Découvertes QS janv-février 2013_Layout 1 12-12-10 10:57 AM Page 22 22 Québec Science | Janvier ~ Février 2013 Découvertes QS janv-février 2013_Layout 1 12-12-10 10:57 AM Page 23 UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL OTORHINOLARYNGOLOGIE À bon entendeur... UNE TECHNIQUE RÉVOLUTIONNAIRE POUR RÉPARER LES TYMPANS VIENT D’ÊTRE MISE AU POINT À MONTRÉAL. DURÉE DE L’INTERVENTION, 20 MINUTES EN CLINIQUE EXTERNE. Par Viviane Desbiens e docteur Issam Saliba se rappelle encore la visite d’une patiente de 82 ans. « Elle avait une perforation totale du tympan, raconte-t-il, et elle voulait être opérée pour pouvoir faire de l’aquagym.» Les médecins considèrent que cette blessure peut se guérir, mais la chirurgie doit tout de même se faire en salle d’opération, sous anesthésie générale, et nécessite 10 jours de convalescence. « Pour une personne âgée, c’était un peu trop risqué, compte tenu du bénéfice que cela allait lui apporter. Surtout à cause de l’anesthésie générale », dit le médecin. Le docteur Saliba, otorhinolaryngologiste ainsi que chirurgien au CHU Sainte-Justine et au CHUM, à Montréal, tente alors une méthode qu’il teste déjà depuis quelques années sur des sujets plus jeunes. L’approche consiste à jumeler deux techniques connues des spécialistes : l’autogreffe d’un tissu graisseux et l’utilisation d’acide hyaluronique. « Ça n’avait jamais été fait pour une perforation complète, dit-il. L’avantage principal, c’est que cela ne nécessite pas d’anesthésie générale. L’intervention a pris 20 minutes. Deux mois plus tard, lorsque j’ai enlevé le pansement, j’étais ému et étonné, se rappelle-t-il, les yeux humides. Le tympan était entièrement restauré.» La réparation du tympan s’appelle une ILLUSTRATION : VIGG L myringoplastie. Pour l’otorhinolaryngologiste, il s’agit de faire une incision derrière l’oreille ou dans le conduit auditif pour avoir accès à la blessure. Un greffon qui peut provenir de l’enveloppe du cartilage de l’oreille, du cartilage lui-même ou encore de l’enveloppe du muscle temporal est ensuite prélevé. «Moi, je passe directement dans le trou de l’oreille, explique-t-il. Quant au greffon, il provient du pli de la nuque du patient. J’y pratique une minuscule incision de 5 mm, puis deux points de suture fondants. Les cheveux poussent par-dessus et rien n’y paraît. » Il installe ensuite de petites éponges derrière le tympan perforé, qui serviront de support au greffon. Une fois le greffon en place, il applique deux disques d’acide hyaluronique. « C’est une version synthétique d’un acide qu’on a naturellement dans notre corps, notamment dans les articulations et la peau », précise le docteur Saliba. Il recouvre ensuite le tout d’autres éponges fondantes et termine avec un bouchon de pansement dans le conduit de l’oreille. Pris en sandwich entre les petites éponges, le tympan abîmé a tout ce qu’il faut pour se reconstruire. La graisse du greffon aide les cellules du tympan à migrer et l’acide hyaluronique permet d’accélérer cette migration, avant que la graisse se résorbe. Issam Saliba, qui est également chercheur et professeur à l’Université de Montréal, a mené une étude comparative sur des enfants et des adultes, pour des perforations de toutes tailles. Ses résultats, parus l’année dernière dans la revue Archives of Otolaryngology – Head and Neck Surgery, confirment que sa technique a autant de succès que l’opération tradition- nelle, sans les inconvénients. Elle suscite d’ailleurs un intérêt grandissant. Selon le docteur Yannick Larrivée, président de l’Association d’otorhinolaryngologie et de chirurgie cervico-faciale du Québec, environ le tiers des médecins ORL québécois y ont maintenant recours. À bon entendeur... QS La Chambre de commerce du Montréal métropolitain a rendu hommage à sa façon à la créativité du docteur Saliba. Janvier ~ Février 2013 | Québec Science 23