19
Nombres complexes et géométrie
euclidienne
Le corps Cdes nombres complexes est supposé construit (voir le chapitre 7).
On rappelle que Cest un corps commutatif et un R-espace vectoriel de dimension 2,de base
canonique (1, i)iest une solution complexe de l’équation x2+ 1 = 0.
19.1 Le plan affine euclidien
On suppose connu le plan affine euclidien que l’on note Pet que l’on munit d’un repère
orthonormé R= (O,
e1,
e2),en désignant par
Ple plan vectoriel associé à P.
Nous rappelons rapidement quelques notions utiles pour la suite.
Un point M∈ P est repéré par ses coordonnées (x, y)R2,ce qui signifie qu’on a l’égalité
OM =x
e1+y
e2dans
P.
On notera :
v1·
v2=x1x2+y1y2: le produit scalaire des vecteurs
v1et
v2de
P;
detB(
v1,
v2) = x1y2x2y1: le déterminant de (
v1,
v2)dans la base B= (
e1,
e2);
AB =°
°
°
AB°
°
°=q(xBxA)2+ (yByA)2: la distance de AàBdans P.
On rappelle que si B0=³
e0
1,
e0
2´est une autre base de
P,on a :
detB(
v1,
v2) = detB(B0) detB0(
v1,
v2)
Dans le cas où B0est orthonormée comme B,on a detB(B0) = ±1.
On rappelle aussi que la base B0définit la même orientation de
Pque Bsi, et seulement si,
detB(B0)>0.
En se fixant une base B,on écrira det pour detB.
19.2 Le plan d’Argand-Cauchy
Le plan Pest muni d’un repère orthonormé R= (O,
e1,
e2).
Théorème 19.1 L’application ϕ[resp.
ϕ] qui associe à tout nombre complexe z=x+iy le
point ϕ(z)∈ P [resp. le vecteur
ϕ(z)
P] de coordonnées (x, y)dans le repère R[resp. dans
la base (
e1,
e2)] réalise une bijection de Csur P[resp. sur
P].
325
326 Nombres complexes et géométrie euclidienne
Démonstration. Résulte du fait que tout nombre complexe [resp. tout point de Pou tout
vecteur de
P] est uniquement déterminé par sa partie réelle et sa partie imaginaire [resp. par
ses coordonnées dans le repère Rou dans la base (
e1,
e2)].
Tout point Mdu plan affine P[resp. tout vecteur
vdu plan vectoriel
P] s’écrit donc de
manière unique M=ϕ(z)[resp.
v=
ϕ(z)] et peut ainsi être identifié au nombre complexe
z.
Remarque 19.1 Les bijections ϕet
ϕdépendent du repère orthonormé Rchoisi.
Remarque 19.2 L’application
ϕest linéaire et donc réalise un isomorphisme d’espace vecto-
riel de Csur
P,puisqu’elle est bijective.
Le plan Pmuni de cette identification est appelé plan complexe ou plan d’Argand-Cauchy.
Si M∈ P [resp.
v
P] s’écrit M=ϕ(z)[resp.
v=
ϕ(z)], on dit que zest l’affixe de M
[resp. l’affixe de
v] et M[resp.
v] le point [resp. vecteur] image de z.
On a ϕ(0) = O, le vecteur
OM est le vecteur image de zet zest l’affixe de
OM. Précisément
si z=x+iy, on a :
ϕ(0) ϕ(z) =
OM =x
e1+y
e2=
ϕ(z)
ce qui peut s’écrire dans P:
ϕ(z) = ϕ(0) +
ϕ(z)
et s’interprète en disant que ϕest une application affine de Cdans Pd’application linéaire
associée
ϕ(le plan vectoriel Cest naturellement muni d’une structure d’espace affine).
En utilisant cette identification entre Pet C,on peut donner les interprétations géométriques
suivantes où a, b, z, z0désignent des nombres complexes et A, B, M, M0leurs images respectives
dans P.
1. L’axe Ox=R
e1est identifié à l’ensemble des nombres réels.
2. L’axe Oy=R
e2est identifié à l’ensemble des imaginaires purs.
3. a+best l’affixe du vecteur
OC =
OA +
OB et bal’affixe du vecteur
AB =
OB
OA
(résulte de la linéarité de
ϕ).
O
A
B
C
4. <¡zz0¢=<(zz0) = xx0+yy0=
OM ·
OM0.
5. =(zz0) = xy0x0y= det ³
OM,
OM0´.
Équations complexes des droites et cercles du plan 327
6. zz0=<(zz0) + i=(zz0) =
OM ·
OM0+idet ³
OM,
OM0´.
7. Si A, B, C sont deux à deux distincts, alors ces points sont alignés si, et seulement si, il
existe un réel λtel que
AB =λ
AC, ce qui équivaut à dire que ba
caest réel.
On peut aussi dire que A, B, C sont alignés si, et seulement si :
det ³
AC,
AB´==((ba) (ca)) = 0
ce qui équivaut à dire que (ba) (ca)est réel.
8. Si les points A, B, C, D sont deux à deux distincts, alors les droites (AB)et (CD)sont
orthogonales si, et seulement si :
AB ·
CD =<¡(ba)¡dc¢¢= 0
ce qui équivaut à dire que (ba)¡dc¢est imaginaire pur.
Remarque 19.3 Si u, v sont deux nombres complexes avec vnon nul, on a les équivalences :
µu
v=1
|v|2uv est réel(uv est réel)
et : µu
v=1
|v|2uv est imaginaire pur(uv est imaginaire pur)
En utilisant les propriétés 7. et 8. précédentes, on en déduit que si A, B, C, D sont des points
deux à deux distincts, alors :
(A, B, C sont alignés)((ba) (ca)R)µba
caR
et :
((AB)et (CD)sont orthogonales)¡(ba)¡dc¢iR¢µba
dciR
Dans ce qui suit, on identifie le plan d’Argand-Cauchy PàC.
Si A, B, M, M0,,··· sont des points de P,nous noterons a, b, z, z0, ω, ··· (noter que les
affixes de points variables M, M0,··· sont notées z, z0,···).
19.3 Équations complexes des droites et cercles du plan
19.3.1 Droites dans le plan complexe
Soit Dune droite passant par deux points distincts A, B. Dire que Mappartient à Déquivaut
à dire que les points A, M, B sont alignés, ce qui équivaut encore à dire que (za)¡zb¢est
réel, soit :
(za)¡zb¢= (za) (zb)
ce qui s’écrit : ¡ba¢z(ba)z¡ab ab¢= 0
328 Nombres complexes et géométrie euclidienne
le nombre complexe abab = 2i=¡ab¢étant imaginaire pur. En multipliant par i, une équation
complexe de la droite Dest alors :
βz +βz +γ= 0 (19.1)
β=i(ab)Cet γest réel.
Le nombre complexe β=i(ab)est l’affixe d’un vecteur
vqui est orthogonal à D.En
effet, on a :
v·
AB =<¡β(ba)¢=<¡i|ba|2¢= 0.
On peut aussi aboutir à ce résultat en utilisant une équation cartésienne de D:
ux +vy +w= 0
avec (u, v)R2\ {(0,0)}et wR.En écrivant que x=1
2(z+z)et y=1
2i(zz)pour M
d’affixe z, cette équation devient :
u(z+z)vi (zz)+2w= 0
soit :
(uiv)z+ (u+iv)z+ 2w= 0
avec β=u+iv affixe du vecteur
v=u
e1+v
e2orthogonal à D.
Réciproquement une équation du type (19.1) définit une droite. En effet, en écrivant z=
x+iy, β =u+iv, cette équation devient :
(uiv) (x+iy)+(u+iv) (xiy) + γ= 0
soit :
ux +vy +γ
2= 0
et c’est une droite dirigée par le vecteur d’affixe v+iu =(ou orthogonale au vecteur
d’affixe β=u+iv).
19.3.2 Cercles dans le plan complexe
Soit Cun cercle de centre et de rayon R > 0dans le plan P.
Dire que M∈ C équivaut à dire que :
(xx)2+ (yy)2=R2
ce qui se traduit dans le plan complexe par :
|zω|2=R2
et peut aussi s’écrire :
(zω) (zω) = zz ωz ωz +|ω|2R2= 0
Une équation complexe de ce cercle Cest donc :
zz ωz ωz +γ= 0 (19.2)
γ=|ω|2R2est réel avec |ω|2γ=R2>0.
Interprétation géométrique du module d’un nombre complexe 329
Réciproquement une telle équation définit un cercle. En effet, en écrivant z=x+iy, ω =
u+iv, cette équation devient :
x2+y22ux 2vy +γ= 0
soit :
(xu)2+ (yv)2+γu2v2= 0
et en posant R2=u2+v2γ=|ω|2γ(ce réel est positif), on constate qu’on a le cercle de
centre ωet de rayon q|ω|2γ.
On a donc montré le résultat suivant.
Théorème 19.2 Toute équation de la forme :
αzz +βz +βz +γ= 0
α, γ sont des réels et βun nombre complexe représente :
l’ensemble Ctout entier si α=β=γ= 0 ;
l’ensemble vide si α=β= 0 et γ6= 0 ;
une droite dirigée par le vecteur d’affixe (ou orthogonale vecteur d’affixe β) si α= 0 et
β6= 0 ;
l’ensemble vide si α6= 0 et |β|2
α2γ
α<0;
le cercle de centre ω=β
αet de rayon r|β|2
α2γ
asi α6= 0 et |β|2
α2γ
α0.
19.4 Interprétation géométrique du module d’un nombre
complexe
A priori, a, b, z, z0, ω désignent des nombres complexes et A, B, M, M0,leurs images res-
pectives dans Prelativement à un repère orthonormé R= (O,
e1,
e2).
19.4.1 Module et distance euclidienne
Théorème 19.3
1. |z|=OM =px2+y2est la distance de OàM;
2. |ba|=AB est la distance de AàB;
3. l’ensemble des nombres complexes ztels que |zω|=ρest identifié au cercle de centre
et de rayon ρ0;
4. l’ensemble des nombres complexes ztels que |zω|< ρ [resp. |zω| ≤ ρ] est identifié
au disque ouvert [resp. fermé] de centre et de rayon ρ0;
5. pour A6=B, le point Mest sur la médiatrice du segment [AB]si, et seulement si,
|za|=|zb|.
Démonstration. Il suffit de vérifier.
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