Comment préparer le volet économique des contrats de ville ?

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 Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? Les enseignements des rencontres par cercles d’acteurs économiques locaux organisées par Villes au Carré Auteure : Marie Bizeray, chargée de missions pour Villes au Carré Directrice de publication : Cécile Dublanche, directrice de Villes au Carré Ce document est sous licence Creative Commons. Vous êtes libres de partager (reproduire, distribuer et communiquer) cet ouvrage selon les conditions suivantes :  Attribution — Vous devez attribuer l’oeuvre à son auteur en citant son nom.  Pas d’utilisation commerciale — Vous n’avez pas le droit d’utiliser cette oeuvre à des fins commerciales.  Pas de travaux dérivés — Vous n’avez pas le droit de modifier, de transformer ou d’adapter cette œuvre. Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 2 Avant propos Villes au Carré s’est engagé pour trois ans dans la déclinaison locale d’une mission nationale en faveur du développement économique urbain (DEU) lancée par la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) et le Secrétariat Général du Comité Interministériel des Villes (SG‐CIV), devenu CGET en 2012. Le Centre de ressources entend ainsi contribuer à renouveler le regard sur le développement économique dans et pour les quartiers et proposer de nouvelles occasions de croisement entre les acteurs de la politique de la ville et ceux du développement économique à travers le contrat de ville. Dans le cadre du projet développement économique urbain, en 2014, le centre de ressources a souhaité contribuer au repérage de leviers d’actions qui favorisent les connexions entre la politique de la ville et le développement économique de droit commun. Pour cela, quatre rencontres par « cercles d’acteurs du développement économique » des régions Centre et Poitou‐Charentes ont été organisées1 : ‐ le cercle de l’Économie Sociale et Solidaire (23 avril 2014) ‐ le cercle de la création d’activité (24 avril 2014) ‐ le cercle de l’économie marchande et productive (20 juin 2014) ‐ le cercle de l’Insertion par l’Activité Économique (1er juillet 2014) L’objectif de ces rencontres était de faire émerger des pistes d’actions communes entre la politique de la ville et le développement économique. Ce document synthétise les enseignements tirés de ces rencontres par cercles d’acteurs et ne reflète que les points de vue des participants interrogés pour l’occasion. La première partie relate les points communs à chacun des cercles qui peuvent contribuer à améliorer l’efficacité des actions qui seront conduites dans le cadre du contrat de ville. La seconde revient les conclusions collectives des travaux par cercle qui sont à retenir dans l’élaboration des contrats de ville. Septembre 2014 1
En savoir plus sur la méthodologie des rencontres par cercles p4 Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 3 SOMMAIRE Méthodologie .......................................................................................................................................... 5
 Les cercles d’acteurs du développement économique ................................................... 5
 L’organisation des cercles : des temps de travail participatifs ........................................ 5
Partie 1 ‐ Les enseignements communs des 4 cercles pour la préparation du volet économique du contrat de ville ......................................................................................................................................... 6
I. Réinterroger ses représentations de « l’économique » ............................................................... 6
1. Abandonner les stéréotypes sur « le développement économique » .................................... 6
2. Associer les « agissants » aux contributeurs actifs du développement économique ............. 7
II. Valoriser la diversité de l’économie et l’ancrage territorial ........................................................ 7
1. Valoriser la diversité de l’économie locale.............................................................................. 7
2. Favoriser l’ancrage territorial .................................................................................................. 8
III. Renouveler ses pratiques professionnelles et ses partenariats ................................................. 9
1. Oser « Aller vers », une des clés de la réussite ....................................................................... 9
2. Adapter les actions en fonction des publics et des territoires .............................................. 10
3. Renouveler ses partenariats et organiser une gouvernance pro‐active ............................... 10
Partie 2 : Zoom sur les enseignements des cercles ............................................................................... 11
I. Le cercle de l’Économie Sociale et Solidaire (ESS) ...................................................................... 11
1. Les atouts d’un rapprochement avec la politique de la ville ................................................ 11
2. Les enjeux et les actions proposées ...................................................................................... 11
II. Le cercle de la création d’activité .............................................................................................. 12
1. Principales limites à la création d’activité par les habitants des quartiers ........................... 12
2. Pistes d’actions pour favoriser la création d’activité dans les quartiers ............................... 13
III. Le cercle de l’économie marchande et productive .................................................................. 14
1. Les points communs aux engagements des entreprises privées .......................................... 14
 Des engagements pérennes sous conditions ................................................................ 14
 Des actions cousues main pour transmettre les valeurs de l’entreprise ...................... 15
2. Les freins aux engagements des entreprises ........................................................................ 15
IV. Le cercle de l’Insertion par l’Activité Économique (IAE) .......................................................... 16
1. Répondre aux difficultés des publics en insertion ................................................................ 16
2. Valoriser l’IAE par une communication adaptée au territoire .............................................. 17
 Communiquer auprès des collectivités.......................................................................... 17
 Communiquer auprès des entreprises .......................................................................... 17
3. Les attendus de l’IAE dans les contrats de ville ..................................................................... 18
 Partager une vision commune de l’IAE .......................................................................... 18
 Encourager l’adoption des clauses sociales ................................................................... 18
 Contribution au contrat de ville et partenariat ............................................................. 18
CONCLUSIONS : Les clés de la réussite .................................................................................................. 19
 Des objectifs adaptés à chaque quartier, partagés et soutenus par les acteurs de l’économie locale ................................................................................................................. 19
 Un contrat de ville traitant de toutes les dimensions de l’économie ........................... 19
 Renouveler ses pratiques professionnelles dans la mise en œuvre du contrat de ville 20
Remerciements ..................................................................................................................................... 21
Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 4 Méthodologie Dans le cadre de la mission nationale en faveur du développement économique urbain (DEU), Villes au Carré a organisé en 2014 des temps de travail visant à proposer des pistes d’actions et des préconisations pour contribuer à l’élaboration des contrats de ville. Les cercles d’acteurs du développement économique Villes au Carré a fait le choix d’interroger quatre types d’acteurs du développement économique en région Centre et Poitou‐Charentes : ‐ De l’économie sociale et solidaire ‐ De la création d’activités ‐ De l’économie marchande et productive ‐ De l’Insertion par l’Activité Économique Cette division par cercle est arbitraire pour faciliter les travaux, mais ne reflète qu’un aspect de la réalité. En effet, les acteurs de la création peuvent relever de l’économie sociale et solidaire, des entreprises de l’ESS ou de l’IAE peuvent également appartenir à l’économie productive… Les participants à ces cercles sont des acteurs individuels/collectifs, des structures, des réseaux… dont les actions ont lieu en région Centre et Poitou‐Charentes. Villes au Carré a sollicité leur participation en fonction de relations ou partenariats préexistants, de connaissance de bonnes pratiques locales, d’un repérage d’acteurs réalisé pour l’occasion, de proposition par d’autres partenaires… Tous les acteurs du développement économique des deux régions n’ont pas été sollicités, les résultats des travaux présentent donc une vision parcellaire. L’organisation des cercles : des temps de travail participatifs Les sessions de travail se sont tenues d’avril à juillet 2014. Chaque cercle s’est réuni une demi‐
journée pour partager un temps de réflexions et de proposition en faveur du développement économique dans et pour les quartiers. Pour préparer ces rencontres, le centre de ressources s’est qualifié avec l’appui de la CCI du Cher à l’animation participative de réseaux (méthode brevetée de « mise en grappe »). Il s’agissait de pouvoir faire émerger des propositions d’actions, des leviers et des préconisations utiles à la préparation des futurs contrats de ville sur un temps de travail restreint. Ce document est la compilation des diverses réflexions et propositions qui ont émergé de ces temps de travail et ne reflète que les opinions exprimées par les participants (cf. Remerciements). Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 5 Partie 1 ‐ Les enseignements communs des 4 cercles pour la préparation du volet économique du contrat de ville I. Réinterroger ses représentations de « l’économique » 1. Abandonner les économique » stéréotypes sur « le développement Tous les cercles interrogés ont fait connaître leurs difficultés face aux représentations erronées que peuvent avoir et véhiculer les autres acteurs du développement économique sur leurs activités. Ces stéréotypes varient selon leur catégorie d’appartenance, par exemple : « toutes les structures d’aide à la création d’activité font la même chose », « l’ESS n’est pas de la vraie économie », « la production des SIAE est en deçà de la qualité requise », « les entreprises ne s’intéressent pas au territoire sur lequel elles sont », « la politique de la ville est éloignée des réalités économiques du territoire » Il est donc recommandé de « faire un pas de côté » pour que chaque cercle sorte de ses représentations et considère l’action de chacun pour ce qu’elle est réellement : une implication dans le développement économique du territoire différente et complémentaire de celle des autres. Quelques exemples :  L’IAE n’est pas seulement une charge pour la collectivité : o c’est également une manière d’éviter la dépense publique et d’investir dans l’économie locale, o les publics y acquièrent des compétences, une qualification transposable qui pourra être réinvestie dans l’économie locale, o les SIAE ont des savoir‐faire à valoriser auprès des collectivités et des entreprises privées, o l’IAE contribue à la dynamique de l’emploi sur le territoire en touchant et en qualifiant les publics qui en sont éloignés.  L’ESS est bien de l’économie réelle et de marché, pas seulement « l’économie du social » : o les biens et services produits peuvent être les mêmes que ceux fournis par le secteur économique marchand classique (commerces, garage, aide à domicile…), o les produits et services ont la même valeur marchande, seule diffère la répartition des bénéfices et le but d’utilité sociale de l’activité pratiquée par la structure, o l’ESS concerne autant les villes petites et moyennes que les grandes agglomérations (ex : 8,4 % des établissements employeurs relèvent de l’ESS sur le bassin de vie de Romorantin‐Lanthenay, 12,4 % de l’emploi salarié sur le bassin de Vierzon, source CRESS Centre).  Les entreprises privées sont intéressées au développement économique et social du territoire sur lequel elles assoient une partie de leurs activités (même si elles n’y sont pas implantées) : o elles ont intérêt à ce que le climat social de leur territoire d’implantation soit favorable pour assurer un cadre de travail serein au personnel, o derrière les entreprises, ce sont des individus qui véhiculent l’intérêt pour la cohésion sociale sur les territoires et s’investissent, o les entreprises ont un intérêt économique à porter une démarche sociétale de bonne qualité et sont prêtes à apporter leur contribution.  Les acteurs de proximité peuvent contribuer aux études de marché locales grâce à leur connaissance de certains aspects de l’économie du quartier (ex. : zone de chalandise) y compris de l’économie souterraine Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 6 Les enseignements communs des 4 cercles pour la préparation du volet économique du contrat de ville Pour abandonner ces stéréotypes, il est essentiel de faire évoluer localement la culture du développement économique sur un territoire en tant que « la création de valeur ajoutée sur un territoire donné ». Selon la démarche du Développement Économique Urbain, cette valeur ajoutée peut être économique et/ou sociale. La démarche de Développement Économique Urbain peut donc faire levier pour proposer une définition partagée et locale de l’économie dans tous les aspects et s’accorder sur des objectifs (économie marchande, non marchande, ESS, économie souterraine…). Le contrat de ville devient alors une opportunité pour permettre aux différents acteurs du développement économique et de la politique de la ville de se rencontrer et de sortir de leurs représentations pour engager des actions partagées et pertinentes. 2. Associer les « agissants » aux contributeurs actifs du développement économique Au‐delà des acteurs classiques du développement économique (entreprises, collectivités, chambres consulaires, Caisse des Dépôts…), il est nécessaire de prendre en compte d’autres acteurs dont l’activité et/ou la présence sur le territoire influent sur son développement économique. Leur implication et leur influence sont variables selon le territoire, leur champ d’action, l’économie locale… Parmi ces « agissants » citons par exemple :  les habitants : qui peuvent être tour à tour employés, clients, usagers, voire « nuisance » (en cas de délinquance par exemple)  les services des collectivités (mobilité, marchés publics, urbanisme, logement, formation) : sans être acteurs directs du développement économique, ils en sont largement contributeurs. Ex. : Ils facilitent les transports, proposent des marchés locaux, peuvent choisir de générer de la sous‐traitance ou aménagent des secteurs propices ou non au développement économique local…  les opérateurs présents sur les quartiers : les associations locales, les centres sociaux, les assistants sociaux, les médiateurs, les gardiens, les services publics de proximité… Ils travaillent constamment sur place et par leurs actions contribuent à la cohésion sociale sur le territoire. Ils servent de relais entre les habitants, les collectivités et les entreprises, et peuvent aider à une meilleure connaissance du territoire. « Le développement économique n’est pas seulement l’affaire des spécialistes, mais aussi de ceux qui agissent sur le territoire et notamment le quartier ». Il ne s’agit pas de les considérer comme des acteurs directs du développement économique, mais plutôt comme des contributeurs occasionnels dont l’avis, l’expertise d’usage et l’action sont pertinents à recueillir pour élaborer le contrat de ville. II. Valoriser la diversité de l’économie et l’ancrage territorial 1. Valoriser la diversité de l’économie locale Ce qui relève de l’économie apparaît sous différents aspects selon le secteur d’activité interrogé et la façon dont l’activité se déploie. Ainsi la notion peut être des plus restrictives (le développement économique au sens de développement exogène) ou des plus larges (incluant également l’économie non marchande). Au côté de l’économie marchande classique, l’ESS représente une partie importante de l’économie en région centre (10 % de l’emploi salarié) et en région Poitou‐Charentes (13 % de l’emploi salarié). Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 7 Les enseignements communs des 4 cercles pour la préparation du volet économique du contrat de ville De même, lorsqu’il est question de favoriser la création d’activité, plusieurs statuts et modalités peuvent être proposés, contribuant tout autant au développement économique du territoire. Il est possible de favoriser la création en individuel, en collectif, dans le secteur marchand classique ou de l’ESS, la création d’une activité à temps plein ou en complément de revenu, sous un statut associatif ou d’entreprise à responsabilité limitée… Si chaque forme retenue par le créateur est différente, elles contribuent toutes au développement économique du territoire par la création de valeur ajoutée économique et/ou sociale. Promouvoir la diversité de l’économie locale est le fer de lance de nombreux acteurs interrogés. Le contrat de ville est une opportunité pour les différentes parties prenantes de s’accorder sur la notion d’économie plurielle et de la développer. 2. Favoriser l’ancrage territorial Les participants aux travaux de Villes au Carré attachent une grande importance à l’ancrage territorial des actions en faveur du développement économique. La notion de « territoire », bien que nécessaire, est variable selon le périmètre d’action des structures interrogées et la « nature » de cet ancrage diffère selon leurs fonctions. Néanmoins, il s’agit d’un vœu partagé et d’une condition sine qua non pour promouvoir le développement économique local. Le volet économique du contrat de ville répondra d’autant mieux à des objectifs pertinents et réalistes établis par un diagnostic économique adapté (intégrant les différents visages de l’économie) et partagé (avec les différents acteurs de l’économie). Les structures interrogées dans le cadre des travaux du centre de ressources disposent d’informations et données quantitatives et qualitatives à mettre à disposition. Ils sont en mesure de contribuer à ce diagnostic initial pour faire connaître les besoins locaux actuels et anticiper sur ceux à venir. Par l’amélioration de la connaissance du contexte économique du quartier, de ses relations avec les autres quartiers de l’agglomération, et de l’agglomération en général, des actions adaptées aux besoins très locaux des quartiers peuvent être proposées et articulées avec d’autres acteurs du développement économique. De même, l’ancrage territorial des actions passe par la mobilisation des acteurs locaux présents sur les territoires. Les réseaux économiques sont nombreux et variés, ils peuvent apporter les relais nécessaires auprès des bons interlocuteurs, diffuser les informations, faire remonter les besoins… On pensera notamment aux CRESS, aux URSCOP, aux coordinations de l’IAE (ex : IRIS, CIRRIE, CNLRQ…), aux clubs d’entreprises locaux, aux fédérations patronales… Il est également recommandé de passer par les « agissants » du quartier pour relayer les informations au plus près des habitants et des entreprises (ex : assistants sociaux, médiateurs, agents de Pôle Emploi, missions locales…). De même ; il est essentiel de connaître et communiquer sur le tissu économique local : quelles sont les entreprises implantées (peu visible hors boite à lettres), les activités relevant de l’ESS, de l’IAE, quels sont les savoir‐faire, quelle est la chalandise, quelles sont les facilités d’accès de la zone… ? Rappelons que l'ancrage territorial est un volet de la RSE des entreprises, ce qui est un véritable bras de levier à qui sait s'en emparer. De même, il est essentiel de connaître et communiquer sur le tissu économique local : quelles sont les entreprises marchandes implantées, les activités relevant de l’ESS, de l’IAE, quels sont les savoir‐
faire des entreprises et des habitants, quelle est la chalandise, quelles sont les facilités d’accès de la zone… ? Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 8 Les enseignements communs des 4 cercles pour la préparation du volet économique du contrat de ville Enfin, une idée est apparue avec force « les acteurs économiques d’un même territoire ont un intérêt commun à son développement ». De nombreuses actions multipartenariales (acteurs publics et privés) de communication dans les quartiers de la politique de la ville sont proposées : pour faire valoir la consommation de produits locaux, faire connaître les offres d’emplois des entreprises locales, le savoir‐faire des SIAE locales ou encore les possibilités d’accompagnement local à la création d’activité… Le contrat de ville peut être l’occasion de structurer une communication multipartenariale sur le développement économique dans les quartiers, à l’intérieur et à l’extérieur de celui‐ci. Il s’agit de s’appuyer sur les atouts de ces quartiers, par exemple un grand marché réputé, un foncier abordable, un accès facile et rapide à l’autoroute ou au stationnement, une chalandise importante liée à la densité de population… Le contrat de ville doit être également l’occasion de coordonner les actions et de nouer et renforcer des partenariats avec les réseaux économiques locaux qui travaillent déjà sur les territoires de la politique de la ville afin de bénéficier d’un effet de levier maximal. III. Renouveler ses pratiques professionnelles et ses partenariats Les rencontres organisées par Villes au Carré ont permis aux participants d’exprimer leurs besoins et envies de renouveler leurs pratiques professionnelles. La politique de la ville fait globalement preuve d’une grande capacité d’innovation sur laquelle les participants souhaitent s’appuyer pour essaimer de nouvelles pratiques. Plusieurs points sont communs à toutes les actions réussies présentées par les participants, leur appui sur les relais locaux (Partie 1, II – 1.2), leur démarche « d’aller vers » et leur adaptation aux publics et territoires. 1. Oser « aller vers », une des clés de la réussite Quels que soient les acteurs interrogés et leur champ d’intervention (droit commun ou uniquement politique de la ville), tous font valoir la nécessité d’être proactif lorsqu’il est question d’agir sur le développement économique. 1) Aller vers les « agissants » des quartiers : communiquer auprès des habitants des quartiers, auprès des opérateurs, des porteurs de projets… Les dispositifs, les actions, les programmes qui sont uniquement en position d’accueil, sans recherche directe de bénéficiaires, ne sont pas suffisamment efficaces. Ce phénomène est particulièrement constaté dans les quartiers de la politique de la ville où la connaissance des institutions est faible et où la confiance des habitants n’est pas acquise. C’est pourquoi de nombreuses structures travaillant avec les publics ont fait le choix de s’installer dans les quartiers de la politique de la ville, sur les marchés, ou encore de se rendre directement chez les habitants. 2) Coordonner les initiatives des acteurs locaux du développement économique. Pour ce faire, il est nécessaire d’assurer la transversalité entre services des collectivités, mais aussi un dialogue permanent avec les acteurs du développement économique dans leur diversité. Il s’agit donc d’aller à la rencontre des objectifs de chacun, de ses contraintes et de ses réseaux. C’est en favorisant la compréhension des modes de faire de chacun qu’il est possible de coordonner les actions sur un territoire. Par exemple une meilleure connaissance des SIAE et de l’ESS par les collectivités et entreprises locales, des structures d’aide à la création d’activité par les opérateurs de terrain sur les quartiers... Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 9 Les enseignements communs des 4 cercles pour la préparation du volet économique du contrat de ville Le travail partenarial à engager pour l’élaboration du volet économique des contrats de ville est l’occasion de permettre ce dialogue et d’aller légitimement vers de nouveaux partenariats attendus. 2. Adapter les actions en fonction des publics et des territoires Au regard de leurs expériences, les participants estiment que les actions menées en faveur du développement économique dans et/ou pour les quartiers ne doivent surtout pas être standardisées. Les actions liées au développement économique du territoire doivent être en parfaite adéquation avec le marché, les besoins locaux, les atouts et les contraintes de la zone. Une action parfaitement adaptée au développement d’un quartier de la ville peut être inadéquate, voire contreproductive, pour un autre. D’où l’importance de s’accorder sur les objectifs à atteindre sur chaque quartier et d’en connaître l’histoire, les atouts et les contraintes. Les actions en faveur des personnes répondent aux mêmes exigences d’individualisation. Les habitants des quartiers sont très hétérogènes quant à leurs niveaux de formation (ex : d’infra VI au master/doctorat), leur parcours professionnel, leurs difficultés sociales (ex. : monoparentalité, mobilité…) ou encore leur culture. Il est donc essentiel que les actions visant à améliorer leur employabilité ou à les aider à créer leur activité tiennent compte de ces différences. C’est en cela par exemple que les crédits de la politique de la ville peuvent venir financer des actions de développement économique répondant à des difficultés ou caractéristiques particulières aux territoires prioritaires. 3. Renouveler ses partenariats et organiser une gouvernance proactive Le partenariat est également une des clés de la réussite des actions menées pour les quartiers. Qu’ils soient formels (conventionnement par exemple) ou informels (bonnes relations entre deux acteurs locaux), ils sont considérés comme la clé de voute de la réussite des actions. Les partenariats permettent à chacun de se concentrer sur ses propres missions et objectifs dans le cadre d’un projet commun. Ex. : lorsqu’une action pour le retour à l’emploi est menée par une entreprise, mais que le bénéficiaire est confronté à de lourds problèmes de mobilité, un partenariat avec une entreprise de mobilité dans l’ESS peut être une réponse ; lorsqu’un porteur de projet souhaite être accompagné pour monter une entreprise ou souhaite trouver un local, un partenariat avec le bailleur social ou le service économique de la collectivité peut l’y aider… C’est également grâce à des partenariats ou de simples relations de proximité que les opérateurs des quartiers peuvent être sollicités pour repérer des bénéficiaires inconnus des institutions (personnes en recherche d’emploi, porteurs de projets…) (ex. : Citélab) Le contrat de ville peut être l’outil de la mise en œuvre de partenariats nombreux et innovants entre acteurs du développement économique, initiateur de passerelles entre les sphères économiques privées et publiques qui communiquent trop peu. Il doit contribuer également à la clarification de la gouvernance du développement économique dans le cadre de la politique de la ville. Il s’agit bien de coordonner les actions qui touchent une petite partie de l’agglomération, dans une dynamique plus générale de développement économique du territoire d’une agglomération. La gouvernance du développement économique dans et/ou pour les quartiers est l’organisation de la transversalité et des partenariats nécessaires à l’échelle microterritoriale du projet intégré pour les quartiers. Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 10 Partie 2 : Zoom sur les enseignements des cercles I. Le cercle de l’Économie Sociale et Solidaire (ESS) Le 23 avril 2014, Villes au Carré organisait le premier cercle des acteurs du développement économique « ESS et quartiers de la politique de la ville ». Cette rencontre a réuni différents acteurs et réseaux de l’ESS en région Centre et Poitou‐Charentes. Après un temps de présentation des actions que chaque participant mène ou bien pourrait mener avec les quartiers de la politique de la ville, le groupe a retenu principalement trois atouts et trois limites au rapprochement de l’ESS et de la politique de la ville. 1. Les atouts d’un rapprochement avec la politique de la ville Les atouts et opportunités repérées concernent principalement les différents réseaux de la politique de la ville et de l’ESS. La synthèse de ces atouts montre qu’ils relèvent majoritairement :  du soutien aux acteurs œuvrant déjà dans l’ESS et les quartiers prioritaires  du rapprochement des réseaux d’acteurs, favorisant la réflexion collective et la prise en compte des problématiques de chacun  d’une amélioration de la connaissance de l’environnement et des métiers de chacun  de la communication/formation sur les réformes de la politique de la ville et de l’ESS. Il apparaît que le secteur de l’ESS n’est pas suffisamment familiarisé avec la politique de la ville et ses acteurs, mais est en demande de plus de travail en collectif. De même, il est souhaité que les collectivités soient mieux informées de ce que sont les structures de l’ESS et de ce qu’elles apportent concrètement aux territoires en termes économiques. Les participants se sont accordés sur les principaux leviers à actionner pour rapprocher l’ESS et la politique de la ville :  faire connaître concrètement les structures de l’ESS  Favoriser les initiatives rapprochant les publics cibles de la politique de la ville de l’ESS  Mener des actions de sensibilisation à l’ESS dans les quartiers avec l’appui de la politique de la ville Les réformes et la nouvelle impulsion donnée au développement économique à travers les contrats de ville peuvent contribuer à un rapprochement des réseaux. Villes au Carré et les CRESS Centre et Poitou‐Charentes pourraient animer un temps d’échanges entre ces deux réseaux. 2. Les enjeux et les actions proposées Les principaux enjeux d’un rapprochement de l’ESS et de la politique de la ville s’articulent autour de trois grandes limites :  Redéployer les moyens financiers et humains : il est souhaité que plus de moyens soient consacrés aux actions de fond : à la coopération, à l’incubation et à l’amorçage de projets… plutôt qu’aux actions évènementielles ponctuelles attendues notamment par les collectivités et l’État.  Contribuer à sortir l’ESS et la politique de la ville de leurs représentations : cette dernière est perçue comme du caritatif, éloignée des réalités économiques des territoires. L’ESS est oubliée dans sa dimension économique par les services des collectivités. Le décloisonnement et la transversalité entre services des collectivités doivent contribuer à sortir de ces représentations.  Coordonner les acteurs à l’échelle locale et régionale : le besoin est ressenti de coordonner l’action et de favoriser la coopération des acteurs œuvrant directement dans les quartiers. Bien que les échelles d’action ne soient pas les mêmes, une meilleure circulation d’information contribuerait à cette coordination. Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 11 Zoom sur les enseignements des cercles Au regard des enjeux retenus et des atouts sur lesquels s’appuyer, un travail en équipe a permis aux participants de proposer des actions concrètes pour répondre à trois problématiques :  Permettre l’utilisation d’un vocabulaire commun entre la politique de la ville et l’ESS : par l’organisation de rencontres thématiques régionales réunissant les acteurs de l’ESS et les différents services des collectivités (ex. : le numérique, la « silver economy », la culture…) ; ou par des ateliers de promotion de l’ESS et de la création d’activité organisés par les CRESS dans les territoires, ou d’autres coordinations régionales (ex : Cré‐Sol)  Mieux approcher la dimension de l’économie plurielle : par l’organisation de rencontres du type « marché de la consommation locale » dans les quartiers avec les différents acteurs de l’économie locale  Contribuer au décloisonnement des services des collectivités : par l’organisation d’un forum régional « économie et vivre‐ensemble » et l’organisation de visites d’entreprises de l’ESS du territoire par les différents services des collectivités Au regard de ces conclusions, l’élaboration du contrat de ville semble être une opportunité à saisir pour rapprocher l’ESS et la politique de la ville autour d’un objectif commun : le développement économique du ou pour le quartier et son intégration dans la dynamique économique de l’agglomération. Pour ce faire, le décloisonnement des services des collectivités est un préalable nécessaire à une meilleure prise en compte de la diversité de l’économie dans le contrat de ville. II. Le cercle de la création d’activité Le 24 avril 2014, Villes au Carré organisait le second cercle des acteurs du développement économique « création d’activité et quartiers de la politique de la ville ». Il a réuni différents acteurs de la création d’activité dédiés à la politique de la ville et de droit commun sur les régions Centre et Poitou‐Charentes. Un tour de table a permis à chaque participant de présenter les actions qu’il mène déjà ou pourrait mener en faveur des quartiers de la politique de la ville. Ensuite, un travail en sous‐groupe a permis d’identifier les principales problématiques de la création d’activité dans et pour les habitants des quartiers. 1. Principales limites à la création d’activité par les habitants des quartiers Les lenteurs et les contraintes administratives : « L’administration » au sens large est un frein à la création par les habitants des quartiers. Les projets innovants peuvent être ralentis par les démarches administratives et leurs délais de traitement. Les modalités administratives de création d’activité en France peuvent être très différentes de celles d’autres pays et compliquer/décourager le processus pour les créateurs. Enfin, les critères d’évaluation des actions imposés par les financeurs ne sont pas toujours adaptés aux réalités des actions menées par les structures d’aide à la création. La multiplicité des structures et dispositifs : Le manque de lisibilité tant sur l’action des structures de la création que sur les dispositifs d’aide à la création (politique de la ville et droit commun) crée un sentiment de redondance d’actions et d’empilement de dispositifs. Certaines structures de droit commun n’ont pas vocation à orienter leurs actions en faveur d’un public spécifique et ne connaissent pas toujours la géographie de la politique de la ville. Convaincus de la pertinence de l’existence de ces différentes structures, les participants demandent à ce que le rôle de chacun (public, territoire, type d’activité, type d’aide…) et leur complémentarité soient éclaircis auprès des porteurs de projets et des acteurs des territoires, notamment de la politique de la ville et du développement économique et des élus. Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 12 Zoom sur les enseignements des cercles L’inadaptation partielle de l’offre d’accompagnement à la création : il existe plusieurs types de créateurs :  le créateur d’une entreprise viable immédiatement dont l’activité s’exerce à temps plein,  le créateur qui va créer son emploi et sa principale activité. Non viable au départ, elle peut le devenir avec le temps avec un accompagnement spécifique  le créateur d’une activité qui génère un revenu complémentaire à une autre activité ou aux aides sociales. Tous les acteurs de l’accompagnement à la création ne se positionnent pas sur les trois segments. De même, toutes les structures de la création n’adaptent pas leur communication, mode de financement… à la réalité l’interculturelle des habitants des les quartiers ce qui peut freiner les créations d’activité. Le manque de culture entrepreneuriale : ce constat est fait pour les acteurs œuvrant dans les quartiers de la politique de la ville, dans les services publics de l’emploi, mais aussi plus largement en France. Les porteurs de projets peuvent être découragés par les acteurs de l’emploi qui leur préfèrent la sécurité du salariat même lorsqu’il est très fractionné. La communication doit aussi être dirigée vers les acteurs des quartiers (ex. : centres socioculturels, associations, travailleurs sociaux…) pour faire connaître les structures d’aides à la création afin qu’ils assurent le relais d’information. Des porteurs de projets insuffisamment prêts : les porteurs de projets qui se présentent peuvent ne pas avoir suffisamment mûri leur projet et ne pas souhaiter prendre le temps nécessaire à un accompagnement. Cela peut notamment être dû à l’urgence pour le créateur de se générer un revenu. On constate également que les porteurs peuvent avoir une vision faussée du métier pour lequel ils entendent créer (qualification inadaptée, diplômes insuffisants/absents, pas les bases de la gestion d’entreprise, financement bancaire non envisagé…). La place importante de l’économie souterraine : la création d’activité par les habitants des quartiers peut aussi être limitée par la place de l’économie souterraine. En situation d’urgence sociale, les habitants peuvent décider de commencer une activité rémunérée non déclarée, sans chercher un accompagnement. Les contraintes administratives et fiscales peuvent également pousser vers l’économie clandestine afin que l’activité soit plus concurrentielle que les activités déclarées, ou de commencer au plus vite l’activité. Un des enjeux du contrat de ville peut être de ramener ces activités déjà existantes vers la légalité. Le groupe s’est enfin interrogé sur la nature d’un éventuel « besoin d’accompagnement spécifique à la création pour les habitants des quartiers ». À cette question la plupart des participants considèrent que globalement leurs besoins d’accompagnement sont les mêmes que ceux des autres porteurs de projets, ils sont confrontés aux mêmes difficultés devant la création. Ce qui diffèrerait serait plutôt les raisons qui motivent la création, notamment l’urgence sociale à laquelle certains créateurs sont confrontés, ainsi que les différences de secteurs d’activité. 2. Pistes d’actions pour favoriser la création d’activité dans les quartiers Les participants à la rencontre ont souhaité proposer trois actions concrètes :  Sensibiliser les acteurs des quartiers à la culture entrepreneuriale : il s’agit d’améliorer la connaissance et la compréhension de l’aide à la création par les opérateurs de terrain et de les aider à orienter les porteurs de projets vers les bonnes structures sans les décourager  Améliorer la connaissance des freins à la création et les faire accepter aux porteurs de projets : il s’agit de mieux faire connaître les métiers dans lesquels le porteur de projet souhaite Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 13 Zoom sur les enseignements des cercles entreprendre et les contraintes de gestion. Il est proposé de s’appuyer sur les évaluations en milieu de travail avec l’appui des entreprises locales.  Adapter au mieux la communication sur la création d’activité aux différents publics dans les quartiers : en particulier préférer une communication directe et régulière d’entrepreneurs à porteurs de projets. Le volet économique des contrats de ville peut contenir des objectifs spécifiques en faveur de la création d’activité et particulièrement s’appuyer sur différents profils de créateurs pour adapter au mieux l’accompagnement nécessaire à chaque type de porteurs de projets. Il peut également être une opportunité pour favoriser l’interconnaissance des acteurs de la création avec ceux de la politique de la ville et permettre une meilleure orientation des porteurs de projets. III. Le cercle de l’économie marchande et productive Le 20 juin 2014, Villes au Carré organisait le troisième cercle des acteurs du développement économique « l’économie marchande et productive et quartiers de la politique de la ville ». Cette rencontre a réuni différents représentants d’entreprises et groupes implantés en région Centre et Poitou‐Charentes et investi pour la cohésion sociale dans ces territoires. Après un temps de présentation par les entreprises de leurs actions menées localement en faveur de l’emploi des habitants des quartiers et particulièrement des jeunes, une synthèse collective a permis de dégager des éléments communs à leurs actions. 1. Les points communs aux engagements des entreprises privées Des engagements pérennes sous conditions Les entreprises et groupes ont intérêt à agir pour la cohésion sociale : à l’origine des actions se trouvent souvent les relations personnelles des dirigeants d’entreprises avec les représentants de l’État. Si ces relations sont à l’initiative des engagements, elles sont relayées en interne par la culture d’entreprise et des collaborateurs personnellement motivés pour s’investir en faveur de la cohésion sociale (souvent même bénévoles). Il est également entendu que les entreprises sont des acteurs majeurs d’un territoire, et qu’elles ne peuvent pas y être implantées sans s’intéresser à son développement, à son climat social et économique. « En tant qu’entreprise, j’existe sur un territoire ; je ne suis pas dans ma bulle ». De même si toutes les entreprises n’ont pas une implantation directe dans le quartier, elles peuvent avoir une partie de leur activité qui s’y exerce ou du matériel sur place (compteurs, transformateurs, voirie, réseaux…) Enfin, ces engagements sociétaux ne sont pas seulement à visée caritative, ils correspondent également à une démarche économique à l’œuvre depuis plusieurs années, la Responsabilité Sociétale des Entreprises. Les groupes sont maintenant cotés sur les marchés aussi en fonction de leur RSE, synonyme de bonne santé et de pérennité des groupes. Les entreprises aident les personnes motivées : « Nous ne sommes pas travailleurs sociaux, nous aidons les personnes motivées » : les entreprises acceptent de consacrer du temps et de l’énergie aux demandeurs d’emploi quelque soit leur niveau de formation, à la condition sine qua non de leur motivation à s’en sortir. « Nous ne prendrons pas le risque de perdre du temps avec des gens non motivés ». Elles sont néanmoins conscientes que la « motivation » est fluctuante, aussi un accompagnement refusé un jour pourra être accepté lorsque la personne sera prête. C’est pourquoi parfois elles arrivent, avec le temps, à la limite de leurs engagements, faute de trouver des personnes suffisamment motivées avec les codes sociaux minimums pour intégrer le milieu professionnel. Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 14 Zoom sur les enseignements des cercles Ce critère de la motivation est primordial dans l’évaluation des actions menées par ces entreprises. Leur taux de sortie positive est très encourageant et s’explique par l’accompagnement individualisé des personnes, mais aussi par leur volonté de (ré)intégrer le marché du travail. Assurer un partenariat pérenne avec les acteurs locaux : Les entreprises sont à la recherche et en demande de partenariats durables avec les acteurs du territoire, qu’ils soient de l’État, des collectivités, des réseaux locaux ou encore des associations locales. Ces partenariats prennent différentes formes selon les actions (repérage des publics, financement de projets, co‐organisation d’actions sportives…), mais la mobilisation des réseaux locaux est essentielle pour leur efficacité. En effet, les entreprises insistent sur l’importance que chacun reste à sa place dans le cadre de ces partenariats et œuvre dans son champ de compétence. Des actions cousues main pour transmettre les valeurs de l’entreprise Des actions qui ne touchent qu’un nombre très limité de bénéficiaires. Les participants plaident pour pouvoir continuer à proposer des actions « cousues main » qui répondent aux besoins de leur territoire d’action et de leur public cible. Elles insistent sur les limites de leurs moyens humains et financiers qu’elles préfèrent dédier à des actions individualisées de qualité plutôt qu’à des « actions de masse qui relèvent du service public de l’emploi ». Des actions pour redonner confiance et l’estime de soi : Lorsqu’une entreprise prend du temps pour accompagner une personne vers l’emploi, celui‐ci considère cela comme une vraie valorisation et une marque de confiance. La plupart des actions présentées contiennent un aspect dédié au retour de la confiance en soi (se présenter devant une assemblée, démontrer ses capacités même en l’absence de formation, remise en confiance via du parrainage…). Des actions qui s’appuient sur le sport pour véhiculer les valeurs de l’entreprise : Les actions relatives au sport permettent de toucher plus de publics jeunes, de susciter leur intérêt pour les actions proposées et de toucher plus de personnes non connues des services publics de l’emploi. Le sport véhicule des valeurs qui sont entendues et respectées par les jeunes. Lorsqu’elles sont comprises, il est alors plus facile de les transposer au milieu de l’entreprise (arriver à l’heure, motivé et en tenue, respecter les règles, travailler en équipe…). Enfin, il permet également de casser les représentations que peuvent avoir les jeunes des recruteurs et les remettre en confiance. Inversement, il permet au recruteur de voir les jeunes en situation de confiance, d’évaluer leur esprit d’équipe… L’immersion en entreprise est le point cardinal des actions proposées par les entreprises : quelle qu’en soit la forme (de la découverte de métier pour affiner un projet professionnel à l’évaluation en milieu de travail pour valider des compétences), ces immersions en milieu professionnel sont le meilleur moyen pour les entreprises de contribuer au retour à l’emploi des publics, et une bonne manière de contribuer au développement économique du territoire (présentation des métiers en tension, validation de compétences…) 2. Les freins aux engagements des entreprises Les participants ont principalement relevé trois freins à leurs actions :  le temps à consacrer à la connaissance des acteurs locaux : créer un réseau prend du temps, ainsi que « trouver les bonnes portes d’entrée ». Certains regrettent qu’une fois établies, les relations avec les acteurs publics se compliquent par un turn‐over important.  Les financements publics sont en diminution : bien qu’institués depuis plusieurs années, certains financements publics, même peu élevés, sont remis en cause. En conséquence, certaines actions partenariales efficaces pourraient être stoppées… Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 15 Zoom sur les enseignements des cercles  Les problématiques des publics ne relèvent pas seulement de leur formation, de leur motivation ou de leurs codes sociaux. Elles peuvent relever également d’autres domaines tels que la santé, le logement et particulièrement de la mobilité. Ce sont des freins majeurs sur lesquels il est nécessaire de travailler, mais pour lesquels les entreprises ne sont pas compétentes. Le nouveau contrat de ville entend faire une place aux entreprises privées dès son élaboration. Ces conclusions montrent qu’elles peuvent être sollicitées davantage sur le volet de la programmation et moins sur la définition des objectifs. Elles peuvent s’engager sur des actions concrètes d’aide au retour à l’emploi des habitants, de mécénat d’association œuvrant dans les quartiers… mais n’ont pas vocation à co‐élaborer la stratégie économique des territoires (éventuellement contribuer au diagnostic en exprimant leurs besoins). En revanche, elles ne doivent pas être oubliées dans les partenariats à instituer localement. IV. Le cercle de l’Insertion par l’Activité Économique (IAE) Le 1er juillet 2014, Villes au Carré organisait le quatrième et dernier cercle des acteurs du développement économique « l’Insertion par l’Activité Économique (IAE) et quartiers de la politique de la ville ». Cette rencontre a réuni quatre réseaux représentants de l’IAE en région Centre et Poitou‐Charentes, complété par des entretiens téléphoniques. 1. Répondre aux difficultés des publics en insertion Les publics en insertion sont souvent confrontés aux mêmes problématiques :  une qualification / formation inexistante ou obsolète  une trajectoire chaotique et non structurante et une perte de repère par rapport à l’emploi  une situation d’isolement, de perte de réseau  une grande difficulté de mobilité… Au‐delà de ces problématiques liées à l’emploi, des difficultés socio‐économiques de santé, d’endettement, de logement, de citoyenneté sont également courantes et demandent une prise en charge globale. Dans les territoires urbains, une grande partie des publics en insertion sont habitants des quartiers prioritaires, le contrat de ville peut alors contribuer à traiter les problématiques de manière intégrée. Les difficultés des personnes en insertion ne tiennent pas seulement à des problématiques individuelles, mais également à un contexte économique peu propice à leur réinsertion :  Une forte concurrence entre entreprises : le niveau d’exigence devient très élevé, les SIAE sont mises en concurrence avec les entreprises classiques, mais aussi entre elles. Se pose alors la question de la valorisation de l'offre des SIAE et la capacité pour les donneurs d'ordres à « clauser » leurs marchés publics  Une saturation du marché de l’emploi : Même lorsque les publics sortent de leur parcours d’insertion, qualifiés et motivés, ils entrent alors sur le marché de l’emploi classique comme « demandeurs d’emploi » en concurrence avec les autres Un des atouts majeurs de l’IAE est de proposer des supports d’activité qui nécessitent peu de qualification et répondent le plus souvent à des besoins présents sur le territoire. Une grande partie des publics en insertion dans les territoires urbains sont des habitants des quartiers en politique de la ville à faible niveau de qualification. Lorsqu’ils intègrent un parcours d’insertion, ils peuvent acquérir des compétences pour un métier qu’ils ne pourront peut‐être pas exercer, mais qui sont transférables sur d’autres emplois. Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 16 Zoom sur les enseignements des cercles La transférabilité des compétences acquises peut s’organiser via leur reconnaissance par des organismes de formation, ou par le chainage des activités supports de différentes SIAE (ex : pour les activités saisonnières : maraichage, puis vendanges…) qui permettent aux publics d’exercer différentes compétences… Il est possible d’imaginer des partenariats valorisant les compétences acquises par les publics via les contrats de ville (ex. : confirmation de compétences par des immersions en entreprise…) 2. Valoriser l’IAE par une communication adaptée au territoire De manière générale, les SIAE d’un territoire ont tout intérêt à faire évoluer leur communication pour la rendre plus professionnelle, pour crédibiliser leur activité (ex : meilleurs sites internet, réseaux sociaux, promotion locale…) et valoriser leurs savoir‐faire et compétences professionnelles, pas seulement leur utilité sociale. Une meilleure communication passe aussi par la transmission de vocabulaire technique aux publics pour sécuriser d’éventuels employeurs « ce sont eux les meilleurs ambassadeurs de l’IAE ». Communiquer auprès des collectivités L’IAE est souvent bien connue des services politique de la ville, solidarité et insertion, mais entretien assez peu en lien avec le service développement économique des agglomérations ou les services des marchés publics. Il est regretté que la politique de la ville rencontre l’IAE pour placer des publics et oublie la dimension économique l’activité. Souvent considérée comme un coût par la collectivité, le réseau IRIS (Union régionale des structures d'insertion par l'activité économique) du Poitou‐
Charentes démontre le contraire :  L’IAE soutient l’emploi : sans l’IAE le taux de chômage de la région Poitou‐Charentes passerait de 11,7 % à 13,5 %  L’IAE diminue la dépense publique et de crée de la richesse : 1 € investi dans l’IAE c’est 2,6 € d’investis dans l’économie locale Un rapprochement avec les services économiques permettrait par exemple d’anticiper sur les marchés à venir, d’introduire des clauses d’insertion, de proposer des allotissements favorisant la réponse de l’économie locale, et, pour les SIAE, de calibrer en amont les besoins de formation/qualification en insertion à venir sur le territoire. Le contrat de ville peut contribuer à cette coordination. Communiquer auprès des entreprises L’IAE souffre d’un important déficit d’image auprès des entreprises privées et particulièrement auprès des PME/TPE locales. Elles doivent communiquer sur leur savoir‐faire avant tout pour trouver des marchés en sous et co‐traitance. Il s’agit de casser les idées reçues des entreprises sur la qualité insuffisante de la prestation fournie ou encore la concurrence que les SIAE fausseraient sur le marché local. Les participants encouragent également les SIAE à ouvrir leurs portes aux entreprises privées pour contribuer à casser les représentations (montrer la qualité des prestations, l’outillage, l’encadrement...). Des dispositifs de promotion des SIAE locales auprès des acteurs publics, mais aussi privés existent. Il s’agit d’encourager les PME locales à entrer dans des logiques de coopérations plutôt que de concurrence avec les SIAE pour faciliter à la réponse aux marchés publics locaux. À travers la politique de la ville, quelques défis attendent l’IAE dans ses relations avec le secteur privé classique :  Développer des relations efficaces avec les chambres consulaires pour les sensibiliser et les convaincre de l’intérêt de l’IAE.  Multiplier les périodes d’immersion des publics en entreprises classiques Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 17 Zoom sur les enseignements des cercles 3. Les attendus de l’IAE dans les contrats de ville Partager une vision commune de l’IAE Les participants proposent de s’accorder localement sur l’adaptation de l’offre en parcours d’insertion, peut‐être à l’occasion de l’élaboration du volet économique des contrats de ville. Faut‐il suivre la logique de répartition des publics en insertion par dispositifs en fonction de leurs difficultés (pour respecter le modèle économique des dispositifs) ou transcender les dispositifs (parce que chaque SIAE est en mesure d’assurer l’accompagnement nécessaire) ? Ils souhaitent également que les exigences en matière de sorties positives soient adaptées au potentiel et au dynamisme économique du territoire. Encourager l’adoption des clauses sociales Les clauses sociales dans les marchés publics sont une véritable opportunité pour les SIAE de pérenniser leurs activités et d’asseoir leurs compétences sur le marché local. L’État entend d’ailleurs poursuivre la promotion des clauses sociales auprès de ses services et des collectivités locales. Les clauses sociales étaient obligatoires dans le premier Programme National de Rénovation Urbaine (PRU), elles le seront également dans cadre des marchés relatifs au Nouveau Programme de Renouvellement Urbain (NPRNU). Le contrat de ville peut également encourager les collectivités partenaires à clauser un maximum de marchés (y compris en dehors des opérations ANRU) notamment de services pour développer les emplois en insertion des femmes. Contribution au contrat de ville et partenariat Si les participants s’accordent globalement à dire qu’il n’est pas souhaitable d’organiser une gouvernance locale de l’IAE, ils considèrent qu’il serait utile d’identifier au sein de Pole Emploi un référent comité technique d’animation (CTA) IAE dont la mission serait de connaître l’IAE du territoire pour orienter les publics et préparer le retour à l’emploi des personnes en fin de parcours d’insertion. Même sans une gouvernance unifiée, les acteurs de l’IAE souhaitent être invités à participer au diagnostic et à la définition des objectifs du volet économique des contrats de ville. Ils souhaitent ainsi faire valoir leur vision du territoire et des publics pour être sur un mode de fonctionnement proactif et non d’opportunité. Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 18 Conclusion : les clés de la réussite Des objectifs adaptés à chaque quartier, partagés et soutenus par les acteurs de l’économie locale La préparation du volet « économie et emploi » du contrat de ville est une opportunité pour s’accorder localement sur les objectifs économiques attendus dans et pour les quartiers. Peut‐être le quartier ne se prête‐t‐il pas au développement d’activité, dans ce cas les objectifs relèveront plutôt de la réintégration du quartier aux dynamiques économiques de l’agglomération. Peut‐être le quartier est‐il en position de proposer des opportunités de développement et dans ce cas, quelle économie promouvoir ? Cette phase de préparation du contrat de ville est essentielle pour recueillir les avis et partager les enjeux des différents acteurs de l’économie présents sur les territoires, qu’ils soient directement actifs ou seulement contributeurs indirects. Cette phase de préparation en amont est également un tremplin pour initier ou renforcer des partenariats innovants sur le développement économique. Il s’agit par exemple de prendre contact avec les réseaux économiques locaux, des entreprises y compris commerces de proximité et professions libérales, ou encore les différents services des collectivités locales (marchés publics, formation…)… Par ces temps de rencontre, il s’agit de s’accorder sur les priorités d’actions à choisir pour chaque quartier afin que chaque acteur se tourne vers les mêmes objectifs et démultiplie l’effet de levier de chacune de ses actions. Un contrat de ville traitant de toutes les dimensions de l’économie Le développement économique est composé plusieurs facettes qui sont autant de leviers qu’il est possible d’actionner dans le cadre du contrat de ville. Si bien sûr il peut consister en l’implantation d’entreprises de plusieurs salariés dans le quartier, le plus souvent il prend forme de façon plus diffuse par la création de plusieurs activités génératrices de revenus plus modestes. Il s’agira également de penser à la place de l’économie sociale et solidaire et de l’IAE dans les quartiers de la politique de la ville. Il peut s’agir d’un levier de développement dans la mesure où :  la part des emplois salariés en ESS croît tandis que hors ESS elle diminue  les activités développées en ESS sur un territoire viennent le plus souvent combler une carence d’initiative privée  la plupart des emplois créés sont des emplois non délocalisables  les activités en ESS poursuivent un but d’utilité sociale… Le contrat de ville peut également être l’occasion de :  promouvoir d’autres formes d’entrepreneuriat comme l’entrepreneuriat en collectif (ex : SCOP / CAE…),  encourager la régularisation d’activités déjà existantes  favoriser l’émergence de nouvelles pratiques professionnelles et d’innovation sociale (ex : création d’espaces de coworking…)  d’anticiper les marchés publics à venir pour intégrer un maximum de clauses d’insertion  … Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 19 Conclusion : les clés de la réussite Renouveler ses pratiques professionnelles dans la mise en œuvre du contrat de ville Développer l’économie dans et pour les quartiers nécessite de travailler différemment :  accepter qu’il soit nécessaire d’être dans une démarche proactive pour aller à la rencontre des acteurs économiques,  accepter de rencontrer et de travailler avec des partenaires différents des partenaires classiques de la politique de la ville,  recueillir les besoins des habitants en allant à leur rencontre,  utiliser au maximum les réseaux présents sur le territoire (réseaux de l’économie et de l’emploi, réseaux d’entreprises, mais aussi réseaux d’habitants),  intégrer la nécessité de pouvoir proposer des actions sur mesure parfaitement adaptées aux besoins de chaque quartier et de leurs habitants. Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 20 Remerciements Ville au Carré remercie chaleureusement pour leur contribution active à ces travaux : Birski Jean‐Luc CNLRQ Borderie Stephen CRESS Poitou‐Charentes ACEASCOP FORMASCOPE SCOPADOM SCHNEIDER ELECTRIC IRIS (Union Régionale des Structures d’Insertion par l’Activité Economique) Poitou‐Charentes UT 37 DIRECCTE Bouchon Alain Boullenger Frédéric Brouck Gaël Carlat Marie‐Hélène Clausse Anne‐Lucie Délégué régional et directeur de la régie de quartier de Vierzon Directeur Directeur Responsable insertion France Nord Directeur Chargée d'animation SOLen et SOLen ANGELS Communauté d’agglomération Castelroussine CREPI Touraine Directrice Courtois Thomas Desbois‐Vannier Christine Dumas Caroline BNP Directeur de Groupe CMA 41 Secrétaire générale CRESS Centre Directrice Faroux Alexandra ETINCEL Chargée de Mission ESS Giquello Cyrille Coopaxis‐Artefacts Gouvazé Karine ERDF Hérault Jean‐François CAPEE Agitateur, Développeur économique Interlocuteur privilégié des collectivités locales ‐
Communication externe Directeur Hervé Solenne IDECO 41 Chargée de mission développement économique et emploi Jallet Brigitte USH Centre Directrice Jarry Marie‐Laure Cré‐Sol coordinatrice Kong Denis URSCOP Poitou‐Charentes Loëmbé Gervais Préfecture 45 Menin Eric Centr’Actif Délégué régional Délégué du Préfet pour le quartier de La Source à Orléans et les quartiers de Montargis Directeur Nérault Sébastien Philippe Claudine URSCOP Centre Crédit Agricole Val De France UREI Centre Responsable de l’antenne région Centre Chargée de mission Vie Mutualiste et Développement Durable Présidente Pineau Emeric CAPEE Agent de développement Remoué Jean BGE ISMER 41 Directeur Roussel Olivier FNARS Centre Chargé de mission Séguineau Marie CCI Touraine Responsable Espace Entreprendre Sorel Marie Indre Initiative ‐ BGE Chargée de mission Thaureau Guy La Poste Délégué régional du groupe La Poste en Poitou‐Charentes Tignon Thomas ADIE Poitou‐Charentes Délégué territorial Poitou‐Charentes Coatrieux Gilles Cormier Claire Patissier Catherine Directeur du Développement Solidaire et de l'Attractivité du Territoire et du Plan Stratégique Local chargée de missions Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 21 Créa on d’ac vité
Entreprises
DI RECCTE UT 37
Économie sociale et solidaire
Inser on par l’ac vité économique
Et particulièrement Marie‐Laure Beaufils, consultante IFACES développement. Villes au Carré remercie également le Commissariat Général à l’Égalité des Territoires et la Caisse des Dépôts et Consignation. Comment préparer le volet économique des contrats de ville ? – Septembre 2014 22 
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