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l’autorité publique. Dans les régimes autoritaires, les systèmes de contrôle et de contre-pouvoir
sont précaires car il n’existe ni tradition de séparation des pouvoirs ni culture de l’expertise ni
usage de la liberté de la presse ou de la mobilisation et de la prise de parole (Rapport sur le
Développement dans le Monde, 1997). La faiblesse des médiateurs indépendants et des modes de
représentation augmente le pouvoir discrétionnaire des intermédiaires politiques, et le coût de la
dénonciation en temps et en argent peut devenir prohibitif (Alam, 1995).
2/ Les écarts au modèle wébérien et les difficultés de construction de la Nation. On a
observé que les régimes politiques, même quand ils se démocratisent, se fondent encore sur le
clientélisme et le patrimonialisme ou le corporatisme (marché politique imparfait). Les pots-de-
vin récoltés lors de la passation de grands contrats servent à la fois à l’enrichissement personnel
des membres de l’élite et à la mise en place de réseaux de redistribution clientéliste qui permettent
aux autorités politiques de se maintenir au pouvoir en achetant des soutiens politiques. Un fort
degré de fractionnement ethnique, religieux ou régional accentue l’importance des réseaux de
redistribution informelle et leurs connexions par des alliances. Les administrations subissent alors
une pression permanente des pouvoirs politiques, claniques et familiaux (Ekpo, 1979 ; Mahieu,
1990 ; Tanzi, 1995) qui limite l’application des principes de la méritocratie. Les achats
d’affectation dans la fonction publique à des postes qui permettent de prélevés des bakchich se
développent (Wade, 1982, 1985).
3/ Un droit inadapté. Les règles formelles de fonctionnement de la société devraient être
en évolution permanente pour s’adapter à la rapidité des transformations. Plus les règles formelles
sont vagues, rigides ou inadaptées, plus les arrangements informels dirigent les actes et les choix
des agents économiques. Par ailleurs, de nombreuses règles formelles sont mises en place pour
permettre la prédation (procédures tatillonnes ou réglementations perçues comme illégitimes par
des citoyens), et l’élaboration des règles informelles s’opère dans l’opacité et sans procédure de
contrôle de leurs effets globaux. Un droit du travail en avance sur le niveau du développement
économique ou une pression fiscale trop forte sur de nouvelles activités favorise le secteur
informel et les arrangements corrompus nécessaires à son fonctionnement (Tanzi, 1983 ; De Soto,
1994 ; de Mello et al., 1995).
Les comportements arbitraires et la faible légitimité de nombreux États — qui ne
protègent pas les agents économiques et n’organisent pas la négociation entre ces mêmes acteurs
— laissent la place à des systèmes alternatifs de protection ou de débrouillardise qui se fondent
sur des micro-légitimités telles la famille, le clan, l’ethnie, la région, l’organisation criminelles, la
guérilla... Ces systèmes par nature sont excluants vis-à-vis de ceux qui n’adhèrent pas aux réseaux
de protection locale par volonté (éthique) ou par manque de capacité (aucune ressource à offrir).
Le sentiment d’une répartition initiale inéquitable des droits de propriété privés et publics (ou