Gestion progressive du diabète: Quelle est la place des

Gestion progressive du diabète: Quelle est la place des agonistes des
récepteurs du GLP-1 dans le schéma de traitement?
Dr Michael A. Nauck, PhD: Bonjour et bienvenue dans le programme Gestion progressive du
diabète: Quelle est la place des analogues des récepteurs du GLP-1 dans le schéma de
traitement? Je suis Michael A. Nauck, Médecin, Ph.D., Professeur de médecine interne et Chef
du centre de prise en charge du diabète à Bad Lauterberg dans la région de Harz, Allemagne.
Pour ce programme, je suis accompagné du Dr Tina Vilsbøll, Docteur en Sciences Médicales,
Chef de recherche sur le diabète à l'hôpital Gentofte et à l'Université de Copenhague à
Copenhague, Danemark; Eleuterio Ferrannini, Médecin, Professeur et Chef de l’unité
métabolisme dans le service de médecine interne à l'Université de Pise à Pise, en Italie, et
Stephen C. Bain, Médecin, Membre de l’école Royale de Médecine, Professeur de Médecine
(diabétologie) à l’école de médecine de l'Université de Swansea à Swansea, Royaume-Uni.
Dr Nauck: Dans ce programme, nous allons discuter des différences cliniques existant entre les
glucagon-mimétiques, agonistes des récepteurs du peptide-1 (analogues du GLP-1) et les
autres possibilités de traitements antihyperglycémiants après l'échec de la metformine. Les
données les plus récentes montrent que les avantages cliniques des analogues du GLP-1 vont
au-delà du contrôle du glucose et ont des effets sur la masse corporelle et sur les marqueurs de
risque cardiovasculaire (CV). Ces données cliniques portent aussi sur les différents profils des
analogues du GLP-1 disponibles sur le marché ainsi que sur les populations de patients qui
pourraient bénéficier d'un traitement de leur diabète par analogues du GLP -1.
Ele, en 2012, l'Association Européenne pour l'étude du Diabète (EASD) et l'American Diabetes
Association (ADA) a publié une prise de position sur la gestion de l'hyperglycémie chez les
patients atteints de diabète de type 2 (DT2). Qu'est-ce que l'approche de soins centrée sur le
patient signifie pour vous?
Dr Eleuterio Ferrannini: Le comité, qui s'est réuni pour émettre cette prise de position, a
estimé, à l'unanimité, que l’époque d’une approche normative ou algorithmique du traitement
de l'hyperglycémie chez les personnes atteintes de DT2 est révolue. Il existe trop
d'antihyperglycémiants actuellement disponibles mais pas de données cliniques suffisantes en
ce qui concerne la supériorité d’une association de ces thérapies par rapport à une autre.
La prise de position a recommandé une approche centrée sur le patient pour le traitement de
l'hyperglycémie, ce qui signifie que le patient est au centre de la relation avec le praticien et que
le traitement est respectueux des préférences individuelles des patients, de ses besoins et de
ses valeurs. Elle s’assure que les valeurs du patient guident toutes les décisions cliniques.
L'obstacle majeur à la réalisation de tout objectif thérapeutique est la non-adhérence du patient
au traitement et l'inertie du médecin, qui toutes deux s’aggravent de façon exponentielle après
l'interaction initiale. En conciliant les préférences, les besoins et les valeurs du patient, ainsi que
les considérations cliniques du médecin, l'idée est que cette combinaison peut améliorer la
gestion globale du diabète de type 2.
Dr Nauck: Quelle est l'approche générale de la gestion de l'hyperglycémie décrite par cette
prise de position?
Dr Ferrannini: La prise de position, dans une certaine mesure, s'éloigne de l'hémoglobine
glycosylée (HbA1c) en tant que le seul critère de décision de choix par rapport au traitement, et
se dirige vers la prise en compte de multiples facteurs et dimensions.
Les facteurs qui, en plus de l'HbA1c, sont importants pour la gestion de l'hyperglycémie incluent
le phénotype clinique, la durée de la maladie, le degré de perte de la fonction des cellules bêta,
la présence de complications, l'environnement dans lequel le patient vit, les ressources qui sont
disponibles pour ce patient, le risque d'hypoglycémie ou d'autres effets indésirables, et enfin les
préférences du patient.
Dr Nauck: Y compris le degré de motivation du patient?
Dr Ferrannini: Oui, y compris le degré de motivation, qui doit généralement être déterminé lors
du premier contact avec le médecin. L’autre contrainte est le coût des médicaments parce que
les nouveaux médicaments sont plus chers que les médicaments plus anciens, mais si le coût
des médicaments ne doit pas être le seul critère directeur, il ne devrait pas être négligé non
plus.
Dr Nauck: Existe-il des preuves scientifiques à l'appui de ces recommandations?
Dr Ferrannini: Il existe un certain niveau de preuves scientifiques, mais il y a aussi l'espoir que
la prise en charge du patient devienne désormais moins algorithmique et plus entre les mains
du médecin.
Dr Nauck: Parfois, les médecins doivent recommander un traitement avec lequel ils ne sont
pas à l'aise, ce qui est difficile pour eux.
Dr Ferrannini: Oui, c'est difficile pour les médecins, mais la façon dont la prise de position est
rédigée permet aux médecins de trouver des trajectoires individuelles et de faire des choix avec
lesquels ils sont à l'aise, basés sur les caractéristiques individuelles des patients.
Dr Nauck: L'éventail des choix de traitement pour la prise en charge de l'hyperglycémie est
large. Comment choisissez-vous le bon médicament pour chaque patient?
Dr Ferrannini: En plus des facteurs que j'ai mentionnés précédemment, il existe d'autres
considérations comprenant l'âge du patient, l’ancienneté de son diabète et les différences
ethniques, raciales et sexuelles. Le poids corporel est un facteur important car la grande
majorité des patients diabétiques de type 2 sont obèses ou en surpoids, et ils continuent à
prendre du poids, surtout si certains traitements plutôt que d'autres sont choisis. En outre, la
présence d'une maladie rénale chronique et le risque cardiovasculaire doivent également être
évalués.
Dr Nauck: Permettez-moi de vous présenter le cas d’un patient. Il s'agit d'une patiente bien
réelle de notre unité ambulatoire. Quand nous l'avons vue la première fois, elle avait 47 ans et
présentait un diabète de type 2 depuis environ 13 ans. Elle mesure 158 cm et pesait 100 kg, ce
qui se traduisait par un indice de masse corporelle de 40,1 kg/m2. Elle était traitée par
metformine depuis longtemps. Il y avait des raisons d'intensifier le traitement, et son médecin a
essayé d'instaurer une insuline basale entre les repas. Mais après quelques injections, elle a
présenté une réaction au site d'injection et l'insuline basale a dû être arrêtée. Pour un temps
très court, elle a essayé d'ajouter d'autres agents oraux, y compris un sulfamide (SU) et un
inhibiteur de la dipeptidyl peptidase-4 (DPP-4).
A ce stade, elle ne présentait pas de complications diabétiques. Dans son historique-patient on
retrouve une thyroïdectomie pour laquelle elle reçoit maintenant la L-thyroxine de
remplacement. Elle a de l'hypertension artérielle. Sa tension artérielle relevée dans notre
service était de 170/100 mm Hg.
Son taux d'HbA1c à l'époque était de 9,2% avec taux élevé de triglycérides (309 mg / dL) et un
taux de cholestérol (HDL-C) relativement normal (55 mg / dL). Son taux estimé de filtration
glomérulaire était supérieur à 60 mL / min; sa créatinine sérique était de 0,8 mg / dL. Sa
concentration sérique du peptide-C était de 0,67 nmol / L et sa TSH était de 5,5 mU / L.
Son traitement, à cette époque, était composé de metformine 1000 mg deux fois par jour, d’un
inhibiteur de l'enzyme de conversion de l'angiotensine (IEC) pour son hypertension: le lisinopril,
10 mg une fois par jour, et de L-thyroxine 125 mcg une fois par jour.
Stephen, que pouvez-vous nous dire au sujet des effets antihyperglycémiants des analogues
des récepteurs au GLP-1? Ceux-ci pourraient-ils être une option thérapeutique chez cette
patiente en particulier?
Dr Stephen C. Bain: Je pense que les analogues des récepteurs du GLP-1 seraient
certainement une option pour ce type de patiente. En outre, les lignes directrices de la dernière
conférence de consensus de l'ADA / EASD recommanderait précisément ce choix pour cette
patiente.
En termes d'efficacité antihyperglycémique, les analogues du GLP-1 apportent une baisse
significative du taux d'HbA1c, environ de 0,7% à 1,0% avec l'exénatide.
Dans l’étude clinique LEAD (Liraglutide Effect and Action in Diabetes), le traitement par
liraglutide a également montré des réductions significatives de l'HbA1c. En fait, de plus grandes
améliorations du taux d'HbA1C ont été observées avec le liraglutide par rapport à celles
obtenues par les sulfamides, thiazolidinediones (TZD), ou l'insuline.
Les analogues du GLP-1 sont très efficaces en termes de réduction du glucose sanguin, et
possèdent, en outre, d'autres effets qui présentent des avantages certains.
Dr Nauck: C'est tout à fait remarquable. Un analogue du GLP-1 peut contrôler la glycémie
aussi bien que l'insuline.
Dr Bain: Plus récemment, l'efficacité des analogues du GLP-1 a été comparée à celle des
inhibiteurs de la DPP-4. L’analogue du GLP-1, le liraglutide, a apporté une plus grande
diminution de l'HbA1c par rapport à l’inhibiteur de la DPP-4 le plus couramment prescrit, la
sitagliptine. Les analogues du GLP-1 permettent une réduction du glucose sanguin quel que
soit le taux d'HbA1c de départ.
Dr Nauck: Cette même comparaison a également été réalisée avec l'exenatide à raison d’une
fois par semaine, et nous avons à nouveau constaté un avantage très clair par rapport au
traitement par la sitagliptine. Une perte de poids a même été constatée.
Dr Bain: Les analogues du GLP-1 sont également associés à un faible taux d'hypoglycémies.
En effet, les études suggèrent que les analogues du GLP-1 sont associés à des taux
d'hypoglycémies proches de ceux du placebo, donc, beaucoup moins importants que les taux
d'hypoglycémies associés aux sulfamides ou à l'insuline. Les hypoglycémies tendent seulement
à être un problème avec les analogues du GLP-1 que lorsque ceux-ci sont utilisés en
association avec un sulfamide.
Dr Nauck: Les analogues du GLP-1 ont reçu l’AMM pour une utilisation en association avec les
sulfamides dans les cas où il y a un taux plus élevé d'épisodes hypoglycémiques. A ma
connaissance, les analogues du GLP-1 ne préviennent pas l'hypoglycémie, ils ne la
déclenchent tout simplement pas. Les médecins et les patients doivent être prudents lors de
l'utilisation d'une combinaison d'agents qui a le potentiel de déclencher des épisodes
hypoglycémiques (Sulfamides plus agonistes du GLP-1).
Stephen, utilisez-vous l’association analogues du GLP-1 plus sulfamides?
Dr Bain: Oui, j'utilise l’association analogues du GLP-1 plus sulfamides. Les directives cliniques
en vigueur au Royaume-Uni, qui est l’endroit je pratique, poussent grandement le clinicien à
utiliser les analogues du GLP-1 comme une option de traitement de troisième intention, en
association avec la metformine et un sulfamide. Quand un analogue du GLP-1 est ajouté à
l’association metformine plus sulfamide, nous réduisons la dose de sulfamide lors de l'initiation
du traitement et nous espérons être en mesure de retirer le sulfamide complètement.
Il est intéressant que vous ayez mentionné la possibilité de protéger les patients de
l'hypoglycémie. Il y a une théorie émergeante, au niveau de quelques études récentes portant
sur l’association de l'insuline avec les analogues du GLP-1, selon laquelle les analogues du
GLP-1 sembleraient protéger les patients contre l'hypoglycémie. Les taux d'hypoglycémies
observées avec l’association des analogues du GLP-1 et de l'insuline étaient, en fait, plus
faibles que ce que nous aurions pu le penser, étant donné le degré de contrôle glycémique. Il
s'agit d'un concept qui devrait être plus approfondi à l'avenir.
Dr Nauck: Tina, quelles données avons-nous en ce qui concerne les effets des analogues du
GLP-1 allant au-delà du contrôle glycémique?
Dr Tina Vilsbøll: Un grand nombre de données concernant les effets des analogues du GLP-1
dépassant les effets sur le contrôle glycémique, se développe. Nous savons que les récepteurs
du GLP-1 sont largement répandus dans tout le corps et que le phénotype de diabète de type 2
va bien au-delà d’une simple glycémie élevée. Les patients atteints de diabète de type 2
souffrent d'obésité. Lorsque les récepteurs du GLP-1 sont stimulés au niveau du système
nerveux central, les gens se sentent plus facilement repus et leur appétit est diminué. Par
conséquent, en plus du contrôle glycémique, les patients recevant des analogues du GLP-1
peuvent également perdre du poids.
Avec les sulfamides, les TZD et l'insuline, si l'HbA1c est réduite de 1%, le poids corporel
augmentera de 1-4 kg. Au contraire, avec l'administration d’analogues du GLP-1, l'HbA1c est
réduite sans augmentation concomitante du poids ou du nombre d’hypoglycémies.
Les réductions de poids semblent être plus prononcées avec la prise d’analogues du GLP-1 à
action prolongée.
La réduction du poids à la suite du traitement par analogues du GLP-1 est prolongée. Les
données actuelles suggèrent que la perte de masse corporelle peut être maintenue jusqu’à 1 à
2 ans après le début du traitement.
Dr Nauck: Est-ce que les effets bénéfiques des analogues du GLP-1 sont observés chez tous
les patients diabétiques de type 2 traités avec ces agents?
Dr Vilsbøll: Malheureusement, non. Les effets que nous voyons avec les analogues du GLP-1
sont dose-dépendants, de sorte que, plus la dose est élevée, plus l'effet est prononcé.
Dans l’absolu, Il n'est pas possible de prédire qui répondra à la thérapie par analogues du GLP-
1, mais il est raisonnable de tenter cette thérapie chez la plupart des patients. En règle
générale, les patients qui entament une thérapie plus tôt dans le cours de leur maladie et qui
ont un moindre taux d'HbA1c, répondront mieux au traitement. Chez les patients non-
répondants, il est important d'arrêter ce traitement.
Un autre effet extra-pancréatique très intéressant des analogues du GLP-1, est leur effet
potentiel sur le système cardiovasculaire. Des effets bénéfiques sur les marqueurs de maladie
cardiovasculaire, y compris le peptide natriurétique de type b, l’inhibiteur-1 de l’activateur du
plasminogéne (PAI-1), et la CRP hypersensible (CRPhs), ont été observés à la suite du
traitement par analogues du GLP-1. Ces résultats ne signifient pas que la maladie
cardiovasculaire est traitée, mais que ces effets favorables vont dans la bonne direction.
Nous avons effectué une méta-analyse récente qui montre une réduction de la PA systolique de
3-4 mm Hg avec l’administration des analogues du GLP-1.
Dr Nauck: Est-ce que la réduction de la PA était juste due à la perte de poids?
Dr Vilsbøll: Non, parce que les effets sur la PA peuvent être observés après environ deux
semaines de traitement à peine, soit beaucoup plus tôt que les répercussions sur le poids. Les
chercheurs ont émis l'hypothèse que les effets sur la pression artérielle peuvent être le résultat
de la vasodilatation et de l'effet natriurétique qui sont soutenus par la perte de poids. Les
patients diabétiques de type 2 avec les PA les plus élevées au départ, semblent tirer le plus
grand bénéfice des analogues du GLP-1.
Dr Nauck: Y a-t-il un risque que les patients ayant une PA normale ou basse deviennent
hypotendus?
Dr Vilsbøll: Lorsque vous examinez les données de la méta-analyse, vous constatez que la
Pression Artérielle des patients ayant une PA de départ de 120/80 mm Hg, reste inchangée ou
augmente légèrement.
Dr Nauck: Qu'est-ce qui se passe sur le plan clinique en ce qui concerne le risque
cardiovasculaire chez les patients traités par un analogue du GLP-1?
Dr Vilsbøll: Je n'ai pas la réponse dans l’immédiat. Plusieurs essais très importants sont
actuellement en cours pour aider à répondre à cette question. Les premières données devraient
être disponibles en 2014.
Dr Nauck: Stephen, est-ce que les analogues du GLP-1 sont sûrs à utiliser? Y a-t-il une
surveillance médicale spécifique nécessaire?
Dr Bain: Les effets à long terme sur la sécurité cardiovasculaire sont actuellement en cours de
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