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Calcul approché des intégrales définies
Pour ce chapitre, I= [a, b]est un segment réel avec a < b, C(I)est l’espace vectoriel réel
des fonctions définies sur Ià valeurs réelles et continues et pour toute fonction f C (I),on
note :
kfk= sup
xI|f0(t)|.
20.1 Formules de quadrature
Définition 20.1 On appelle formule (ou méthode) de quadrature à n+ 1 points sur C(I)la
donnée d’une forme linéaire ϕndéfinie sur C(I)par :
f C (I), ϕn(f) =
n
X
k=0
λn,kf(xn,k)
nest un entier naturel non nul, (xn,k)0knune suite de points deux à deux distincts dans
l’intervalle Iet (λn,k)0knune suite de réels non tous nuls.
On cherche des formules de quadrature, avec des coefficients xn,k et λn,k indépendants de f,
permettant d’approximer l’intégrale définie Zb
a
f(x)dx. On écrira alors :
Zb
a
f(x)dx wϕn(f) =
n
X
k=0
λn,kf(xn,k).
Pour chaque formule de quadrature il sera important de savoir estimer l’erreur de quadrature :
En(f) = Zb
a
f(x)dx ϕn(f).
Définition 20.2 Une formule de quadrature à n+ 1 points sur C(I)est dite d’ordre psi elle
est exacte sur Rp[x]et inexacte pour au moins un polynôme de degré strictement supérieur à
p.
Pour vérifier qu’une formule de quadrature est d’ordre p, il suffit, par linéarité de ϕnet de
l’intégrale, de vérifier qu’elle est exacte sur une base de Rp[x](par exemple la base canonique)
et inexacte pour un polynôme de degré p+ 1 (par exemple le polynôme xp+1).
473
474 Calcul approché des intégrales définies
Remarque 20.1 L’ordre maximum d’une formule de quadrature à n+ 1 points est 2n+ 1.En
effet en considérant le polynôme Pde degré 2n+ 2 défini par P(x) =
n
Q
k=0
(xxn,k)2,on a :
Zb
a
P(x)π(x)dx > 0 =
n
X
k=0
λn,kP(xn,k).
On dit qu’une méthode de quadrature définie par une suite de formes linéaires (ϕn)nNest
convergente si pour toute fonction f C (I)la suite (ϕn(f))nNconverge vers ϕ(f).
20.2 La méthode des rectangles à gauche
Pour I= [a, b]intervalle fermé borné, en prenant les points xn,k équidistants dans I, c’est-
à-dire :
xn,k =a+kba
n(0 kn)
et les coefficients λn,k tous égaux à ba
npour kcompris entre 0et n1,le coefficient λn,n
étant nul, on obtient la formule des rectangles à gauche :
Rn(f) = ba
n
n1
X
k=0
f(xn,k)
et le cours sur l’intégrale de Riemann nous dit que :
f C (I),lim
n+Rn(f) = Zb
a
f(x)dx.
La méthode des rectangles à gauche est donc convergente.
Cette méthode est d’ordre 0.En effet il est clair que Rn(f) = Zb
a
f(x)dx pour fconstante
et pour f(x) = xsur [0,1] ,on a pour tout entier n1:
Rn(f) = 1
n
n1
X
k=0
k
n=n+ 1
2n=1
2+1
2n6=Z1
0
xdx =1
2.
De manière plus générale, en choisissant pour tout entier kcompris entre 0et n1un réel
ξn,k dans l’intervalle [xn,k, xn,k+1],les sommes de Riemann :
ϕn(f) = ba
n
n1
X
k=0
f(ξn,k)
définissent une méthode de quadrature sur C(I)qui est exacte sur l’ensemble des fonctions
constantes et pour toute fonction fdans C(I)on a :
lim
n+ϕn(f) = Zb
a
f(x)dx.
La méthode des rectangles en un point quelconque de [xn,k, xn,k+1]est donc convergente.
Pour fmonotone, on peut facilement obtenir un encadrement de l’erreur d’approximation
pour la méthode des rectangles à gauche.
La méthode des rectangles à gauche 475
Théorème 20.1 Avec les notations qui précèdent, on a pour fmonotone sur [a, b]:
¯¯¯¯Zb
a
f(x)dx Rn(f)¯¯¯¯ba
n|f(b)f(a)|
Démonstration. Par exemple, pour fcroissante, on a pour kcompris entre 0et n1:
x[xn,k, xn,k+1], f (xn,k)f(x)f(xn,k+1)
ce qui entraîne en intégrant sur [xn,k, xn,k+1]:
ba
nf(xn,k)Zxn,k+1
xn,k
f(x)dx ba
nf(xn,k+1)
et en effectuant la somme :
ba
n
n1
X
k=0
f(xn,k)Zb
a
f(x)dx ba
n
n
X
k=1
f(xn,k)
soit :
0Zb
a
f(x)dx Rn(f)ba
n(f(b)f(a))
Dans le cas où fest décroissante, fest croissante et Rn(f) = Rn(f).On a donc :
0Zb
af(x)dx Rn(f)ba
n(f(b) + f(a))
ou encore :
0Rn(f)Zb
a
f(x)dx ba
n(f(a)f(b)) .
Remarque 20.2 Il n’est pas nécessaire de supposer que fest continue dans le théorème pré-
cédent puisque une fonction monotone est Riemann-intégrable.
Pour fde classe C1sur [a, b],on peut donner une majoration de l’erreur d’approximation
de Zb
a
f(x)dx par la méthode des rectangles à gauche.
Nous utiliserons à plusieurs reprises le lemme suivant, conséquence du théorème des valeurs
intermédiaires.
Lemme 20.1 Si ϕest une fonction continue sur [a, b]et (xk)1knune suite de points de [a, b]
avec n2,il existe alors un réel cdans [a, b]tel que :
n1
X
k=1
ϕ(xk) = n·ϕ(c)
Démonstration. En désignant par m[resp. M] la borne inférieure [resp. supérieure] de ϕ
sur [a, b],on a :
n·m
n1
X
k=0
ϕ(xk)n·M
et le théorème des valeurs intermédiaires nous dit alors qu’il existe cdans [a, b]tel que n1
P
k=1
ϕ(xk) =
n·ϕ(c).
476 Calcul approché des intégrales définies
Lemme 20.2 Soit fune fonction de classe C1sur [a, b].Il existe un réel cdans ]a, b[tel que :
Zb
a
f(x)dx f(a) (ba) = f0(c)
2(ba)2.
Démonstration. En désignant par F:x7→ Zx
a
f(t)dt la primitive de fnulle en a, cette
fonction est de classe C2sur [a, b]et le théorème de Taylor-Lagrange nous dit qu’il existe un
réel c]a, b[tel que :
F(b) = Zb
a
f(x)dx =F(a) + F0(a) (ba) + F00 (c)
2(ba)2
=f(a) (ba) + f0(c)
2(ba)2
On déduit de ce lemme une majoration de l’erreur dans la méthode de base du rectangle à
gauche : ¯¯¯¯Zb
a
f(x)dx f(a) (ba)¯¯¯¯kf0k
2(ba)2
Pour ce qui est de la méthode composée des rectangles, on a le résultat suivant.
Théorème 20.2 Soit fune fonction de classe C1sur [a, b]et nun entier naturel non nul.
Avec les notations qui précèdent, il existe un réel cn[a, b]tel que :
Zb
a
f(x)dx Rn(f) = (ba)2
2nf0(cn)
et on a : ¯¯¯¯Zb
a
f(x)dx Rn(f)¯¯¯¯kf0k(ba)2
2n
Démonstration. On a :
Zb
a
f(x)dx Rn(f) =
n1
X
k=0 Zxn,k+1
xn,k
f(x)dx ba
n
n1
X
k=0
f(xn,k)
=
n1
X
k=0 Zxn,k+1
xn,k
f(x)dx (xn,k+1 xn,k)f(xn,k)
=
n1
X
k=0
f0(cn,k)
2(xn,k+1 xn,k)2=(ba)2
2n2
n1
X
k=0
f0(cn,k)
où chaque cn,k est dans ]xn,k, xn,k+1[.
Le lemme 20.1 nous dit alors qu’il existe cndans [a, b]tel que n1
P
k=0
f0(cn,k) = n·f0(cn).On
a donc : Zb
a
f(x)dx Rn(f) = (ba)2
2n2n·f0(cn) = (ba)2
2nf0(cn)
et : ¯¯¯¯Zb
a
f(x)dx Rn(f)¯¯¯¯kf0k(ba)2
2n
La méthode des rectangles à gauche 477
Avec ce théorème, on retrouve le fait que :
lim
n+Rn(f) = Zb
a
f(x)dx.
Pour une fonction fsuffisamment dérivable, on peut donner, en utilisant la formule de Taylor-
Lagrange, un développement asymptotique de l’erreur d’approximation dans la méthode des
rectangles à gauche.
Lemme 20.3 Pour toute fonction f∈ C3([a, b],R),il existe des réel c1, c2, c3dans [a, b]tels
que :
F(b) = f(a) (ba) + ba
2(f(b)f(a)) (ba)2
12 (f0(b)f0(a))
+(ba)4
24 ¡f(3) (c1)f(3) (c2) + f(3) (c3)¢
Démonstration. En désignant par F:x7→ Zx
a
f(t)dt la primitive de fnulle en a, cette
fonction est de classe C4sur [a, b]et le théorème de Taylor-Lagrange nous dit qu’il existe un
réel c1]a, b[tel que :
F(b) = Zb
a
f(x)dx (20.1)
=F(a) + F0(a) (ba) + F00 (a)
2(ba)2+F(3) (a)
6(ba)3+F(4) (c)
24 (ba)4(20.2)
=f(a) (ba) + f0(a)
2(ba)2+f00 (a)
6(ba)3+f(3) (c1)
24 (ba)4
On a aussi, avec la formule de Taylor-Lagrange pour f:
f(b) = f(a) + f0(a) (ba) + f00 (a)
2(ba)2+f(3) (c2)
6(ba)3
soit, en multipliant la première relation par ba
2:
f0(a)
2(ba)2=ba
2(f(b)f(a)) f00 (a)
4(ba)3f(3) (c2)
12 (ba)4
et en reportant dans (20.1) ,on obtient :
F(b) = f(a) (ba) + ba
2(f(b)f(a)) f00 (a)
4(ba)3f(3) (c2)
12 (ba)4
+f00 (a)
6(ba)3+f(3) (c1)
24 (ba)4
=f(a) (ba) + ba
2(f(b)f(a)) f00 (a)
12 (ba)3+(ba)4
24 ¡f(3) (c1)f(3) (c2)¢
De même, avec :
f0(b) = f0(a) + f00 (a) (ba) + f(3) (c3)
2(ba)2
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