Partie I Les différentes méthodes rencontrées dans le domaine de la

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Partie I
Les différentes méthodes
rencontrées dans le domaine
de la conception
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La démarche valeur
1.1 Les principales étapes de la démarche
La norme AFNOR de référence NF X 50-152:20075 propose une description précise des étapes
à suivre pour mettre en œuvre une démarche valeur, à savoir :
►► l’initialisation ;
►► le lancement ;
►► l’analyse fonctionnelle du besoin, l’analyse des coûts, les objectifs détaillés ;
►► la recherche et l’étude des solutions (création d’idées, de solutions, etc.) ;
►► l’analyse comparative ;
►► l’évaluation et le retour d’expérience.
Ces processus sont détaillés dans la norme. Si besoin, l’utilisateur est invité à la consulter ainsi que
les principaux documents normatifs auxquels elle fait référence pour approfondir sa connaissance
de la démarche valeur.
1.2 L’intérêt de la démarche valeur
Face à l’offre abondante de démarches et de méthodes proposées aux entreprises, la démarche
valeur – utilisée depuis de nombreuses années – apporte une cohérence entre ces dernières de
par ses concepts, ses champs d’application et sa logique rigoureuse. S’appliquant tout au long
des projets, elle montre tout son intérêt. De plus le fait qu’elle repose sur des bases naturelles
de raisonnement la met à la portée de tous.
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Management par la valeur – Caractéristiques fondamentales de l’analyse de la valeur.
Le grand guide pratique de l’analyse de la valeur pour les TPE-PME
1.3 Les points forts de la démarche valeur
Chacun trouvera de nombreux avantages à utiliser la démarche valeur, car elle :
►► est transposable à n’importe quel problème ;
►► permet de faire appel à une expertise extérieure si nécessaire (est-ce un avantage ?) ;
►► améliore les relations humaines, le travail de groupe ;
►► augmente la motivation et les échanges ;
►► permet une coordination générale ;
►► permet la remise en cause de l’existant ;
►► permet de faire bien du premier coup et au moindre coût ;
►► est impulsée par la direction (ce qui impacte directement sur la motivation) ;
►► définit le besoin client ;
►► améliore les marges ;
►► optimise et valorise les acquis ;
►► apporte de nouveaux savoir-faire ;
►► facilite la comparaison avec des résultats connus ;
►► apporte un argumentaire chiffré ;
►► fait référence au marché ;
et elle :
►► implique chacun dans son domaine et enrichit le résultat ;
►► donne un langage commun et précis et évite le piège du langage technique des spécialités ;
►► favorise l’acceptation des idées des autres en permettant de s’adapter et de rester ouvert ;
►► réunit les gens autorisés à prendre des décisions justifiées et en connaissance de cause sur
la base de critères formels et partagés ;
►► est adaptable et prépare les actions à moyen terme pour tenir le délai ;
►► apporte plus d’implication et de motivation ;
►► peut répondre à des besoins ponctuels avant d’être déployée dans sa totalité ;
►► permet de créer une culture « méthodes » accessible et partageable par tous.
1.4 Quand faut-il mettre en œuvre une telle démarche ?
La démarche doit être mise en œuvre :
►► le plus en amont possible du projet ;
►► lorsque le contexte a changé, avec un enjeu significatif et le risque qu’un objectif important ne soit
pas atteint ;
►► lorsque le nombre et la nature des modifications du produit ou du service par rapport au cahier
des charges sont de nature à dévier le projet initial de façon significative ;
►► lorsque les délais ne sont pas tenus ;
►► lorsque les actions ou les méthodes engagées n’ont pas permis de trouver de solution.
1.5 Pour quels marchés ?
Le domaine d’application de la démarche valeur concerne tous les types de marchés.
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La démarche valeur
1.5.1 Les marchés diffus
Les marchés de type diffus sont souvent des marchés aux clientèles éclatées et nombreuses qui
achètent sur le stock disponible chez un distributeur de proximité. Celui-ci joue le rôle d’écran entre
les clients et les fournisseurs.
Dans ce contexte, le client ne sait pas exprimer son propre besoin qui apparaît variable et même flou.
Les fournisseurs qui ont une véritable compétence peuvent être tentés de déterminer « ce qui est bon
pour le client » ! Le concepteur doit en être conscient pour ne pas se faire piéger dans la définition
du cahier des charges du produit.
1.5.2 Les marchés concentrés
Il s’agit des marchés où les produits sont commercialisés au travers de réseaux de distribution
spécialisés. Leur organisation est variable selon les pays.
Les produits sont souvent complexes avec de nombreuses fonctionnalités. C’est sur ces marchés
que l’on peut rencontrer des situations en relation avec des clients difficiles.
Certains de ces marchés sont très concentrés, ils comptent donc un nombre de clients limité.
La relation avec le client est plus directe. Dans ce contexte, ce sont les concepteurs qui sont censés recueillir les attentes du client.
1.5.3 Les marchés matures
Dans les cas où les couples « produits x marchés » sont à maturité, les évolutions sont lentes et
l’on connaît assez bien les besoins du marché. La part du marketing sera alors limitée car lors des
re-conceptions antérieures, l’essentiel des prestations aura été intégré. Le travail portera essentiellement sur l’EFT (étude fonctionnelle technique) qui constitue un cadre avec ses règles pour définir
l’EFB (l’expression fonctionnelle du besoin). La valeur en conception se traite alors principalement
dans la phase de l’EFB (étude fonctionnelle du besoin) : c’est celle qui requiert le plus fortement
la mixité « analyse de la valeur + marketing ».
1.5.4 Les marchés en émergence
La nouvelle démarche sera très utile dans les situations qui correspondent à des produits nouveaux
pour les marchés en émergence, pour l’innovation et les diversifications ainsi que pour les produits
B to B 6 et B to C7.
Dans ces situations, le fait de savoir déterminer le juste prix de mise sur le marché et la connaissance
des vraies attentes des clients constitue un réel atout pour réussir le lancement du nouveau produit
ou du nouveau service.
Nous aurons l’occasion de revenir plus en détail sur ces concepts, en particulier au niveau de leurs
apports pour la nouvelle démarche proposée.
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Business to business : l’ensemble des activités d’une entreprise visant une clientèle d’entreprises (source : Wikipédia).
Business to consumer : l’ensemble des architectures techniques et logiciels informatiques permettant de mettre en relation
des entreprises directement avec les consommateurs (source : Wikipédia).
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Le grand guide pratique de l’analyse de la valeur pour les TPE-PME
1.5.5 Référentiel de base
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La démarche valeur
Après ces paragraphes introductifs qui définissent la cible et les orientations prises, nous pouvons
présenter les outils et les méthodes supports. Mais non sans avoir fait un bref rappel des évolutions
de la conception et des contextes vécus par les entreprises. En effet, l’histoire en la matière a
le mérite de nous aider à mieux comprendre les enjeux actuels et à venir.
1.6 La situation en conception
1.6.1 Le contexte
L’introduction de la conception assistée par ordinateur (CAO), du fait de la facilité qu’elle apporte pour
la conception, a peu à peu remplacé les autres formes de conception.
Parmi celles-ci, et aussi étrange que cela puisse paraître, elle a indirectement écarté l’usage d’une
méthode comme l’analyse de la valeur.
À la démarche rigoureuse mais parfois lourde de l’analyse de la valeur, s’est substituée, au fur
et à mesure que des modules venaient enrichir la base de données de la CAO ou ses fonctions,
une autre façon de travailler, plus souple et plus numérique que l’analyse de la valeur traditionnelle –
et ce, même si des développements informatiques de l’analyse de la valeur ont été réalisés par
des sociétés de logiciel.
On peut constater que l’effet indirect est d’avoir atténué (par le recours facile aux bases de données
de solutions fournies par la CAO) la créativité qu’apportaient l’analyse fonctionnelle et l’analyse de
la valeur.
Le fait que l’ensemble de ces méthodes et de ces outils relevait de la fonction technique et donc
de techniciens à l’approche très cartésienne a encore joué en défaveur de l’analyse de la valeur.
Par contre du côté du marketing, la tendance a été à l’inverse plutôt profitable grâce à un recours plus
fréquent aux techniques proposées par cette discipline.
En effet, sous la pression des marchés, avec la « customisation » des produits, et de la production
en juste à temps, le recours au marketing devenait incontournable pour essayer de satisfaire des
clients de plus en plus exigeants.
Le marketing apportait alors des outils pour la segmentation du marché et des clientèles,
des approches différenciées des clients et de l’analyse de leurs besoins.
À noter que la culture dans les services commerciaux est une culture de nature plus proche de celle
du marketing que de celle de la technique, elle est donc plus ouverte et plus réceptive aux approches
proposées par le marketing. Celui-ci a donc connu un fort développement au cours de la deuxième
moitié du xxe siècle. De plus, des formations commerciales et marketing se sont mises en place
dans le même temps, favorisant largement son essor.
De son côté et en parallèle, le design réussissait une synthèse habile entre le besoin, le client et
le produit en alliant une certaine technicité et des outils empruntés au marketing.
Avec des outils pragmatiques adaptés aux attentes des différents services et directions de l’entreprise,
le design a su, grâce à ses esquisses 2D et ses maquettes 3D, proposer aux clients une approche
séduisante et concrète. On pouvait ainsi voir, toucher et modifier le produit ainsi que le faire évoluer
et en produire différentes versions.
À l’arrivée de la CAO, il a su l’assimiler pour en intégrer les bons côtés, tout en conservant les outils
et les démarches propres à sa discipline.
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Le grand guide pratique de l’analyse de la valeur pour les TPE-PME
Le design a su développer l’enseignement de son art et intéresser les collectivités publiques pour faire
sa promotion auprès des PME. Il a également su communiquer sur ses réalisations et vu s’instituer
des prix et des trophées le concernant.
Contrairement à l’analyse de la valeur qui s’est progressivement effacée face à l’arrivée de nouvelles
méthodes comme la qualité, le kaizen, le lean, etc., le marketing et le design on fait valoir leur spécificité
et leur complémentarité sans les ignorer et sans se placer en concurrence avec elles, considérant
que ces nouvelles méthodes se situaient sur d’autres champs. Étant plus proches des clients et
des marchés, elles laissaient le domaine de la production à la qualité et au lean en particulier.
Aujourd’hui, la revalorisation de l’analyse de la valeur passe par la promotion de l’analyse fonctionnelle
d’une part et par l’assimilation intelligente des autres approches d’autre part pour élaborer
une synthèse plus complète et plus riche qui prendra en compte les spécificités et les atouts des
autres méthodes.
Chaque méthode dans son emploi strictement limité à son domaine en montre rapidement ses limites.
Ainsi, la CAO peut brider la créativité à cause de la facilité du recours aux solutions éprouvées
proposées par la base de données et les procédures de la qualité sont réductrices car elles obligent
au strict respect de la conformité. La lourdeur administrative de la CAO, si elle est adaptée à
des fabrications répétitives et stables ou à des produits exigeant un haut niveau de sécurité,
ne l’est par contre plus lorsque l’on se trouve face à des contextes très évolutifs avec des configurations qui évoluent rapidement et face à la production de petites séries.
Le marketing peut amener à doter le produit de performances ou de fonctions supplémentaires en
vue de le différencier de la concurrence. Cette démarche peut engendrer un supplément de coût qui
n’est pas toujours justifié, surtout si la segmentation n’a pas été finement étudiée.
Le design peut faire courir le risque d’une fuite vers l’esthétique (ce qui revient à faire de l’art pour
l’art), sous prétexte que la laideur se vend mal, alors que le marché attend un produit fonctionnel,
plutôt « sympa » (autrement dit « sexy ») mais fonctionnel avant tout.
Le design relève d’experts ayant une certaine sensibilité, ce qui limite son usage par tout un chacun
dans les services de conception et de marketing.
Quelle que soit la méthode ou la démarche, cela aboutit toujours in fine à un prix et donc à une marge
lorsque le coût global est en fin de compte établi.
Bien souvent le prix devance le coût du fait du positionnement sur le marché lorsqu’il existe une offre
concurrente. Mais sans marge, aucune activité ne peut survivre. Et dans certains cas si elle survit,
c’est alors au détriment d’autres activités de l’entreprise. Ce fait est de toute façon préjudiciable à
la pérennité de l’ensemble.
Il est donc capital dans tous les cas d’assurer une marge suffisante par un bon positionnement du prix
et de maîtriser les coûts !
C’est là que la combinaison intelligente de l’analyse fonctionnelle, du marketing et du design permet
de dépasser le cadre de l’analyse de la valeur, du lean ou de toute autre approche plus spécialisée.
Bien utilisés, la méthode qualité et le lean devront permettre à l’autre bout de la chaîne de réduire
les gaspillages et donc les coûts de la non-valeur ajoutée.
À cette combinaison, on ajoutera les apports de la VUPC (que nous définissons ci-après) afin d’offrir
un cadre adapté au développement de produits et de services performants sur les marchés actuels
et futurs.
Ce que nous avons écrit à propos de la marge et du prix a été très bien synthétisé et modélisé dans
une approche baptisée « VUPC » par ses concepteurs.
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La démarche valeur
La VUPC nous invite à inverser les approches classiques de la conception ou de l’innovation : au lieu
de partir du produit, elle propose de partir du client avec lequel on confronte le nouveau produit
ou service afin d’évaluer sa réaction et son comportement d’achat éventuel.
Cette démarche a pour objectif d’identifier ce qui, dans le produit ou le service, a de la valeur aux
yeux du client, ce qui est accessoire et ce qui n’en a pas. Partant de là, il devient plus facile de faire
du premier coup le bon produit ou le bon service au bon prix avec la bonne marge.
Pour réussir cette approche, il faut tour à tour avoir recours à l’analyse fonctionnelle, au marketing
et au design dans une démarche non séquentielle et non linéaire entre des services aux cultures
différentes (techniques, commerciales, artistiques) et souvent cloisonnés dans l’entreprise. Il faut
brasser ensemble ces cultures et ces approches.
Les différents outils, grilles et tables présentés dans cet ouvrage ont pour but de permettre au lecteur
de parvenir à réussir ce brassage.
Tout au long de la démarche valeur, donc du processus d’innovation et du cycle de vie du produit,
nous prendrons comme fil rouge les questions clés suivantes :
►► À qui rend-on service ? Quels sont les services rendus ?
►► Combien cela coûte ? Combien cela rapporte ?
►► Qu’est-ce qu’il faut changer ? Qu’est-ce qu’on y gagne ?
1.6.2 Rappel de l’objectif
Ce livre est destiné aux responsables et dirigeants de TPE-PME, c’est pourquoi :
►► les approches retenues et la méthode globale proposée dans cet ouvrage ont été élaborées en
se plaçant dans le contexte des PME ;
►► les choix sont justifiés par l’objectif de mettre des outils et des méthodes qui n’exigent pas de
services étoffés dans les différentes spécialités à la portée des moyens des PME. Comme
toutes ces méthodes sont nécessaires pour réussir sur les marchés, nous avons extrait l’essence
(ou le cœur) de ces différentes méthodes ou approches pour les simplifier sans leur faire perdre
leur efficacité.
Il s’agit d’une bonne compréhension de ce qu’une approche 20/80 peut apporter et qui justifie de ne
prendre que les 20 % d’une méthode qui assureront 80 % du résultat. En procédant ainsi, on obtient
un niveau de simplification qui permet à tous ces outils d’être accessibles aux TPE-PME.
††À noter
Nous conseillons aux lecteurs qui souhaiteraient approfondir chacun des concepts ou chacune des méthodes utilisées
de recourir à des formations appropriées.
1.6.3 Le parti pris
Afin de disposer d’une approche qui va à l’essentiel (simple dans sa mise en œuvre et aisée dans
sa compréhension) et sans rien sacrifier sur le plan de la performance en termes de résultats
attendus, nous avons retenu trois composantes déterminantes. Le « trio » gagnant se compose :
►► du besoin qui comprend le marché, sa segmentation et la clientèle correspondante ;
►► de la technologie, y compris l’ergonomie et le cycle de vie ;
►► du prix avec les coûts et les marges.
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Le grand guide pratique de l’analyse de la valeur pour les TPE-PME
Nous avons choisi de représenter ce triptyque par trois cercles… et toujours à leur intersection ou
point de convergence : le produit ou le service, objet de la conception ou de l’innovation en question
(voir figure 1.1).
Figure 1.1 Le « trio » gagnant
LLRemarque
Les trois cercles permettent de visualiser les intersections deux à deux et donc de s’interroger sur les incidences
ou opportunités relatives.
††À noter
Sans que cela change le raisonnement et l’approche, chacun peut privilégier une autre représentation basée sur
ces trois composantes fondamentales. Par exemple : économie (avec le prix)/marché (avec le couple produit/segment
de clientèle)/solutions (avec la technologie/les services associés/les produits existants).
D’autres formes de représentations peuvent être préférées (voir figure 1.2).
Figure 1.2 Le « trio » gagnant
Ou encore (voir figure 1.3) :
Figure 1.3 Le « trio » gagnant
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