Chez l`octogénaire, de faibles doses de fer permettent de corriger

Les posologies habituellement recommandées pour
corriger une carence martiale se situent entre 150 et 200 mg
de fer métal par jour. Ces doses journalières peuvent même
être augmentées dans certaines situations particulières. Cette
démarche peut en particulier se justifier chez le sujet âgé
dont l’absorption du fer est supposée diminuer en raison de
la moindre sécrétion acide de l’estomac. La tolérance des
sels de fer n’est cependant pas très bonne et diminue avec les
doses administrées. Par ailleurs, un excès de fer a pu être
impliqué dans la survenue de diverses pathologies
impliquant des mécanismes oxydatifs. Aussi, certains
investigateurs ont tenté de réduire les doses quotidiennes de
fer destinées à la correction des carences. Forts de
l’observation effectuée chez des femmes enceintes montrant
l’efficacité de faibles doses de fer dans l’élévation de
l’hémoglobinémie sans effets secondaires, des gériatres
israéliens ont voulu savoir si une telle approche se montrerait
également bénéfique chez des octogénaires.
Cette étude a été effectuée sur un groupe de 90 patients
sélectionnés à partir d’une population de 548 sujets de plus
de 80 ans admis sur une période de 3 années en unité de
soins aigus et qui tous présentaient une anémie. Les
participants ont été retenus en fonction de leur niveau
d’hémoglobine qui devait se situer entre 8,0 et 11,9 g/dL et
de leur concentration de ferritine qui devait être < 40 ng/mL.
Etaient exclus les patients qui avaient un déficit en vitamine
B12, ainsi que ceux qui souffraient de pathologies lourdes,
d’une insuffisance rénale sévère, ou qui avaient reçu une
supplémentation en fer ou une transfusion sanguine moins
d’une semaine plus tôt. Ces patients, répartis en 3 groupes de
30 sujets chacun, ont reçu de façon randomisée 15, 50 ou
150 mg de fer métal chaque jour. Les deux doses les plus
faibles étaient administrées sous forme d’une solution de
gluconate de fer alors que la posologie la plus élevée était
constituée de citrate calcique de fer en comprimés. Les
concentrations sanguines en hémoglobine et en ferritine
étaient mesurées avant toute supplémentation, puis 30 et 60
jours après le début du traitement. Un quatrième groupe de
sujets de même âge mais non anémiés a servi de témoin et a
également reçu 15 mg de fer quotidiennement pendant 2
mois.
L’absorption du fer était significative dès la quinzième
minute après l’ingestion d’une dose de 15 mg. La vitesse
d’absorption était plus élevée chez les patients anémiés que
chez les non anémiés. Au cours des 2 mois de traitement, les
niveaux d’hémoglobine et de ferritine ont augmenté de façon
significative dans les trois groupes traités sans qu’une
différence n’apparaisse selon la posologie administrée. En
revanche, ces deux paramètres demeuraient inchangés dans
le groupe témoin qui avait reçu 15 mg de fer par jour.
L’augmentation de la ferritine était plus rapide au cours du
premier mois de traitement qu’au cours du second, quelle
que soit la dose de fer. Par ailleurs, plus la concentration de
l’hémoglobine était faible au départ, plus elle était améliorée
par le traitement. La fréquence des effets secondaires gastro-
intestinaux, faible à la posologie de 15 mg/j, était
proportionnelle à la dose. Les abandons en cours de
traitement étaient de 2 à la plus faible dose, 5 à la dose
intermédiaire et 8 à la dose de 150 mg/j.
Il semble donc possible, au vu de ces résultats,
d’améliorer de manière très sensible la tolérance d’une
supplémentation en fer en utilisant de faibles posologies tout
en conservant un bénéfice comparable à celui obtenu aux
doses habituelles. Chez ces patients très âgés, une
normalisation des concentrations d’hémoglobine n’a
cependant pas pu être obtenue après 2 mois de traitement
quelle que soit la dose administrée. Des essais
complémentaires éventuellement de plus longue durée seront
nécessaires afin de préciser les posologies optimales
permettant de corriger les carences martiales avec un
minimum d’effets indésirables. Il resterait aussi à vérifier
que ces faibles posologies sont également efficaces quelle
que soit l’étiologie des déficits en fer.
Af 380-2005 ©2005 Successful Aging SA
Chez l’octogénaire, de faibles doses de fer permettent de
corriger efficacement une anémie tout en améliorant sa
tolérance
T. Cudennec
Hôpital Ambroise Paré, Boulogne Billancourt
Rimon E, Kagansky N, Kagansky M, Mechnick L, Mashiah T, Namir M, Levy S. Are we giving too much iron? Low-dose
iron therapy is effective in octogenarians. Am J Med. 2005;118:1142-1147
Jour 0 Jour 60
Hémoglobine (g/dL)
-15 mg/j
-50 mg/j
-150 mg/j
10,0 ± 1,1
10,9 ± 1,0
10,2 ± 1,3
11,3 ± 0,9
12,3 ± 0,7
11,6 ± 0,8
Ferritine (ng/mL)
-15 mg/j
-50 mg/j
-150 mg/j
19,8 ± 6,6
25,1 ± 8,8
22,2 ± 9,1
60,2 ± 18,5
61,4 ± 18,2
66,3 ± 19,5
Effets indésirables
Doses quotidiennes de fer
15 mg 50 mg 150 mg
Nombre de sujets (%)
Douleurs abdominales 6 (20) 18 (60) 21 (70)
Nausées/vomissements 4 (13) 11 (36) 20 (67)
Diarrhées 4 (13) 16 (53) 21 (70)
Constipation 0 3 (10) 7 (23)
Modification des niveaux d’hémoglobine et de ferritine après 2 mois de traitement en fonction de la posologie.
Incidence des effets secondaires en fonction de la posologie quotidienne.
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