Le modèle algérien : un développement sans entreprises

Le modèle algérien : un développement sans entreprises ?
Malgré la faiblesse de la mise initiale de la maison mère, OTA faisait figure de modèle de réussite de la politique
d’attraction des IDE. Suscitant la controverse sur l’apport réel de ses promoteurs, et laissant planer le doute sur
les facilitations politiques dont elle a bénéficié, cette première expérience d’entrée du capital privé dans la
téléphonie mobile, était mal partie.
Entre-temps, les hostilités qui ont entouré les rencontres de football entre l’Algérie et l’Égypte et, surtout, la
cession profitable des cimenteries privatisées à son profit ont fini par déchoir l’opérateur adulé de son piédestal.
Au-delà de la réussite économique d’OTA, ses déboires ont aussi des relents politiques.
Au demeurant, il fallait que l’entreprise dépassât son statut d’opérateur économique pour que ses agissements
suscitent les réactions instantanées de ministres et que tout un État se mette en veille pour scruter ses actes,
ses intentions et les commenter de manière si solennelle.
Même dans le secteur des hydrocarbures qui bénéficie des leçons d’une longue histoire de partenariat aussi
bien en Algérie que dans d’autres pays pétroliers, on a toutes les peines du monde à stabiliser un cadre de
coopération. Toutes les précautions réglementaires n’ont pas pu prévenir les tensions nées autour du projet
Gassi Touil entre Sonatrach et Repsol et Gas Natural, par exemple.
Depuis la loi de finances complémentaire 2009, c’est au tour des entreprises locales de mesurer les coûts d’une
absence de doctrine organisant l’activité de production. Sous couvert de pragmatisme, de procédures réputées
prévenir les transferts illicites et réduire l’effet d’une importation de bazar sont venues étouffer un peu plus une
industrie déjà handicapée par son déficit de compétitivité, la pénurie foncière et bien d’autres entraves. Les
entreprises publiques, ballottées entre privatisation et restructuration, entre autonomie et refinancement, au
gré de l’état du Trésor public, partagent la même précarité doctrinale. La dernière initiative d’une stratégie
industrielle attend toujours d’être traduite, ou pas, en termes de mesures de relance industrielle.
La stagnation technologique, managériale et sociale de ces entreprises, les gabarits qui n’ont pas évolué et le
retour de l’injonction politique dans la gestion ne les privent-ils pas de la compétence et de la souplesse
nécessaires à un rythme de développement compétitif ?
La primauté idéologique de l’entreprise publique, remise au goût du jour par l’embellie pétrolière, tend à
disqualifier l’entreprise privée comme vecteur de développement. La révision doctrinale vient d’être illustrée
par le retrait coordonné des entreprises nationales membres du FCE, probablement parce que l’instance a émis
des critiques sur la politique économique qui se dessine.
Politisé au point de s’impliquer dans les campagnes électorales, ce groupement d’entreprises semble voué à
l’exclusion, parce qu’il a osé des avis contradictoires avec les orientations économiques actuelles.
Un peu comme si le souci était de se donner des entreprises militantes plutôt que des entreprises performantes.
À force de vouloir politiser l’entreprise, on s’achemine vers un étrange modèle de développement sans
entreprises.
M. H.
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