Les altérations : un enregistrement des mouvements verticaux des lithosphères continentales, un nouveau concept de réservoir dans les roches cristallines Robert Wyns BRGM Orléans Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 PLAN 1. Critique du contrôle climatique de l’altération 2. Qu’est-ce que l’altération ? 3. Relations entre altération, hydrologie et tectonique 4. Séquences d’altération et mouvements verticaux de la lithosphère 5. L’altération, un marqueur géodynamique et paléogéographique des orogènes 6. L’horizon fissuré des profils latéritiques : un réservoir pour l’eau et pour les hydrocarbures Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 >2 1. Critique du contrôle climatique de l’altération L’altération des roches a été jusqu’à récemment considérée comme contrôlée essentiellement par le climat, selon la représentation de Strakhov (1962, 1967). From Strackhov, 1967 Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 >3 Depuis le milieu des années 1990, la multiplication des datations de profils latéritiques (datations Ar-Ar sur oxydes de manganèse, initiées par Vasconcelos, et datations par paléomagnétisme, initiées par Théveniault et Freyssinet) a permis de montrer que de nombreux paléoprofils latéritiques d’Europe de l’Ouest avaient le même âge que ceux d’Afrique de l’Ouest, d’Amérique du Sud ou d’Australie : Ils se sont formés en dehors de la zone intertropicale, sous des latitudes comprises entre 35° et 50°. Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 >4 Un exemple de profil latéritique en Vendée Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 >5 La distribution actuelle des zones climatiques en fonction de la latitude n’existe que depuis 10 Ma environ (période à partir de laquelle l’importance des calottes glaciaires aux pôles a resserré les ceintures climatiques en direction de l’équateur) Au cours de l’essentiel du Mésozoïque et du Cénozoïque, les températures moyennes (18 à 22 °C) et les précipitations ( 1000 mm) permettaient le fonctionnement des profils latéritiques jusque sous les hautes latitudes (# 60° N) Les nombreux profils latéritiques présents en Europe se sont développés sous des latitudes comprises entre Gibraltar et Paris Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 >6 L’altération latéritique peut s’affranchir du climat : effets thermiques de l’altération soustractive (Travail réalisé en collaboration avec JP Girard, L. Guillou-Frottier et P. Blanc) ¾ L’altération des biotites en chlorite s’accompagne très souvent de la cristallisation d’adulaire (feldspath potassique de basse T°), selon la réaction : biotite + quartz + H2O Æ chlorite + goethite + adulaire les adulaires néoformées sont de plus en plus abondantes lorsque l’on monte dans le profil : elles sont donc d’origine latéritique. Leur formation débute au voisinage du front de percolation, à la base de l’horizon fissuré (plusieurs dizaines de mètres sous la surface) ¾ L’étude géothermométrique (isotopes de l’oxygène et de l’hydrogène) des adulaires et des chlorites néoformées a permis de déterminer une T° de cristallisation voisine de 100°C, ce qui n’est pas compatible avec des T° d’eau de surface Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 >7 ¾ L’altération soustractive consiste en un ensemble de changements de phases minéralogiques de la roche mère permettant de mettre celle-ci en équilibre avec les conditions de surface. ¾ Les principales réactions en jeu sont des réactions d’hydratation et d’oxydation ¾ Toutes ces réactions sont puissamment exothermiques : elles libèrent la chaleur emprisonnée dans les liaisons chimiques de haute énergie des minéraux cristallisés à haute température (processus inverse du métamorphisme, où les réactions sont endothermiques) ¾ Lorsque l’eau peut circuler librement dans le milieu, la chaleur produite est évacuée vers le haut par convection dans l’eau. ¾ Au voisinage du front de percolation, la perméabilité est trop faible pour permettre la convection : la chaleur ne peut être évacuée que par conduction dans la roche ¾ Comme le front de percolation s’enfonce dans sa propre auréole thermique à une vitesse plus faible que celle de la conduction, la température de départ des réactions est un peu plus élevée à chaque stade d’enfoncement. Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 >8 Hypothèse d’évolution thermique au front de percolation : T0 : initiation du profil latéritique t0 Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 >9 T1 : le front de percolation commence à s’enfoncer : la T° reste faible, la biotite se transforme en vermiculite Front de percolation T° < 50°C : La biotite s’hydrate en vermiculite P1 t1 Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 10 Tn : l’augmentation de température à la base du profil permet la formation de chlorite et d’adulaire Arène Horizon fissuré Pn Front de percolation T° > 50°C : La biotite s’hydrate en chlorite avec apparition d’adulaire tn Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 11 Les calculs thermodynamiques permettent d’estimer la production de chaleur à environ 150J par gramme de granite soit 405.106 J/m3 (405 mégajoules), mais la puissance thermique dégagée (1W=1J/s) dépend de la cinétique des réactions On résout donc l’équation de la chaleur avec les conditions et propriétés suivantes : Granite, avec : T=20°C z=0 densité = 2700 kg/m3 capacité calorifique = 800 J/kg/K conductivité thermique = 3 W/m/K z=200m Flux=Cste=90 mW/m² Production de chaleur = Q(z,t) = - pour z<(veloc.t), Q=Q0 - pour z>(veloc.t), Q= Q0 exp (- (z-veloc.t)² / G²) où G vaut 10m, et où veloc est homogène à une « vitesse » mais qui ne correspond pas à la vitesse de propagation du front thermique (celui-ci se propage plus lentement – c.f. diffusion thermique) Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 12 Steady-state temperature profiles – No convection - Variable heat source Régime permanent atteint à 200m (i.e. le flux revient à 90mW/m²) zone 100°C +/- 20°C les sources associées émettraient entre 0.008 et 0.014 W/m3 Æ Donc, pour une production 0.008 W/m3, on pourra atteindre les 100+/-20°C au bout d’environ 9 Ma Æ La température initiale de l’eau de pluie liée au climat joue donc un rôle mineur, puisque l’eau est réchauffée en base de profil par la chaleur libérée par les réactions d’altération Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 13 Æ Le climat n’est pas le contrôle unique, ni même majeur, de l’altération Æ Le modèle de Strakhov s’applique aux sols au sens pédologique, dont la durée de vie est de quelques dizaines à quelques milliers d’années Æ Il ne s’applique pas aux profils d’altération, dont la durée de vie est de plusieurs dizaines de millions d’années Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 14 2. Qu’est-ce que l’altération ? Les altérites forment une série continue, depuis un pôle soustractif (exportation nette de matière) jusqu’à un pôle additif (importation nette de matière) : Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 15 L’altération soustractive : • Elle agit principalement par l’hydrolyse des minéraux primaires de la roche et l’évacuation par lessivage des cations les plus solubles (K, Na, Mg, Ca, et dans une moindre mesure Si). Les éléments non évacués se recombinent sur place pour former essentiellement des oxydes, hydroxydes et des argiles. • Classiquement on appelle profils latéritiques des profils d’altération soustractive développés sur roches cristallines (roches plutoniques, volcaniques et métamorphiques) • On peut y rattacher les profils développés sur roches sédimentaires : argiles kaoliniques sur argiles et marnes, argiles à chailles sur calcaires jurassiques à chailles, sables sur tuffeau crétacé, sables à silex et argiles à silex sur craie à silex, ainsi que les dissolutions karstiques développées sur calcaires pauvres en insolubles Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 16 Structure d’un profil latéritique Æ L’épaisseur de l’horizon fissuré est environ le double de celle de la saprolite Æ Les connaissances actuelles montrent des épaisseurs d’horizon fissuré comprises entre 50 et 200 m environ Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 17 L’altération additive : A l’opposé des altérations soustractives, les altérations additives (silcrètes, calcrètes, dolocrètes, gypcrètes…) sont dues à la précipitation en zone vadose des éléments chimiques contenus dans l’eau souterraine (Si, Ca, Mg, Na, K…) La concentration des solutions résulte de l’évapotranspiration et du dégazage dans la zone capillaire située au-dessus de la nappe phréatique (From Wright and Tucker 1991) Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 18 Exemple de calcrète développé dans le calcaire de Beauce Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 19 3. Relations entre altération, hydrologie et tectonique L’altération soustractive (départ net de matière) n’est possible que si la composition de l’eau interagissant avec la roche est en permanence sous-saturée par rapport aux minéraux présents dans la roche ÆCeci implique que l’eau puisse s’évacuer en permanence vers l’aval du paysage, ou en d’autres termes que la zone considérée se trouve à l’amont d’un gradient hydrologique régional, ou encore dans une partie haute du paysage. ÆPar ailleurs, pour que l’eau de pluie ait le temps de s’infiltrer jusqu’à la roche saine (en traversant généralement plusieurs dizaines de mètres de saprolite argileuse), la pente moyenne de la surface du sol doit être faible (dans le cas contraire le ruissellement prend le pas sur l’infiltration). Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 20 Ces deux conditions (altitude et faible pente) sont réunies dans les déformations lithosphériques de grande longueur d’onde (500 à 1000 km). Les altérations soustractives se forment donc généralement sur : ÆLes épaulements de rift, ÆLes bombements thermiques, ÆLes antiformes liées au flambage lithosphérique en contexte de compression. Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 21 L’altération additive (apport net de matière) n’est possible que si la surface de la nappe phréatique se trouve à faible profondeur sous la surface du sol, condition indispensable pour permettre la concentration des solutions par évapotranspiration Æ Elle apparaît donc dans les points bas du paysage ÆLes altérations additives se développent donc principalement dans les grandes dépressions intracontinentales (exemples actuels : Australie centrale, bassin du Tchad…). Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 22 C’est sur la base de ce raisonnement que l’on peut classer les différents types d’altération supergène selon une série continue allant d’un pôle soustractif, correspondant aux zones soulevées des lithosphères continentales, à un pôle additif, correspondant aux zones déprimées Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 23 Exemple de l’Australie : on rencontre tous les types d’altération à la même latitude, mais les altérations additives sont en position de cuvette, et les altérations soustractives sur les zones soulevées Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 24 4. Séquences d’altération et mouvements verticaux de la lithosphère Lorsqu’une lithosphère continentale émergée se déforme verticalement, elle enregistre généralement la succession des types d’altération caractéristiques des différents états de drainage liés à son altitude Les silicifications marquent l’inversion du type d’altération : Les silcrètes à coiffes se développent sur d’anciens profils d’altération soustractive, après l’engorgement de ceux-ci dû à la remontée de la nappe phréatique lors de la subsidence lithosphérique ; l’illuviation argileuse, donnant des « coiffes » sur les éléments figurés, précède la silicification ; elle résulte de l’inondation périodique de la surface du sol et de la décantation des eaux boueuses Les meulières se développent sur des carbonates (marins, continentaux ou lacustres) ; d’abord compactes, elles évoluent en faciès caverneux lors de l’altération soustractive liée au soulèvement lithosphérique, avec illuviation argileuse postérieure à la silicification Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 25 La séquence altération soustractive Æ altération additive caractérise une lithosphère en subsidence, Subsidence Silcrètes à coiffes Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 26 La séquence inverse altération additive Æ altération soustractive caractérise une lithosphère en soulèvement. Uplift Meulières Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 27 Détail d’un silcrète à coiffes (Nord du Massif central)) : Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 28 Détail d’un silcrète à coiffes (Carrière de Viennay, Deux Sèvres) : Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 29 Silcrète formé aux dépens d’un profil bauxitique (sud de l’Arabie, épaulement de la Mer Rouge) : Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 30 Silcrète formé aux dépens d’un profil bauxitique (sud de l’Arabie, épaulement de la Mer Rouge) : Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 31 Meulière se développant aux dépens d’un calcrète (Inde) Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 32 Meulière caverneuse formée aux dépens de calcaires lacustres oligocènes (graben de Saint-Maixent, Poitou) Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 33 Exemple de séquences d’altération enregistrant les déformations de l’avant-pays alpin au Tertiaire en Europe de l’ouest Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 34 Répartition des altérations soustractives en France à l'Eocène ; la zone hachurée a été soulevée par flambage lithosphérique au cours de la compression "pyrénéenne" : Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 35 La comparaison des faciès sédimentaires et d'altération associés à une paléosurface avec la charte eustatique permet de construire une courbe paléoaltimétrique de cette surface : Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 36 Les mêmes évènements se retrouvent dans les courbes d'accommodation construites à partir de l'analyse séquentielle haute résolution en domaine de bassin épicontinental (d'après Robin et Guillocheau, 1999) : Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 37 Exemple d’évolution altimétrique du sommet de la lithosphère hercynienne en Europe de l’Ouest : Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 38 Ondulations lithosphériques en Europe au Crétacé inférieur : Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 39 Ondulations lithosphériques en Europe depuis le Miocène : Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 40 5. L’altération, un marqueur géodynamique et paléogéographique dans les orogènes L’association fréquente des altérations soustractives (latérites, bauxites) avec les épaulements de rift en font des marqueurs paléogéographiques des marges émergées liées aux ouvertures océaniques dans les chaînes de collision Ainsi, pour l’ouverture du Golfe de Gascogne au Crétacé, l’épaulement nord est marqué par une surface d’érosion profondément altérée depuis la Bretagne jusqu’aux Cévennes, avec des profils latéritiques sur socle cristallin (Massif armoricain, Limousin, Aubrac…), des argiles à Chailles dans le Poitou et des bauxites sur le plateau des Causses. L’épaulement sud, quant à lui, souligné par des profils latéritiques sur roches cristallines et par des bauxites sur roches carbonatées, est actuellement dispersé tectoniquement au sein de la chaîne pyrénéenne La reconstitution de sa géométrie originelle et de ses éventuels diverticules est encore à réaliser, en prenant en compte une analyse structurale des sites où ces paléoaltérations ont été fossilisées (regard des failles normales au pied desquelles les bauxites resédimentées sont préservées…). Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 41 L’ouverture du golfe de Gascogne au Crétacé inférieur : L’épaulement nord du rift s’étend de la Bretagne aux Cévennes L’épaulement sud est actuellement dispersé tectoniquement au sein de la chaîne pyrénéenne From Ziegler, 1998 Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 42 La question de l’aplanissement précoce des chaînes de collision en voie de surrection L’étude des paléoaltérations en Corée du Sud et en Corse du Sud (tous deux orogènes structurés au Tertiaire) a montré les faits suivants : Existence dans les deux cas d’une surface d’aplanissement portant un épais manteau d’altération, postérieure aux structures tangentielles en raccourcissement Cette surface d’aplanissement est décalée verticalement par des failles (de directions conjuguées en Corée) à premier jeu décrochant, avec rejeu en failles normales ensuite (les 2 générations de stries sont enregistrées dans les arènes argileuses des profils d’altération), avec une dénivellation de plus de 2500 m. Ces faits peuvent être interprétés, en première hypothèse, comme résultant d’une phase d’aplanissement à la fin de la phase de convergence et au début de la phase extensive de résorption des racines lithosphériques (soulèvement de la chaîne) Les failles décalant la paléosurface seraient la trace en surface (transtension puis extension) des failles listriques normales accompagnant la dénudation de la chaîne Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 43 Evolution des contraintes régionales dans une chaîne de collision : 1. Phase de raccourcissement : ¾ ¾ ¾ ıh > ıv Création de racines lithosphériques Peu de relief, surface d’aplanissement ? (Modifié d’après Jolivet et Nataf, 1998) Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 44 Evolution des contraintes régionales dans une chaîne de collision : 2. Epaississement maximal : ¾ıh § ıv ¾Le raccourcissement est bloqué ¾Début de croissance de l’altitude (Modifié d’après Jolivet et Nataf, 1998) Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 45 Evolution des contraintes régionales dans une chaîne de collision : 3. Phase d’effondrement : ¾ıv > ıh ¾Relief maximal ¾Etalement latéral de la chaîne, nappes gravitaires, dénudation ¾Remontée des racines lithosphériques (Modifié d’après Jolivet et Nataf, 1998) Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 46 6. L’horizon fissuré des profils latéritiques : un réservoir pour l’eau et les hydrocarbures Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 47 Certains des minéraux hydrolysés (notamment biotite, pyroxène, olivine) augmentent de volume lors de leur hydratation : Par exemple, la transformation d’une biotite en chlorite ou en vermiculite au stade précoce de l’altération provoque une augmentation volumique potentielle de l’ordre de 40 % (l’épaisseur des feuillets passe de 10 Å à 14 Å) ÆIl s’ensuit l’apparition de contraintes qui engendrent des micro et des macro-fissures par lesquelles l’eau peut continuer à progresser vers le bas et atteindre de plus en plus de minéraux : ÆL’altération crée physiquement dans la roche saine les conditions de perméabilité qui lui permettent de se propager Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 48 Exemple de l’altération d’un granite à biotite : Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 A la base de la saprolite (horizon feuilleté), toutes le biotites ont été altérées, on observe un intense réseau de micro-fissures : Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 Les microfissures ainsi créées permettent l’augmentation exponentielle des surfaces réactives : la surface spécifique augmente comme 2 x l’inverse de l’écartement entre les fissures Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 Exemple des microfissures crées par le gonflement des biotites dans un granite (horizon feuilleté) Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 Aspects mécaniques de la fissuration Cas des roches grenues (granitoïdes) La biotite subit une augmentation de volume de 40 % environ : l’écartement des feuillets passe de 10 Å à 14 Å lorsqu’elle se transforme en chlorite ou en vermiculite. Cette transformation se fait au sein de l’horizon fissuré, à plusieurs dizaines de mètres de profondeur. Dans ces conditions, le gonflement dans le plan horizontal est impossible (sauf à proximité des fissures préexistantes) car le milieu est infini : Æ il en résulte une augmentation des contraintes horizontales. Dans le plan vertical, le gonflement ne sera possible que lorsque la contrainte verticale sera supérieure ou égale à la charge lithostatique. Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 53 Æ Dans un granite, dès que la charge lithostatique est compensée, la contrainte verticale n’augmente plus et elle est remplacée par de la dilatation, alors que les contraintes horizontales continuent à augmenter Æ les contraintes maximales (ı1 et ı2 du tenseur de contraintes) sont alors horizontales, tandis que la contrainte minimale (ı3) est verticale. Æ Lorsque la différence d’intensité entre contrainte maximale horizontale et contrainte verticale dépasse la limite élastique de la roche, il y a apparition de fentes de tension parallèles aux deux composantes maximales du tenseur de contraintes (c'est-à-dire horizontales dans le cas d’un granite). Æ Des microfissures ainsi que des macrofissures apparaissent alors Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 54 L’horizon fissuré dans les granitoïdes En Vendée (granite de Mortagne) Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 55 En Vendée (granite de Mortagne) : Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 En Guinée dans des migmatites à foliation verticale Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 57 Dans le Livradois : Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 Dans les Vosges (Honeck) : profil anté-triasique Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 En Bretagne (granite de Ploumanac’h) Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 Dans le Morvan Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 En Aveyron Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 Au Burkina-Faso Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 En Inde (Hyderabad, Andhra Pradesh) : Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 En Arabie saoudite : Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 65 L’altération en boules A proximité d'une diaclase verticale préexistante, le tenseur des contraintes subit une rotation de 90°, car la dilatation horizontale peut être localement absorbée par la fermeture de la diaclase ; c'est l'origine de la formation des boules de granites : Les fractures radiales restent fermées car les contraintes majeures sont tangentes à la surface de la boule, le cœur est donc protégé des infiltrations d’eau et de l’altération Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 66 L’altération en boules Exemple de rotation des contraintes le long d’une diaclase préexistante (Inde) : Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 67 Exemple : Peyro Clabado (Sidobre) Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 68 Cas des roches plissées (schistes, micaschistes, gneiss) ÆLes phyllites ont des orientations dépendant de la structure de la roche ÆPar ailleurs, la texture litée confère généralement à la roche des plans de faiblesse préférentiels Æ La géométrie des fractures résultantes est généralement irrégulière Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 69 L’horizon fissuré dans les roches basiques et ultrabasiques ÆLes principaux minéraux gonflants sont les pyroxènes et l’olivine ÆPas ou peu de gonflement dans les roches paléovolcaniques ou ayant subi un métamorphisme rétrograde (amphibolites) car les minéraux gonflants ont été hydratés avant l’altération latéritique ÆIdem pour les dolérites lorsque les minéraux gonflants ont été hydratés lors de la mise en place ÆLes basaltes et les gabbros non métamorphiques sont capable de développer un horizon fissuré s’ils contiennent des minéraux gonflants, idem pour les péridotites Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 70 Application aux aquifères en roches cristallines Le modèle ancien d’aquifère en zones de socle : aquifères verticaux isolés les uns des autres, liés à des couloirs de fracturation Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 71 Le nouveau modèle d’aquifère : Horizon fissuré : 10-8 -3 -5 K= à 10 m/s (moy. 10 m/s), Saprolite : Aquifère stratiforme, multicouches, lié à un ancien profil forte anisotropie de latéritique K dans les granites, -7 -5 -6 K = 10 à 3 x 10 m/s (moy. = 2 x 10 m/s) Peff = 3 à 10 % avec Kh = 10 x Kv Peff = 0,1 à 5 % Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 > 72 Quantification des volumes poreux Æ Les études réalisées en France en combinant modélisation géométrique de l’aquifère et mesures des teneurs en eau par RMP (Résonance Magnétique Protonique) ont permis de réaliser des cartes de la réserve en eau souterraine, exprimée en hauteur d’eau équivalente. Æ Ces études montrent que 80 à 90 % de l’eau libre est stockée dans l’horizon fissuré, le reste dans les altérites meubles HORIZONS D’ALTERATION m 50 50 m Surface du sol (MNT) Surface piézométrique h1 SONDAGES RMP : MESURE DES POROSITES Altérites Base des altérites Horizon fissuré supérieur h2 Horizon fissuré inférieur h3 Bed-rock sain Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 ESTIMATION DE LA RESERVE ) Lame d’eau = )1 * h1 (mm) ) Lame d’eau = )2 * h2 (mm) ) Lame d’eau = )3 * h3 (mm) Pour des profils d’altération dont l’horizon fissuré a une épaisseur moyenne de 70 m, la hauteur d’eau totale de l’aquifère d’altération est comprise entre 1 et 3 m Carte de la réserve en eau souterraine, micaschistes précambriens (Maine et Loire) Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 Application aux réservoirs pétroliers Modèle habituel d’un réservoir d’hydrocarbures en roches cristallines Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 Theoretical porous volume of fissured layer from Magnetic Resonance Soundings (Case of 80 to 100 m thick fissured layer) In m3/km² In barrels/km² For 1 m water height 1000000 6289308 For 2 m water height 2000000 12578616 For 3 m water height 3000000 18867924 Conférence EnSciTerre, OSUC, 27 mars 2013 Merci de votre attention ! > 77