3
Commentaires :
Il importe de rappeler immédiatement que chacune de ces trois « identités » s’est construite –et continue de se construire- en
rupture/continuité/reprise/antagonisme avec les deux autres. Aucune de ces identités n’existe « en vase clos ».
Le christianisme s’est constitué en rupture/continuité avec le judaïsme du premier siècle
10
; l’islam s’est constitué en rupture/continuité avec le
judaïsme et le christianisme du 7
ème
siècle
11
. Aujourd’hui, comme hier et demain, les conflits, les dialogues et les perceptions mutuelles continueront de
déstabiliser et de fortifier les identités des uns et des autres
12
.
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Cette perspective est celle proposée par André Chouraqui dans son ouvrage Histoire du judaïsme, PUF, 1979. « L’histoire du judaïsme sera celle d’une trinité : le message, ici, est
inséparable du peuple, qui le reçoit et celui-ci ne se conçoit que par rapport à sa terre » (p.5). Précisons immédiatement que le Peuple, le Message et la Terre ont été compris de mille
manières par les juifs eux-mêmes, et que c’est précisément cette diversité qui donne la complexité à leur identité. Pour une présentation synthétique et pédagogique de la vocation
juive, cf. de Samson Raphaël Hirsch, Dix-neuf épîtres sur le judaïsme, Cerf, 1987.
6
A lire -et à relire !- le beau texte d’Emmanuel Lévinas paru dans l’Encyclopaedia Universalis, DVD, Version 11, 2006, comme « Prise de vue » sur le judaïsme. Ce texte figure
dans les Annexes.
7
Cf. la « Prise de vue » sur le christianisme paru dans l’Encyclopaedia Universalis, DVD, Version 11, 2006 de Pierre Liégé. Ce texte figure aussi dans les Annexes. La littérature sur
le christianisme est bien sûr monumentale. Pour une somme synthétique (plus de 1200 pages !), cf. l’ouvrage de Hans Küng, Le christianisme. Ce qu’il est et ce qu’il est devenu dans
l’histoire, Seuil, 1999, où il présente le christianisme non seulement dans son extension historique et sa diversité confessionnelle, mais aussi dans sa spécificité et ses ouvertures
possibles à d’autres traditions religieuses. Voici comment Hans Küng définit le cœur de l’identité chrétienne : « Ainsi se trouve défini sans ambiguïté le spécifiquement chrétien –la
différence non seulement avec le judaïsme, mais avec toutes les autres religions et tous les humanismes : le spécifiquement chrétien, c’est le Christ crucifié et néanmoins vivant !
Et la foi en ce Christ n’est pas une formule vide, pas davantage une simple doctrine. En effet : - La foi dans le Christ se rapporte à une personne historique très concrète : Jésus de
Nazareth. C’est lui qui se tient non seulement aux origines du christianisme, mais derrière toute la grande tradition chrétienne bimillénaire : est chrétien qui peut se réclamer du
Christ. – La foi dans le Christ ne s’exprime pas seulement dans un message, mais également dans des rites porteurs de sens : dans le baptême en son nom et dans la célébration de la
Cène en souvenir de lui. – La foi dans le Christ ouvre en même temps un chemin de vie, une orientation fondamentale, pour le présent et pour l’avenir : Jésus-Christ n’apporte certes,
pas une nouvelle Loi, mais il apporte l’amour dont il fait le critère fondamental déterminant pour la vie et pour l’agir, pour la souffrance et la mort des chrétiens » (p.79).
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Cf. la « Prise de vue » sur l’islam paru dans l’Encyclopaedia Universalis, DVD, Version 11, 2006 d’Olivier Carré. Ce texte figure aussi dans les Annexes.
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Mohammed Arkoun rappelle aussi qu’islam étymologiquement ne signifie pas seulement « livrer quelque chose à quelqu’un » mais aussi « défier la mort ». « (…) défier la mort en
livrant son âme, c’est-à-dire sa vie, pour une noble cause. Ici, livrer son âme, se livrer en sacrifice, par exemple dans un combat pour Dieu, c’est manifester à l’extrême cet élan, ce
mouvement qui porte le croyant à accepter sans condition l’appel de Dieu et ses enseignements. Aller vers Dieu, c’est aller vers l’Absolu, vers la Transcendance ; c’est se sentir
promu à un niveau supérieur d’existence » (Ouvertures sur l’islam, Paris, J.Grancher, 1992, p.35). Les ouvrages de présentation sur l’islam et sur l’identité musulmane sont très
nombreux. Outre celui de Mohammed Arkoun, intellectuel musulman largement ouvert aux valeurs de la modernité, cf. d’un occidental converti à l’islam et plus spécialement au
soufisme, Roger du Pasquier, Découverte de l’Islam, Seuil, 1984 ; d’un musulman à la fois traditionnel et moderne (gérant l’héritage des Frères musulmans et l’ouverture à
l’Occident), Tariq Ramadan, Les Musulmans d’Occident et l’avenir de l’islam, Sindbad/Actes Sud, 2003 ; d’un islamologue chrétien, dont l’œuvre est reconnue aussi bien par les
musulmans que par les chrétiens, Louis Gardet, L’ISLAM, Religion et communauté, Desclée de Brouwer, 1967.
10
Pour une première analyse de la problématique judéo-chrétienne du premier siècle, cf. de Daniel Marguerat, éditeur, Le déchirement. Juifs et chrétiens au premier siècle, Labor et
Fides, 1996.
11
Pour une première et rapide présentation de cette problématique, cf. de W. Montgomery Watt, Mahomet, Payot, 1980, les pp.37-50 « L’influence du judaïsme et du
christianisme ».
12
Pour une présentation contemporaine et dialoguale entre juifs et chrétiens, cf. de Shmuel Trigano, Pierre Gisel et David Banon, Judaïsme et christianisme, entre affrontement et
reconnaissance, Bayard, 2005 ; de Catherine Chalier et Marc Faessler, judaïsme et christianisme, l’écoute en partage, Cerf, 2001 ; pour une présentation des regards respectifs entre
musulmans et chrétiens, cf. de Jacques Waardenburg, éditeur, Islam and Christianity, Mutual Perceptions since the mid-20th Century, Leuven, Peeters, 1998.