ARAVIS - Les « risques psychosociaux » au travail : De quoi parle-t-on ? Comment aborder ce sujet ?
Juin 2010 5/15
3 Quelques notions sur le travail et la santé
3.1.1 Travailler, c’est toujours plus que seulement « faire son travail »
Toute situation de travail est en partie structurée par des logiques en tension (par ex. quantité,
qualité, coûts, délais, sécurité, santé). Tenir ces différentes logiques et leurs objectifs, n’est
pas donné, et la seule application des procédures et consignes n’y répond qu’imparfaitement.
Ainsi, travailler, c’est déployer son intelligence pour élaborer des compromis entre ces
logiques et aussi pour faire face à ce qui n’est pas prévu par l’organisation formelle.
Ainsi, le travail est fait de difficultés qui sont des occasions de faire preuve de créativité et
d’ingéniosité. Cette intelligence est aussi et surtout collective, elle s’appuie sur les règles et
les savoir-faire élaborées au cours du temps par les travailleurs. C’est dans la discussion et la
confrontation des différentes manières de s’y prendre que se construit le collectif de travail.
3.1.2 Le travail, est-ce la santé ?
La santé est individuelle, et chacun ressent les effets du travail d’une manière qui lui est
propre.
La santé n’est pas qu’un capital qu’il faut protéger, elle est aussi le résultat d’une construction
dont l’équilibre est toujours remanié. Le travail, en tant qu’activité socialement utile,
contribue à cette construction quand les difficultés rencontrées permettent de mobiliser son
intelligence, de développer des compétences, de coopérer… et malgré ces difficultés
d’atteindre les résultats demandés et de contribuer à une œuvre commune. Ainsi, la santé au
travail est en partie déterminée par le cadre collectif de travail.
Dans toute situation de travail, la santé est en jeu, car le travail participe de la construction de
l’identité et de l’accomplissement de soi, grâce à la dynamique de la reconnaissance du
travail. C’est la raison pour laquelle il y a toujours un engagement du travailleur dans son
travail. Cet engagement est à la fois social (« être reconnu dans son travail ») et subjectif (« se
reconnaître dans son travail »).
Les personnes ne restent pas passives face à ce qui, dans la situation, constitue des difficultés
ou des dangers. Elles s’appuient sur des savoir-faire de prudence individuels ou collectifs, et
se défendent psychiquement contre la perception de ce qui empêcherait de continuer à
travailler (la peur, le dégoût, l’ennui, les conflits de valeur, …). Autrement dit, les personnes
ne subissent pas passivement une « organisation », elles sont toujours actives que ce soit pour
influencer l’organisation ou pour tenir dans la situation de travail.
3.1.3 Peut-on identifier des « causes » des troubles psychosociaux ?
Il n’y a pas de relation mécanique entre des causes et des effets.
Les troubles psychosociaux ne sont pas l’effet d’une exposition à des contraintes, mais le
signe d’un « équilibre » rompu. L’analyse est complexe car les dimensions du problème sont
emmêlées et sédimentées.
Pour comprendre ce qui se passe dans les situations de travail, il faut s’intéresser à la fois à ce
que les personnes font, pensent et ressentent.
Il n’est donc pas possible de prédire, du seul fait de l’organisation (même si toutes les
organisations ne se valent pas), s’il y aura ou pas des troubles psychosociaux, parce qu’il
s’agit de ce qui est le plus humain de l’homme, son psychisme, la souffrance psychique et sa
destinée, et que, dans la plupart des cas, on ne peut pas prédire les effets psychiques de la
rencontre d’un sujet ou d’un collectif avec une organisation. Ainsi, il est des situations, où les