26 • Questions actuelles (n°18)
lement les limites de ce qui est technique-
ment possible, mais aussi celles que détermi-
nent le respect de la nature humaine, entendue
dans son intégralité: «ce qui est technique-
ment possible n’est pas pour autant morale-
ment admissible » (Congrégation pour la
Doctrine de la foi, Donum vitae, 4). (•)
Le don d’organe :
un véritable acte d’amour
3. Il faut tout d’abord souligner, comme j’ai
pu le faire remarquer en une autre occasion,
que toute transplantation d’organe a pour ori-
gine une décision d’une grande valeur éthique :
«la décision d’offrir sans aucune compensation
une partie de son propre corps pour la santé et
le bien-être d’une autre personne » (Allocution
adressée aux participants d’un Congrès sur les
transplantations d’organes, 3 [20 juin 1991]).
C’est là précisément que réside la noblesse de
ce geste, un geste qui est un véritable acte
d’amour. Il ne s’agit pas seulement de se dé-
faire de quelque chose qui nous appartient
mais de donner quelque chose de nous-
mêmes, car «en raison de son union substan-
tielle avec l’âme spirituelle, le corps humain ne
peut pas être considéré seulement comme un
ensemble de tissus, d’organes et de fonctions
[...] mais il est partie constitutive de la per-
sonne qui se manifeste et s’exprime à travers
lui » (Donum vitae, 3).
Par conséquent, toute procédure qui tend à
commercialiser des organes humains ou à les
considérer comme des produits pouvant être
échangés ou vendus, doit être considérée mo-
ralement inacceptable, car utiliser le corps
comme un «objet », c’est violer la dignité de
la personne humaine.
Ce premier point a une conséquence immé-
diate dont la portée éthique est considérable :
un consentement avisé est nécessaire.
L’« authenticité» humaine d’un geste si capi-
tal exige que les personnes soient convena-
blement informées du processus que cela im-
plique, afin d’être en mesure d’y consentir ou
d’y renoncer sciemment et en toute liberté.
L’accord des proches possède une valeur
éthique en l’absence de décision de la part du
donneur. Bien sûr, un consentement ana-
logue doit être donné par le bénéficiaire du
don d’organe.
4. La reconnaissance de la dignité unique de
la personne humaine a une autre conséquence
inhérente : les organes vitaux individuels dans
le corps ne peuvent être prélevés qu’après la
mort, c’est-à-dire à partir du corps d’une per-
sonne dont la mort est avérée. Cette exigence
va de soi, puisqu’agir différemment signifierait
provoquer intentionnellement la mort du don-
neur en prélevant ses organes. Cela soulève
l’une des questions les plus débattues au-
jourd’hui dans le monde de la bioéthique et
suscite beaucoup d’inquiétude au sein de l’opi-
nion publique. Je me réfère au problème de la
vérification de la mort. Quand peut-on considé-
rer avec certitude qu’une personne est morte?
(•) Pour le texte
intégral de
Donum vitae,
qui traite plus
directement du
respect de la vie
naissante et de
la dignité de
la procréation,
voir DC 1987,
n°1937,
p. 349-361.
Voici le paragraphe de l’encyclique Evangelium
vitae qui situe le don d’organes dans le contexte
plus large de «l’Évangile de la vie »:
86. Dans l’esprit du culte spirituel agréable à Dieu
(cf. Rm 12, 1), la célébration de l’Évangile de la vie
demande à être réalisée surtout dans l’existence
quotidienne, vécue dans l’amour d’autrui et dans
le don de soi. C’est toute notre existence qui se fera
ainsi accueil authentique et responsable du don de
la vie et louange sincère et reconnaissante de Dieu
qui nous a fait ce don. C’est ce qui se passe déjà
dans tant de gestes d’offrande, souvent humble et
cachée, accomplis par des hommes et des femmes,
des enfants et des adultes, des jeunes et des anciens,
des malades et des bien portants.
C’est dans un tel contexte, riche d’humanité et
d’amour, que prennent aussi naissance les gestes
héroïques. Ceux-ci sont la célébration la plus
solennelle de l’Évangile de la vie, parce qu’ils le
proclament par le don total du soi; ils sont la
lumineuse manifestation du degré d’amour le plus
élevé: donner sa vie pour la personne qu’on aime
(cf. Jn 15, 13); ils sont la participation au mystère de la
Croix, sur laquelle Jésus révèle tout le prix qu’a pour lui
la vie de tout homme et comment cette vie se réalise
pleinement dans le don total de soi. Au-delà des
actions d’éclat, il y a l’héroïsme au quotidien, fait de
petits ou de grands gestes de partage qui enrichissent
une authentique culture de la vie. Parmi ces gestes,
il faut particulièrement apprécier le don d’organes,
accompli sous une forme éthiquement acceptable,
qui permet à des malades parfois privés d’espoir
de nouvelles perspectives de santé et même de vie.
Pour le texte intégral de l’encyclique, voir DC 1995, n°2114, p. 351-405.
UN GRAND GESTE DE PARTAGE
ÀDÉTACHER ET INSÉRER DANS VOTRE DOSSIER SUR LA SANTÉ