Union-Discipline-Travail DIRECTIVES SUR LA MEDECINE TRADITIONNELLLE CODE D’ETHIQUE ET CRITERES DE PRATIQUES DES TRADIPRATICIENS DE SANTE Programme National de Promotion de la Médecine Traditionnelle 0 AVANT-PROPOS Pendant des années les différents gouvernements ont contribué par diverses manières au développement de la médecine traditionnelle en Côte d’Ivoire. Depuis l’indépendance, la Côte d’Ivoire a soutenu et adopté plusieurs résolutions internationales sur le développement de la médecine traditionnelle lors des assemblées mondiales de la santé (la déclaration d’Alma-ata en 1978, l’initiative de Bamako adoptée en 1987 et de l’Union africaine ( la déclaration des Chefs d’Etat de l’Union Africaine 2001 faisant de la période 2001-2010 « la Décennie de la Médecine Traditionnelle en Afrique » ) . La politique actuelle de la Côte d’Ivoire est d’intégrer véritablement la médecine traditionnelle dans le système national de santé afin d’améliorer la couverture sanitaire par des soins de qualité au service de la population La pratique de la médecine traditionnelle comme profession exige la connaissance, la consécration, l’obligation et l’habilité. Aujourd’hui, avec l’ère de la mondialisation, la médecine traditionnelle telle que pratiquée par nos ancêtres par le passé n’est plus de mise. A savoir une médecine traditionnelle basée sur les croyances magico-religieuses et les méthodes thérapeutiques empiriques sans réglementation. L’irrationnel fait place maintenant au rationnel dans la démarche diagnostique et thérapeutique au niveau social, spirituel et somatique, en un mot dans la prise en charge globale du malade à travers un mécanisme de contrôle et de réglementation en vigueur : le code d’éthique et de bonne conduite pour les acteurs de la médecine traditionnelle. L’objectif final étant d’améliorer la qualité des pratiques de la médecine traditionnelle dans un contexte d’institutionnalisation, de formation et de professionnalisation. Ces directives permettront d’augmenter la crédibilité de la médecine traditionnelle en Côte d’Ivoire. Ces directives ont été regroupées en cinq (5) sections suivantes : 1- les devoirs généraux des tradipraticiens de santé ; 2- les devoirs envers le public ; 3- la prohibition de certains procédés dans la recherche de la clientèle ; 4- les relations avec les agents de l’administration ; 5- les dispositions diverses. Ainsi, le code de l’éthique est de servir en tant qu’instrument d’expression des critères de pratique, de discipline morale et de compétence exigé de tous les acteurs de la médecine traditionnelle en Côte d’Ivoire. Toute transgression du présent code d’éthique par le tradipraticien de santé est susceptible d’être relevé par sanctions disciplinaires, sans préjudice des poursuites judiciaires qu’elles seraient susceptibles d’entraîner. 1 REMERCIEMENTS Ces directives sur le code d’éthique et les critères de pratique de la médecine traditionnelle sont une autre preuve pour le Ministère de la Santé et l’Hygiène Publique d’intégrer véritablement la médecine traditionnelle dans son plan de développement sanitaire. Ces directives contribueront à assurer sans aucun doute la discipline, la promotion du professionnalisme et l’amélioration de la qualité de service. J’adresse les remerciements les plus sincères aux personnes suivantes pour leurs contributions pour l’élaboration de ce document : énormes 1- Pr. YANGNI-ANGATE Antoine Doyen honoraire UFR sciences médicales. 2- Pr. BOA YAPO Félix, Neurologue Directeur du CHR de Bouaké. 2 La Direction de Coordination du Programme National de Promotion de la Médecine Traditionnelle comprend : - Le Service de la réglementation et du contrôle de l’exercice de la médecine traditionnelle; - le Service d’identification, de la formation du suivi et de l’évaluation ; - Le service de la recherche et de la valorisation des médicaments issus de la pharmacopée traditionnelle; - Le service de la communication, des projets et des relations extérieures. 3 INTRODUCTION La médecine traditionnelle utilisée au niveau primaire, secondaire et tertiaire du système sanitaire est très répandue en Côte d’Ivoire. En effet dans la plupart des ménages, les différents produits issus de la médecine traditionnelle sont utilisés pour guérir et prévenir les maladies. En Côte d’Ivoire, selon les estimations du Programme national de promotion de la médecine traditionnelle, il existe environ plus 17 000 Tradipraticiens de santé localisés dans les zones rurales, urbaines et périurbaines, avec plus 90 % d’analphabètes. La plupart d’entre eux ont acquis leurs savoirs par révélation ou par apprentissage. Le Programme national de promotion de la médecine traditionnelle a initié depuis sa création un programme de formation afin d’améliorer la compétence et la technique professionnelle de certains d’entre eux. Cependant, beaucoup d’entre eux opèrent avec très peu où de formation officielle. L’objectif du Ministère de la Santé et l’Hygiène publique étant d’améliorer la couverture sanitaire des besoins de la population par une prise en compte effective et efficiente de la Médecine et de la Pharmacopée Traditionnelles dans le système de santé. Il est nécessaire pour une bonne pratique de la médecine traditionnelle en Côte d’Ivoire, efficacité et qualité, les principaux acteurs se doivent de se soumettre obligatoirement à cette charte de bonne conduite. Les praticiens de la médecine traditionnelle devraient éviter n’importe quel acte d’omission ou comportement qui pourrait compromettre les services fournis. Par conséquent, ces directives servent en tant qu’instruments de régulation pour la pratique de la médecine traditionnelle en Côte d’Ivoire. C’est donc à juste titre que ces directives sur le code d éthique ont été développées pour les praticiens de la médecine traditionnelle. 4 CHAMPS D’APPLICATION DES DIRECTIVES Ces directives sont destinées aux acteurs de la médecine traditionnelle régulièrement inscrits sur les registres du Programme National de Promotion de la Médecine Traditionnelle et de façon générale, à tous ceux qui exercent la médecine traditionnelle en Côte d’Ivoire. Le Programme National de Promotion de la Médecine Traditionnelle est chargé de veiller au respect de ces directives. Sont considérés comme acteurs de la médecine traditionnelle : - Les tradipraticiens de santé ou phytothérapeutes ; les herboristes ; les psychothérapeutes ; les accoucheuses traditionnelles ; les spiritualistes (féticheurs, devins, occultistes, exorcistes). les naturothérapeutes ; les Médico-droguistes Le tradipraticien de santé est une personne, qui, jouissant d’une certaine notoriété dans sa communauté, est reconnu capable de diagnostiquer les maladies, de prescrire les plantes médicinales et de dispenser les soins. L’herboriste est une personne qui connaissant les plantes médicinales, ne dispense pas les soins mais les met à la disposition des tradipraticiens de santé. Le psychothérapeute soigne les troubles mentaux et établit l’équilibre spirituel à partir des plantes médicinales et des pouvoirs surnaturels ou magiques. L’accoucheuse traditionnelle est une personne relativement âgée qui assiste la mère au cours du travail et qui a acquis la pratique de l’accouchement, soit par elle-même soit en travaillant avec une autre accoucheuse traditionnelle. Le devin est une personne dotée de l’art de découvrir les secrets et de prédire l’avenir par des moyens naturels (oracles, signes astrologiques, cartes, sable, cauris, interprétation des rêves et songes). L’occultiste est une personne qui soigne au moyen des pratiques magiques. L’exorciste est une personne qui a le don de désenvoûter des personnes possédées. Le naturothérapeute est un praticien de la médecine traditionnelle qui s’en tiennent à des méthodes très simples fondées sur les vertus de l’eau, de la diététique et du jeûne pour guérir. Le Médico-droguiste est une personne qui, sur la base des connaissances acquises en médecine et en pharmacopée traditionnelles, conditionne et vend des matières premières végétales, animales et/ou minérales à des thérapeutiques. Tous ces acteurs de la médecine traditionnelle sont dénommés sous le vocable tradipraticien de santé dans ces présentes directives. 5 SECTION PREMIERE : DEVOIRS GENERAUX DES TRADIPRATICIENS DE SANTE ARTICLE 1: Les tradipraticiens de santé doivent se soucier avant tout de promouvoir la santé et le bien-être des patients et du public en général. Ils doivent se garder de poser des actes qui pourraient compromettre la santé de ses patients. ARTICLE 2: Les tradipraticiens de santé doivent exercer leurs activités de médecine traditionnelle qu’après s’être fait légalement enregistrer à la Direction de Coordination du PNPMT / Au comité départemental. ARTICLE 3 Il est du devoir du tradipraticien santé de prêter son concours à l’action entreprise par les autorités compétentes en vue de la protection de la santé. ARTICLE 4 Les tradipraticiens de santé doivent avoir un comportement reflétant la dignité, cultiver l’esprit d’abnégation et entretenir la solidarité entre eux et avec les malades. ARTICLE 5 Les tradipraticiens de santé ne doivent pas employer la médecine traditionnelle à des fins destructives, telles que l’homicide, l’avortement, l’adultère, l’empoisonnement, la trahison, l’escroquerie, la sorcellerie, etc. ARTICLE 6 Les tradipraticiens de santé ne doivent pas favoriser, ni par leurs conseils, ni par leurs actes, des pratiques contraires aux bonnes mœurs. ARTICLE 7 Les tradipraticiens de santé doivent participer aux réunions et conférences organisées par les autorités compétentes et intéressant la médecine traditionnelle. ARTICLE 8 La préparation et la délivrance des médicaments et, plus généralement tous les actes de la médecine traditionnelle doivent être effectués avec une conscience professionnelle élevée. ARTICLE 9 Les tradipraticiens de santé sont tenus de disposer de registres où sont répertoriés tous les actes qu’ils accomplissent, les références des malades traités, les maladies traitées, les remèdes utilisées, les techniques et méthodes employées. Ces registres doivent se conformer aux caractéristiques définies par arrêté du Ministère chargé de la Santé. ARTICLE 10 Les tradipraticiens de santé doivent se garder de désigner leurs assistants ou subalternes pour les tâches qu’ils devraient accomplir eux-mêmes. Au cas où ils seraient amenés à le faire, ils doivent fournir une supervision directe à leurs apprentis et ou assistants et veiller à ce qu’aucune atteinte ne soit portée par son entourage au secret qui s’attache à l’exercice de leur profession. 6 ARTICLE 11 Les tradipraticiens de santé doivent signaler immédiatement au comité départemental et à la DCPNPMT toute réaction indésirable ou effet secondaire constatés lors d’un traitement. De la même manière, ils doivent signaler, par écrit tout cas avéré ou suspect d'une maladie figurant sur la liste des maladies à déclaration obligatoire. ARTICLE 12 Les tradipraticiens de santé doivent limiter leur pratique seulement à l’intérieur des secteurs ou ils ont enregistré leurs compétences professionnelles (aire géographique). ARTICLE 13 Les tradipraticiens de santé autorisé doivent rester à tout temps sur les lieux durant les heures de travail afin de s’assurer d’une supervision ARTICLE 14 Les tradipraticiens de santé doivent garder à jour leurs connaissances et maintenir leurs compétences professionnelles dans les domaines directement liés à leur spécialité. Ils doivent prendre toutes dispositions nécessaires pour participer aux séminaires de formations initiées par la DC-PNPMT et par les associations de tradipraticiens. ARTICLE 15 Les tradipraticiens de santé doivent fournir en cas de besoin des informations sur la médecine traditionnelle au public et à tous les autres professionnels de la santé. ARTICLE 16 Les tradipraticiens de santé doivent s’abstenir de tout actes d’indiscipline incluant l’ivrognerie, la cigarette, l’immoralité, l’abus de la drogue, le charlatanisme au cours de l’exécution de leur art. SECTION II : LES DEVOIRS ENVERS LE PUBLIC ARTICLE 17 Les tradipraticiens de santé doivent se garder d’utiliser le titre de « Docteur », directement ou indirectement, d’une manière susceptible de faire croire qu’ils sont des médecins conventionnels agréés, à moins qu’ils ne le soient effectivement. L’usage du titre « Docteur » pourrait induire le public en erreur. ARTICLE 18 Les tradipraticiens de santé doivent s’abstenir d’utiliser, de porter ou d’avoir un stéthoscope ou tout autre appareil utilisé normalement par les médecins conventionnels ou les dentistes qualifiés ARTICLE 19 Les tradipraticiens de santé doivent s’abstenir d’administrer un anesthésique et d’utiliser la voie parentérale (voie sous-cutanée, intramusculaire, intraveineuse ou autre) pour l’injection des produits. ARTICLE 20 Les tradipraticiens de santé doivent éviter d’appliquer ou d’utiliser un médicament ou pratiquer un acte chirurgical pour faciliter l’examen d’un patient. 7 ARTICLE 21 La première préoccupation du tradipraticien de santé est de faire retrouver où d’améliorer la santé des maladies qui s’adressent à lui. Il doit avoir également pour souci la promotion de la santé et la prévention. ARTICLE 22 Chaque fois qu’un tradipraticien de santé est placé devant un cas de maladies qui dépasse ses compétences, il doit référer ce patient à un confrère plus expérimenté ou à un membre du corps médical. ARTICLE 23 Le tradipraticien de santé est au service du public. Il doit soigner tous ses patients avec la même conscience, sans discrimination de condition sociale, de sexe, de race ou de considération philosophique, politique et religieuse. ARTICLE 24 Avant d’instituer un traitement, le tradipraticien de santé doit obtenir le consentement libre et éclairé de sont patient ou, à défaut, d’un proche autorisé. ARTICLE 25 En cas de pronostic grave constaté lors d’une consultation, le tradipraticien de santé ne doit pas le dissimuler au patient, sauf dans le cas où celui-ci serait dans l’incapacité psychologique de supporter la révélation d’un tel diagnostic ; il peut l’être à sa famille ou, à défaut, à un proche autorisé. ARTICLE 26 Le secret professionnel s’impose à tous les tradipraticiens de santé, sauf dérogations établies par la loi. ARTICLE 27 Afin d’assurer le respect du secret professionnel, le tradipraticien de santé s’abstiendra de parler ou discuter en public des maladies de ses clients. ARTICLE 28 Le lieu d’exercice du tradipraticien de santé doit être clairement identifié. A cet effet, le tradipraticien doit, en accord avec les services publics compétents, faire figurer à la porte de son local professionnel les indications précises suivantes : - Nom ; Qualification ; Types de maladies traitées ; Jours et heures de consultations. ARTICLE 29 Les produits de la médecine traditionnelle doivent être des substances naturelles d’origine végétale, animal, minérale et ne doivent pas être mélanger/ combiner avec les produits de la médecine orthodoxe / chimique pure durant leur préparation ou leur fabrication. 8 ARTICLE 30 Les tradipraticiens de santé ne doivent pas formuler de prescription ou entreprendre des soins dans des domaines qui dépassent leurs connaissances, leur expérience et les moyens dont ils disposent. ARTICLE 31 Les tradipraticiens de santé doivent déterminer leurs honoraires avec tact et mesure en tenant compte de la réglementation en vigueur, des actes dispensés ou des circonstances particulières, notamment le niveau général de revenu des populations. SECTION III : LA PROHIBITION DE CERTAINS PROCEDES DANS LA RECHERCHE DE LA CLIENTELE ARTICLE 32 Les tradipraticiens de santé doivent s’interdire de rechercher la clientèle par des procédés et moyens contraires à la dignité de sa profession. Toute publicité en faveur de la médecine traditionnelle doit se conformer aux règles éditées par le ministère chargé de la santé. ARTICLE 33 Les tradipraticiens de santé investissent de mandats électifs ou administratifs ne doivent pas en user pour accroître leur clientèle. ARTICLE 34 Le détournement ou la tentative de détournement de clients ainsi que tous les actes et comportements allant dans le même sens sont interdits et exposent le contrevenant à des sanctions prévues par les lois en vigueur. SECTION IV : LES RELATIONS AVEC LES AGENTS DE L’ADMINISTRATION ARTICLE 35 Les tradipraticiens de santé doivent maintenir des relations confiantes avec les autorités administratives. ARTICLE 36 Les tradipraticiens de santé doivent donner aux inspecteurs de la santé, dans leurs lieux d’exercice, toutes facilités pour qu’ils puissent accomplir leur mission. ARTICLE 37 Tout tradipraticien de santé qui croit avoir à se plaindre d’un agent de l’administration et qui désire obtenir réparation peut s’adresser, dans ce but, au Programme National de Promotion de la Médecine Traditionnelle ou au district sanitaire dont il relève, qui donne à l’affaire la suite qui convient. 9 CHAPITRE V : DES RAPPORTS AVEC LES CONFRERES ET AUTRES PROFESSIONNELLES DE LA SANTE ARTICLE 38 Dans sa vie de tous les jours, le tradipraticien de santé mettra tout en œuvre pour maintenir entre lui et les tradipraticiens de la Médecine traditionnelle d’une part, entre lui et les agents de la Médecine moderne d’autre part, des rapports empreints de fraternité et de cordialité. Il se doit d’accepter la collaboration avec les services compétents du Ministère chargé de la Santé ARTICLE 39 Afin de maintenir de très bons rapports avec les confrères, le tradipraticien de santé doit s’interdire d’inciter les collaborateurs d’un confrère à le quitter ou les débaucher. ARTICLE 40 Les calomnies et les médisances sur un confrère ou tout autre membre du corps médical sont interdites. Il en est de même de la propagation des propos, des actes ou des comportements susceptibles de le nuire dans l’exercice de sa profession. ARTICLE 41 Avant d’engager l’ancien collaborateur d’un confrère, le tradipraticien de santé doit informer celui-ci et avoir son avis. ARTICLE 42 Les tradipraticiens de santé doivent s’interdire de donner les consultations ou des soins dans un établissement sanitaire sans y être autorisé par le médecin traitant. De même, ils éviteront de prodiguer des soins à des personnes hospitalisées chez elles, sans informer le médecin traitant et obtenir son accord. 10 SECTION VI : DISPOSITIONS DIVERSES ARTICLE 43 Tout tradipraticien de santé, lors de son inscription au registre du Programme National de Promotion de la Médecine Traditionnelle ou au district sanitaire doit affirmer qu’il a eu connaissance du présent Code, et s’engager, sous serment, à le respecter. ARTICLE 44 Tout changement de lieu d’activité du tradipratcien de santé d’un Département à un autre doit donner lieu, de la part de l’intéressé, à une demande de transfert de son enregistrement dans le département d’accueil. ARTICLE 45 Tout tradipraticien de santé qui cesse d’exercer est tenu d’en avertir le Programme National de Promotion de la Médecine Traditionnelle ou au Comité départemental. Celui-ci lui donne acte de sa démission. Le Ministre de la Santé et de l’Hygiène Publique Dr AKA AOUELE 11