ITEM 241 : GOITRE ET NODULE THYROÏDIEN

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©Collège des Enseignants d’Endocrinologie, Diabète et Maladies Métaboliques. Mise à jour décembre 2004
ITEM 241 : GOITRE ET NODULE THYROÏDIEN
Objectifs pédagogiques terminaux : « diagnostiquer un goitre et un nodule thyroïdien », « augmenter
l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient »
Prérequis
L'unité fonctionnelle de la thyroïde est la vésicule thyroïdienne. Dans le tissu conjonctif on retrouve
d'autres cellules les cellules C d'origine neuro endocrine synthétisant la calcitonine.
La cellule thyroïdienne est polarisée, elle exprime sur la membrane basale le récepteur de la TSH, le
symporteur de l'iodure et sur sa membrane apicale au contact de la colloïde la thyroperoxydase et le
système régénérateur d'H2O2..
La biosynthèse des hormones thyroïdiennes requiert des apports réguliers en iode, les besoins sont évalués
à 150 µg/j, ils sont plus importants chez la femme enceinte.
La croissance de la thyroïde est sous la dépendance de la TSH et d'autres facteurs de croissance. La
disponibilité en iodure interagit avec la sensibilité à la TSH, en carence iodée les cellules thyroïdiennes
sont plus sensibles à la TSH et la croissance de la thyroïde est favorisée.
1) Le goitre
1 a) définition
Goitre veut dire augmentation du volume thyroïdien.
Quelle est la normale ?
Celle-ci dépend de l'âge, de la taille, des apports iodés. Pour un adulte en France, on parlera de goitre pour
un volume thyroïdien mesuré en échographie > 18 ml chez la femme, > 20 ml chez l'homme.
1 b) Le diagnostic de goitre
clinique : permet de suspecter le diagnostic : thyroïde bien visible, thyroïde entièrement palpable,
thyroïde dont la taille palpée des lobes est > à la 1ère phalange du pouce du patient (définition OMS)
c'est l'échographie qui permettra un calcul précis du volume thyroïdien et donc le diagnostic.
2) Les goitres simples
2 a) physiopathologie
2 a 1 facteurs nutritionnels : la carence iodée est à l'origine des goitres simples, pathologie
rencontrée à l'état endémique dans de larges zones du globe (plus d'1,5 milliards d'individus touchés),
demeurant sporadique < 10 % de la population en France.
Le développement du goitre répond à un mécanisme adaptatif thyroïdien à type d'hyperplasie assurant la
persistance d'une synthèse hormonale de T4 et T3 malgré des apports nutritionnels en iode insuffisants
(apports conseillés > 150 µg/j). Cette adaptation se fait sans élévation du taux circulant de TSH, mais par
une augmentation de la sensibilité des cellules thyroïdiennes à l'hormone, induite par le déficit en iode lui
même.
2 a 2 facteurs génétiques, cette pathologie se concentre souvent dans quelques familles. Importance des
antécédents familiaux à préciser dans les observations
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2a3 facteurs hormonaux Les femmes sont les plus concernées,
rôle des estrogènes ?
et surtout rôle des grossesses : il existe une augmentation de volume de la thyroïde de 10 à 20 %
durant toute grossesse, augmentation plus importante en cas de carence iodée. Beaucoup de goitres ne
régressent pas après l'accouchement.
2a 4 le tabac est un facteur favorisant
2 b) histoire naturelle du goitre simple
Le goitre se révèle vers l'adolescence ( 6 à 7 % ).
Il s'agit alors d'un goitre diffus avec hyperplasie homogène susceptible de régresser, de rester stable ou
de se compliquer selon les facteurs favorisants (génétique, grossesse, environnement).
Lorsque le goitre se complique, cela survient à long terme, très progressivement. La question du traitement
ne sera souvent soulevée (à tord car il faudrait prendre en charge les patients plus tôt en surveillant
convenablement l'évolution des goitres) que chez des patients âgés, présentant des pathologies associées,
qui rendent plus difficiles la prise en charge.
2 b 1) Le goitre multi nodulaire: le goitre, au début homogène, va au bout de quelques années être le
siège de tumeurs (adénomes voire cancers) ou de pseudotumeurs (zones de remaniement définissant des
nodules limités par des zones de fibrose). Cliniquement le goitre devient multinodulaire, les lésions sont
irréversibles.
Les complications
2 b 2) Le goitre multi nodulaire toxique : quand les nodules néoformés sont fonctionnels (nodules
chauds captant l'iode) et autonomes vis à vis de la TSH (synthèse de T4 ou T3 indépendante de la TSH
circulante), leur activité s'additionne au fur et à mesure des années, pour faire virer le goitre vers
l'hyperthyroïdie (goitre multinodulaire toxique). La prise exogène d'iode est un facteur qui favorise ce
passage à la toxicité.
2 b 3) Le goitre compressif : l'augmentation du volume du goitre et l'acquisition de nodules peut
entraîner des signes de compression locale d'autant plus dangereux que le développement se fera en intra
thoracique (goitres plongeants) avec possibilité de syndrome asphyxique par compression trachéale. Les
signes de compression sont : la dyspnée inspiratoire par compression trachéale, plus rarement la dysphonie
par compression du nerf récurrent, la dysphagie par compression oesophagienne, le développement d'un
syndrome cave supérieur par compression veineuse profonde.
Enfin, le développement d'un goitre multinodulaire rend très difficile le dépistage d'un carcinome
thyroïdien au sein des nombreux nodules.
2 b 4) L'exploration d'un goitre :repose sur
la clinique qui mesure la partie palpable du goitre, repère les éventuels nodules (à reporter
sur un schéma anatomique qui fait partie de l'observation) et recherche son retentissement sur les organes
de voisinage.
Le dosage de la TSH. Les goitres simples non compliqués sont euthyroïdiens, une
hyperthyroïdie avec TSH basse révèle le passage à la toxicité.
Les anti corps anti thyroïdiens sont négatifs ce qui un élément important du diagnostic
ifférentiel d'avec les thyroïdites chroniques.
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L'échographie permet une évaluation précise du volume, montre une thyroïde homogène
isoéchogène dans les goitres diffus, permet une description précise des nodules de la partie cervicale des
goitres multinodulaires (aspect mesure et localisation à reporter sur un schéma. pour permettre un suivi
longitudinal)
Pour les goitres plongeants
cliniquement les pôles inférieurs de la thyroïde ne sont pas perçus
la radio de thorax montre une déviation de la trachée parfois une réduction de son calibre
le meilleur examen est le TDM thoracique, sans injection d'iode (risque d'hyperthyroïdie en cas de
nodules fonctionnels), qui visualise le goitre et ses limites, les organes de voisinage, le calibre trachéal
2 c) Le traitement des goitres simples :
2 c 1) Prévention de la carence iodée par l'iodation du sel (non systématique en France) et
bientôt par la prescription de complément alimentaires dans des populations à risque essentiellement les
femmes enceintes. Cette action permettrait de réduire considérablement l'incidence du goitre dans la
population.
2 c 2) au stade du goitre simple, inhibition de la croissance thyroïdienne par la prescription d'un
traitement frénateur de la TSH (LT4). Il n'y a pas de consensus sur la durée et la posologie du traitement.
2 c 3) au stade du nodule, les traitements frénateurs sont peu ou pas actifs et peuvent parfois
faire basculer un goitre multinodulaire vers l'hyperthyroïdie (suivi hormonal des patients traités).
2 c 4) au stade des complications, goitre multinodulaire toxique ou goitre plongeant compressif les
traitements radicaux doivent être envisagés, chirurgie ou I131 pour les nodules fonctionnels, chirurgie
parfois urgente pour les goitres compressifs.
3) D'autres pathologies thyroïdiennes se révèlent par un goitre :
les thyroïdites chroniques sont responsables fréquemment d'un goitre ferme notamment dans la forme
thyroïdite de Hashimoto intérêt :
du bilan hormonal thyroïdien avec tendance à l'hypothyroïdie,
du dosage des anticorps anti TPO marqueurs de la maladie
de l'échographie qui montre un aspect hypoéchogène pseudonodulaire
En dehors de la forme atrophique toutes les autres thyroïdites sont susceptibles de donner un goitre,
rappelons aussi la maladie de Basedow. Cf cours sur hyper et hypothyroïdies
rarement le goitre est une conséquence d'une anomalie de l'hormonosynthèse par diverses
anomalies moléculaires (RTSH, transporteur de l'iode, TPO, Tg, pendrine) parfois responsable d'une
hypothyroïdie ou d'un tableau plus complexe dans les résistances aux hormones thyroïdiennes.
4) Les nodules thyroïdiens
4 a) définition : c'est une notion clinique : tuméfaction cervicale inférieure mobile à la déglutition avec le
reste du corps thyroïde
4 b) épidémiologie position du problème :
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très grande fréquence : nodules cliniques palpables dans 4 à 5 % de la population générale, nodules
infra cliniques mis en évidence à l'échographie dans plus de 50 % de la population de 60 ans. La fréquence
des nodules augmente avec l'âge, les femmes sont plus touchées que les hommes.
La découverte d'un nodule thyroïdien pose le problème du dépistage du cancer thyroïdien, sachant
qu'actuellement seuls 5 à 10 % des nodules opérés sont des cancers, la proportion étant beaucoup plus
faible pour les nodules échographiques, mais sachant également tout l'intérêt de traiter un cancer
thyroïdien au stade précoce de nodule isolé sans métastases.
La grande question actuelle est d'améliorer la stratégie diagnostique des nodules thyroïdiens dans le
but de respecter une lésion bénigne et de traiter au plus tôt un cancer.
2 c) Ainsi, la découverte clinique d'un nodule entraîne la recherche d'arguments en faveur de la
malignité
Par l'interrogatoire et l'examen :
Terrain : jeune âge ou à l'opposé patients de plus de 60 ans avec un nodule isolé, sexe masculin.
ATCD personnels d'irradiation du cou, actuellement traitement du Hodgkin, du cancer du sein, des
cancers ORL
ATCD familiaux de cancers thyroïdiens qui font évoquer le carcinome médullaire et le syndrome de
Sipple ou NEM2 (association cancer médullaire de la thyroïde, phéochromocytome, hyperparathyroïdie)
mais il existe aussi des familles de cancer papillaires et de cancers oxyphiles
Signes cliniques locaux : nodule de plus de 3 cm, dur, douloureux, adhérent aux structures de
voisinage, présence d'adénopathies cervicales, signes de compression ou d'irritation locale.
Signes cliniques généraux qui font rechercher un cancer médullaire : diarrhée motrice, flush.
Par les examens complémentaires (Fig 1)
CAT devant un nodule thyroïdien
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Le dosage de la TSH pour repérer les nodules toxiques ou prétoxiques (TSH basse : nodule
probablement chaud à vérifier en scintigraphie d'emblée, ce caractère fonctionnel avec extinction du
parenchyme adjacent n'étant qu'exceptionnellement associé à un cancer)
Le dosage de la calcitonine marqueur du cancer médullaire à demander en cas de symptôme et pour
certains au moins 1 fois devant tout nodule.
Echographie : un cancer est plus volontiers mal limité, hypoéchogène siège de petites calcifications
mais aucun critère échographique n'est suffisamment fiable pour permettre un diagnostic de malignité.
On attendra de l'échographie :
la mesure exacte de la taille du nodule : indication chirurgicale pour les nodules solides de plus de 3
cm ; permettant une surveillance longitudinale pour les nodules plus petits
le diagnostic entre kyste d'aspect liquidien et nodule plein ou remanié
la recherche de nodules infra cliniques associés faisant poser le diagnostic de goitre multinodulaire
plutôt que de nodule isolé.
Scintigraphie : seuls les nodules froids sont suspects de cancers (Fig 2) mais ils représentent 85 %
des nodules palpés. Le caractère non fixant n'est donc pas suffisamment spécifique pour donner des
arguments en faveur de la malignité. La scintigraphie est de moins en moins utilisée pour le diagnostic des
nodules est mais reste un examen intéressant dans nodules avec TSH basse.
Fig. 2 : nodule thyroïdien froid
L'examen clef est la ponction cytologique à l'aiguille fine ++++. On ponctionne les nodules
cliniques ou suspects en échographie, la limite est en général d'1 cm. La ponction permet d'analyser des
cellules issues du nodule. Parfois elle permettra aussi d'évacuer un kyste.
Sous réserve d'une technique et d'une interprétation fiable et validée, celle-ci donnera 4 types de
résultats : bénin probable permettant de respecter le nodule, malin indiquant formellement la chirurgie (
Fig 3 et 4), douteux notamment dans les lésions vésiculaires ou à cellules de Hurtle faisant discuter la
chirurgie (un diagnostic est nécessaire une lésion douteuse ne peut être en général laissée en place),
ininterprétable nécessitant une nouvelle ponction.
Dans les nodules laissés en place, la ponction thyroïdienne sera renouvelée pour augmenter la
fiabilité du diagnostic.
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Fig 3 : Carcinome papillaire : aspect
cytologique
calcosphérite
Fig. 4 Lésion folliculaire (vésiculaire) suspecte à la cytologie (dans 17 à 54 % il s’agit de cancers)
2 d) Traitement
Le traitement médical des nodules par hormones thyroïdiennes à dose frénatrice est peu efficace.
Il peut être discuté à titre de test, son résultat ne constitue pas un argument permettant de réfuter une
étiologie maligne.
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Le traitement chirurgical consiste en une loboisthmectomie du côté du nodule avec examen
extemporané ou examen anatomo pathologique ultérieur qui décidera en fonction des résultats (cancer ou
non ) et des facteurs pronostiques de gestes complémentaires: (totalisation, curage, iode 131).
4 e ) Surveillance
Tout nodule laissé en place requiert une surveillance longitudinale clinique devant s'assurer de la stabilité
des lésions.
5) Les cancers thyroïdiens (étiologie des nodules de la thyroïde)
C'est un cancer rare, son incidence dans le registre des cancers de la thyroïde des département de la
Marne et des Ardennes est de :
5,57/100 000/an chez les femmes et de 1,67/100 000/an chez les hommes :
5 1 – Anatomie pathologique (voir annexe)
5 1 1) LES CANCERS D’ORIGINE VESICULAIRE
L ES CANCERS DIFFERENCIES DE BON PRONOSTIC : 85 %
- papillaire (métastasent par voie ganglionnaire), les plus fréquents : 50 à 60 %
- vésiculaire (voie sanguine) : 10 à 20 %
L ES CANCERS PEU DIFFERENCIES DE MAUVAIS PRONOSTIC
- vésiculaire peu différencié
- anaplasique : 5 à 10 %
5 1 2) LES CANCERS MEDULLAIRES SPORADIQUES OU FAMILIAUX (NEM2) 5 %
5 1 3) LES AUTRES : lymphome, métastases : 1 %
aide à prévoir le pronostic
aide à planifier le traitement
T TUMEUR
Tx tumeur non mesurée
T0 tumeur non accessible cliniquement
T1 tumeur de moins de 1 cm
T2 tumeur entre 1 et 4 cm
T3 tumeur de plus de 4 cm limitée à la thyroïde
T4 tumeur dépassant la capsule
Quand la classification repose sur l'anatomie pathologique la lettre p sera rajoutée.
N GANGLIONS
Nx ganglions non mis en évidence
N0 pas de ganglion
N1 métastases
5 2) La classification TNM
M METASTASES
M0 absence de métastase
M1 métastases
5 3) Les facteurs pronostiques
La notion de facteur pronostique permet, pour un malade donné, d'évaluer la gravité de son cas et
d'adapter la stratégie thérapeutique en fonction de cette gravité.
Les facteurs reconnus par la plupart des équipes sont :
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l'âge supérieur à 45 -50 ans
la taille de la tumeur et notamment le stade T4
le type histologique : cancers peu différenciés
l'existence de métastase
Un score pronostique peut être établi pour chaque malade lors du diagnostic.
5 4) Le diagnostic
Les signes cliniques
Le plus souvent : nodule isolé (cancer dans moins de 10 % des nodules)
Parfois signes évocateurs d'emblée : gêne cervicale, compression, douleur, nodule dur, adénopathies
cervicales, flush et diarrhées en rapport avec un cancer médullaire. Les signes locaux sont particulièrement
marqués dans les cancers anaplasiques.
Parfois, métastases révélatrices plutôt adénopathies cervicales pour les cancers papillaires, métastases
à distance pulmonaires et osseuses pour le cancer vésiculaire.
La stratégie diagnostique a été exposée dans le chapitre nodules
5 -5) Le traitement
5 5 1) La chirurgie
Elle a pour objectif de retirer tout le tissu cancéreux cervical, un geste sur la thyroïde est en règle associé à
un geste sur les ganglions.
Selon les équipes, les protocoles chirurgicaux sont variables, ceux-ci s'adaptent au score pronostique après un
inventaire des lésions facilité par l'examen anatomo pathologique extemporané.
Le plus souvent, en cas de cancer clinique (lésion de plus de 1 cm) on pratique une thyroïdectomie totale ne
laissant que quelques résidus protégeant les parathyroïdes et un curage adapté.
Dans les microcancers < 1 cm souvent découverts fortuitement (leur pronostic est excellent et les rechutes
sont très rares) sur l'examen anatomopathologique définitif, il est souvent possible de ne pas réopérer les
patients, même si le geste pratiqué n'a été que partiel, en se donnant les moyens de la surveillance
longitudinale.
UN CAS PARTICULIERS
Cancer médullaire de la thyroïde (CMT) : thyroïdectomie totale avec curage ganglionnaire complet
bilatéral.
5 5 2) Utilisation thérapeutique de l'I 131 après la chirurgie
L'I131 est un élément essentiel dans le traitement et la surveillance des cancers thyroïdiens
différenciés à l'exclusion des autres cancers qui ne fixent pas l'iode. Cette méthode permet d'effectuer une
radiothérapie métabolique ciblée sur les cellules thyroïdiennes.
Après thyroïdectomie totale l'I131 permet l'ablation de tout le tissu thyroïdien cervical restant et le bilan
des lésions à distance. Une fois la thyroïde entièrement détruite (préalable indispensable à son efficacité) il
pourra être utilisé pour traiter les métastases.
Préparation des malades
L'administration de l'I131 implique de mettre le patient en hypothyroïdie. L'élévation de la TSH ainsi
obtenue, stimule la captation de l'iode par les cellules thyroïdiennes (arrêt du traitement de LT4 pendant 4
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semaines, relais éventuel par la T3 dans les 15 premiers jours). S'assurer de l'absence de surcharge iodée
(bétadine, cordarone, examens radiologiques avec produits de contraste iodé). L'emploi du thyrogène (TSH
humaine recombinante) vient maintenant limiter ces périodes d'hypothyroïdie provoquées.
L'hospitalisation en chambre protégée est obligatoire dès que la dose administrée est supérieure à 740
MBq (20 mCi) pour recueil des effluents. L'iode radioactif (3,7 GBq = 100 mCi) est administré sous forme de
gélule. Aucun effet secondaire n'est à redouter tant que les doses cumulées restent faibles, importance de
la contraception chez la jeune femme (pas de grossesse avant 1 an). Des mesures de radioprotection
rigoureuses doivent être mises en place.
Détection scintigraphique
Systématique 4 jours après la prise d'iode. Elle permet d'évaluer l'importance du reliquat thyroïdien et
d'effectuer un bilan des lésions à distance.
5 5 3) Le traitement frénateur
Il est systématique dans les cancers différenciés hormono-sensibles.
Les cancers différenciés de la thyroïde sont sensibles à la TSH qui joue un rôle de facteur de
croissance. La mise des patients sous thyroxine (le traitement frénateur) a pour but de prévenir ce risque en
inhibant la sécrétion hypophysaire de TSH. Le caractère efficace du freinage est jugé sur le dosage de la
TSH (< 0,2 µUI/ml) sans signe clinique d'hyperthyroïdie (T3l qui reste normale). Bien sûr, le traitement est
mis en place quand l'I131 n'est plus indiqué (après le bilan des lésions par scintigraphie).
5 5 4) Les autres traitements
L'irradiation externe
Utilisant les hautes énergies, l'irradiation peut être très utile :
dans les formes extracapsulaires
dans les métastases douloureuses
La chimiothérapie
Elle est peu ou pas efficace dans les cancers différenciés.
La chimiothérapie est une urgence dans les formes anaplasiques.
C'est le traitement principal dans les lymphomes de la thyroïde.
6) Surveillance des patients
La surveillance va reposer sur les éléments suivants : l'examen clinique, le dosage de la thyroglobuline
marqueur biologique du tissu thyroïdien, l'échographie cervicale, la réalisation de scintigraphie corps entier à
l'iode 131. D'autres explorations à visée morphologique seront pratiquées en fonctions des résultats de ces
examens.
6 1) L'examen clinique
Il consiste en la palpation attentive de la région cervicale à la recherche d'une récidive locale et
surtout d'adénopathie cervicale.
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6 2) le dosage de la thyroglobuline
La thyroglobuline (Tg) est le marqueur tumoral des cancers différenciés de la thyroïde après
thyroïdectomie totale. En l'absence de tissu thyroïdien, son taux doit être indétectable. Toute élévation de ce
taux indique la persistance d'un processus pathologique. Le dosage de la Tg doit toujours être couplé à la
recherche d'auto-anticorps anti-thyroglobuline qui interfèrent dans le dosage de la Tg.
Le taux de Tg doit être vérifié après sensibilisation par la TSH obtenue par un arrêt du
traitement frénateur (4 semaines pour la thyroxine entraînent une stimulation des cellules métastatiques).
Cette stratégie permet de détecter des taux de Tg élevés chez 6 % des patients semblant indemnes de toute
récidive ou métastase.
6 3) les scintigraphies corps entier à l'iode 131
Elles sont à visée diagnostique et les doses utilisées, de 74 à 185 MBq (2 à 5 mCi) selon les centres,
ne nécessitent pas d'hospitalisation. Elles ne peuvent être réalisées qu'après arrêt du traitement frénateur
4 semaines auparavant ou sous thyrogen. La scintigraphie corps entier est réalisée 3 jours après
l'administration de l'iode 131, à l'aide d'une gamma-caméra.
6 4) Les examens morphologiques
L'échographie cervicale : c'est l'examen majeur de surveillance quand du tissu thyroïdien a été laissé
en place. Elle détecte les récidives locales et les adénopathies.
Quand la scintigraphie détecte une lésion son volume est précisé par un examen morphologique ciblé.
Certaines métastases ne sont pas fonctionnelles, c'est-à-dire qu'elles ne fixent pas l'iode 131. Se
pose alors le problème de leur localisation lorsqu'elles ne sont révélées que par une élévation de la Tg. La
recherche de ces métastases reposent sur les examens morphologiques : recherche d'une récidive locale par
échographie cervicale, radio pulmonaire, scanner cervicomédiastinal et thoracique, scintigraphie osseuse,
échographie hépatique, scanner cérébral.
La sur veillance est réalisée selon un rythme qui répond à des protocoles précis
Cette attitude est modulable en fonction du groupe pronostique dans lequel se trouve le patient, allégée pour
les patients du groupe de bon pronostic.
Cette surveillance est maintenue à vie.
7) Les métastases
La fréquence des métastases varie de 10 à 20 % selon les séries.
La présence de métastases à distance dans les cancers différenciés de la thyroïde aggrave
considérablement le pronostic vital puisque seulement 23 % des patients sont vivants à 10 ans, alors que le
taux de survie à 10 ans, en l'absence de métastases varie de 78 à 98 % selon les études.
Elles sont découvertes dans la moitié des cas au moment du diagnostic.
Elles sont localisées par ordre de fréquence décroissante : au poumons, à l'os, parfois aux 2 sites, plus
rarement métastases cérébrales, hépatiques, exceptionnellement cutanées.
Seuleument 2/3 des métastases sont fixantes
Les signes radiologiques : Les métastases pulmonaires peuvent être infraradiologiques découvertes par
la scintigraphie à l'iode 131. Parmi les métastases osseuses isolées, seulement 11 % sont découvertes à un
stade infraradiologique.
Les métastases infra-radiologiques fixant l'iode 131 peuvent être contrôlées par cette radiothérapie
métabolique. Pour les autres lésions de multiples traitements doivent être discutés.
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CONCLUSION
La prise en charge du cancer de la thyroïde est particulièrement bien codifiée. 2 groupes de patients
s'opposent. Les plus nombreux ont un cancer thyroïdien bien différencié sans métastase, de bon pronostic.
Quand cela est nécessaire, l'iode 131 permet un traitement spécifique in situ. Le traitement frénateur est un
des éléments du contrôle à long terme.
Par contre, quelques patients ont un cancer peu différencié, qui fixe peu ou mal l'iode et dans ce groupe le
cancer de la thyroïde demeure d'évolution redoutable.
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Classification OMS des tumeurs de la thyroïde 1988
I - TUMEUR PRIMITIVES
1) Tumeurs épithéliales
Bénignes
Adénomes vésiculaires
- normovésiculaire, macrovésiculaire et microvésiculaire et trabéculaire, atypique à
cellules oxyphiles
Malignes
Carcinomes différenciés de la thyroide d'origine vésiculaire
Carcinome papillaire et variantes
Carcinome vésiculaire et variantes
- minimal invasif (encapsulé)
- largement infiltrant
Carcinome médullaire dérivé des cellules C
- forme sporadique
- forme familiale
Carcinome indifférencié (anaplasique) de la thyroïde
Autres carcinomes :
- Carcinomes épidermoïdes, etc....
2) Tumeurs non épithéliales
- Hémangio-endothéliome malin, etc...
3) Lymphomes malins hodgkiniens et lymphomes malins non hodgkiniens
II - TUMEURS SECONDAIRES : METASTASES
Principales causes de nodule solitaire dans la thyroïde
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?? Adénomes vésiculaires
- macrovésiculaire (colloïde)
- microvésiculaire, trabéculaire, à cellules oxyphiles, atypique
?? Kystes
- colloïde, simple, hémorragique.
?? Thyroïdites
- thyroïdite aiguë et subaiguë (granulomateuse)
- thyroïdite lymphocytaire de type Hashimoto
- thyroïdite de Riedel
?? Carcinomes
- carcinome papillaire et ses variantes
- carcinome vésiculaire et ses variantes
- carcinome médullaire
- carcinome anaplasique
- lymphome malin non hodgkinien
- métastases (cancer du rein, du sein, etc...)
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