MISE AU POINT Mémoire autobiographique épisodique et dépression C. LEMOGNE (1), P. PIOLINO (2, 3), R. JOUVENT (1, 4), J.-F. ALLILAIRE (1, 4), P. FOSSATI (1, 4) Episodic autobiographical memory in depression : a review Summary. Introduction. Autobiographical memory and personal identity (self) are linked by a reciprocal relationship. Autobiographical memory is critical for both grounding and changing the self. Individuals' current self-views, beliefs, and goals influence their recollections of the past. According to Tulving, episodic memory is characterized by autonoetic consciousness, which is associated with a sense of the self in the past (emotions and goals) and mental reliving of an experience. Its close relationship with self and emotion strongly involves episodic autobiographical memory in the psychopathology of depression. However, due to methodological and conceptual issues, little attention has been paid to episodic autobiographical memory in depression. Since the seminal work of Williams et al. 15 years ago, there is now growing interest around this issue. Literature findings. We reviewed the evidence for three major features of autobiographical memory functioning in depression : an increase in general memory retrieval (overgenerality), a mood-congruent memory effect and the high occurrence of intrusive memories of stressful events. Although it was first observed among suicidal patients, overgenerality is actually associated with both depression and post-traumatic stress disorder. Overgenerality is not associated with anxious disorders other than post-traumatic stress disorder, obsessive-compulsive disorder, or borderline personality disorder. Most of controlled studies carried out on autobiographical memory in depression rely on the Williams' Autobiographical Memory Test (AMT). When presented with positive and negative cue words and asked to retrieve specific personal events, depressed patients (unlike matched controls) are less specific in their memories. They tend to recall repeated events (categorical overgeneral memories) rather than single episodes (specific memories). Overgenerality in depression is : 1) more evident with positive than with negative events (mood-congruent memory effect) ; 2) related to avoidance of intrusive memories ; 3) quite stable over time, ie, remaining after remission ; and 4) related to short-term prognosis in depression. Although it is not clear whether overgenerality is a cause or an effect of depression, there is some evidence to suggest that overgenerality is a trait marker indicating vulnerability to persistent depression. Mood-congruent effect, a well-known effect in depression, has been addressed in both autobiographical and non-autobiographical memory. Depressed patients spontaneously recall more negative than positive memories. With the AMT, depressed patients take longer to respond to positive than to negative cues, whereas controls do the opposite. Depression is also associated with a high occurrence of spontaneous intrusive memories of stressful life events. Studies found intrusions and related avoidance, as measured by the Impact of Event Scale, to be positively correlated with overgenerality, whereas there was no direct link between performance on the Autobiographical Memory Test and stressful life events per se. Both Williams' mnemonic interlock model and Conway’s self-memory system are useful models to address the complexity of findings regarding autobiographical memory and depression. Discussion. According to Williams, repeated avoidance of stressful memories leads depressed patients to have an autobiographical memory functioning characterized by iterative retrievals of categorical overgeneral memories, producing an enduring overgeneral retrieval style. According to Conway, the recollection of autobiographical memories requires a retrieval process that provides access to sensory/perceptual event-specific knowledge (ie perceptions and (1) (2) (3) (4) Unité CNRS 7593, Groupe Hospitalier Pitié-Salpêtrière, 47, boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris. Unité INSERM E 0218, Université de Caen. Institut de psychologie, EPHE, CNRS UMR 8581, Université Paris V. Service de Psychiatrie d’Adultes, Groupe Hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris. Travail reçu le 2 mars 2005 et accepté le 21 mars 2005. Tirés à part : C. Lemogne (à l’adresse ci-dessus). L’Encéphale, 2006 ; 32 : 781-8, cahier 1 781 C. Lemogne et al. L’Encéphale, 2006 ; 32 : 781-8, cahier 1 feelings) via a personal semantic knowledge base (ie lifetime periods and generic events). This retrieval process (generative retrieval mode) relies on both executive functioning and current self-view, namely the working-self. Spontaneous memories, usually vivid, result from a direct retrieval mode in which event-specific knowledge is directly triggered. In line with this model, episodic autobiographical memory impairment in state depression may arise from the working self rather than from autobiographical knowledge. The mood-congruent effect may be explained by the current (depressed) self. The high occurrence of intrusive memories may be explained by lack of executive control during direct retrieval. Overgenerality may rely on the interaction of both executive dysfunction and current (depressed) self, within the working-self, during generative retrieval. Our review suggests that further evidence is needed to address the relationship between executive functioning, self and autobiographical memory in depression. Key words : Autobiographical memory ; Autonoetic consciousness ; Depression ; Episodic memory ; Overgenerality. Résumé. La mémoire autobiographique épisodique permet de remonter dans le temps pour revivre mentalement (conscience autonoétique) un événement personnellement vécu. La revue de la littérature sur le fonctionnement de la mémoire autobiographique épisodique au cours de la dépression met en évidence trois résultats principaux : la surgénéralisation des souvenirs, la congruence à l’humeur et la fréquence des souvenirs intrusifs. La surgénéralisation, c’est-à-dire le rappel préférentiel de souvenirs portant sur des événements répétés ou étendus, est relativement spécifique de la dépression. Cet effet a été répliqué quasi constamment dans la littérature depuis une quinzaine d’années. Il constitue un facteur de mauvais pronostic de l’épisode dépressif et possède probablement les caractéristiques d’un trait, notamment en cas de trouble dépressif récurrent. Les données les plus récentes suggèrent l’existence d’un trait acquis, équivalent d’une séquelle cognitive de la dépression. Il existe des liens entre évitement des souvenirs intrusifs et surgénéralisation. Ces liens demandent à être explorés au sein d’un modèle intégrant self, fonctions exécutives et mémoire autobiographique épisodique dans le domaine de la dépression. Mots clés : Conscience autonoétique ; Dépression ; Mémoire autobiographique ; Mémoire épisodique ; Surgénéralisation. INTRODUCTION La mémoire est une fonction cognitive hétérogène au sein de laquelle il est possible de distinguer plusieurs compétences mnésiques relativement indépendantes. Il est usuel de distinguer une mémoire à court terme, souvent assimilée à la mémoire de travail, et une mémoire à long terme. La mémoire à long terme peut être séparée en mémoires déclarative et non déclarative. La mémoire non déclarative concerne des informations non restituables sous forme verbale. Elle concerne le conditionnement, la mémoire procédurale (apprentissage d’habiletés perceptives, motrices ou cognitives) et les phénomènes d’amorçage perceptif. La mémoire déclarative concerne des informations restituables sous forme verbale et serait constituée d’une mémoire épisodique et d’une mémoire sémantique (35). La mémoire épisodique est la mémoire des événements, celle du « je me souviens ». Elle permet l’encodage et le rappel des événements personnellement vécus avec 782 leur contexte phénoménologique d’acquisition : (« je me souviens du bac de français, je me revois passer l’oral »). La mémoire sémantique est la mémoire des faits, celle du « je sais ». Elle permet l’encodage et le rappel d’informations dépourvues de référence à leur contexte d’acquisition (« je sais que Santiago est la capitale du Chili »). La mémoire autobiographique est généralement définie comme la capacité à récupérer des informations portant sur soi-même (self) (28). Ainsi définie, la mémoire autobiographique comporte nécessairement : (1) des événements autobiographiques relevant de la mémoire épisodique ; (2) des faits autobiographiques (lieu de naissance, nom des collègues, etc.) relevant de la mémoire sémantique. Au carrefour de l’émotion et de la cognition, la mémoire occupe une place centrale dans la sémiologie, la psychopathologie et la physiopathologie de la dépression. L’existence de troubles mnésiques au cours de la dépression concerne aussi bien la mémoire à court terme que la mémoire à long terme. De nombreux travaux ont étudié le fonctionnement de la mémoire épisodique au cours de la dépression à l’aide de paradigmes de mémoire non autobiographique, comme l’apprentissage de listes de mots (mémoire épisodique verbale) (voir 10 pour revue). À l’inverse, l’étude de la mémoire autobiographique épisodique a été longtemps négligée en raison d’ambiguïtés conceptuelles et méthodologiques (28). La mémoire épisodique est caractérisée par la recontextualisation du souvenir, c’est-à-dire le rappel de son contexte d’acquisition. Trop souvent limité à ses aspects temporo-spatiaux par les protocoles expérimentaux, ce contexte s’étend à toute la phénoménologie de l’expérience vécue, notamment aux cognitions et aux émotions. La mémoire autobiographique constitue donc un matériau d’étude écologique de la mémoire épisodique. Elle est la source du sentiment d’identité (8) et de la conscience du temps (39). Elle constitue également la cible naturelle des thérapies cognitives de la dépression. Enfin, il existe une congruence entre certaines régions cérébrales impliquées dans les tâches de mémoire autobiographique épisodique (20) et des régions d’intérêt dans la physiopathologie de la dépression (21), en particulier les structures médiofrontales et hippocampiques. L’étude des relations entre mémoire autobiographique épisodique et dépression a fait l’objet de plusieurs travaux L’Encéphale, 2006 ; 32 : 781-8, cahier 1 depuis une quinzaine d’années et suscite actuellement un intérêt croissant. Nous proposons une synthèse de l’état actuel des connaissances en nous limitant aux aspects épisodiques de la mémoire autobiographique au cours de la dépression. MÉMOIRE AUTOBIOGRAPHIQUE ÉPISODIQUE ET DÉPRESSION Nous envisagerons successivement les trois principaux résultats mis en évidence dans ce domaine : surgénéralisation, congruence à l’humeur, niveau élevé de souvenirs intrusifs. Nous exposerons leurs implications cliniques ainsi que les deux modèles fondamentaux susceptibles d’en rendre compte : le mnemonic interlock model de Williams (41), portant sur la mémoire autobiographique dans la dépression, et le self-memory system de Conway, portant sur la mémoire autobiographique en général. Effet de surgénéralisation (overgeneral recall) En réponse à un mot-indice, les sujets déprimés produisent, par rapport à des témoins appariés pour le sexe, l’âge et le niveau d’éducation, un plus grand nombre de souvenirs autobiographiques surgénéralisés (overgeneral memories). Aussi appelés souvenirs génériques (generic memories), ils sont définis comme se référant à des événements répétés, c’est-à-dire survenus plus d’une fois (« quand j’allais à la piscine en CE2 »), ou étendus, c’est-à-dire ayant duré plus d’une journée (« mon voyage à Sumatra »). Cette tendance serait plus marquée pour les mots-indices positifs et s’expliquerait surtout par un excès de souvenirs se référant à des événements répétés (categoric overgeneral memories). Cet effet de surgénéralisation a été mis en évidence dans la dépression en 1988 (23, 44). En 1986, Williams et Broadbent avaient déjà obtenu des résultats similaires dans une population de patients suicidants, immédiatement après une intoxication médicamenteuse volontaire, à l’aide de l’Autobiographical Memory Test (AMT) (42). L’AMT fonctionne sur le principe de mots-indices positifs, négatifs ou neutres à partir desquels le sujet est invité à produire un souvenir autobiographique spécifique, c’està-dire survenu une seule fois et ayant duré moins d’une journée. Ces résultats ont été répliqués dans une cohorte de patients suicidants plusieurs mois après une intoxication médicamenteuse volontaire (43). Depuis les premiers travaux menés par Williams et al., de nombreuses études ont répliqué l’effet de surgénéralisation au cours de la dépression. Les principaux résultats de ces travaux sont présentés dans le tableau I avec seulement une étude négative. Cette étude portait sur une population de 15 patients souffrant d’un trouble dépressif majeur récurrent à caractère saisonnier (9). Les résultats ne montraient pas d’effet de surgénéralisation par rapport aux témoins. Mémoire autobiographique épisodique et dépression L’effet de surgénéralisation semble relativement spécifique de la dépression et de l’état de stress post-traumatique (14, 22), avec des résultats négatifs dans les autres troubles anxieux (29, 38) et le trouble obsessionnel-compulsif (40), et contradictoires dans le trouble borderline (1, 15, 34). Dans une population de 103 patients hospitalisés avec ou sans accident vasculaire cérébral, Sampson, Kinderman et al. montraient que le nombre de souvenirs surgénéralisés était un indicateur de dépression mais pas d’accident vasculaire cérébral (30). Il n’existe pas d’argument en faveur d’un effet du sexe sur la spécificité des souvenirs au cours de la dépression. Cependant, à notre connaissance, cette question n’a pas fait l’objet de travaux spécifiques. L’effet de l’âge est mieux connu et diminue la spécificité des souvenirs, indépendamment de la dépression (12, 27). Chez le sujet âgé, la dépression entraîne une surgénéralisation accrue (12, 27). Effet de congruence à l’humeur Un effet de congruence à l’humeur (dépressive) chez les sujets déprimés, déjà décrit dans des tâches dites de mémoire « épisodique » verbale, s’observe également dans le domaine de la mémoire autobiographique. Sur un plan quantitatif, les sujets déprimés rappellent plus d’événements de vie négatifs et plus rapidement que les positifs. Ce biais mnésique n’est pas dû à un excès d’événements négatifs ni à un jugement exagérément négatif que porteraient les sujets déprimés sur leurs événements de vie (3). En 1995, Fromholt et al. montrent dans une population de patients déprimés âgés de plus de 70 ans que ce biais concerne essentiellement les cinq dernières années et disparaît après rémission de la dépression (12). Sur un plan qualitatif, certains travaux ont mis en évidence une surgénéralisation préférentielle des souvenirs évoqués à partir d’indices positifs (tableau I). Il s’agit d’un effet unidirectionnel mais inconstant dans la littérature, probablement moins robuste que l’effet de surgénéralisation per se. Cette interaction entre le groupe (déprimés versus témoins) et la valence émotionnelle (positive versus négative) témoigne d’un effet de congruence à l’humeur au sein de l’effet de surgénéralisation. Quelques travaux montrent une inversion de cette tendance après rémission (surgénéralisation préférentielle des souvenirs évoqués à partir d’indices négatifs) (24, 43). Souvenirs intrusifs La dépression, comme l’état de stress post-traumatique, est associée à l’existence de souvenirs intrusifs (4, 16, 33). Souvent liés à des événements traumatiques, il s’agit de souvenirs spontanés, pénibles et vivaces (hautement « épisodiques »). Les notions de souvenirs intrusifs et de surgénéralisation renvoient respectivement aux notions de rappel automatique (spontané) et contrôlé (volontaire) qui peuvent donc être associés. 783 C. Lemogne et al. L’Encéphale, 2006 ; 32 : 781-8, cahier 1 TABLEAU I. — Principaux résultats concernant la surgénéralisation au cours de la dépression. Référence Population Principaux résultats Williams et Scott, 1988 Moore et al., 1988 20 déprimés (tous hospitalisés) + 20 témoins SG déprimés vs témoins 17 déprimés (dont 3 épisodes mineurs) SG déprimés vs témoins + 17 témoins (uniquement des femmes) Brittlebank et al., 1993 22 déprimés SG stable à 3 et 7 mois SG initiale corrélée positivement aux scores HRSD à 3 et 7 mois Moffit et Singer, 1994 90 étudiants en psychologie SG déprimés vs non-déprimés (séparés par la médiane du score MAACL-R dépression) Kuyken et Brewin, 1995 58 déprimés +/– abus sexuel et (ou) physique SG corrélée positivement aux ATCD d’abus avant 17 ans sexuel et (ou) physique et à l’évitement des (uniquement des femmes) souvenirs intrusifs (IES) Kuyken et Dalgleish, 1995 33 déprimés + 33 témoins SG déprimés vs témoins Brewin et al., 1999 62 déprimés (tous hospitalisés) SG corrélée positivement aux scores IES (J0) mais pas BDI (M6) Scores IES (J0) corrélés positivement aux scores BDI (M6) Dalgleish et al., 2001 15 déprimés récurrents avec caractère Pas de SG déprimés vs témoins ; SG pour les saisonnier + 15 témoins indices positifs en hiver (épisode dépressif) corrélée positivement aux scores HRSD en été (rémission) Goddard et Dritschel, 2001 30 déprimés + 30 témoins SG déprimés vs témoins Wessel et al., 2001 42 déprimés (+/– trouble anxieux) + 51 anxieux SG déprimés vs témoins mais pas de SG anxieux vs témoins non déprimés + 24 témoins SG non corrélée avec CTQ Barnhofer et al., 2002 15 déprimés + 15 témoins SG déprimés vs témoins Plus de souvenirs catégoriels consécutifs déprimés vs témoins Nandrino et al., 2002 32 déprimés hospitalisés (16 épisodes isolés Avant rémission : SG déprimés vs témoins et 16 récurrents) avant et après rémission Après rémission : SG épisodes récurrents vs témoins mais pas de SG épisode isolé vs témoins Park et al., 2002 49 déprimés actuels + 47 déprimés en SG déprimés vs témoins, y compris dans le rémission + 26 cas psychiatriques non groupe en rémission déprimés + 33 témoins Pas de SG déprimés vs cas psychiatriques non déprimés Peeters et al., 2002 25 déprimés SG stable à 3 et 7 mois ; SG corrélée négativement avec CTQ (J0) et positivement avec MADRS à 3 et 7 mois Sampson et al., 2003 103 patients hospitalisés dont 53 AVC Pas de SG AVC vs non AVC SG prédicteur du score de dépression de l’HAD ECH + Ø Ø + ? Ø ? ? + Ø Ø + + Ø ? AMT = Autobiographical Memory Test ; AVC = accident vasculaire cérébral ; BDI = Beck Depression Inventory ; CTQ = Childhood Trauma Questionnaire ; ECH = effet de congruence à l’humeur ; HAD = Hospital Anxiety and Depression scale ; hosp. = hospitalisé(e)s ; HRSD = Hamilton Rating Scale for Depression ; IES = Impact of Event Scale ; MAACL-R = Multiple Affect Adjective Cheklist – Revised ; MADRS = Montgomery-Asberg Depression Rating Scale ; SG = surgénéralisation. L’Impact of Event Scale (IES) est une échelle destinée à mesurer l’intensité des souvenirs intrusifs liés à un événement traumatique. Elle permet le calcul d’un sous-score évitement (effort subjectif pour éviter tout rappel de l’événement) et d’un sous-score intrusion. En utilisant l’IES, Spenceley et Jerrom ont montré que des patientes souffrant d’un trouble dépressif majeur obtenaient des scores supérieurs aux témoins pour les deux sous-facteurs de l’IES (intrusion et évitement) (33). Par rapport aux patien784 tes en phase dépressive, les patientes en rémission avaient un sous-score intrusion inférieur, mais un sousscore évitement équivalent. Plusieurs travaux ont montré des corrélations positives entre surgénéralisation et souvenirs intrusifs au cours de la dépression. Il semble que les patients qui rapportent les souvenirs intrusifs les plus vivaces (rappel automatique) soient également ceux qui rapportent le plus de souvenirs généraux après présentation d’un mot-indice (rappel contrôlé). En L’Encéphale, 2006 ; 32 : 781-8, cahier 1 1995, Kuyken et Brewin ont utilisé l’AMT et l’IES dans une population de patientes déprimées, ayant ou non subi des violences physiques ou sexuelles pendant l’enfance (17). Les patientes déprimées rapportant des antécédents de violences physiques ou sexuelles pendant l’enfance présentaient des scores de surgénéralisation plus élevés. Ce premier résultat n’a pas été répliqué par la suite. En particulier, la surgénéralisation ne semble pas corrélée positivement aux scores du Childhood Trauma Questionnaire (1, 26, 38). Dans la même étude, Kuyken et Brewin montraient que la surgénéralisation était corrélée positivement à l’existence de souvenirs intrusifs liés aux violences subies dans l’enfance. Des résultats similaires ont été obtenus par Brewin et al. en 1998 dans une population de patients cancéreux déprimés (5). Les patients rapportant le plus d’efforts pour éviter des souvenirs intrusifs (sous-score évitement) présentaient plus de souvenirs surgénéralisés. En 1999, Brewin et al. ont utilisé l’AMT et l’IES dans une population de 62 patients déprimés (6). Il existait une corrélation positive entre le nombre de souvenirs surgénéralisés et les deux sous-scores de l’IES. Le pronostic de l’épisode dépressif à 6 mois était négativement affecté par l’intensité des souvenirs intrusifs et le degré d’évitement associé mais pas par le niveau de surgénéralisation. Dans l’ensemble de ces travaux, les corrélations entre la surgénéralisation et les sous-scores de l’IES étaient indépendantes de l’intensité dépressive. IMPLICATIONS CLINIQUES Surgénéralisation : marqueur pronostique ? En 1993, Brittlebank et al. ont utilisé l’AMT dans une population de 22 patients souffrant d’un épisode dépressif majeur selon les critères du DSM III-R (7). À 3 et 7 mois, le nombre de souvenirs surgénéralisés ne différait pas significativement pour les mots-indices positifs et négatifs. La surgénéralisation initiale (J0) en réponse aux indices positifs était un facteur de mauvais pronostic, nettement corrélé aux scores de la Hamilton’s Rating Scale for Depression à 3 et 7 mois. Lors de l’analyse post-hoc, les patients étaient séparés en deux groupes autour de la médiane des scores obtenus à l’AMT à J0. Dans le groupe ayant produit le plus de souvenirs surgénéralisés après un indice positif, 1 patient sur 9 était en rémission à 7 mois. Dans l’autre groupe, 8 patients sur 10 étaient en rémission. Des résultats similaires ont été obtenus avec la Montgomery and Asberg’s Depression Rating Scale (MADRS) (26) mais pas avec la Beck’s Depression Inventory (6). Ce résultat négatif s’expliquait par l’utilisation du score global de l’IES comme covariable. Dans l’étude de Dalgleish et al., portant sur des patients souffrant d’un trouble dépressif majeur récurrent à caractère saisonnier, le nombre de souvenirs surgénéralisés lors de l’épisode dépressif majeur (en hiver) était prédictif de l’intensité des symptômes résiduels après rémission (en été) (9). Mackinger et al. ont utilisé l’AMT dans une population de 65 patients hospitalisés pour sevrage Mémoire autobiographique épisodique et dépression alcoolique et ayant reçu le diagnostic de dépendance alcoolique et de trouble dépressif non spécifié (18). Le nombre de souvenirs surgénéralisés était positivement corrélé au score de la MADRS entre J21 et J35, c’est-àdire à un pronostic défavorable. Les auteurs proposaient d’utiliser la surgénéralisation comme marqueur de la dépression et comme aide à la décision thérapeutique. Surgénéralisation : marqueur trait ou état ? La persistance de la surgénéralisation à distance d’une tentative de suicide et (ou) d’un épisode dépressif suggère l’existence d’un trait surgénéralisant, d’où le titre explicite de l’article de Brittlebank et al. en 1993 (7) : Autobiographical memory in depression : state or trait marker ? La même équipe montrait en 1995 une corrélation positive entre neuroticism (névrosisme) et surgénéralisation (32). En 2000, Mackinger et al. ont montré que la surgénéralisation pouvait prédire l’existence d’antécédents dépressifs chez des femmes euthymiques (19). De même, Scott et al. ont montré que la surgénéralisation pouvait distinguer des patients bipolaires euthymiques de sujets témoins. La surgénéralisation était proportionnelle au nombre d’épisodes thymiques antérieurs (31). Des résultats similaires ont été obtenus par Park et al. en 2002 dans une population d’adolescents déprimés âgés de 12 à 17 ans (25). En 2002, Nandrino et al. ont utilisé l’AMT chez 32 patients déprimés présentant soit un épisode dépressif isolé, soit un trouble dépressif récurrent, avant et après rémission (24). En phase dépressive, les deux groupes présentaient un effet de surgénéralisation concernant les souvenirs évoqués à partir d’indices positifs. Après rémission, seuls les patients souffrant d’un trouble dépressif récurrent présentaient encore un effet de surgénéralisation concernant les souvenirs négatifs. Les patients ayant présenté un premier épisode dépressif ne différaient plus des témoins. Les données récentes suggèrent donc l’existence d’un trait surgénéralisant acquis. MODÈLES THÉORIQUES Modèle de Williams Depuis les premiers travaux de Williams, plusieurs auteurs ont postulé que la surgénéralisation protégeait le patient déprimé et (ou) traumatisé de l’excès d’affects négatifs liés au rappel des souvenirs intrusifs. La surgénéralisation correspond en effet à une réduction du rappel contrôlé des souvenirs spécifiques au profit de souvenirs généraux moins émotionnels. Ce phénomène est commun à la dépression et à l’état de stress post-traumatique. Au cours de la dépression, il existe des corrélations positives entre la surgénéralisation, les souvenirs intrusifs en général et leur évitement en particulier. Ces données invitent à considérer la surgénéralisation comme un processus adaptatif potentiellement favorable aux déprimés. Le modèle de Williams s’inscrit dans le cadre de cette hypothèse adaptative. 785 C. Lemogne et al. Selon Williams, la surgénéralisation témoignerait d’un style cognitif secondaire à l’évitement répété de souvenirs pénibles, c’est-à-dire des affects négatifs liés au rappel d’événements de vie négatifs (41). Cet évitement répété consoliderait l’activation de souvenirs généraux au détriment de souvenirs spécifiques, produisant un style surgénéralisant persistant entre les épisodes dépressifs (mnemonic interlock model). En 2002, Barnhofer et al. ont montré que les patients déprimés produisaient plus de souvenirs sugénéralisés par rapport aux témoins après un premier souvenir surgénéralisé, mais pas après un souvenir spécifique (2). Les patients déprimés avaient ainsi tendance à maintenir un style surgénéralisant là où les témoins faisaient preuve d’une plus grande flexibilité dans leur stratégie de rappel. Ce style surgénéralisant expliquerait la consolidation de schémas cognitifs dépressogènes, de plus en plus indépendants des événements vécus. Modèle de Conway À partir d’une revue extensive de la littérature, Conway et al. ont construit un modèle hiérarchique de la mémoire autobiographique (8). Ce modèle postule que l’accès à un souvenir autobiographique épisodique passe par un processus de reconstruction. Cette reconstruction du souvenir utilise des matériaux autobiographiques appartenant à trois niveaux de spécificité croissante : connaissances associées à une période de vie (« quand j’étais étudiant »), à un événement général (« aller au restaurant ») et détails perceptivo-sensoriels associés à un événement spécifique (« la tête que faisait mon père »). Ce niveau phénoménologique du souvenir est appelé « Event-specific Knowledge ». Selon Conway et al., la reconstruction d’un souvenir autobiographique épisodique procède de la mise en relation simultanée et coordonnée d’informations appartenant à ces trois niveaux. La mémoire épisodique y est donc figurée comme une « capacité à » et non une « capacité » contenant des souvenirs particuliers. Cette reconstruction ferait appel à un cycle de récupération sous la dépendance d’un système exécutif central. Ce système permettrait de récupérer et de maintenir en mémoire de travail une représentation transitoire du souvenir au prix d’un effort cognitif. Cela suggère que le souvenir n’est pas stocké tel quel dans la mémoire à long terme mais bien reconstruit lors d’un processus effortful de recontextualisation. La production d’un souvenir aspécifique (surgénéralisé), c’est-à-dire répété ou étendu, correspondrait à la non-reconstruction d’un souvenir autobiographique spécifique (inhibition par le système exécutif central de l’accès au niveau Eventspecific Knowledge). Plus spécifiquement, Conway introduit la notion d’un working self, présidant à la reconstruction du souvenir, en référence à la working memory de Baddeley. Il existe un large consensus, quasi tautologique, pour insister sur l’importance de la mémoire autobiographique dans la constitution du self (représentation de soi). Certains auteurs, tels que Conway, postulent que les relations entre mémoire autobiographique et self sont intrinsèques 786 L’Encéphale, 2006 ; 32 : 781-8, cahier 1 et donc réciproques. Selon Conway, le working self module la reconstruction des souvenirs autobiographiques en fonction des buts actuels du sujet. Dans ce modèle, l’accès au niveau Event-specific Knowledge est soit indirect (rappel contrôlé) soit direct (rappel automatique). Les travaux de Watkins et Teasdale ont montré que la spécificité des souvenirs pouvait être modulée par des manipulations cognitives portant sur le self (36, 37). Le nombre de souvenirs surgénéralisés chez des sujets déprimés et (ou) dysphoriques était réduit lors des conditions de distraction (versus rumination) et de décentrage (versus self-focus). Cet effet était indépendant d’un éventuel effet sur l’humeur. Williams et al. ont obtenu des résultats similaires chez des patients déprimés en montrant l’efficacité de techniques cognitives de décentrage (Mindfulness-Based Cognitive Therapy) sur la réduction de la surgénéralisation (45). DISCUSSION La méthodologie des travaux cités ne permet pas d’écarter totalement le rôle potentiel de l’hospitalisation et des traitements psychotropes dans la surgénéralisation. Les résultats obtenus avec des témoins hospitalisés (42), avec des patients non hospitalisés (2, 26, 38) et avec des patients en rémission (7, 19, 24, 25, 26) rendent peu probable le rôle de l’hospitalisation. En revanche, il n’existe pas d’argument satisfaisant permettant d’écarter le rôle des traitements psychotropes. Certains auteurs ont souligné que la surgénéralisation préférentielle des souvenirs positifs (13, 24, 25, 44) était difficilement imputable à un effet médicamenteux, mais aucune étude n’a porté sur une population clinique non traitée. La méthodologie des travaux cités ne permet pas non plus de faire clairement l’analogie entre d’une part, souvenirs spécifiques et surgénéralisés discriminés par l’AMT au cours de la dépression et, d’autre part, mémoire épisodique et sémantique. La notion de mémoire épisodique renvoie au modèle hiérarchique de Tulving (35). À la base de cette hiérarchie, l’utilisation inconsciente d’habiletés perceptives, cognitives ou motrices caractérise la mémoire procédurale, définie par un niveau de conscience dit anoétique. À un niveau intermédiaire, la restitution consciente de connaissances caractérise la mémoire sémantique, définie par un niveau de conscience dit noétique. Au sommet de l’échelle, la capacité de revivre une expérience avec son contexte phénoménologique d’acquisition caractérise la mémoire épisodique. Celle-ci est définie par un niveau de conscience autonoétique. Selon Wheeler, Stuss et Tulving, la conscience autonoétique sous-tendrait la représentation mentale consciente des expériences subjectives passées, présentes et futures, dépassant le cadre de la mémoire épisodique (39). Cependant, la méthodologie de l’AMT autorise à considérer comme spécifique un souvenir dénué de détails et (ou) de reviviscence, pourvu qu’il se réfère à un événement unique et ayant duré moins d’une journée. Elle ne prend pas non plus en compte le niveau de conscience associé au souvenir. Enfin, elle ne permet pas de contrôler a priori L’Encéphale, 2006 ; 32 : 781-8, cahier 1 l’âge d’encodage. Il s’agit pourtant d’un paramètre essentiel dans la vivacité des souvenirs (28). La surgénéralisation est un effet robuste et relativement spécifique de la dépression. Sa persistance après rémission suppose l’existence d’un trait surgénéralisant. Sa valeur en tant que marqueur pronostique est également bien étayée (7, 9, 18, 26), en dépit d’un résultat négatif (6). Ce résultat négatif est souligné par Nandrino et al. selon qui la surgénéralisation témoignerait davantage des épisodes dépressifs passés que futurs. Selon ces auteurs, la persistance de la surgénéralisation en cas de trouble dépressif récurrent suggère en effet l’existence d’un trait surgénéralisant acquis, équivalent d’une séquelle cognitive de la récurrence dépressive (24). Cependant, dans l’état actuel des connaissances, aucune étude prémorbide ne permet de confirmer cette hypothèse. En dépit de sa spécificité, de sa robustesse et de sa valeur pronostique, la place de la surgénéralisation dans la psychopathologie de la dépression reste opaque. Chez les patients déprimés, cette restriction du rappel contrôlé à des souvenirs autobiographiques généraux est marquée par un manque de flexibilité cognitive (2, 41). Cela implique de considérer le rôle des fonctions exécutives et de la mémoire de travail dans le rappel des souvenirs autobiographiques épisodiques au cours de la dépression. L’hypothèse d’un déficit des processus cognitifs effortful dans la dépression, en particulier ceux mettant en jeu les fonctions exécutives et la mémoire de travail (11), est bien étayée. Elle pourrait expliquer en partie l’effet de surgénéralisation. Cette hypothèse n’a fait l’objet d’aucune étude publiée. Plus généralement, bien qu’impliquant un rappel contrôlé, rien n’indique dans quelle mesure la surgénéralisation est elle-même un processus contrôlé (volontaire) ou automatique (tributaire de perturbations exécutives). L’hypothèse d’un processus contrôlé, c’est-à-dire d’un évitement délibéré de souvenirs pénibles, se heurte toutefois aux mêmes objections que l’hypothèse adaptative. L’hypothèse adaptative rend difficilement compte de la surgénéralisation préférentielle des souvenirs positifs chez les déprimés et du mauvais pronostic associé à la surgénéralisation. Elle est également difficilement réfutable et donc scientifiquement peu satisfaisante. Sa formalisation par Williams est plus séduisante et inscrit la surgénéralisation dans une séquence physiopathologique classique : adaptation initiale favorable puis dépassement (suradaptation) défavorable. Cependant ce modèle ne rend pas compte des interactions entre self, mémoire autobiographique, fonctions exécutives et mémoire de travail. De plus, l’évitement des souvenirs émotionnels n’est pas spécifique des patients déprimés. Plusieurs données expérimentales suggèrent que le working self limite l’accès aux souvenirs émotionnels susceptibles de désorganiser la poursuite des buts actuels chez le sujet sain (8). De fait, Conway et al. proposent un modèle particulièrement heuristique de la mémoire autobiographique susceptible de rendre compte des résultats obtenus dans la dépression : 1) surgénéralisation lors du rappel contrôlé (generative retrieval) par défaut d’accès au niveau Event-specific Knowledge ; Mémoire autobiographique épisodique et dépression 2) souvenirs intrusifs lors du rappel automatique (direct retrieval) par accès fortuit au niveau Event-specific Knowledge ; 3) effet de congruence à l’humeur lié au working self. CONCLUSION Le fonctionnement de la mémoire autobiographique épisodique au cours de la dépression est caractérisé par la surgénéralisation, la congruence à l’humeur et l’existence de souvenirs intrusifs. La surgénéralisation est : 1) un effet robuste plusieurs fois répliqué ; 2) un effet relativement spécifique de la dépression ; 3) un facteur de mauvais pronostic ; 4) probablement un trait acquis lié à la récurrence dépressive. Sa place dans la psychopathologie de la dépression demeure floue en raison de l’absence : 1) d’étude prémorbide ; 2) de recours à une définition stricte de la mémoire épisodique ; 3) de modèle holistique intégrant self, fonctions exécutives et mémoire autobiographique dans le cadre de la dépression. Références 1. ARNTZ A, MEEREN M, WESSEL I. No evidence for overgeneral memories in borderline personality disorder. Behav Res Ther 2002 ; 40 : 1063-8. 2. BARNHOFER T, DE JONG-MEYER R, KLEINPASS A et al. Specificity of autobiographical memories in depression : an analysis of retrieval processes in a think-aloud task. Br J Clin Psychol 2002 ; 41 : 411-6. 3. BLANEY PH. Affect and memory : a review. Psychol Bull 1986 ; 99 : 229-46. 4. BREWIN CR, HUNTER E, CARROLL F et al. Intrusive memories in depression. Psychol Med 1996 ; 26 : 1271-6. 5. BREWIN CR, WATSON M, McCARTHY S et al. Intrusive memories and depression in cancer patients. Behav Res Ther 1998 ; 36 : 113142. 6. BREWIN CR, REYNOLDS M, TATA P. Autobiographical memory processes and the course of depression. J Abnorm Psychol 1999 ; 108 : 511-7. 7. BRITTLEBANK AD, SCOTT J, WILLIAMS JMG et al. Autobiographical memory in depression : state or trait marker ? Br J Psychiatry 1993 ; 162 : 118-21. 8. CONWAY MA, PLEYDELL-PEARCE CW. The construction of autobiographical memories in the self-memory system. Psychol Rev 2000 ; 107 : 261-88. 9. DALGLEISH T, SPINKS H, YIEND J et al. Autobiographical memory style in seasonal affective disorder and its relationship to future symptom remission. J Abnorm Psychol 2001 ; 110 : 335-40. 10. FOSSATI P. Processus mnésiques et troubles des fonctions exécutives dans la dépression. Thèse pour le Doctorat d’Université, Université Paris VI, 2001. 11. FOSSATI P, ERGIS AM, ALLILAIRE JF. Troubles des fonctions exécutives dans la dépression unipolaire : une revue de la littérature. Encéphale 2002 ; 28 : 97-107. 12. FROMHOLT P, LARSEN P, LARSEN SF. Effects of late-onset depression and recovery on autobiographical memory. J Gerontol B Psychol Sci Soc Sci 1995 ; 50 : 74-81. 13. GODDARD L, DRITSCHEL B, BURTON A. The effects of specific retrieval instruction on social problem-solving in depression. Br J Clin Psychol 2001 ; 40 : 297-308. 14. HARVEY AG, BRYANT RA, DANG ST. Autobiographical memory in acute stress disorder. J Consult Clin Psychol 1998 ; 66 : 500-6. 787 C. Lemogne et al. 15. JONES B, HEARD H, STARTUP M et al. Autobiographical memory and dissociation in borderline personality disorder. Psychol Med 1999 ; 29 : 1397-404. 16. KUYKEN W, BREWIN CR. Intrusive memories of childhood abuse during depressive episodes. Behav Res Ther 1994 ; 32 : 525-8. 17. KUYKEN W, BREWIN CR. Autobiographical memory functioning in depression and reports of early abuse. J Abnorm Psychol 1995 ; 104 : 585-91. 18. MACKINGER HF, LEIBETSEDER MF, KUNZ-DORFER AA et al. Autobiographical memory predicts the course of depression during detoxification therapy in alcohol dependent men. J Affect Disord 2004 ; 78 : 61-5. 19. MACKINGER HF, PACHINGER MM, LEIBETSEDER MM et al. Autobiographical memories in women remitted from major depression. J Abnorm Psychol 2000 ; 109 : 331-4. 20. MAGUIRE E. Neuro-imaging studies of autobiographical event memory. Phil Trans R Soc Lond B 2001 ; 356 : 1441-51. 21. MAYBERG HS, FOSSATI P. Dysfonctional limbic-cortical circuits in major depression : a functional neuroimaging perspective. In : Barch DM, ed. Cognitive and Affective Neuroscience of Psychopathology. Oxford University Press, 2005. 22. McNALLY RJ, LASKO NB, MACKLIN ML et al. Autobiographical memory disturbance in combat-related posttraumatic stress disorder. Behav Res Ther 1995 ; 33 : 619-30. 23. MOORE RG, WATTS FN, WILLIAMS JMG. The specificity or personnal memories in depression. Br J Clin Psychol 1988 ; 27 : 275-6. 24. NANDRINO JL, PEZARD L, POSTE A et al. Autobiographical memory in major depression : a comparison between first-episode and recurrent patients. Psychopathology 2002 ; 35 : 335-40. 25. PARK RJ, GOODYER IM, TEASDALE JD. Categoric overgeneral autobiographical memory in adolescents with major depressive disorder. Psychol Med 2002 ; 32 : 267-76. 26. PEETERS F, WESSEL I, MERCKELBACH H et al. Autobiographical memory specificity and the course of major depressive disorder. Compr Psychiatry 2002 ; 43 : 344-50. 27. PHILLIPS S, WILLIAMS JMG. Cognitive impairment, depression and the specificity of autobiographical memory in the elderly. Br J Clin Psychol 1997 ; 36 : 341-7. 28. PIOLINO P, DESGRANGES B, EUSTACHE F. La mémoire autobiographique : théorie et pratique. Marseille : Solal, 2000. 29. RICHARDS A, WHITTAKER TM. Effects of anxiety and mood manipulation in autobiographical memory. Br J Clin Psychol 1990 ; 29 : 145-53. 30. SAMPSON MJ, KINDERMAN P, WATTS S et al. Psychopathology and autobiographical memory in stroke and non-stroke hospitalized patients. Int J Geriatr Psychiatry 2003 ; 18 : 23-32. 788 L’Encéphale, 2006 ; 32 : 781-8, cahier 1 31. SCOTT J, STANTON B, GARLAND A et al. Cognitive vulnerability in patients with bipolar disorder. Psychol Med 2000 ; 30 : 467-72. 32. SCOTT J, WILLIAMS JM, BRITTLEBANK A et al. The relationship between premorbid neuroticism, cognitive dysfunction and persistence of depression : a 1-year follow-up. J Affect Disord 1995 ; 33 : 167-72. 33. SPENCELEY A, JERROM W. Intrusive traumatic childhood memories in depression : a comparison between depressed, recovered, and never depressed women. Behav Cogn Psychother 1997 ; 25 : 309-18. 34. STARTUP M, HEARD H, SWALES M et al. Autobiographical memory and parasuicide in borderline personality disorder. Br J Clin Psychol 2001 ; 40 : 113-20. 35. TULVING E. How many memory systems are there ? Am Psychologist 1985, 40 : 385-98. 36. WATKINS E, TEASDALE JD. Rumination and overgeneral memory in depression : effects of self-focus and analytic thinking. J Abnorm Psychol 2001 ; 110 : 353-7. 37. WATKINS E, TEASDALE JD, WILLIAMS RM. Decentring and distraction reduce overgeneral autobiographical memory in depression. Psychol Med 2000 ; 30 : 911-20. 38. WESSEL I, MEEREN M, PEETERS F et al. Correlates of autobiographical memory specificity : the role of depression, anxiety and childhood trauma. Behav Res Ther 2001 ; 39 : 409-21. 39. WHEELER MA, STUSS DT, TULVING E. Toward a theory of episodic memory : the frontal lobes and autonoetic consciousness. Psychol Bull 1997 ; 121 : 331-54. 40. WILHELM S, McNALLY RJ, BAER L et al. Autobiographical memory in obsessive-compulsive disorder. Br J Clin Psychol 1997 ; 36 : 21-31. 41. WILLIAMS JMG. Depression and the specificity of autobiographical memory. In : Rubin D, ed. Remembering Our Past : Studies in Autobiographical Memory. Cambridge : University Press, 1996. 42. WILLIAMS JMG, BROADBENT K. Autobiographical memory in attempted suicide patients. J Abnorm Psychol 1986 ; 95 : 144-9. 43. WILLIAMS JMG, DRITSCHEL BH. Emotional disturbance and the specificity of autobiographical memory. Cogn Emotion 1988 ; 22 : 221-34. 44. WILLIAMS JMG, SCOTT J. Autobiographical memory in depression. Psychol Med 1988 ; 18 : 689-95. 45. WILLIAMS JMG, TEASDALE JD, SEGAL ZV et al. Mindfulnessbased cognitive therapy reduces overgeneral autobiographical memory in formerly depressed patients. J Abnorm Psychol 2000 ; 109 : 150-5.