
le shofar
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Est-ce incongru de se demander si la vision en 
direct sur le petit écran des mains  votantes 
flamandes tendues de concert avec celles au 
geste peu étrangement éloigné du signe nazi, 
le mercredi 7 novembre 2007, pourrait, d’une 
certaine façon, être mise en perspective avec 
le choc  psychologique  que  dut être, pour  les 
Juifs non hellénisés de la Judée grecque anti-
que,  l’annonce  de  l’introduction  d’une  statue 
de Zeus au visage similaire à celui d’Antiochus 
IV dans le Temple de Jérusalem, voici quelque 
deux mille cent septante quatre ans ? 
Certainement. 
Sauf    à  comprendre,  à  partir  des  chemine-
ments  intellectuels  par  lesquels  nos  Sages 
ont muté les évènements politiques d’alors en 
célébration d’un « petit » «  miracle » très dis-
cret mais tellement chargé de sens, combien 
même pour nos jours, la mise en exergue du 
retour  de  la  Lumière  revêt  une  importance 
fondamentale,  aussi  bien  dans  la  conduite 
des  affaires  publiques  que  dans  la  relation 
individuelle à autrui.  
Le  Temple  purifié,  la  Ménora  rallumée 
n’auraient  aucune  signification  sans  la 
conscience, sans l’exigence que la pensée hu-
maine doit refuser son asservissement.   
A Hanoukka, la lueur scintillante derrière la 
vitre  des  maisons  juives  qu’aperçoivent  les 
passants, et qui est là pour montrer la persé-
vérance de ceux qui pensent autrement face 
à  ceux  qui  imposent  leurs  propres  concep-
tions,  a une portée universelle. 
Aujourd’hui,  lorsqu’en  Belgique,  nous  dis-
posons nos hanoukkiot devant nos fenêtres 
pour  rappeler  que  l’huile  pure  découverte 
dans le Sanctuaire permettant la lumière de 
la  Menora  qu’un  seul  jour  brûla  finalement  
huit  fois  plus  longtemps,  c’est  donc  aussi 
pour  dire  que  la  norme,  la  croyance,  l’opi-
nion, la sensibilité, la culture ou la langue de 
l’un ne doit jamais, ne peut jamais faire fi du 
respect infini de l’autre ; c’est pour dire que 
la différence, la particularité, l’altérité englo-
bées fondamentalement en un souci commun 
de bien-vivre  ensemble à la fois collectif et 
individuel  est  le  meilleur  rempart  contre 
l’obscurantisme,  le  dogmatisme  et  l’idéolo-
gie  fanatiques  qui  débouchent  immanqua-
blement sur une uniformisation si chère aux 
dictatures.
Or  donc,  que  l’on  soit  partisan  des  flamin-
gants, des fransquillons, des brusselaires ou 
des Belges-à-la-Papa ; que l’on soit centriste, 
de gauche, de droite ou de nulle part ; que l’on 
découvre les propos de Jules Destrée comme 
parole de prophétie ou non ; que l’on se sente 
peu ou prou concerné par la vie politique de 
notre pays,  il  ne peut,  il  ne doit  échapper à 
personne  que  les  coups  de  buttoir  de  l’ex-
trême droite flamande  portent hélas  actuel-
lement efficacement leurs fruits.     
Le résultat d’un sondage paru le mois dernier 
dans le quotidien flamand « De Standaard » 
est édifiant, à cet égard. En effet, à la ques-
tion de savoir s’ils approuvaient les déclara-
tions  du président du N-Va Bart De Wever, 
un des grands argentiers des mains votantes 
dont question ci-dessus, qualifiant de « gra-
tuites  »  les  excuses  sur  la  participation  de 
la ville d’Anvers à la Shoa exprimées par  le 
Bourgmestre  Patrick  Janssen,  63,86%  des 
sondés répondirent par l’affirmative… 
Voilà donc démasqué, en un rapprochement 
rapidement  construit,  l’homme-Babel  au 
sentiment  nationaliste  exacerbé,  discours 
populiste et dessein éhontément destructeur 
réunis, perché au sommet de cette toute pe-
tite chose si peu enfouie et tellement révéla-
trice de tout le reste: la haine du Juif.  
Aux premiers temps de l’indépendance de la 
Belgique,  le  8  septembre  1831,  Léopold  Ier, 
L’Union fit la force
Par Jacqueline Wiener