Chapitre VI, Les gaz, partie D page 1/16
LES GAZ, PARTIE D :
Eléments de théorie cinétique1
La théorie cinétique étudie les gaz d’un point de vue statistique. Elle se base sur les notions de
densité particulaire et de distribution des vitesses et sur des hypothèses qui concernent ces deux
notions et qui traduisent l’équilibre thermodynamique des gaz.
Elle permet de poursuivre, en passant du qualitatif au quantitatif, l’interprétation cinétique de la
pression et de la température d’un gaz parfait, que nous avons établie au chapitre III.
A. Description qualitative des gaz à l’échelle microscopique
Nous commençons par le rappel de l’interprétation cinétique qualitative de la pression et de la
température d’un gaz parfait.
1. Rappels essentiels
a) Lagitation moléculaire
Un gaz est constitué de molécules animées de mouvements incessants dont les trajectoires se
brisent de choc en choc. C’est lagitation moléculaire.
b) Interprétation cinétique qualitative de la pression
L’interprétation microscopique de la pression est la suivante : les chocs des molécules sur les
parois créent la pression. Plus les chocs sont nombreux et violents et plus la pression augmente.
Deux facteurs agissent sur le nombre et la violence des chocs : la densité moléculaire et la vitesse
des molécules.
- plus la densité moléculaire est grande et plus le nombre de chocs est grand. Donc plus la
pression est forte. L’équation d’état2 des gaz parfaits, pV = NkBT, indique qu’{ température
constante, la pression est proportionnelle à la densité moléculaire :
xcste
B
NN
p k T
VV
- plus la vitesse est grande et plus les chocs sont violents. Donc plus la pression est forte.
- plus la vitesse est grande et plus les molécules rencontrent souvent les parois. C’est-à-dire plus
le nombre de chocs est grand. Donc plus la pression est forte.
Ces deux derniers points indiquent que la pression est une fonction croissante de la vitesse des
molécules.
1 L’adjectif « cinétique » vient du grec « kinêtikos » « qui agite ».
2 Voir dans le chapitre III, § D.2., les deux formes de l’équation d’état des gaz parfaits.
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c) Interprétation cinétique qualitative de la température
L’interprétation microscopique de la température est la suivante : La température traduit le
mouvement incessant des molécules, nommé « agitation thermique ».
Selon l’équation d’état des gaz parfaits, à volume constant, la pression p est proportionnelle à la
température absolue T :
xcste
B
Nk
p T T
V
Donc lorsque la température absolue double, la pression double. Le volume est constant donc la
densité moléculaire aussi. Le seul facteur qui reste pour expliquer l’augmentation de pression
est la vitesse des molécules. Donc l’élévation de température se traduit par une augmentation de
la vitesse des molécules. La température est une fonction croissante de la vitesse des molécules.
2. Gaz parfait pur isolé en équilibre thermodynamique
Ces interprétations montrent l’importance de la densité moléculaire et des vitesses des
molécules. Nous allons voir quelques-unes de leurs propriétés dans le cas d’une situation très
simple.
Nous considérons un flacon de gaz, parfait, isolé, immobile dans le référentiel terrestre et en
équilibre thermodynamique. On imagine bien que la densité moléculaire et la vitesse des
molécules dépendent de ces hypothèses.
De plus nous choisissons un gaz pur. De cette façon toutes les molécules sont identiques. On
imagine bien, encore une fois, que des molécules différentes compliquent l’étude.
a) Densité moléculaire, son homogénéité
Il n’est pas possible, { cause de l’énormité de leur nombre, de connaître les positions des
molécules { chaque instant. Il faut donc se contenter d’une description statistique que nous
allons fonder sur une hypothèse plausible.
Hypothèse : Homogénéité de la densité moléculaire.
Puisque le gaz est isolé et en équilibre thermodynamique, aucun point du volume occupé n’a de
particularités. Nous faisons donc l’hypothèse qu’en moyenne, les molécules sont uniformément
réparties. C’est-à-dire que les molécules ne se concentrent pas en des points particuliers du
récipient ou n’en désertent pas d’autres. A cause de lagitation moléculaire cela peut arriver à
certains instants mais, en moyenne au cours du temps, en chaque point, cela n’arrive pas.
Nous remplaçons donc la donnée de toutes les positions des molécules par l’hypothèse de
l’homogénéité de la densité moléculaire. C’est-à-dire un ensemble gigantesque de données par
une information statistique.
b) Répartition des vitesses, son homogénéité
De la même façon nous remplaçons la donnée de toutes les vitesses des molécules par la
connaissance de la loi de répartition des vitesses. C'est-à-dire que nous cherchons à savoir le
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nombre moyen de molécules se déplaçant à une vitesse donnée, 500 m/s par exemple, au lieu de
chercher à savoir la vitesse de chaque molécule. Et ainsi pour chaque valeur de la vitesse.
Hypothèse : Homogénéité de la répartition des vitesses.
Puisque le gaz est isolé et en équilibre thermodynamique, nous faisons l’hypothèse que la densité
de molécules ayant une vitesse donnée est uniforme. A cause de lagitation moléculaire il peut y
avoir des fluctuations mais, en moyenne au cours du temps, en chaque point, ces fluctuations
sont gommées.
Nous remplaçons donc la donnée de toutes les vitesses des molécules par l’hypothèse de
l’homogénéité de la répartition des vitesses et par leur loi de distribution. C’est-à-dire un
ensemble gigantesque de données par une loi statistique donnant le nombre de molécules pour
chaque vitesse.
c) Orientation des vitesses, son isotropie
Hypothèse : Isotropie de la répartition des vitesses
Puisque le gaz est isolé et en équilibre nous faisons l’hypothèse qu’aucune direction n’est
privilégiée. Il y a autant de molécules se déplaçant à la vitesse de 500 m/s de haut en bas, que de
bas en haut, ou encore de droite à gauche, ou en diagonale dans le flacon, etc. La loi de
distribution des vitesses ne dépend pas de la direction de la vitesse.
Nous avons donc posé trois hypothèses : homogénéité de la densité moléculaire, homogénéité de
la distribution des vitesses, isotropie de cette distribution. Ces hypothèses traduisent le
caractère statistique de l’équilibre thermodynamique du gaz ; les molécules ne sont pas
immobiles mais en mouvement incessant ; de ces mouvements naît une répartition uniforme des
positions et des vitesses, caractéristique de l’équilibre.
Nous allons approfondir quantitativement ces notions toujours dans le cas d’un gaz parfait, pur,
isolé et en équilibre thermodynamique.
B. Densité moléculaire ou particulaire
La densité moléculaire est aussi appelée densité particulaire. Nous considérons N molécules
occupant un volume V. Nous allons la définir quantitativement, appliquer l’hypothèse de son
homogénéité pour la calculer et discuter son ordre de grandeur pour rendre compte de son
gigantisme.
1. Densité particulaire
a) Définition de la densité particulaire
La densité particulaire est calculée dans un volume élémentaire dV(L) entourant un point L
quelconque, et contenant en moyenne un nombre dN(L) de molécules :
()
() ()
pdN L
nL dV L
Le nombre de molécules est sans dimension, l’unité légale de volume est le m3 donc celle de la
densité particulaire est le m-3.
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b) Homogénéité de la densité particulaire
A cause de l’hypothèse de l’homogénéité de la densité particulaire, celle-ci ne dépend pas du
point considéré :
( ) cste
pp
n L n
En d’autres termes, la probabilité de trouver une molécule en un point du volume V est
indépendante du point considéré. De ce fait, la densité particulaire est égale à sa valeur globale :
globalepp N
nn V
2. Ordres de grandeur
a) Densité particulaire
Calculons la densité particulaire np dans une mole de gaz parfait dans les conditions normales de
température et de pression :
23 3 25 3
3
6,02.10 m 2,69.10 m
22,4.10
pN
nV
b) Nombre de molécules
Le résultat précédent permet de calculer le nombre moyen N de molécules présentes dans des
volumes V petits du point de vue macroscopique :
N
V
NV
V
1 cm3
10-3 mm3
10-6 mm3
1 µm3
N
2,69. 1019
2,69. 1013
2,69. 1010
2,69. 107
Nous constatons que 1 µm3 est très petit devant V = 22,4 litres (vraiment très petit, V/V est de
l’ordre de 10-19) et que cependant il contient en moyenne un très grand nombre de molécules.
Ceci rend les fluctuations de la densité particulaire négligeables dans le volume V malgré les
mouvements incessants des molécules. (Voir complément VI.1)
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C. Loi de répartition3 des vitesses
L’isotropie de la distribution des vitesses entraîne quelques propriétés quantitatives pour les
moyennes des vitesses. Nous allons considérer la moyenne du vecteur-vitesse, puis la moyenne
du carré de la vitesse car elle intervient dans l’énergie cinétique.
1. Moyenne du vecteur-vitesse et de ses composantes
Nous repérons le vecteur-vitesse4 vi de la ième molécule dans le référentiel terrestre par ses
composantes (vi,x, vi,y, vi,z) sur trois axes orthonormés.
a) Moyenne du vecteur-vitesse
A cause de l’isotropie de la distribution des vitesses, la moyenne du vecteur-vitesse <v> est
nulle :
1
10
N
i
i
vv
N
Si cette moyenne n’était pas nulle, il y aurait un mouvement d’ensemble du gaz de vitesse <v> ce
qui n’est effectivement pas le cas. L’hypothèse de l’isotropie de la distribution des vitesses dans
un gaz isolé, immobile dans le référentiel terrestre et { l’équilibre thermodynamique est en
accord avec cette constatation expérimentale.
b) Moyenne des composantes
Lorsqu’un vecteur est nul, toutes ses composantes le sont. Donc la moyenne de chaque
composante est nulle :
, , ,
1 1 1
1 1 1
0, 0, 0
N N N
x i x y i y z i z
i i i
v v v v v v
N N N
De plus ces résultats sont cohérents avec l’isotropie de la distribution des vitesses. En projection
sur l’axe (x’x) par exemple, il y a autant de molécules se déplaçant vers la droite ou la gauche à
une vitesse donnée.
c) Moyenne de la vitesse
La moyenne <v> de la valeur de la vitesse n’est pas nulle. Petit exemple avec trente molécules
imaginaires se déplaçant uniquement sur l’axe des abscisses :
Valeurs
Moyennes
N(vx)
5
10
10
5
vx en m.s-1
-2
-1
1
2
0
v = |vx| en m.s-1
2
1
1
2
40/30≈1,33
3 Voir l’expression de cette loi dans le complément VII.2.
4 Dans le texte les vecteurs sont notés en caractères gras. La lettre surmontée d’une flèche est utilisée dans les
expressions mathématiques.
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