierre Bourdieu, appliquera ainsi à ce dernier l’objectivation sociologique qu’il pratiquait dans l’analyse des productions intellectuelles et du monde académique2. Après un moment consacré à la discussion entre les intervenants et le public, il reviendra à Bertrand Geay d’aborder l’un des thèmes majeurs du travail sociologique de Pierre Bourdieu : le système scolaire. Professeur en sciences de l’éducation à l’Université d’Amiens, membre du CURAPP (Centre Universitaire de Recherches sur l’Action Publique et le Politique), il a consacré l’essentiel de ses recherches au métier d’instituteur3, au syndicalisme dans les différents secteurs de l’enseignement public4, ainsi qu’à l’action collective dans les universités5. Pour avoir mené sa thèse sous la direction de Pierre Bourdieu , Bertrand Geay est particulièrement au faîte de ses manières de travailler et de l’empreinte qu’il a laissé dans le domaine de la sociologie de l’éducation. Il reviendra ici sur les usages de l’approche bourdieusienne dans l’analyse des rapports de classes sociales à l’école. Pour clore la matinée, c’est la philosophie, discipline d’origine de Pierre Bourdieu, qui sera représentée, à travers la communication de Bruno Ambroise, chargé de recherche au CURAPP. Ce spécialiste de philosophie du langage et de la connaissance, auteur d’ouvrages sur l’efficacité discursive et performative de la parole6 et d’articles consacrés à l’influence de la théorie bourdieusienne sur la pensée philosophique contemporaine7, soulèvera la question du « Bourdieu philosophe ». En partant d’une réflexion sur les emprunts des philosophes à certaines problématiques déterminantes – qui touchent notamment à l’action, à la règle, au pouvoir et à l’efficacité symbolique, à la posture scolastique – il montrera ce que l’œuvre de Bourdieu permet de penser et dans quelle mesure elle est riche de prolongements en philosophie du langage et de la connaissance. Après une nouvelle discussion collective, les intervenants et organisateurs de la journée d’études se retrouveront autour d’un repas au restaurant administratif de l’UFR. L’après-midi commencera par la communication de Tassadit Yacine, anthropologue, maître de conférences à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, membre du Laboratoire d’anthropologie sociale (LAS), qui évoquera les liens entre le travail de Pierre Bourdieu et les études anthropologiques contemporaines. Cette spécialiste du monde berbère, auteur de nombreux ouvrages8, dirige la revue d'études berbères Awal qu'elle a cofondée en 1985 avec l'anthropologue algérien Mouloud Mammeri et le soutien de Pierre Bourdieu. Tout en rappelant l’importance des recherches de ce dernier en Algérie, elle montrera leurs incidences sur le travail des anthropologues contemporains. 2 Notamment dans Homo Academicus (Minuit, 1984) et dans L’Ontologie politique de Martin Heidegger (Minuit, 1988). 3 Bertrand Geay, Profession : instituteur, Paris, Liber, 1999. 4 Voir notamment Bertrand Geay, Le syndicalisme enseignant, Paris, La Découverte, collection « Repères » 2006. 5 Bertrand Geay, « Le « tous ensemble » des enseignants », in Sophie Béroud, René Mouriaux, L’année sociale, Syllepse, 2004. 6 Bruno Ambroise, Qu'est-ce qu'un acte de parole ?, Paris, Vrin, coll. « Chemins philosophiques » ; et avec Sandra Laugier, Textes-clés de philosophie du langage, Paris, Vrin, 2008 (T.1) et 2011 (T.2). 7 Bruno Ambroise, « Bouveresse et Bourdieu, critiques de la position scolastique », Agone, n°48, avril 2012. 8 Tassadit Yacine, Si tu m'aimes, guéris moi : études d'ethnologie des affects en Kabylie, Paris, Maison des sciences de l'homme, 2006. 3 Nous avons ensuite souhaité accorder une place privilégiée à l’histoire, car l’œuvre de Bourdieu est traversée par un souci constant d’historicisation des faits sociaux9. Professeur de lycée, docteur en histoire (Université de Lyon II, 2011, dir. : Olivier Christin) et membre du LARHRA (CNRS-UMR 5190), Boris Klein s’intéressera au dialogue entre Pierre Bourdieu et les historiens. Ses recherches portent sur la transmission des savoirs au sein des universités allemandes au XVIIe siècle. Il a notamment publié « Les finalités de l’enseignement de l’histoire : du lycée français au Gymnasium hessois », Le Cartable de Clio, n° 3, 2003. Les interventions de Tassadit Yacine et de Boris Klein seront suivies d’un débat avec le public et d’une pause. Ensuite, pour lancer la dernière séquence de la journée d’études, nous avons prévu de projeter des photographies et des extraits de vidéos montrant un autre aspect de la personnalité intellectuelle de Pierre Bourdieu : c’est en effet le sociologue engagé qui sera mis à l’honneur à travers ses différentes actions politiques, depuis sa prise de position pour la candidature Coluche à l’élection présidentielle de 1981 jusqu’à ses interventions contre les effets du libéralisme et les « nouveaux maîtres du monde » ou son soutien aux grévistes du mouvement social de novembre-décembre 1995. Le thème des relations entre Pierre Bourdieu et le champ politique sera approfondi par deux chercheurs de générations différentes : Boris Gobille, maître de conférences en science politique à l’ENS-LSH de Lyon et membre du laboratoire Triangle, et Bernard Pudal, professeur de science politique à l’Université Paris Ouest Nanterre La Défense et membre du CSU (Culture et sociétés urbaines). Le premier est spécialisé en sociologie de l’engagement, des crises politiques et du champ intellectuel. Sa thèse, consacrée à la mobilisation des écrivains en Mai 6810, a été réalisée sous la direction de Bernard Pudal, dont les travaux portent notamment sur l’histoire sociale du communisme français11 et de la dimension culturelle des trajectoires militantes12. Ensemble, ces deux spécialistes des rapports entre savoir et politique croiseront leurs regards sur les appropriations différenciées du travail de Pierre Bourdieu en science politique, et plus particulièrement en sociologie des engagements politiques et intellectuels. Enfin, la dernière communication orale sera assurée par un tandem de sociologues réputés pour leur travail sur les formes contemporaines de domination sociale : Stéphane Beaud, professeur à l’Ecole Normale Supérieure et directeur de l’équipe de recherche Enquêtes, Terrains, Théorie du Centre Maurice Halbwachs, et Michel Pialoux, aujourd’hui retraité, membre du Centre européen de sociologie et de science politique de la Sorbonne, du CNRS et de l'EHESS. Après avoir travaillé avec Pierre Bourdieu dans les années 1980-90 et réalisé, notamment, plusieurs entretiens dans l’ouvrage collectif La misère du monde13, ils ont publié ensemble une enquête magistrale sur le devenir du monde ouvrier14 et, plus récemment, un 9 Souci particulièrement manifeste dans Les règles de l’art, Genèse et structure du champ littéraire (Le Seuil, 1992). 10 Pour un aperçu : Boris Gobille, « Les mobilisations de l’avant-garde littéraire française en mai 1968. Capital politique, capital littéraire et conjoncture de crise », Actes de la Recherche en Sciences Sociales, n°158, dossier « Le capital militant (2) : crises politiques et reconversion : Mai 68 », juin 2005, p. 30-53. 11 Bernard Pudal, Prendre parti. Pour une sociologie historique du PCF, Paris, Presses de la FNSP, 1989 ; et Un monde défait. Les communistes français de 1956 à nos jours, Bellecombe en Bauges, Editions du Croquant, 2009. 12 Gérard Mauger, Claude Poliak, Bernard Pudal (dir.), Histoires de lecteurs (Nathan, 1999) 13 Pierre Bourdieu (dir.), La misère du monde, Paris, Seuil, 1993. 14 Stéphane Beaud, Michel Pialoux, Retour sur la condition ouvrière : enquête aux usines Peugeot de SochauxMontbéliard, Paris, Fayard, 1999. 4 ouvrage sur les classes populaires urbaines15. Dans le cadre de cette journée, ils reviendront sur leur collaboration avec Pierre Bourdieu et sur son héritage théorique et méthodologique dans le domaine de l’analyse des classes populaires, et plus particulièrement du monde usinier. Après une dernière discussion avec la salle, les organisateurs diront un mot de conclusion et les principaux représentants de l’UFR procéderont à l’inauguration officielle de l’amphithéâtre Pierre Bourdieu, à l’entrée duquel sera installée une plaque résumant la biographie du sociologue. Les intervenants et les membres du public seront enfin conviés à un cocktail apéritif. Cette journée d’études sera par la suite valorisée par une publication collective, pour laquelle plusieurs contacts prometteurs ont d’ores et déjà été noués avec la revue Actes de la Recherche en Sciences Sociales (Le Seuil) et avec les éditions Raisons d’agir pour la collection « Cours et Travaux ». Comité d’organisation : Catherine Leclercq maître de conférences au département de sociologie, membre du GRESCO (EA 3815). [email protected] Wenceslas Lizé, maître de conférences au département de sociologie, membre du GRESCO (EA 3815). [email protected] Hélène Stevens, maître de conférences et responsable du département de sociologie, membre du GRESCO (EA 3815). [email protected] 15 Stéphane Beaud, Michel Pialoux, Violences urbaines, violence sociale : genèse des nouvelles classes dangereuses, Paris, Fayard, 2003. 5 Programme de la journée d’études 9h00 Accueil des participants 9h15 Ouverture de la journée par Yves Jean, Président de l’Université de Poitiers 9h30 Catherine Leclercq, Wenceslas Lizé, Hélène Stevens (Université de Poitiers, GRESCO) : Introduction à la Journée d’études 10h00 Gérard Mauger (CESSP, EHESS) : Le style de pensée de Pierre Bourdieu 10h30 Questions et débat 11h00 Bertrand Geay (Université d’Amiens, CURAPP-CNRS) : Faut-il casser les amphithéâtres ? Quelques remarques sociologiques et pédagogiques à la lecture de Pierre Bourdieu 11h30 extrait filmé du dialogue entre Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron 11h45 Bruno Ambroise (Université d’Amiens, CURAPP-CNRS) : Bourdieu en philosophie : quels usages philosophiques du travail de P. Bourdieu ? 12h15 Questions et débat 12h30-14h : Pause déjeuner 14h00 Tassadit Yacine (LAS-EHESS) : l'anthropologie de Pierre Bourdieu 14h30 Boris Klein (Université Lumière Lyon 2): Des raisons pratiques pour un usage de la pensée de P. Bourdieu en histoire. 15h00 Questions et débat 15h15 Pause 15h30 Bourdieu engagé : photos et extraits filmés 15h45 Bernard Pudal (Paris X Nanterre, CSU-CNRS) et Boris Gobille (ENS Lyon, Triangle) : Faire de la science politique avec la sociologie de Pierre Bourdieu : regards croisés 16h15 Stéphane Beaud (CMH, ENS-EHESS), Michel Pialoux (CESSPP-EHESS) : Faire du terrain à Peugeot-Sochaux avec Bourdieu en tête 16h45 Questions et débat 17h00 Conclusion de la journée 17h15 Inauguration de l’amphithéâtre Frédéric Chauvaud, Doyen de l’UFR SHA / cocktail La dimension symbolique dans 6