Médecine d'Afrique Noire : 1999, 46 (4)
particulier une reprise de la mobilité par rapport aux plans
profonds. Un mois plus tard, les chirurgiens effectuent un
”picking” ganglionnaire libérant le creux axillaire gauche.
La pièce opératoire confirme l’histologie initiale. Le traite-
ment est complété par un complément de dose de 10,00 Gy
en 5 séances sur un volume axillaire gauche réduit. Au
premier anniversaire post-thérapeutique, il n’existe aucun
signe de récidive. Le rendez-vous du 2ème anniversaire
n’est pas respecté et la patiente est perdue de vue.
Cas 2 : Madame J.A., patiente de 63 ans, est transférée
dans notre service le 10 juillet 1992 pour une volumineuse
adénopathie axillaire gauche unique, fixée aux plans pro-
fonds et superficiels, maintenant le bras gauche en légère
abduction. Le tableau clinique a évolué pendant un an et
demi avant la première consultation motivée par la gêne
permanente sous le bras empêchant la patiente de vaquer à
ses occupations champêtres. L’examen clinique ne montre
aucune autre anomalie associée à l’adénopathie suspecte.
Le bilan à ”minima” - la scintigraphie osseuse non réalisa-
ble au Cameroun n’est pas faite - ne montre pas d’atteinte
métastatique. Une radiothérapie première à la dose de
40,00 Gy en 20 séances est réalisée sur le sein et les aires
ganglionnaires axillo-sus-claviculaires gauches. Elle est
suivie au bout de trois semaines par un curage axillaire
gauche limité. La patiente n’est revue que quatre mois plus
tard avec un blindage axillaire gauche manifestement
néoplasique qui évolue vers une plaie ulcérée et surinfectée
de toute la région axillaire. Les conditions exactes de son
décès n'ont pas pu être évaluées, la patiente ayant passé ses
derniers jours en région rurale.
Cas 3 : Madame Z, âgée de 57 ans, est reçue à notre
consultation du 26 mai 1995 pour une voûssure du prolon-
gement axillaire gauche de nature inflammatoire ayant
évolué depuis 3 mois, d’abord sur un mode indolore, ensui-
te algique dès les premières manifestations de l’inflamma-
tion. Cette paisible patiente de provenance rurale, mariée
depuis un quart de siècle n’a jamais eu d’enfant sans
qu’elle sache pourquoi. Ses antécédents aussi bien fami-
liaux que personnels sont sans particularités. L’ e x a m e n
clinique met en évidence une induration du prolongement
axillaire gauche de plus de 10 cm de grand axe, mal limitée
et fixée aux plans profonds. Les radiographies pulmonaires
et l’échographie abdominale à la recherche de localisations
secondaires sont normales. Les résultats des biopsies au
trucut sont en faveur d’une métastase ganglionnaire d’un
adénocarcinome canalaire infiltrant. Le 5 juin 1995, une
polychimiothérapie de type FAC est initiée. Elle se déroule
en trois cures au terme desquelles on obtient une fonte
tumorale évaluée à 40 %. Elle est suivie d’une irradiation
externe au Cobalt 60 portant sur le sein gauche, la paroi
thoracique sous-jacente et les aires ganglionnaires axillo-
sus-claviculaires homolatérales. La dose administrée est de
40,00 Gy en 20 séances réparties sur 4 semaines. La
patiente est mise en RC après ces deux modalités thérapeu-
tiques et présentée au ”staff ” de l’hôpital qui suggère que
soit réalisée une mastectomie radicale avec curage axillaire
gauche. Elle est faite le 21 août 1995. La pièce opératoire
ne présente aucun signe de malignité, pourtant la paix est
de courte durée pour Madame Z. En effet, 9 mois après le
traitement, à l’occasion de l’installation d’une toux rebelle,
on lui découvre des métastases pulmonaires en lâcher de
ballons et hépatiques. Sa mort survient 2 mois plus tard.
DISCUSSION
L’adénopathie axillaire synonyme de cancer mammaire est
une entité bien définie. Dans l’approche thérapeutique,
HALSTED signalait déjà 3 cas en 1907 [3]. Pourtant avec
un siècle de recul, peu de travaux ont été consacrés à cette
forme particulière de cancers mammaires. L’une des rai-
sons serait le nombre peu élevé de cas. A l’hôpital général
de Douala, les 3 cas représentent 2,5 % de cancers mam-
maires par rapport aux 119 patientes traitées en 6 ans [5].
Sur le plan pratique, il est important d’éliminer les adéno-
pathies axillaires primitives, celles qui sont métastatiques
d’autres localisations et les cancers mammaires du prolon-
gement axillaire.
Dans les formes communes de cancers mammaires, le sex-
ratio est de 1 homme pour 100 femmes. Dans la plupart des
séries publiées, il n’existe aucune atteinte masculine décri-
te [6]. Y aurait-il une prédilection d’atteinte du sexe fémi-
nin ou serait-ce en raison du nombre insignifiant des mala-
des enregistrés dans diverses séries ?
L’âge médian de nos patientes est de 63 ans. Celui de la
série de l’Institut Curie est de 54,6 ans [1]. Le grand dia-
mètre moyen des tumeurs à la découverte est de l’ordre de
8 cm. Nos patientes étaient d’emblée T0N2. Cette décou-
verte tardive s’explique par le caractère initialement indo-
lore de l’adénopathie dont la présence en raison de l’état
socio-culturel et éducatif n’inquiète guère nos patientes.
A. MOUELE SONE,J.M. NGALLE MBONJO, M. ESSOMBA BIWOLE,
J.P. AMANA, A. MBAKOP
235