JUILLET 2012
L’EMPLOI CADRE DANS LES ZONES
FRONTALIÈRES
ÉTAT DES LIEUX–
–EMPLOI TRANSFRONTALIER EN FRANCE : DÉFINITIONS–
–PRINCIPAUX ENSEIGNEMENTS –
- Les territoires transfrontaliers sont confrontés à des problématiques spécifiques, notamment en matière d’emploi.
- Les déplacements transfrontaliers sont concentrés principalement vers la Suisse.
- Les cadres sont encore minoritaires dans ce type de déplacements mais le mouvement s’amplifie.
- Les cadres transfrontaliers ont trois principaux pays de destination : la Suisse, l’Allemagne et le Luxembourg.
La France connaît une position géographique particulière : elle possède
près de 3 000 kilomètres de frontières. 16 régions et 28 départements
sont frontaliers1. Environ 320 000 résidents de France métropolitaine
traversent la frontière pour aller travailler dans un pays limitrophe2. Les
flux en provenance de l’étranger sont de moindre ampleur : 11 000 per-
sonnes viennent travailler en France.
Est considéré comme transfrontalier un résident, c'est-à-dire une
personne qui a son domicile principal en France, qui déclare tra-
vailler à l’étranger dans un pays limitrophe (définition Insee).
Une autre définition plus précise considère qu’un travailleur est fron-
talier quand il passe l’essentiel de son temps professionnel de l’autre
côté de la frontière et que son salaire est essentiellement issu de cette
activité (définition MOT – Mission Opérationnelle Transfrontalière).
Ces définitions ne tiennent pas compte de la fréquence des navettes
(quotidienne, hebdomadaire …).
Les données disponibles proviennent pour la grande majorité des
données du recensement de la population de 2007. La définition du
travailleur transfrontalier privilégiée ici est donc celle de l’Insee.
Pour cette même raison, la définition de la catégorie cadre utilisée
dans ce document est celle employée par l’Insee. Elle est issue du
regroupement par catégorie socioprofessionnelle : cadres et professions
intellectuelles supérieures. Elle comprend les cadres d’entreprises, les
professions libérales et assimilés, les cadres de la fonction publique et
les professions intellectuelles et artistiques.
Cette classification est plus large que celle utilisée à l’Apec (salariés
cotisant à l’Agirc au titre des articles 4 et 4bis). Toutefois, on peut sup-
poser que dans ce cas particulier de déplacements transfrontaliers, les
cadres de la fonction publique sont marginaux et que la part des pro-
fessions libérales et assimilés reste très minoritaire. Les ordres de gran-
deur entre les deux définitions de cadre seraient donc très proches et
avoisinent les 46 600 cadres transfrontaliers.
1Mission parlementaire sur la politique transfrontalière. Rapport de mission. Juin 2010.
2« Vivre en deçà de la frontière, travailler au-delà », Insee Première, février 2011.
–UNE DYNAMIQUE SPÉCIFIQUE AUX ZONES FRONTALIÈRES–
Les territoires frontaliers, de par leur situation géographique, connais-
sent des problématiques en matière d’emploi assez spécifiques. Ils
peuvent accueillir des travailleurs venus de pays voisins et connaître à
l’inverse un exode de travailleurs résidant en France vers les pays fron-
taliers.
Cette spécificité peut être une contrainte, accroissant la compétitivité
entre les entreprises de part et d’autre de la frontière dans la recherche
de compétences. Mais elle peut aussi être un atout, en atténuant les
déséquilibres économiques entre deux régions frontalières, notamment
sur le marché du travail, en offrant des perspectives d’emploi de l’autre
côté de la frontière.
L’emploi transfrontalier a d’ailleurs, dans certains cas, permis de com-
penser les pertes d’emplois industriels. Sur certaines zones d’emploi,
les emplois transfrontaliers occupent plus de 40% des actifs de la
zone3. C’est le cas de Saint-Louis en Alsace, de Longwy en Meurthe et
Moselle, de Menton dans les Alpes-Maritimes et du Genevois français.
Ils peuvent aussi occasionner de nouveaux enjeux démographiques. Par
exemple, la mise en place d’accords bilatéraux entre la Suisse et
l’Union européenne permet aux Suisses de s’installer en tant que rési-
dents permanents dans les pays de l’Union. Cet accord a favorisé leur
installation sur certaines zones frontalières françaises, afin de bénéfi-
cier d’un coût foncier moindre que celui en vigueur en Suisse.
L’agglomération franco-genevoise s’est alors retrouvée confrontée à de
forts déséquilibres démographiques et économiques : elle compte plus
de 850 000 habitants pour environ 400 000 emplois4.
A contrario, le Luxembourg présente des dynamiques démographiques
positives, du fait de son solde migratoire le plus élevé d’Europe, les
Luxembourgeois représentent moins des deux tiers des 450 000 habi-
tants du pays.
Si l’existence d’une frontière est devenue plus un obstacle administra-
tif qu’une barrière géographique, il n’en demeure pas moins qu’un cer-
tain nombre de différences existent de part et d’autres des frontières :
différences de langues, de cultures, de réglementations et législations,
qui rendent nécessaires les coopérations entre territoires. C’est en effet
grâce à ces coopérations qu’une certaine unité peut exister.
3« Vivre en deça de la frontière, travailler au-delà », Insee Première, février 2011.
4L’actualité transfrontalière, MOT, n° 68, avril 2011.
–LA SUISSE CONCENTRE LA GRANDE MAJORITÉ DES FLUX TRANSFRONTALIERS–
PAYS DE DESTINATION DES TRAVAILLEURS
TRANSFRONTALIERS
Source: Insee, Recensement de la population, 2007.
La Suisse et le Luxembourg concentrent à eux deux plus de 60% des
déplacements transfrontaliers des résidents en France, ce qui repré-
sente près de 200 000 personnes.
Plus précisément, la majorité des déplacements vers la Suisse concerne
la zone située entre l’Ain, la Haute-Savoie et Genève. Vers le
Luxembourg, il s’agit principalement de résidents des deux départe-
ments frontaliers, la Moselle et la Meurthe-et-Moselle.
LAllemagne, deuxième pays de destination en 1999, est désormais
devancée par le Luxembourg, malgré les 52 500 travailleurs frontaliers
qu’elle accueille. Les principales zones d’accueil sont les aires urbaines
de Sarrebruck et de Karlsruhe.
L’Espagne, l’Italie et le Royaume-Uni comptabilisent relativement peu
de transfrontaliers. Leurs frontières communes avec la France se
confondent avec des frontières naturelles (massifs montagneux, mer)
qui sont un obstacle au développement des déplacements transfronta-
liers.
En revanche, les flux de travailleurs entrants sur le territoire français
restent assez faibles et constants : depuis 1999, environ 11 000 rési-
dents des voisins européens viennent travailler en France.
Allemagne 17%
Belgique 11%
Monaco 8%
Suisse 44%
Luxembourg 20%
Résidents en France
travaillant à l'étranger
Résidents à l'étranger
travaillant en France
(ou Monaco et Andorre)
Nombre de frontaliers
de 100 à 999
de 1 000 à 9 999
de 10 000 à 34 999
plus de 35 000
FLUX DE TRAVAILLEURS TRANSFRONTALIERS ENTRANTS ET SORTANTS
Source: INSEE, ANPE Nice, EurèsPyréméd, Eurès Eurazur, Eurès Sarlorlux, Conférence du Rhin Supérieur
(france et ses partenaires frontaliers)
INAMI, IWEPS (Belgique)
StatistischeLandesämter Saarland et Rheinland-Platz (Allemagne)
Bundesamt für Migration BFM (Suisse)
IDESCAT, EUSTAT, Instituto Nacional de Estadistica (Espagne)
Departament de treball (Andorre)
Au cours de la dernière décennie, le nombre de travailleurs transfron-
taliers résidant en France a nettement progressé. En 1999, 248 000 tra-
vailleurs frontaliers sortant du territoire français étaient comptabilisés.
En 2007, ils sont près de 320 000 à traverser une frontière pour
aller travailler (+29%)5. Certaines destinations plus que d’autres ont
bénéficié de cette croissance. C’est le cas de la Suisse et du
Luxembourg tandis que les flux vers l’Allemagne ont décru.
5« Vivre en deçà de la frontière, travailler au-delà », Insee Première, février 2011.
LES CADRES SONT MINORITAIRES PARMI LES TRANSFRONTALIERS
–LES CADRES ET PROFESSIONS INTELLECTUELLES : UNE POPULATION
SPÉCIFIQUE PARMI LES TRANSFRONTALIERS–
RÉPARTITION DES TRAVAILLEURS TRANSFRONTALIERS
PAR CATÉGORIE SOCIO-PROFESSIONNELLE
Source: Insee, Recensement de la population, 2007.
Au total, 46 600 cadres occupent un emploi dans une commune fron-
talière à l'étranger alors que leur résidence principale est située dans
une commune française. Ils représentent 15% des transfrontaliers. Les
cadres sont donc légèrement sous-représentés parmi les transfronta-
liers, le taux d’encadrement en France étant de 18% fin 20106. La
majorité des déplacements concerne les ouvriers (38%). Artisans, commerçants,
chefs d’entreprise 2% Cadres et professions
intellectuelles supé-
rieures 15%
Employés 22%
Ouvriers 38%
Professions
intermédiaires
23%
6Les effectifs cadres en France fin 2010, Apec, 2011
LA SUISSE CONCENTRE PLUS DE LA MOITIÉ DES FLUX DE CADRES TRANSFRONTALIERS
0%
10%
20%
30%
52%
38%
22%
32%
21%
20%
33%
35%
23%
27%
15%
19%
26%
56%
30%
17% 13%
20%
18%
17% 18%
11% 13%
11%
Ensemble
2%2%2%2%2%3%
Ouvriers
SuisseMonacoLuxembourgBelgiqueAllemagne
Employés
Professions
intermédiaires
Cadres et professions
intellectuelles supérieures
Artisans, commeants,
chefs d’entreprise
RÉPARTITION DES TRAVAILLEURS TRANSFRONTALIERS PAR CATÉGORIE SOCIO-PROFESSIONNELLE SELON LE PAYS DE DESTINATION
Source: Insee, Recensement de la population, 2007.
Note de lecture : parmi l’ensemble des travailleurs transfrontaliers se rendant en Allemagne, 52% sont des ouvriers.
La répartition des travailleurs transfrontaliers par catégorie socio-professionnelle est différente selon les pays. Les cadres sont davantage repré-
sentés parmi les transfrontaliers travaillant en Suisse, à Monaco et dans une moindre mesure au Luxembourg. Cela illustre en particulier la forte
demande dans ces pays de compétences dans le domaine de la finance et des services en général.
RÉPARTITION DES CADRES ET PROFESSIONS INTELLECTUELLES
SUPÉRIEURES TRANSFRONTALIERS SELON LE PAYS DE DESTINATION
Source: Insee, Recensement de la population, 2007.
Les flux de cadres sont particulièrement notables vers la Suisse : cette
destination concentre à elle seule 54% de l’ensemble des déplace-
ments transfrontaliers de cadres ou professions intellectuelles supé-
rieures (contre 44% pour l’ensemble des transfrontaliers).
Cela illustre la spécificité des offres d’emplois selon les zones. Elles
sont par exemple plutôt destinées à des ouvriers quand il s’agit d’aller
travailler dans les usines belges, luxembourgeoises ou allemandes. La
structure économique de chaque région détermine en effet la compo-
sition par catégorie socio-professionnelle des transfrontaliers selon le
pays de destination.
L’existence d’une langue commune est un autre facteur déterminant :
la forte proportion d’ouvriers transfrontaliers vers la Belgique et
l’Allemagne s’explique par la non exigence de la maîtrise du néerlan-
dais ou de l’allemand, pour ces postes, tandis que l’exercice d’un poste
d’encadrement la requiert davantage.
On observe en outre, une augmentation de la part des cadres et des
professions intermédiaires dans l’emploi transfrontalier entre 1999 et
2007. Et ce, même sur certains territoires traditionnellement indus-
triels, comme c’est le cas entre le Nord-Pas-de-Calais et la Belgique :
la proportion de cadres parmi les transfrontaliers y est passée de 18%
à 25% depuis 19997. A l’inverse, la part des ouvriers occupant un poste
de l’autre côté de la frontière décroît. Les évolutions économiques
mondiales, les délocalisations et la tertiarisation, vont dans le sens
d’un recentrage sur une main d’œuvre de plus en plus qualifiée.
Allemagne 13%
Belgique 7%
Monaco 9%
Suisse 54%
Luxembourg
17%
Artisans, commerçants
et chefs d'entreprise
Cadres et professions
intellectuelles supérieures
Professions intermédiaires
Ouvriers
Employés
Répartition des frontaliers
travaillant dans les pays limitrophes
par CSP
42 000
11 000
4 400
Nombre de frontaliers
travaillant dans les pays limitrophes
LES FLUX SORTANTS DE TRAVAILLEURS TRANSFRONTALIERS RÉSIDANT EN FRANCE PAR CATÉGORIE SOCIO-PROFESSIONNELLE
Source : Atlas de la coopération transfrontalière, 2ème édition, Mission Opérationnelle Transfrontalière.
7«La mobilité des habitants du Nord-Pas-de-Calais sur le marché du travail transfrontalier», CESR, Septembre 2010.
Note de lecture : Ne sont représentés sur cette carte que les volumes de transfrontaliers les plus importants.
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