L'importance des collocations et des palimpsestes verbaux dans le nom de marque et les slogans: Analyse de quelques cas (publicités écrites) ● Le remplacement paradigmatique se fait sur une collocation attendue dans le domaine de la restauration: on parle en effet de VIN DE TABLE, alors que dans ce slogan le mot VIN est remplacé par EAU. ● Au niveau syntagmatique, par contre, l'expression consacrée « eau de table » est prolongée, sur l'axe linéaire, par un complément DE JARDIN. ● Le résultat, c'est un slogan qui justifie l'image (table de jardin prototypique, avec trois pieds, des ustensiles et des objets de la nature; situation de repas, avec une « eau de table » Badoit pour accompagner le repas). Par ailleurs, l'expression « eau de table » ennoblit le produit et lui confère un statut plus recherché que le contexte dans lequel il est plongé: buvez du Badoit et vos moments quotidiens seront projetés dans le luxe et le raffinement des grands restaurants ● A travers un ajout syntagmatique, le slogan joue ici sur le déplacement de la collocation du nom commun à la marque: LES ENFANTS EN BATEAU a un sens très concret (pouvant commuter paradigmatiquement avec « en moto », « à bicyclette » etc.), alors que « les enfants en PETIT BATEAU » passe du domaine de la navigation à celui de l'habillement (l'autre sens est tout de même présent); la commutation paradigmatique est alors avec « en shorts », « en baskets », « en t-shirt », etc. ● Le résultat, c'est un slogan ambigu qui joue explicitement avec les deux relations paradigmatiques et oblige le destinataire à se confronter explicitement avec le contenu de la photographie, qu'il doit mettre en relation avec le slogan lui-même. (plaisir du décodage) ● ● ● ● Modification d'un palimpseste sousjacent (ici: un lieu commun): « LES FEMMES SONT TOUJOURS EN RETARD », qui est doublement modifié: Négation morpho-syntaxique (toujours/jamais) Singularisation du sujet (les femmes/la femme de sa vie) Prenant le contre-pied des lieux communs et mettant en scène une image qui déplace le sens le plus probable du SN sujet (la femme de sa vie = son amante???), le slogan ne dit pas tout et oblige le destinataire, accroché par cette phrase, à poursuivre la lecture du message publicitaire jusqu'au bout pour répondre à ses questions. ● Le jeu consiste ici à utiliser une collocation imposée par l'image (« descendre un homme » = le tuer) et à la détourner par une substitution paradigmatique inattendue (descendre un Perrier). ● L'ambiguïté joue un rôle non négligeable, car « descendre une bouteille » (autre collocation possible du verbe descendre, bien plus probable dans ce contexte, mais occultée par l'image) signifie en effet « vider en buvant ». ● Le conflit entre les deux collocations et le renforcement de la collocation la moins probable par l'image induit une ambiguïté plaisante , ce qui aboutit à une publicité très ludique. ● La publicité des serviettes hygiéniques VANIA joue sur l'une des collocations les plus fréquentes de ces serviettes, à savoir « tenir en place », qui est niée, mais en même temps c'est le sujet qui varie (donc, là aussi, il y a un déplacement paradigmatique sur la collocation. (les filles qui ne tiennent pas en place). ● Même si les arguments ne sont pas très innovants, le slogan a le mérite de bien utiliser les ressources de la langue: le pire défaut qui puisse toucher ce produit est évoqué et écarté par l'utilisation de la collocation appropriée mais avec un sujet différent: les filles ont le droit de bouger, de ne pas tenir en place, pas les serviettes hygiéniques. ● Bonne collocation (Écouter + musique), mais avec un déplacement significatif dans le sujet (les pieds, qui n'ont pas d'oreilles) et dans le nom propre, qui n'indique pas le musicien, mais bien une marque de chaussures. ● On peut y voir en outre une deuxième collocation qui se superpose à la première: « n'écouter que + pers. » s'utilise pour indiquer qu'une personne ne se soumet qu'à l'autorité d'une personne déterminée; ici, les pieds sont rétifs à se faire emprisonnes dans la gangue d'une chaussure, à moins que celle-ci ne soit une Vivaldi... ● Encore une fois, le but visé c'est l'ambiguïté, qui oblige le destinataire à croiser la lecture au premier degré avec une (ou plusieurs) lectures au deuxième degré. ● La publicité pour une biscotte salée utilise un palimpseste verbal repris tel quel « n'en faites pas un fromage » = n'en faites pas toute une histoire, n'exagérez pas), qui se trouve être justifié par l'image de présentation, laquelle suggère également l'une des manières de consommer ce produit. ● Le slogan ne porte pas directement sur le produit, car l'évocation d'un sujet tabou (le « transit » intestinal ) est détournée par le jeu sur le fromage On remarquera aussi la validité des deux autres slogans présents dans la pub: « craquez pour le craquant des Wasa Fibres » (assonance sur KR – K) et « Vas-y Wasa » [vazivaza], qui reprend toutes les structures en -ci/-ça de la langue française (« comme-ci, commeça » etc). ●