TEXTE 2 Crise : pourquoi 2016 pourrait être pire que 2008 Au vue du récent krach boursier de janvier, l'économie mondiale se dirige vers une crise économique et monétaire d'une intensité inégalée. Elle dépasserait celle des subprimes en 2008. La crise de 2008 était difficile à concevoir car bien peu pouvaient se targuer de connaître l'ampleur de la dissémination de produits toxiques dans différents compartiments d'épargne. Bien peu pouvaient concevoir que l'on laisserait choir – de manière totalement inconséquente – un établissement du format de Lehman Brothers. Bien peu auraient été en situation d'imaginer la thrombose qui a atteint le marché interbancaire. De la cupidité des hommes est née une crise durable : à meilleure preuve, les volumes de liquidités que les banques commerciales confient quotidiennement aux banques centrales de 2016, méfiantes qu'elles sont de la réalité de leurs concurrentes. Elles préfèrent un taux négatif au risque interbancaire ce qui en dit long sur leur configuration analytique de la situation concrète. Le trident de la défiance Nous sommes confrontés au plan bancaire à une crise des conditions de la création monétaire. L'incertitude du créancier quant à la qualité de ses contreparties, alliée à des normes sectorielles probablement élaborées trop drastiquement induisent un resserrement du crédit et un étranglement de l'économie réelle. Les statistiques avancées sont souvent trompeuses : on nous dit qu'il n'y a pas de credit-crunch, mais on omet de citer loyalement la multitude de cas où les demandes de prêts à faible occurrence d'aboutissement ne sont pas prises en compte. Idem pour l'autocensure des dirigeants qui ne vont pas jusqu'à formuler leurs demandes. Seules des personnes du rang de l'ancien gouverneur Christian Noyer ont eu la lucidité et la témérité d'un discours de vérité. Or, en économie moderne, l'essentiel de la création monétaire est bancaire. Face à ce blocage, le monde a inventé la notion de quantitative easing (QE) qui donne aux banques centrales la mission de procéder à des rachats d'actifs moyennant une injection de liquidités. Cette deuxième branche du trident fait désormais l'objet d'une défiance digne de celle qu'inspire une pompe à morphine erratique pour au moins deux raisons. D'une part, la qualité des actifs éligibles à la politique de rachat ne manque pas de poser question. Ce sujet sera probablement traité lors de la prochaine réunion de la Banque centrale européenne (BCE) en mars prochain. D'autre part, la transmission verticale supposée de ces liquidités vers des projets tangibles de l'économie réelle a sous-estimé l'épaisseur du papier buvard des banques souvent en quête de restauration de la qualité de leurs états bilanciels, engagements horsbilan inclus. Désormais, troisième pointe du trident, c'est bien le statut de la création monétaire qui est en jeu. Cela n'a rien à voir avec une crise financière et une dépréciation sous oscillations de diverses valeurs sur les marchés. Il s'agit d'une inquiétude sur la pierre angulaire du système capitaliste que constitue la monnaie d'où les tensions présentes entre les devises phares. On a tué la valeur de la rémunération de l'argent par la diffusion massive de taux epsilon voire négatifs : le système l'a intégré et nous lance un boomerang nommé déflation découlant des trappes à liquidités ainsi générées.