Ludwig van Beethoven Bagatelle en la mineur “à Élise”

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Le programme de ce disque pourra paraître hétérogène, groupant des pièces mineures de
caractère anecdotique et des pages sublimes. Mais il illustre, en fait, le travail quotidien et
le tempérament versatile d’un ­Beethoven qui ­tantôt se livre à la séduction du public viennois
frivole, ­tantôt, conscient de sa mission d’artiste, impose l’expression de son style et de sa
pensée.
Les pièces isolées sont souvent liées à une anecdote de la vie du compositeur : petites
pièces calquées sur les modèles alors en vogue constituant pour le musicien à la fois un
terrain d’expérience et un moyen de se faire connaître auprès des amateurs. Dès 1783,
Beethoven avait écrit deux Rondos qui trahissent son âge (treize ans !). Par contre les deux
Rondos de l’opus 51, écrits isolément mais publiés ensemble en 1805 par le Comptoir
d’Arts et d’Industrie, témoignent d’un métier nettement plus assuré. Le premier en Ut
majeur “moderato e grazioso” de 1796-97 traduit déjà une belle assurance, particulièrement
dans le deuxième des quatre couplets en mineur et dans la coda conclusive. Le Rondo en
Sol majeur de 1801 va encore un peu plus loin dans l’originalité. “Beethoven, rapporte Otto
Jahn, l’avait donné à la comtesse Guicciardi mais le lui redemanda lorsqu’il voulut dédier
quelque chose à la comtesse Henriette von Lichnowsky et lui dédia alors en échange la
Sonate Clair de lune.”
On peut dire que l’esprit de la variation domine l’œuvre de Beethoven. Le fait que sa
­première œuvre (Variations sur un thème de Dressler) et sa dernière (Variations sur un thème
de Diabelli) appartiennent à ce genre, n’est pas seulement l’effet du hasard, il témoigne de
l’intérêt constant du compositeur pour le thème varié. On en relève la permanence non
seulement dans des œuvres portant le titre de Variations (vingt-deux pour clavier !) mais
aussi à l’intérieur d’œuvres de musique de chambre ou symphonique (une quinzaine de
mouvements !). Il est significatif, toutefois, qu’il ait refusé d’attribuer un numéro d’opus à
beaucoup de ses Variations, estimant probablement qu’il s’agissait là d’un genre mineur ou
expérimental. Les 6 Variations op.76 de 1809 sont improprement appelées “sur la Marche
turque des Ruines d’Athènes”. En fait, c’est ce thème qui sera repris en 1811 dans la
musique de scène de la pièce d’August von Kotzebue Les Ruines d’Athènes. Par rapport aux
Variations Eroica, il nous faut bien reconnaître l’usage de procédés assez conventionnels,
mais on ne peut s’empêcher toutefois d’apprécier la rythmique originale et peut-être d’y voir
un hommage au final “alla turca” de la Sonate K.331 de Mozart.
Cette Marche servira la célébrité de son auteur mais peut-être pas autant que la trop
fameuse Bagatelle “à Élise” en la mineur WoO 59. C’est d’ailleurs à tort qu’elle est ­appelée
ainsi car le manuscrit autographe, actuellement perdu, aurait porté la mention “Pour
­Therese”, en fait Therese Malfatti que Beethoven envisageait alors d’épouser. Malgré sa
simplicité, cette Bagatelle aura plus fait pour Beethoven que bien d’autres œuvres majeures
et plus complexes en rappelant à bien des pianistes amateurs leurs premières difficultés.
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L’Andante favori en Fa majeur WoO 57 est d’un plus grand intérêt. Il était à l’origine ­destiné
à la Sonate n°21 op.53 “Waldstein” (1803-1804). La Sonate comprenait trois mouve­ments
dont cet Andante amplement développé. “Un ami de Beethoven, rapporte Ferdinand Ries,
lui dit que cette Sonate était trop longue, ce qui lui valut une algarade. Mais après mûre
réflexion, mon maître fut persuadé de la justesse de cette remarque et il édita à part ce
long Andante… alors il composa l’intéressante introduction au rondo qui existe maintenant.”
L’Andante fut donc publié séparément en septembre 1805 au Comptoir des Arts et de
l’Industrie. Czerny rapporte que par suite de la faveur qui accueillit ce nouveau morceau,
Beethoven, qui le jouait souvent en public, lui donna le titre d’Andante favori. Il ne lui
accorda pas cependant de numéro d’opus. La partition adopte à peu de chose près la coupe
d’un rondo.
Les trois dernières Sonates op.109 à 111 de Beethoven furent pratiquement conçues
ensemble, leurs esquisses communes datant de 1819-1820. La Sonate n°31 en La bémol
majeur op.110 fut menée à bien au cours de l’année 1821 et achevée le 18 décembre
parallèlement à la composition du Sanctus et du Benedictus de la Missa Solemnis. La
­partition se présente en trois mouvements mais le dernier est beaucoup plus développé et
complexe, contenant à lui seul l’Adagio et l’Allegro final avec deux épisodes fugués. Le
premier adopte la coupe classique d’un mouvement de sonate avec développement. Il
s’ouvre sur un premier thème de quatre mesures “con amabilita” suivi immédiatement d’un
second thème d’essence mélodique emprunté au menuet de sa 8e Sonate op.3 pour violon
et piano. Mouvement serein, coulé, aérien, de caractère lyrique auquel s’oppose la verve
rythmique, terrienne de l’Allegro molto dont le thème provient d’un air populaire d’origine
silésienne alors en vogue à Vienne, Ich bin liederlich (“Je suis bon vivant”). Imaginez,
aujourd’hui, un mouvement de Sonate de Boulez sur un thème des Beatles ! Le bref trio
central accentue encore le caractère un peu débridé du mouvement avec ses appels dans
l’aigu. Le finale commence par un Adagio ma non troppo qui fait office de mouvement lent,
moment confidentiel avec un récitatif libre très expressif qui introduit un Arioso dolente. Une
fugue Allegro ma non troppo interrompt la rêverie avec un sujet solidement charpenté,
rassurant, mais qui ne suffit pas à empêcher un retour de l’Arioso avec une ornementation
enrichie. Du coup, la fugue revient mais inversée, se déploie avec volubilité et s’impose en
force jusqu’à la conclusion rayonnante, symbole de l’équilibre retrouvé par la discipline
consentie.
Beethoven, contrairement à son habitude, n’a dédié cette Sonate à personne. Peut-être,
comme le suggère Wilhelm Kempff, souhaitait-il seulement la garder pour lui ?
JEAN-YVES BRAS
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