CLASSIFICATION DES SCHÉMAS EN GROUPES D`ORDRE p (D

CLASSIFICATION DES SCHÉMAS EN GROUPES D’ORDRE p
(D’APRÈS OORT ET TATE)
YICHAO TIAN
1. Sch´
emas en Groupes d’Ordre Fini
Dans cette section, Sdésigne un schéma quelconque. On dit qu’un S-schéma Test d’ordre fini
(resp. d’ordre m pour mZ1) si son algèbre OTest localement libre de type fini (resp.de rang m)
en tant que OS-module.
1.1. Soit G=Spec(A) un schéma en groupes d’ordre fini sur S. On note
sA:AAOSA(resp. tA:AOSAA),
les homomorphismes de OS-algèbres correspondant à la loi de composition G×SGG, (resp.au
morphisme diagonal GG×SG). Posons A=HomOS(A,OS). C’est un OS-module localement
libre du même rang que celui de A, et on a un isomorphisme canonique
(AOSA)'AOSA.
On note
tA=(sA):AOSAA
et
sA=(tA):AAOSA
les morphismes induits par sAet tA. Ceci fait de Aune OS-algèbre de Hopf associative, coasso-
ciative et cocommutative. Pour tout S-schéma T, on a une injection canonique d’ensembles
(1.1.1) G(T)=HomOSalg(A,OT)Γ(S,AOSOT),
dont l’image est le groupe multiplicatif formé par les éléments gΓ(S,AOSOT) tels que
sA
T(g)=gg, où sA
Test la comultiplication sur AOSOTinduite par sA.
On note que Gest commutatif si et seulement si Aest une OS-algèbre commutative. Si c’est le
cas, on pose G=Spec(A). Alors Gest muni de la structure de schéma en groupes induite par
la comultiplication sAsur A, et on l’appelle dual de Cartier de G. D’après (1.1.1), le foncteur
qui associe à tout S-schéma Tle groupe HomTgr(G×ST,Gm,T) est représentable par G. On en
déduit donc un accouplement canonique
(1.1.2) G×SGGm,s
qui est non-dégénéré et bimultiplicatif.
1.2. Soit G=Spec(A) un schéma en groupes ane et plat sur S. Pour tout mZ, on note
mG:GGl’homomorphisme de l’élévation à la m-ème puissance, i. e. pour tout S-schéma
1
2 YICHAO TIAN
Tet tout ξG(T), on a mG(ξ)=ξm. On note [m] : AAl’homomorphisme de OS-algèbres
correspondant. Les relations (ξm)n=ξmn et ξm·ξn=ξm+ncorrespondent aux identités
[m][n]=[mn] et tA([m][n]) sA=[m+n].
On a [1] =IdAet [0] : A
→ OS
i
A, où correspond à la section unité de Get iest le morphisme
structural de A. On appelle IG=Ker([0]) =Ker()idéal d’augmentation de G.
Théorème 1.3 (Deligne).Soit G un S -schéma en groupes commutatif d’ordre m. Alors G est
annulé par mG.
Remarque 1.4.D’après [SGA 3 VIIA8.5], si Sest réduit, tout S-schéma en groupes d’ordre m
est annulé par mG.
Pour montrer le théorème 1.3, on a besoin d’introduire le morphisme trace d’après Deligne.
Soient T=Spec(B) un S-schéma d’ordre n,f:TSle morphisme structural. Il existe un
unique morphisme Trf, appelé morphisme trace, qui rend commutatif le diagramme suivant
G(T)
Trf
/Γ(S,AB)
Nm
G(S)/Γ(S,A),
où les flèches horizontales sont définies dans (1.1.1) et Nm désigne l’application norme de A-
algèbre AB. On vérifie facilement que le morphisme Trfsatisfait aux propriétés suivantes :
(a) Trfest un homomorphisme de groupes ;
(b) pour tout uG(S), on a Trf(fu)=un, où f=G(f) : G(S)G(T) ;
(c) pour tout tAutS(T) et βG(T), on a Trf(Tt
Tβ
G)=Trf(Tβ
G).
Démonstration de 1.3. On doit montrer que pour tout S-schéma Tet tout xG(T), on a xm=1.
Comme on a
G(T)=HomSsch(T,G)=HomTsch(T,G×ST),
quitte à faire un changement de base, on peut supposer T=S. Pour tout xG(S), on note
tx:G'G×SS(x,IdG)
G×Gµ
G
le morphisme de translation par x, où µest la loi de composition de G. Notons f:GSle
morphisme structural de G, et 1G:GGl’identité de G. Comme 1Gtx=1G×f(x), où
”signifie le composition et “×” la multiplication dans G(G), on en déduit que
Trf(1Gtx)=Trf(1G×f(x)=Trf(1G)Trf(f(x)).
En utilisant les propriétés (a), (b) et (c) de Trf, on obtient Trf(1G)=Trf(1G)xm, d’où xm=1.
Théorème 1.5. Soit p un nombre premier. Alors tout S -schéma en groupes d’ordre p est néces-
sairement commutatif et annulé par p.
Rappelons d’abord le lemme suivant bien connu.
CLASSIFICATION DES SCHÉMAS EN GROUPES D’ORDRE p(D’APRÈS OORT ET TATE) 3
Lemme 1.6 ([TO] Lemma 1).Soient k un corps algébriquement clos, G =Spec(A)un k-groupe
d’ordre p. Alors ou bien G est isomorphe au groupe constant (Z/pZ)k, ou bien k est de caracté-
ristique p >0, et G 'µp,kou G 'αp,k. En particulier, G est commutatif et la k-algèbre A est
monogène.
Démonstration de 1.5. Soit G=Spec(A) un S-schéma en groupes d’ordre p. D’après le théorème
1.3, il sut de prouver la commutativité de G, ou de manière équivalente la commutativité de A.
Le problème étant local pour S, on peut supposer S=Spec(R) avec Run anneau local. Si RR0
est une injection d’anneaux, alors As’injecte dans ARR0, et la commutativité de ARR0
entrainera la commutativité de A. Quitte à élargir R, on peut donc supposer le corps résiduel kde
Ralgébriquement clos. D’après le lemme 1.6, on a Gk'αp,k,µp,kou (Z/pZ)k. En particulier,
l’algèbre Akest monogène. On choisit xAtel que k[x]=Ak, où xAkest l’image
de x. D’après le lemme de Nakayama, on a A=R[x], ce qui montre que Aest commutative.
2. Th´
eor`
eme de Classification d’Oort-Tate
Soient pun nombre premier, χ:FpZple relèvement de Teichmüller, i. e. χ(0) =0 et pour
tout mF×
p,χ(m) est l’unique (p1)-ème racine de l’unité dans Zptelle que χ(m)mmod p.
On pose
Λp=Z[χ(F×
p),1
p(p1)]Zp,
où l’intersection est prise dans Qp. Voici quelques exemples de Λp:
p=2,Λ2=Z;
p=3,Λ3=Z[1/2];
p=5,Λ5=Z[i,1
2(2 +i)],
i=χ(2) est l’unique élément de Z5tel que i2=1 et i2 mod 5. Dans la suite, on fixe un
nombre premier p, et on note Λ=Λp. Sauf mention expresse du contraire, tout schéma considéré
sera supposé sur Spec(Λ).
2.1. Soient Sun Λ-schéma, G=Spec(A) un schéma en groupes d’ordre psur S,IAl’idéal
d’augmentation de G. Alors l’algèbre OS[F×
p] agit naturellement sur Aet préserve I. Pour tout
iZ, on pose
ei=1
p1
p1
X
i=1
χi(m)[m]∈ OS[F×
p]
et Ii=eiI. On note que eiet Iine dépendent que de la classe imod (p1).
Lemme 2.2. Sous les hypothèses précédentes, on a une décomposition de OS-modules
(2.2.1) I=
p1
M
i=1
Ii.
Pour chaque i Z, Iiest un faisceau inversible sur S , et pour tout ouvert U de S , on a
(2.2.2) Γ(U,Ii)={fΓ(U,I); [m]( f)=χi(m)fpour tout mFp.}
4 YICHAO TIAN
En plus, on a IiIjIi+jpour tout i,jZ, et Ii=Ii
1pour 1ip1.
Démonstration. On a des égalités dans OS[F×
p] :
1=e1+· · · +ep1;
eiej=
0 si i,j,
eisi i=j;
[m]ei=χi(m)ei.
On en déduit immédiatement l’existence de la décomposition (2.2.1) et la caractéristaion (2.2.2)
de Ii. Le fait que IiIjIi+jrésulte de (2.2.2). Il reste à montrer que les Iisont inversibles et que
Ii=Ii
1pour 1 ip1. Étant facteur direct de I, les Iisont localement libres de rang fini sur
S. Désignant par rile rang de Ii, on a donc r1+· · · +rp1=p1. Comme la décomposition
(2.2.1) commute à tout changement de base, on se ramène à traiter le cas où Sest le spectre d’un
corps algébriquement clos ksur Λ. Il sut de trouver une section f1de I1telle que fi
1,0 pour
1ip1. D’après le lemme 1.6, il y a trois cas à distinguer :
(a) G=(Z/pZ)k. Dans cette situation, l’algèbre Ade Gconsiste en les fonctions sur Fpà valeur
dans k. L’action de Fpsur Aest donnée par ([m]·f)(n)=f(mn) pour tout fAet m,nFp. On
peut prendre alors f1=χ.
(b) G=αp,k. Alors on a A=k[t]/tpavec sA(t)=t1+1tet [m](t)=mt. Comme kest de
caractéristique p, on a χ(m)=mdans k, et donc on peut prendre f1=t.
(c) G=µp,k. On a A=k[t]/((1 +t)p1) avec sA(t)=1t+t1+tt, et donc [m](t)mt
mod t2. Posons f1=e1(t). Alors on a fi
1timod ti+1pour tout 1 ip1 ; en particulier,
fi
1,0 pour 1 ip1.
De la description (2.2.2) de Ii, on déduit aisément le corollaire suivant.
Corollaire 2.3. Soient ϕ:GH un homomorphisme de S -schémas en groupes d’ordre p, IGet
IHles idéaux d’augmentation de G et de H. Alors l’homomorphisme ϕ:IHIGde OS-modules
induit par ϕenvoie IH,idans IG,ipour tout 1ip1.
Exemple 2.4.Soit µp=Spec(B) le schéma en groupes multiplicatif d’ordre psur Λ. On va
expliciter la décompostion (2.2.1) pour µp. On a alors B= Λ[z]/(zp1) avec sB(z)=zzet
[m](z)=zmpour tout mFp. L’idéal d’augmentation IBde µpest B(z1), et il a (zm1) avec
mF×
ppour sa base sur Λ:
IB= Λ(z1) +· · · + Λ(zp11).
Pour tout iZ, posons
yi=(p1)ei(1 z)=X
mFp
χi(m)(1 zm)(2.4.1)
=
pPmFpzmsi i0 mod (p1);
PmFpχi(m)zmsinon.
CLASSIFICATION DES SCHÉMAS EN GROUPES D’ORDRE p(D’APRÈS OORT ET TATE) 5
Comme
1zm=1
p1
p1
X
i=1
χi(m)yi
pour tout mF×
p, On en déduit pour tout iZ
sB(yi)1yiyi1
=X
mF×
p
χi(m)((1 1zmzm)1(1 zm)(1 zm)1)
=X
mF×
p
χi(m)[(1 zm)(1 zm)]
=1
(p1)2X
mF×
p
χi(m)
p1
X
j=1
p1
X
k=1
χj(m)χk(m)yjyk
=1
p1X
j+kimod (p1)
yjyk,
et donc
(2.4.2) sB(yi)=yi1+1yi+1
1p
p1
X
j=1
yjyij.
On a alors Ii= Λyipour tout 1 ip1, et IB= Λy1+· · · + Λyp1. Posons y=y1. Comme
Ii
1Iipour tout iZ, il existe des éléments w1=1,w2,· · · ,wi,· · · Λtels que yi=wiyi.
Proposition 2.5. (i) Les nombres wipour 1ip1sont inversibles dans Λet on a wii!
mod p.
(ii) On a wp=pwp1.
(iii) Posons y =y1. Alors on a B = Λ[y]/(ypwpy)avec
sB(y)=1y+y1+1
1p
p1
X
i=1
yi
wi
ypi
wpi,
[m](y)=χ(m)y pour tout m Fp
et
z=1+1
1p(y+y2
w2
+· · · +yp1
wp1).
On renvoie le lecture à [TO, p.9] pour une preuve complète de cette proposition. Indiquons ici
comment démontrer (ii), ce qui fait le lien avec les sommes de Gauss. On fixe un plongement
σ:ΛCdans le corps des nombres complexes. On l’étend en un homomorphisme ϕ:BC
en posant ϕ(z)=ζ, une p-ème racine primitive de l’unité. Notons ηi=ϕ(yi) pour tout iZ.
D’après (2.4.1), on a
ηi=
psi i0 mod p1
PmFpχi(m)ζmsi i.0 mod p1.
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