MAPAR 200024
bien…», pour que le pharmacien puisse délivrer le produit à la dose prescrite. L’évolu-
tion des pratiques va désormais au-delà, car il peut être recommandé que le dossier
médical porte la mention de la motivation de cette entorse faite à la règle générale, et
pas seulement la réaffirmation de cette exception. Même si n’est pas développée ici
l’éventualité d’un contentieux, avec l’arrière-pensée de pouvoir apporter la preuve que
la prescription ne résultait pas d’une méconnaissance des «données acquises de la
science» mais d’un souci particulier d’améliorer la santé du patient, cette mention dans
le dossier médical est indispensable pour que l’ensemble des médecins et du personnel
paramédical apportant ses soins au patient puisse prendre connaissance, à tout moment,
de la motivation de la prescription particulière.
Il est une autre limitation à cette prescription, qui est d’ordre pécuniaire. En effet,
lorsque la Caisse Nationale d’Assurance-Maladie accepte le remboursement d’un mé-
dicament, c’est sur la base d’un argumentaire scientifique, c’est-à-dire, en pratique, du
dossier d’AMM. Elle ne s’engage donc à rembourser que ce qui correspond à ce cadre,
sauf démarche particulière du praticien, motivant l’exception demandée, qui peut être
acceptée ou refusée. C’est la rançon de notre régime de protection sociale, mais des
limitations existent dans tous les pays, sous une forme ou sous une autre.
Dans les hôpitaux publics, le contexte budgétaire est différent. Toutefois, le passage
du système de budget global à celui d’allocations de moyens par l’ARH en fonction de
points ISA, en attendant d’autres réformes ou d’autres acronymes, ne change rien au
fait que, collègues, pharmaciens, représentants de l’administration, puissent souhaiter
exercer des pressions pour réduire des coûts, ce qui peut s’exprimer par une demande
de justification de prescriptions hors AMM. Un élément quantitatif intervient donc ici,
et il est normal de se préparer à de telles questions, de disposer d’un argumentaire,
documenté, rationnel, scientifique. Sinon, à qualité égale, c’est le produit le moins coû-
teux qui devra s’imposer.
Même si les aspects financiers sont mis de côté, le recours à un consensus au sein de
l’établissement est un processus nécessaire. L’homogénéisation des pratiques est en
effet un des éléments de la «Qualité» (au sens d’assurance de la qualité). A ce titre, elle
fait partie des éléments d’accréditation par l’Agence Nationale d’Accréditation et d’Éva-
luation en Santé (ANAES succédant à l’ANDEM). Dans ce contexte, la liberté du
prescripteur s’exprime, dans un premier temps, au travers de sa participation, person-
nelle ou par l’intermédiaire d’un représentant, à l’élaboration du consensus local, par
son apport à l’argumentation, avec son expérience, son analyse de la littérature.
Dans un deuxième temps, cette liberté peut avoir à s’exprimer pour un malade
particulier : s’il apparaît opportun de déroger au protocole établi, il convient, là encore,
que le dossier porte la trace de la justification de cette dérogation et que le prescripteur
soit à même de répondre aux questions qui pourraient en découler, quitte à demander la
reformulation du texte de consensus local s’il s’avère inadapté au regard de données
nouvelles pouvant provenir, soit d’une situation jusque là non envisagée, soit de la
littérature médicale récente.
Ces démarches posent immanquablement la question de la valeur des données scien-
tifiques sur lesquelles on s’appuie, problème d’autant plus actuel que la rapidité de la
communication via Internet (parfois repris le jour même par la grande presse) peut
porter à la connaissance des praticiens, ou des patients, des résultats scientifiques avant
que l’article publié dans une revue scientifique puisse parvenir sur le bureau du méde-
cin. De ce point de vue, le libellé de l’AMM, les textes de conférences de consensus ou
autres recommandations de bonne pratique clinique, restent une source difficilement