Fiche SFR‐ Evidence‐Based Medicine (EBM)
DETECTION DE L’ISCHEMIE MYOCARDIQUE
Rédacteur : Mickaël Ohana mickael.ohana@chru-strasbourg.fr
Relecteurs : Louis Boyer - lboyer@chu-clermontferrand.fr ;
Jean-Pierre Laissy - jean-[email protected]hp.fr
D’après la Séance de cours organisée aux JFR 2014
Détection de l'ischémie myocardique en imagerie cardiaque : quelles nouveautés
dans chacune des techniques ?
Dimanche 19 octobre – 17h30-15h15Amphithéatre Havane
Responsables : Louis Boyer, Jean-Pierre Laissy et Pascal Gueret
Points essentiels et recommandations
La scintigraphie myocardique est l’examen de référence pour détecter une
ischémie d’effort.
L’échographie de stress est un excellent examen de dépistage du fait de sa
bonne sensibilité, mais est encore limitée par sa forte dépendance à
l’expérience de l’opérateur.
L’IRM de perfusion analyse plutôt la réserve coronaire, mais permet de
stadifier précisément les ischémies constituées.
Le scanner de perfusion est encore très limité par des protocoles non
standardisés et une irradiation problématique.
Résumé de la séance
Abordant des thématiques pointues, cette séance pédagogique organisée par la SFICV et
les Sociétés françaises de radiologie et de cardiologie a permis de faire le point sur une
problématique clinique quotidienne : comment détecter et quantifier une ischémie
myocardique ? Que ce soit pour un bilan préopératoire, le check-up d’un patient à risque
ou l’exploration d’un angor d’effort, il est capital de pouvoir répondre à cette question
simple : le patient a-t-il déjà fait ou est-il à risque de faire une ischémie myocardique ?
Quatre modalités d’imagerie, chacune en développement continuel, peuvent être
utilisées. Toutes analysent les conséquences sur le myocarde d’un effort physique ou
d’un test de stimulation pharmacologique, avec comme avantage par rapport à la
classique épreuve d’effort, des possibilités de localisations et de quantifications qui
rendent ces tests nettement plus sensibles. Des anomalies apparaissant à l’effort mais
non présentes au repos signent l’ischémie réversible (Fig. 1), tandis que la normalité des
examens d’effort permet d’exclure la maladie ischémique.
Figure 1 : Détermination de l’ischémie réversible ou constituée en imagerie IRM et TDM
de perfusion avec rehaussement tardif.
Comme le rappelle B. Songy (Saint-Denis), la scintigraphie myocardique avec épreuve
d’effort reste la technique de référence, fiable, reproductible et offrant de bonnes
possibilités de quantification, de valeur pronostique et de suivi. Les nouvelles caméras à
semi-conducteurs CZT améliorent la sensibilité par 6 et la résolution spatiale par 3, tout
en abaissant la dose à environ 1mSV (protocole « stress-only » réalisable en 1h, et très
intéressant en dépistage) : elles assoient encore plus la place de cet examen. Sa valeur
pronostique est aussi bien démontrée, et aide à la différenciation entre les patients à
traiter médicalement et ceux à revasculariser.
En imagerie PET, des traceurs de la viabilité myocardique (flurpiridaz F18, utilisable
avec un test d’effort, et rubidium, utilisable uniquement avec un stress
pharmacologique) sont en cours d’évaluation, et pourraient permettre une
quantification de la réserve coronaire par territoire artériel.
L’échographie de stress, présentée par S. Lafitte (Bordeaux), qui explore plutôt le
versant de la réserve contractile du myocarde que la réserve de perfusion coronaire, a
beaucoup bénéficié des améliorations informatiques permettant une quantification 3D
voire 4D des modifications de la contraction myocardique au repos (évaluation de la
déformation et du « strain », notamment des fibres sous-endocardiques) et plus
difficilement à l’effort, améliorant sa reproductibilité et ses performances diagnostiques.
L’échographie de stress est sensible, non irradiante et peu chère, ce qui en fait un
excellent examen de dépistage. Elle reste cependant limitée par sa dépendance à
l’opérateur, avec des variabilités allant jusqu’à 20%, mais les nouvelles machines à très
haute cadence image pourraient limiter ces écarts.
L’IRM de perfusion est une alternative fiable à la scintigraphie. J-N. Dacher (Rouen) a
insisté sur la nécessité d’un examen complet (et complexe !) couplant morphologie,
cinétique, perfusion de premier passage de repos et sous stress pharmacologique
vasodilatateur et étude du rehaussement tardif. L’IRM permet ainsi de détecter des
ischémies réversibles et de stadifier des ischémies constituées (viable/non viable), ce
qui en ferait un examen pertinent chez le patient coronarien connu.
Le scanner de perfusion, comme l’a rappelé D. Mandry (Nancy), est une technique jeune
encore en évaluation, réservée aux machines haut de gamme. Couplant un stress
pharmacologique et une analyse morphologique des coronaires, il a l’intérêt d’explorer à
la fois la cause (la sténose coronarienne) et la conséquence (l’ischémie réversible ou
irréversible), permettant de cibler les sténoses parlantes. L’exposition aux radiations
ionisantes reste cependant problématique, tout comme la non standardisation des
protocoles.
En conclusion, nous pouvons retenir les recommandations 2013 de l’ESC (Figure 2)
concernant la maladie coronarienne stable : elles mettent à égalité et au premier plan
l’imagerie d’effort (médecine nucléaire, échographie) qui est préconisée comme test
initial devant le classique ECG d’effort si l’expertise et la disponibilité locales le
permettent, les tests de stimulation pharmacologique en deuxième intention (MN, écho
ou IRM), et laissent une place au coroscanner chez les patients à risque modéré de
coronaropathie (<50%).
Fig. 2 : recommandations 2013 de l’ESC pour l’exploration de la maladie coronarienne
stable.
Références
Task Force M et al. 2013 ESC guidelines on the management of stable coronary artery
disease: the Task Force on the management of stable coronary artery disease of the
European Society of Cardiology. European Heart Journal 2013. 34: 2949-3003.
Prior JO, Farhad H and Muller O. Multimodality Imaging in Ischemic Cardiomyopathy.
Current Cardiovascular Imaging Reports 2014. 7: 9285.
Korosoglou G, Giusca S, Gitsioudis G, Erbel C and Katus HA. Cardiac magnetic resonance
and computed tomography angiography for clinical imaging of stable coronary artery
disease. Diagnostic classification and risk stratification. Frontiers in Physiology 2014. 5:
291.
El Aidi H et al. Cardiac magnetic resonance imaging findings and the risk of
cardiovascular events in patients with recent myocardial infarction or suspected or
known coronary artery disease: a systematic review of prognostic studies. Journal of the
American College of Cardiology 2014. 63: 1031-45.
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