Thèmes détaillés - Chaire de recherche du Canada en patrimoine

THÈMES DES ATELIERS DE LA JOURNÉE D’ÉTUDE
Préambule
Après consultations et discussions avec les différents représentants/propriétaires/gestionnaires des sites au fil de la dernière année, voici les huit thèmes que nous avons définis en liens
avec autant de sites ou secteurs que les participants verront et vivront.
SECTEUR NORD
1- Éducation et patrimoine : les synergies possibles sur la pointe de la Gaspésie
Gaspé, Wakeham, Sunny Bank, York et Gaspé Harbour
Quels rôles peuvent jouer les établissements d’enseignement dans les enjeux et les défis liés à la conservation et à la mise en valeur du patrimoine?
Comprendre ce qui nous entoure, c’est le b.a-ba de l’interprétation et de la préservation de nos milieux de vie. Par son programme en guide-interprète du patrimoine et en écotourisme, le
Cégep de Gaspé utilise les environnements naturels comme salle de cours. Par exemple, à l’hiver 2013, professeurs, étudiants, et architectes locaux se sont penchés sur le bassin
versant de la baie dans le cadre du cours « geography and adventure tourism ».
Pour les résidents de Gaspé, le « tour de la baie » réfère à la boucle d’établissements humains sur le pourtour du bassin de la rivière York, et spécifiquement, à la route qui le ceinture,
l’on situe les localités de Gaspé, Wakeham, Sunny Bank, York et Gaspé Harbour. Sur ses rives persistent des vestiges d’une activité agricole et de pêche. L’implantation des
maisons, notamment dans le secteur de Wakeham, se distingue par leur relation particulière à la route. Une entrée dessert deux et parfois trois maisons. Ce patron s’explique par une
tradition où le propriétaire léguait des parties de son lot à des membres de sa famille.
Le patrimoine constitue un facteur qui joue dans la création d’un sentiment d’appartenance à son milieu, à sa communauté. Le fait d’intégrer des éléments liés au patrimoine dans
certains cours permet-il aux étudiants de mieux s’approprier leur milieu?
Cet atelier, en utilisant l’exemple du « tour de la baie » à titre de cas d’espèce, explore les diverses façons pour les établissements scolaires de participer à la formation, à la recherche,
ainsi qu’à la production et la diffusion du savoir en matière de patrimoine, et ce, au-delà de l’offre de cours aux étudiants. Pensons à des modules en formation continue, la collaboration
avec des organismes locaux, voir le développement de projets avec les communautés qui peuvent faire du patrimoine un outil de développement social et communautaire.
2- Conciliation entre développement industriel et protection du patrimoine naturel et culturel
Rivière-au-Renard
Comment assurer l’avenir économique de Rivière-au-Renard sans détruire les traces de son passé?
Rivière-au-Renard est un village qui s’est construit sur l’industrie de la pêche. Il demeure aujourd’hui un havre de pêche moderne très actif. La construction d’un nouveau quai et d’autres
aménagements a entraîné la disparition d’anciennes installations situées sur le banc. Malgré la perte d’un nombre de bâtiments autrefois liés à l’industrie de la pêche tels les entrepôts,
chafauds et maisons du gérant plusieurs perdurent, notamment, le long de la rue du Banc. Si les uns ont été transformés en boutiques ou magasins, d’autres cherchent une nouvelle
vocation ou font face à la démolition.
En parallèle, le marais, un riche écosystème, s’est fait gruger successivement par la construction, l’élargissement et le déplacement de la route 132. Si l’organisme Beau Village n’avait
pas déploré et contesté le nouveau déplacement de la route et la construction d’un pont, la superficie du marais serait davantage réduite. Le tracé de cette route a entraîné néanmoins la
démolition d’une ancienne école.
Ce même organisme a su restaurer le moulin des Plourde. Cependant, l’opération du site est chancelante vu le nombre réduit de visiteurs qu’il reçoit.
Beaucoup de maisons et de bâtiments ont été démolis ou déménagés à la suite de multiples et récurrentes inondations. De nouvelles maisons sont construites à flanc de montagne, ce
qui nécessite des travaux d’excavation et de terrassement défigurant le paysage.
Dans une optique de développement durable, une planification urbaine qui tient compte du patrimoine architectural, naturel et culturel, peut améliorer le milieu de vie des gens qui
résident à Rivière-au-Renard, et ce, sans obligatoirement passer par le tourisme.
Sans figer le développement de cette ville qui se voit souvent en concurrence avec Gaspé, comment conceptualiser une vision d’ensemble, un plan directeur d’aménagement urbain et
paysager qui tienne compte autant de l’histoire des bâtiments et des sites anciennement propriétés des compagnies de pêche à Rivière-au-Renard, ou d’importance locale, que de son
milieu naturel toutefois fragile?
3- Fruit d’une mobilisation citoyenne pour la sauvegarde du patrimoine : réussites et nouveaux défis
L’Anse-au-Griffon
Comment la maison Boulay peut-elle tirer profit de son entourage et de l’expérience acquise par le milieu dans la prise en charge du patrimoine local pour réaliser son
propre projet de restauration?
Les citoyens de L’Anse-au-Griffon peuvent être fiers de leur remarquable mobilisation qui a déjà mené à la réfection de deux bâtiments patrimoniaux. L’entraide et la collaboration entre
les différents comités sont à l’origine de la sauvegarde du patrimoine bâti à L’Anse-au-Griffon. Les résidents ont d’abord milité pour sauvegarder le Manoir Le Boutillier, et le transformer
en centre d’interprétation. L’endroit est maintenant un lieu historique national du Canada et un monument historique classé au provincial. Ils ont aussi piloté le projet de conservation de
l’ancien entrepôt frigorifique, bâtiment industriel de pêche, pour en faire un lieu de rencontre culturel: le Centre culturel Le Griffon.
L’organisme sans but lucratif (OSBL), La Maison aux Lilas de L’Anse, ayant dans la mire depuis quelques années la propriété ainsi nommée, et étant intéressé par son histoire, son
emplacement et les caractéristiques du site, propose d’y réaliser une foule d’activités reliées à l’horticulture, l’agriculture et la mise en valeur de la flore et la faune indigènes. Il a donc
acquis la maison plus que centenaire et sa propriété en 2010. De construction modeste et située tout près de l’imposant Manoir Le Boutillier à L’Anse-au-Griffon, elle a abrité quatre
générations de la famille Boulay. Le dernier propriétaire, feu Raymond Boulay, l’a utilisée comme maison d’été à partir des années 1970. Restée intouchée depuis une trentaine
d’années, elle est aujourd’hui le seul vestige d’un ensemble agricole qui comptait une grange, une ou deux remises, des champs et un potager.
La protection et la mise en valeur du patrimoine horticole, notamment des anciens pommiers, cerisiers et pruniers qui se trouvent sur la propriété, la revalorisation du jardinage et la mise
SECTEUR SUD
en valeur du milieu naturel sont au cœur de la mission de La Maison aux Lilas de L’Anse.
Présentement le terrain sert de laboratoire/conservatoire, où se trouvent aussi des jardins communautaires universellement accessibles. L’été, bénévoles et étudiants, embauchés dans
le cadre des programmes de financement, animent des ateliers destinés autant aux enfants qu’aux familles et aux aînés. De plus, l’établissement figure, lors de journées portes ouvertes
et autres activités culturelles, au calendrier régional.
L’OSBL souhaite pouvoir tirer profit de la maison Boulay, la conserver et la restaurer, de façon à l’intégrer à sa programmation qui s’inscrit dans une démarche de développement
durable. L’atelier a comme objectif de définir clairement les besoins communautaires ainsi que les besoins de l’organisme afin d’éclaircir les possibilités de transformation de la maison.
Non seulement faut-il considérer les caractéristiques constructives de la maison, l’esprit du lieu et la signification de la maison en tant que patrimoine vernaculaire gaspésien, mais aussi
les limites qu’un tel changement de fonction provoque, en prenant compte des normes régissant la conversion de lieux et de son utilisation par le public. Finalement, il faut aussi réfléchir
sur les possibilités de financement nécessaire pour réaliser les travaux d’une éventuelle réfection.
4- Vivre en périphérie d’un parc national : vers une vision d’avenir d’interdépendance entre le parc national du Canada Forillon et les villages avoisinants
Parc national du Canada Forillon, Cap-aux-Os, Cap-des-Rosiers
Comment générer une synergie et une complémentarité entre l’entreprise privée, l’offre publique et les initiatives communautaires visant à dynamiser les villages et le Parc?
En tant que moteur économique de la région, la création du Parc du Canada Forillon en 1970 devait engendrer des retombées économiques généreuses. Dans le but d’attirer les
touristes, on a procédé à la restauration de certains bâtiments et maisons qui avaient été réquisitionnés lors de l’expropriation, dont l’église Saint-Pierre, le magasin Hyman, la maison
Blanchette et plus récemment la maison Dolbel-Roberts. D’autres, cependant, demeurent toujours sans fonction. L’état des trois maisons Gavey, la maison Bartlett ainsi que les
bâtiments secondaires attenants telles les granges, remises et «bécosses», même s’ils ont fait l’objet de consolidation et de réparation, se dégradent d’année en année.
Les villages aux abords du Parc comme Cap-des-Rosiers, dont le havre et la moitié de son territoire se retrouvent à l’intérieur des limites du Parc, et Cap-aux-Os, qui est aujourd’hui
enclavé par 2 secteurs du Parc (le sud et Penouille), peinent à tirer leur épingle du jeu. Le tourisme semble être la seule modalité de développement pour ces localités. Les propriétaires
de motels, restaurants, auberges, magasins de souvenirs et compagnies de tourisme d’aventure (kayak de mer, etc.) en dépendent grandement. Entre temps bon nombre de services de
proximité ont disparu.
Cet atelier veut explorer comment on peut stimuler la viabilité, fragile, des services et entreprises sur le pourtour de la Péninsule de Forillon en tenant compte des besoins des résidants.
Comment peut-on augmenter et diversifier les activités offertes au sein du Parc, et ce faisant, contribuer à l’augmentation de l’achalandage de ce dernier sans toutefois négliger les
initiatives commerciales ou communautaires locales? Est-ce que l’introduction d’activités commerciales est un moyen envisageable de protéger les propriétés des pêcheurs-fermiers à
l’intérieur du Parc national du Canada Forillon? Quels projets Parcs et les villages avoisinants peuvent-ils développer ensemble au profit de chacun?
5- Une petite patrie irlandaise
Douglastown
Quelles orientations doivent guider la revitalisation d’un noyau paroissial devenu le cœur d’une communauté subissant une forte transformation démographique? Comment
requalifier le Holy Name Hall pour lui donner une vocation autosuffisante?
Douglastown est aujourd’hui le seul quartier en croissance à Gaspé. Aux familles irlandaises longuement implantées s’ajoutent de jeunes familles dynamiques canadiennes-françaises.
Les résidants de longue date dont les parents et grands-parents ont largement contribué à la construction des édifices paroissiaux, tiennent particulièrement à l’église.
La paroisse Saint-Patrick de Douglastown est peut-être la seule à avoir construit et conservé un théâtre paroissial. Elle est aussi une des rares ayant un ensemble d’apparence
monumentale par l’harmonisation des revêtements extérieurs des composantes du noyau : église, presbytère, couvent-école, le muret du cimetière, et bien sûr, le théâtre, Holy Name
Hall.
Depuis que les sœurs du Notre-Dame-du-Saint-Rosaire ont quitté le presbytère de facture Art-Déco en 2012, le conseil de Fabrique l’a mis en vente ainsi qu’un lopin de terre. La salle
Trachy, anciennement une résidence et un hôtel de ville, accueille actuellement un service de garde scolaire et un camp de jour. Incorporé en 1998 à l’initiative de citoyens engagés, le
Centre communautaire Douglas a récupéré la St-Patrick Central School pour la transformer en auberge et centre communautaire qui connait aujourd’hui un franc succès.
Depuis quelques années, un comité de citoyens travaille avec acharnement à trouver les moyens de conserver et mettre en valeur le Holy Name Hall, lieu de culture irlandaise et fierté
de Douglastown. Celui-ci a obtenu le statut de bâtiment patrimonial par la municipalité. La restauration intégrale du théâtre paroissial a été écartée dû au coût astronomique d’une telle
réfection. Récemment des travaux ont été entrepris pour refaire la toiture et le système électrique, mais il n’est pas isolé pour l’hiver québécois. Le comité souhaite lui donner une 2e vie
quitte à lui apporter des modifications pour pouvoir éventuellement autofinancer les coûts d’opération et de programmation à l’année. Les défis pour sécuriser les appuis financiers sont
de taille. Peut-on identifier des solutions qui sortent des sentiers battus? On mise beaucoup sur de récentes activités de remue-méninges avec la population afin de trouver des pistes de
solution.
Comment, alors, développer une stratégie de pérennisation de chacune des composantes du noyau paroissial, et ce, non pas par une approche cas par cas mais à partir d’une vision
d’ensemble? En quelle mesure est-ce que cette vision peut agir comme levier de développement socioéconomique?
6- Tout patrimoine doit-il devenir musée ou centre d’interprétation?
Maison Legros, Pointe-Saint-Pierre
Quelle vocation donner à la maison Legros ? Les consultations préliminaires menées auprès de divers organismes spécialisés encouragent une utilisation mixte des
bâtiments afin d’assurer leur entretien. Comment mieux définir une utilisation mixte ?
L’organisme à but non lucratif Conservation de la nature a comme mission la protection de la flore et la faune. En 2008, les anciens propriétaires de la maison LeGros cèdent leur maison
centenaire et leurs vastes terrains sur la pointe Saint-Pierre à Conservation de la nature. Ils stipulent dans le contrat de cession une condition visant à préserver l’intégrité architecturale
du bâtiment. C’est tout un défi pour un OSBL qui vise la protection des habitats et écosystèmes naturels.
Les derniers occupants de la maison ont laissé tous leurs meubles et même de nombreux biens personnels comme des vêtements, des photos de famille, etc. Ils ont quitté les lieux de
façon permanente en 1959. La maison est en quelque sorte figée dans le temps. Il y a tout pour en faire un musée. Par contre, est-ce que tout patrimoine doit devenir musée ou centre
d’interprétation?
1. Dans l’optique où la maison reçoit une utilisation mixte, ex. conférence-atelier, accueil, interprétation, bureau, ou toute autre fonction publique, comment la mettre aux normes
(sécurité, incendie, etc.) sans dénaturer ses qualités architecturales. Est-ce que la création d’un Centre de conservation régional est envisageable, si le musée régional est trop
petit?
2. Les documents valables les plus importants furent déposés au Musée de la Gaspésie. Que doit-on faire avec le reste des collections et des meubles? Où doit-on les
conserver? Y a-t-il une expertise d’archivage qui pourrait entreprendre un tel projet?
3. Par quels moyens peut-on valoriser la mission fondamentale de Conservation de la nature à partir de ce patrimoine bâti, ou d’utiliser ce dernier pour attirer des personnes vers
cette mission?
4. Étant donné l’urgence d’agir sur la consolidation et la réhabilitation du bâtiment (fondations, structure, services, etc.) et que Conservation de la nature dispose de peu de
moyens pour fiancer de telles dépenses, quelles structures financières, autres que le recours à des subventions, pourraient être mises en place pour défrayer les coûts de
réhabilitation de la structure et ensuite assurer les dépenses d’opération?
7- Des communautés d’appartenance
Bougainville, Saint-Georges, Malbay, Barachois
Dans un contexte de dévitalisation, les ressources sont maigres pour ne pas dire presque inexistantes pour la restauration et l'entretien de bâtiments patrimoniaux sur le
territoire, qu’il s’agisse de maisons centenaires ou d’églises historiques. Peut-on imaginer une solution qui, d’une part, permettrait aux aînés de briser leur isolement et de
vieillir dans leur milieu, entourés des leurs, et d’autre part, contribuerait à la conservation du patrimoine local?
Une population vieillissante considérable réside dans le secteur formé par Barachois, Saint-Georges, Malbay, Bougainville, tous des villages fusionnés à la municipalité de Percé. Les
personnes âgées éprouvent un fort sentiment d’appartenance à leurs villages et à leurs paroisses. Elles désirent vieillir sur place plutôt que de casser maison ou de se s’éloigner de leur
église. L’offre inexistante en logement ou résidence les force souvent à s'exiler à Gaspé, Chandler, voire Rimouski. La ville songe à prévoir dans ses plans stratégiques des logements
centralisés à Percé même pour personnes âgées. Alors que ceci convient aux personnes originaires de Percé centre ou aux alentours, les gens de Barachois, Saint-Georges, entre
autres, n’y voient pas là une véritable solution au déménagement vers une plus grande ville. Cependant, la municipalité n’a pas les moyens de placer ce genre d'équipement, ou d’autres
services dédiés aux aînés dans chaque village.
Dans ce même secteur existent bon nombre d’églises et maisons historiques. Peuvent-elles faire l’objet d’une reconversion en dépit des coûts associés avec un tel changement de
vocation (mises en état, conformité aux normes) de façon à ce que les personnes puissent bénéficier de services et de soutien qu’ils ont besoin à proximité?
Quoi faire pour concilier patrimoine et vieillissement de la population? Créer une fiducie d’utilité sociale? Trouver des philanthropes et mécènes? Comment élaborer une structure
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