hemolyse aigue apres annuloplastie mitrale. a propos d`un cas

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HEMOLYSE AIGUE APRES ANNULOPLASTIE MITRALE
A PROPOS D’UN CAS
RÉSUMÉ
Les auteurs rapportent un cas d’hémolyse intravasculaire sévère, chez une jeune fille de 13 ans, après
plastie mitrale chirurgicale.
Bien que la régurgi t ation mitrale résiduelle soit
modérée, la sévérité de l’hémolyse a imposé la réintervention. Immédiatement, après le remplacement valvulaire mitral, les signes d’hémolyse disparaissent.
Cette hémolyse serait dûe au traumatisme des globules
rouges résultant de l’exposition des fils de suture avec
les patchs en teflon dans les turbulences crées par le jet
de la fuite mitrale résiduelle.
Mots clés : Hémolyse, plastie mitrale, prothèse mécanique.
INTRODUCTION
L’hémolyse intravasculaire infraclinique est très fréquente
(1), notée chez plus de 50% des patients porteurs de prothèse en l’occure n c e, en préscure de prothèses à bille
métallique en position aortique ou de prothèses multiples.
(1, 4, 5). Ce risque est minime voire nul en cas de bioprothèse, en l’absence de dysfonction prothétique (1).
Toutefois, l’hémolyse aigue après plastie mitrale est un fait
exceptionnel, rapporté dans un nombre restreint d’observations. (2, 3, 4). C’est pour cette raison que nous rapportons
le fait clinique suivant.
OBSERVATION
E.K. 13 ans, est hospitalisée le 30/06/94 pour correction
chirurgicale d’une fuite mitrale.
En 1992, la patiente avait présenté une endocardite infectieuse sur double fuite mitroaortique compliquée d’insuffisance cardiaque gauche. Sous traitement médical, l’évolution était favorable. L’électrocardiogramme note un rythme sinusal à 130/mn avec HAG et HVG de type systoli-
que. Les données cliniques actuelles comportent une fatigabilité et une dyspnée classe III NYHA, rythme régulier
rapide, un galop gauche, une insuffisance mitrale à 4/6, une
insuffisance aortique à 2/6, une cardiomégalie avec index
c a rd i o t h o racique à 65%, un débord droit et un doubl e
contour de l’arc inférieur droit. L’échocardiographie révèle
des va l ves mitrales remaniées, épaissies avec diastasis
systolique et aspect d’élongation des cordages de la GVM.
L’oreillette gauche est dilatée à 45 mm. L’anneau mitral
mesure 42 mm. Les sigmoides aortiques sont modérément
remaniées.
Le doppler cardiaque révèle une IM grade IV, IAO grade II
et IT grade I. HTAP avec PAPS estimée à 50 mm Hg.
Le bilan biologique est normal. Le taux des lacticodéshydrogénases est à 414 UI/1.
L’exploration peropératoire (6/7/1994) révèle une IM par
dilatation de l’anneau dans son segment postérieur avec
élongation des cordages de la GVM. Une annuloplastie de
réduction postérieure et bicommisurale à l’aide de points
patchés en teflon est réalisée.
Les manoeuvres d’étanchéité après plastie, sur un coeur
statique, sont excellentes. Les suites opératoires sont marquées par la persistance d’une fuite mitrale avec un ictère
conjonctival et des urines rouge-porto.
Le bilan biologique met en évidence une anémie hémolytique avec hémoglobine à 7,1 g/dl, globules ro u ges :
2.570.000/ mm3, hématocrite : 21,4%, réticulocytes : 10%,
présence de schizocytes, LDH : 10 100 UI/1, bilirubine
totale : 34 mg/l, bilirubine indirecte : 22 mg/1, le test de
coombs est négatif. L’électrophorèse de l’hémoglobine est
normale. Devant la persistance d’une hémolyse aiguë 3
semaines après plastie mitrale, nécessitant des transfusions
i t é rat ives, avec une IM résiduelle, l’indication d’un
remplacement mitral est posée. Une prothèse Saint-Jude
Medical est mise en place en position mitrale. Immédiatement, en peropératoire, les signes d’hémolyse disparaissent
dès l’arrêt de la CEC.
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Le bilan biologique post-opératoire souligne les faits suivants :
- Une numération et formule sanguine normale.
- Le taux de LDH chute de moitié.
- La bilirubinémie devient normale.
Tableau I : Comparaison des résultats biologiques avant
et après la plastie, puis après le remplacement valvulaire
Avant
la plastie
Après
la plastie
Après le
remplacement
valvulaire
12,3 g/100ml
7,1 g/100ml
11,7 g/100ml
µ3
84
83
90
g/dl
31
33
35
Réticulocyles
0,2%
10%
-
LDH
414
10100
4590
Bilirubine
Totale mg/1
9
34
6
Bilirubine
indirecte mg/1
9
22
6
Bilirubine
directe mg/1
0
12
0
Hémoglobine
VGM
CCMH
UI/1
DISCUSSION
LILLEHEI et MERENDINO (6) ont décrit pour la première fois en 1957 la réparation de la valve mitrale. Du fait du
nombre faible de complications à long terme, cette technique ne cesse d’être utilisée par de nombreux auteurs.
Toutefois, elle peut être grevée d’une complication exceptionnelle : l’hémolyse. La revue de la littérature actuelle en
dénombre 14 cas.
Notre observation est caractérisée par la survenue après
annuloplastie mitrale d’une anémie normochrome normocytaire régénérative avec ictère cutanéo-muqueux et des
urines rouge-porto.
Le taux des LDH avait atteint 25 fois la normale. D’autrep a rt, la valvuloplastie mitrale ch i ru rgicale avait laissé
persister une insuffisance mitrale. Dès le remplacement
valvulaire mitral par une prothèse mécanique, la numération fo rmule sanguine se norm a l i s e, le taux des LDH
baisse, les urines s’éclaircissent. DILIP et Coll (6) rapportent, en 1992, le cas d’une anémie hémolytique survenue
2 semaines après une plastie ch i ru rgicale de la va l ve
mitrale, ayant disparu après le remplacement valvulaire.
Une hémolyse aiguë avec défaillance mu l t iv i s c é ra l e
survenue après plastie mitrale, est rapportée par SEYR et
Coll (8). Après remplacement valvulaire mitral et un séjour
en réanimation, le malade s’est rétabli.
Le mécanisme de cette hémolyse serait lié à la persistance
ou la réapparition d’une fuite mitrale avec fragmentation
des globules rouges secondaires à l’exposition du matériel
étranger (fils et patchs) dans le flux turbulent généré par la
régurgitation mitrale (2, 3, 4, 6, 7, 9). Chez notre patiente,
plusieurs arguments plaident en faveur d’une hémolyse
mécanique intrava s c u l a i re imputable à l’annu l o p l a s t i e
mitrale :
- absence d’autre cause,
- absence de calcifications valvulaires,
- persistance d’une fuite mitrale,
- et surtout cessation immédiate de l’hémolyse après remplacement valvulaire mitral.
CONCLUSION
Quoiqu’exceptionnelle, une hémolyse sur annuloplastie
mitrale est possible, imputable à l’exposition des fils dans
les turbulences de l’insuffisance mitrale.
BIBLIOGRAPHIE
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