janv/fév maq ok 27/02/02 16:30 Page 5 Guy Amah, Xavier Girerd Impact de la pression artérielle normale haute sur le risque de maladie cardiovasculaire L a classification du niveau de pression artérielle (PA), proposée par le JNC VI en 1997 et l’OMS en 1999, identifie trois sous-groupes de sujets considérés comme normotendus : il s’agit des sujets ayant une PA dite optimale (PAS < 120 mmHg et PAD < 80 mmHg), ceux ayant une PA dite normale (PAS allant de 120 à 129 mmHg ou PAD allant de 80 à 84 mmHg), et ceux ayant une PA dite normale haute (PAS allant de 130 à 139 mmHg et PAD allant de 85 à 89 mmHg). Il est établi que le risque cardiovasculaire augmente parallèlement à l’élévation de la PA. Cependant, la relation entre PA normale haute et risque cardiovasculaire manquait de précision. Cela a fait l’objet d’une analyse réalisée à partir des données de l’étude Framingham. Au total, 6 859 sujets étaient concernés par cette analyse. Tous étaient normotendus (PAS < 140 mmHg et PAD < 90 mmHg) et indemnes de maladies cardiovasculaires à leur inclusion dans l’étude de Framingham. Un quart d’entre eux avaient une PA normale haute, un tiers une PA normale et les autres une PA optimale. Chez les sujets âgés de moins de 65 ans avec une PA normale haute, l’incidence cumulée de maladie cardiovasculaire à 10 ans était de 8 % chez les hommes et de 4 % chez les femmes, ce qui correspond à un taux d’événements cardiovasculaires, pour 1 000 personnes-année, respectivement de 9,2 chez les hommes et de 4,7 chez les femmes. Pour les individus âgés de 65 ans et plus, ayant une PA normale haute, l’incidence cumulée de maladie cardiovasculaire à 10 ans était de 25 % chez les hommes et 18 % chez les femmes, soit un taux d’événements cardiovasculaires, pour 1 000 personnesannée, de 28,1 chez les hommes et de 19,5 chez les femmes. Comparativement aux sujets ayant une PA optimale, ceux ayant une PA normale haute avaient un risque cardiovasculaire, 2,5 fois plus élevé chez les femmes et 1,6 fois chez les hommes. De même, le risque cardiovasculaire était plus élevé chez les sujets ayant une PA normale, comparativement à ceux ayant une PA optimale de 1,5 fois chez les femmes et de 1,3 fois chez les hommes. La prise de poids est aussi un déterminant indépendant de survenue d’une hypertension artérielle, avec une augmentation de 20 à 30 % du risque de devenir hypertendu lorsqu’une prise de poids de 4 kg chez l’homme et de 3 kg chez la femme est notée. Commentaire : Les résultats de cette étude montrent donc une progression du risque de survenue d’un événement cardiovasculaire à mesure que le niveau de la PA augmente, même chez les sujets considérés comme normotendus. Le risque le plus élevé dans cette catégorie de population étant supporté par les individus ayant une PA normale haute, surtout lorsqu’ils sont âgés de 65 ans et plus. Commentaire : Ce sont l’âge et la prise de poids qui constituent les deux principaux déterminants de la survenue d’une hypertension artérielle. Si, aujourd’hui, il est encore difficile de lutter contre les effets du vieillissement, chaque individu devrait être informé du rôle favorable d’une absence de prise de poids pour prévenir la survenue d’une hypertension artérielle et de ses complications. – Vasan RS et al. Impact of High-Normal Blood Pressure on the Risk of Cardiovascular Disease. N Engl J Med 2001 ; 345 : 1291-7. G.A. Pourquoi devient-on hypertendu ? L es raisons qui conduisent un normotendu à devenir un hypertendu sont encore largement incomprises. À partir du suivi de la population des sujets de l’étude Framingham, les facteurs de prédiction de la survenue d’une élévation de la pression artérielle ont été précisés. Le suivi de sujets avec une pression artérielle inférieure à 140/90 mmHg est examiné pour rechercher les principaux déterminants de la survenue d’une hypertension artérielle (>160/100 mmHg) sur une période de 4 ans. La progression vers l’hypertension artérielle est deux fois plus importante chez les sujets âgés de plus de 65 ans (35 % de progression) que chez ceux de moins de 65 ans (16 % de progression). Cette incidence augmente avec le niveau initial de la pression artérielle et, chez les sujets de 35 à 64 ans, l’incidence après 4 ans est de 5,3 % chez ceux dont la PAS/PAD était initialement inférieure à 120/80 mmHg et de 37,3 % chez ceux dont la PAS/PAD était initialement inférieure à 130-139/85-89 mmHg. – Vasan RS et al. Assessment of frequency of progression to hypertension in non hypertensive participants in the Framingham Heart Study : a cohort study. Lancet 2001 ; 358 : 1682-6. X.G. Masse grasse centrale et élévation tensionnelle chez les descendants d‘hypertendus I l est reconnu que les descendants de parents hypertendus ont un risque plus élevé de développer ultérieurement une HTA permanente, comparativement aux descendants de parents normotendus. Une équipe suisse a évalué les mécanismes possibles pouvant expliquer le “basculement” vers l’HTA permanente chez 17 sujets de sexe masculin, descendants de parents hypertendus, âgés de 25 ± 1 ans, minces et en bonne santé (groupe 1). Ces sujets ont été comparés à 17 autres, appariés sur l’âge et le sexe, également minces et en bonne santé, mais descendant de parents normotendus (groupe 2). Une mesure de la pression artérielle systolique (PAS) au repos et à l’effort, de même qu’une mesure du poids, de l’index de masse corporelle (IMC) et du rapport taille/hanche (RTH) ont été effectués à l’état de base puis cinq ans plus tard. Aucune différence 5 Revue de presse Revue de presse janv/fév maq ok 27/02/02 16:30 Page 6 significative n’a été observée à l’état de base concernant le poids, l’IMC, le RTH et la PA d’un groupe à l’autre. Au cours de la période de suivi de cinq ans, une augmentation significative du poids et de l’IMC a été notée d’une manière équivalente dans les deux groupes. En revanche, le RTH a significativement augmenté dans le groupe 1, mais est resté inchangé dans le groupe 2. De ce fait, le RTH était significativement plus élevé durant la période de suivi dans le groupe 1 comparativement aux sujets du groupe 2. Par ailleurs, une augmentation significative de la PAS au pic de l’effort a été observée de l’état de base à la fin de la période de suivi dans le groupe 1, alors que l’augmentation de la PAS au repos n’était pas significative dans ce groupe. Dans le groupe 2, aucun changement notable n’est survenu pour la PAS au pic de l’effort et au repos. Ainsi, les sujets du groupe 1 présentaient une réponse tensionnelle excessive à l’effort durant la période de suivi comparativement aux sujets du groupe 2, sans qu’une différence significative ait été notée entre les deux groupes en ce qui concerne la PAS au repos. Le fait important de cette étude est que les descendants de parents hypertendus ont une prédisposition à développer à long terme, une obésité abdominale comparativement aux descendants de parents normotendus. Commentaire : À côté de la prédisposition génétique probable, le développement d’une obésité abdominale, et une réponse tensionnelle excessive à l’effort constituent des facteurs prédictifs de développement ultérieur d’une HTA chez les sujets descendant de sexe masculin de parents hypertendus. – Allemann Y et al. Increased central body fat deposition precedes a significant rise in resting blood pressure in male offspring of essential hypertensive parents : a 5 year follow-up study. J Hypertens 2001 ; 19 (12) : 2143-8. G.A. Pression pulsée et développement de l’insuffisance cardiaque dans l’étude SHEP L a pression pulsée (PP) élevée est maintenant reconnue comme étant un facteur de risque indépendant de survenue d’événements cardiovasculaires et cérébrovasculaires. Les auteurs de l’étude SHEP ont évalué la relation entre une PP élevée et l’augmentation du risque de développer une insuffisance cardiaque chez les sujets âgés ayant une hypertension artérielle systolique isolée. Il apparaît que la PAS, la PP et la pression artérielle moyenne (PAM) sont des facteurs prédictifs puissants de développement de l’insuffisance cardiaque. Après ajustement pour la PAM, le développement de l’insuffisance cardiaque est inversement lié à la PAD et directement lié à la PP. On retrouve les mêmes résultats lorsque l’on exclut les patients ayant développé un infarctus du myocarde (IDM) durant la période de suivi. Commentaire : Chez les sujets âgés ayant une HTA systolique isolée, une PP élevée est associée à un risque élevé d’insuffisance cardiaque indépendamment de la PAM et de la survenue d’un IDM aigu. Ces résultats démontrent une fois de plus l’importance de la PP dans l’évaluation du pronostic des sujets âgés, en particulier ceux ayant une HTA systolique isolée. – JB Kostis et al. Association of increased pulse pressure with the development of heart failure in SHEP. Am J Hypertens 2001 ; 14 : 798-803. G.A. Qui bénéficie de l’aspirine en prévention primaire ? L a prescription de l’aspirine pour prévenir les complications cardiovasculaires chez des sujets en prévention primaire fait partie de la pratique de nombreux médecins. Cette attitude devrait être raisonnée en fonction du rapport bénéfice/risque de cette prescription préventive. Un groupe d’experts nord-américains a réalisé une recommandation fondée sur une méta-analyse des essais randomisés menés sur au moins une année chez des sujets en situation de prévention primaire des complications cardio-vasculaires. Globalement, s’il existe un bénéfice significatif de la prescription d’aspirine Act. Méd. Int. - Hypertension (14), n° 1, janvier 2002 sur la survenue d’un infarctus du myocarde non mortel et d’une maladie cardiaque mortelle de - 28 % (IC, - 13 à - 40 %), il faut tenir compte du risque de survenue d’une complication par hémorragie cérébrovasculaire de + 40 % (IC, - 10 à + 200 %) et de celui d’une hémorragie digestive qui est de 70 % (IC, 40 à 210 %). La mortalité toutes causes n’étant pas significativement affectée. De façon plus opérationnelle, les auteurs proposent de tenir compte du rapport bénéfice/risque de cette prescription selon le niveau initial du risque cardiovasculaire du patient : – chez 1 000 sujets dont le risque cardiovasculaire absolu de maladie coronaire est de 5 % à 5 ans, l’aspirine prévient 6 à 20 infarctus du myocarde mais provoque de 0 à 2 hémorragies cérébrales et de 2 à 4 hémorragies digestives graves ; – chez 1 000 sujets dont le risque cardiovasculaire absolu de maladie coronaire est de 1 % à 5 ans, l’aspirine prévient 1 à 4 infarctus du myocarde mais provoque de 0 à 2 hémorragies cérébrales et de 2 à 4 hémorragies digestives graves. Commentaire : Alors que la justification de prescription des antihypertenseurs et des hypolipémiants n’ont pas pris en compte, jusqu’à présent, les risques de complications liés à ces médicaments, il est maintenant recommandé de considérer les risques liés à la prescription de l’aspirine lors de sa prescription. Si le risque de complications est pris en compte, la prescription de l’aspirine ne devrait pas être systématique mais, au minimum, réservée aux sujets dont le risque de complications par infarctus dépasse 5 % à 5 ans. – Hayden M et al. Aspirin for the primary prevention of cardiovascular events : a summary of the evidence for the US preventive services task force. Ann Intern Med 2002 ; 136 : 161-72. X.G. Toutes nos revues en ligne avec un accès GRATUIT Code revue : mp-ach 6 Revue de presse Revue de presse