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de ses concepts et notions les plus fructueux dans ma démonstration, je n’ai 
pas l’intention de situer pleinement mon analyse entière dans le schéma 
conceptuel et explicatif que son œuvre suggère. Bernard Williams nous a 
indubitablement off ert une des discussions du relativisme moral les plus 
profondes, perspicaces et nuancées. Je suis donc favorablement disposé à 
utiliser quelques-unes de ses idées, mais seulement comme une partie de 
l’arrière plan de mon enquête. Je crois néanmoins, avec quelques autres 
sympathiques critiques, que sa contribution est au fi nal confrontée à des 
apories, tensions et autres diffi  cultés sérieuses (Nussbaum, , p. - ; 
Scheffl  er, , p. -). Je ne pense pas que sa proposition alterna-
tive à la théorie éthique, ou pour reprendre son expression, au « système 
de moralité » (morality system), pourra être suffi  sante et satisfaire l’inten-
tion d’une critique normative sociale et politique, qu’il a engagée et qu’il 
juge utile. J’essaierai d’expliquer brièvement pourquoi j’entretiens de tels 
 doutes quand je reprendrai mon examen critique de la proposition alterna-
tive de Williams fondée sur la « réfl exion » et sa recommandation de rempla-
cer les concepts « fi ns » (thin) favorisés par le « système de moralité » par des 
concepts  « épais »  (thick), du genre de ceux qui étaient prédominants dans 
la pensée éthique de la Grèce ancienne⁸.
Au fi nal cependant, je suis d’accord avec Williams sur le point suivant. 
Bien qu’il soit admis que le relativisme culturel fasse apparaître un pro-
blème général, il vient en réalité soit trop tôt, soit trop tard (Williams, , 
, ). Dans notre cas, et à ce moment charnière de l’histoire, nous 
devons reconnaître que l’heure est plutôt tardive. Dans un monde où vont 
croissant la mondialisation, la « glocalisation », l’interdépendance et l’inter-
connexion, nous devons tenir compte des conséquences de la « complexité 
culturelle » et construire une conception de la « culture » alternative, et plus 
appropriée, que celle qui sous-tend le relativisme culturel (Chokr, a, 
a, b)⁹. En faisant cela, nous serons mieux capable de saisir les 
besoins normatifs, pragmatiques et politiques qui nous sont imposés à ce 
  Pour les détails, voir Chokr, *.
  Parmi les relativistes ici en question, j’inclus tous ceux auto-proclamés et les élitistes « gardiens 
de la pureté et de l’intégrité culturelle », comprenant, entre autres, l’ancien Premier ministre 
de Singapour, Li Kuan Yew, les offi  ciels et plusieurs intellectuels de la République populaire de 
Chine, plusieurs autres leaders politiques et intellectuels d’Asie, Afrique et Amérique Latine, 
plusieurs chefs religieux et laïques et des universitaires du monde musulman, et un certain 
nombre d’intellectuels et de philosophes occidentaux tel que Rorty (), Lévi-Strauss () 
et Lyotard () par exemple, ainsi que de nombreux autres protagonistes dans le monde qui 
n’ont pas le courage de se tenir clairement et fermement derrière leur position et croyance et 
qui peuvent donc être caractérisés comme des « relativistes cachés et réticents ».
QUI (N’)A (PAS) PEUR DU RELATIVISME (CULTUREL) ?