ANTONÍN DVOŘÁK 1841-1904
CONCERTO POUR VIOLONCELLE ET ORCHESTRE
COMPOSÉ DURANT L’HIVER 1894-1895 / CRÉÉ LE 19 MARS 1896 AU QUEEN'S HALL
DE LONDRES, PAR LEO STERN ET L'ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE LONDRES SOUS
LA DIRECTION DU COMPOSITEUR / DÉDIÉ À HANUŠ WIHAN
Je traversais les belles campagnes de Bohême, ce pays
privilégié des joueurs de harpe et des chanteurs nomades.
Dans un petit bourg, je fis la rencontre d'une de ces nombreuses
troupes de musiciens ambulants, orchestre mobile composé
d'un violon, d'une basse, d'une clarinette, d'une flûte, de deux
cors, sans compter une harpiste et deux chanteuses femmes
pourvues d'assez jolies voix. Pour quelques pièces de monnaie,
ils exécutaient des airs de danse ou chantaient quelques ballades,
et puis ils allaient plus loin recommencer le même manège.
Richard Wagner
Dvořák destina l'alpha et l'oméga de sa production concertante au violoncelle.
En 1865, il aborda le genre pour la première fois, mais laissa l'œuvre inachevée.
S'il composa ensuite des concertos pour violon et pour piano, il écarta le
violoncelle, en dépit des sollicitations de son ami Hanuš Wihan : il estimait que
l'instrument était, par nature, réservé à la musique de chambre et à l'orchestre.
Il infléchit sa position lorsqu'il découvrit le Concerto pour violoncelle n° 2
de Victor Herbert, créé à New York en 1894. Depuis l'automne 1892, il dirigeait
le Conservatoire de cette ville, où l'avait appelé Jeannette Thurber, présidente
de l'institution. Son Concerto pour violoncelle fut sa dernière œuvre importante
composée aux États-Unis.
La Symphonie «Du Nouveau Monde» et le Quatuor à cordes n° 12 s'étaient
nourris de musiques américaines. En revanche, le Concerto pour violoncelle
regarde vers la terre tchèque. Son lyrisme slave, le rythme dansant et le caractère
populaire du thème principal du Finale dénotent peut-être la nostalgie du pays
natal. Par ailleurs, la partition se détourne des concertos brillants dont le
XIXesiècle fut friand. Certes, Dvořák utilise toute l'étendue de l'instrument
soliste, lui confie des passages en doubles cordes et des traits redoutables.
Mais il ne recherche jamais la virtuosité pour elle-même. Le violoncelle chante
avant tout, soutenu dans ses solos par un effectif restreint. À maintes reprises
(notamment dans l'Adagio), ses bariolages, volutes et contre-chants