Corrigé question de théorie : août 16 1. Godbout/Tönnies/Weber : Quelles caractéristiques des différentes logiques d’échange (Godbout) se rapprochent-elles de la Gesellschaft (Tönnies)/Domination rationnelle légale (Weber) ? Justifiez votre réponse en utilisant les définitions des différentes logiques d’échanges et de la Gesellschaft/Domination rationnelle légale. (6 POINTS) La logique du don peut être située par rapport à la Gesellschaft en repartant des deux paradoxes qui la définissent : son caractère intéressé (vs désintéressé) renvoie à cette caractéristique centrale de la Gesellschaft, la place qu’y a l’intérêt, motif fondamental du lien à autrui ; son caractère libre (vs contraint), cette liberté individuelle étant elle aussi le propre des membres de la Gesellschaft. La logique marchande renvoie clairement à la Gesellschaft, à nouveau vu l’importance qu’y a l’intérêt comme mobile de l’action. On peut aussi remarquer que la possibilité d’exit comme moyen de régulation des rapports sociaux (logique marchande) renvoie à cette formule utilisée par Tönnies pour caractériser la Gesellschaft : « séparés malgré toute liaison », qui dit la fragilité du lien, sa superficialité dans ce type de société, qui rendent possible l’exit. Enfin, le principe d’équivalence qui régule les échanges dans la logique marchande renvoie à l’importance du calcul comme forme de rationalité dans la Gesellschaft. La logique étatique présente quant à elle plusieurs traits de la domination rationnelle-légale : l’égalité de tous devant la loi se retrouve dans les deux concepts, la professionnalisation de la logique étatique correspond à la spécialisation des fonctions observée par Weber au sein de la bureaucratie qui accompagne la domination rationnelle-légale, l’impersonnalité des décisions dans la logique étatique renvoyant au même trait des rapports de domination tels qu’analysé par Weber. Erreurs fréquentes : confondre les 4 sphères (inutiles ici) et les 3 logiques ; parler de « don étatique » ou de « don marchand » ce qui n’a pas de sens ; traiter ensemble, comme s’ils ne faisaient qu’un seul et même concept Gesellschaft et domination rationnelle-légale 2. Goffman : 2.1. Pourquoi est-ce que l’individu goffmanien est considéré par certains auteurs comme immoral ? (2 POINTS) C’est parce que Goffman considère que ce qui compte pour les individus, c’est de donner l’apparence du respect des règles (et non un respect effectif) de celles-ci que certains commentateurs considèrent que la vision de l’individu qui en découle est immorale. Leur vision de la morale suppose une sincérité, une authenticité que n’a pas l’individu goffmanien. Erreurs fréquentes : associer l’immoralité à la multiplicité des identités qui, en tant que telle, n’implique pas nécessairement l’impossibilité d’être moral. En effet, dans chaque interaction, l’individu pourrait respecter les règles « de tout son cœur » quand bien même il serait défini d’une façon différente dans l’interaction suivante. Le seul lien qui peut être fait concerne l’absence de pôle réflexif associé à la multiplicité des identités, absence ne permettant pas de définir un agir éthique au-delà du temps de chaque interaction ; confondre la question de la critique d’immoralité adressée à l’individu tel que le conçoit Goffman (qui est une critique de son modèle théorique, faisant l’objet de la question) et le « doute sur la moralité » qui peut saisir des interactants quand un individu ne respecte pas les conditions de félicité (qui n’est pas une critique de la théorie de Goffman mais une façon dont, au sein de ce modèle, les individus sont censés évaluer la valeur de la face d’un interactant, suite au non-respect d’une règle, ce qui n’a rien à voir). 2.2 Cette critique vaut-elle pour toutes les dimensions de l'identité prises en compte par Goffman ? (2 POINTS) Non, elle ne vaut que pour l’importance qu’il donne au jeu de l’acteur, donnant à celui-ci la liberté de feindre le respect (entre autre). Par contre, son insistance sur la sacralité des faces – règle centrale – confère un certain poids, un certain sérieux au rapport que les individus vont entretenir avec les règles, allant dans le sens d’une forme d’authenticité. Notons que la 3ème dimension de l’identité, les fondements cérémoniels du moi n’interviennent pas ici, ni dans un sens, ni dans un autre. Erreurs fréquentes : Dans le prolongement de l’erreur mentionnée ci-dessus (partir sur la question de la multiplicité du moi), répondre à cette critique-là (en repérant des pôles de stabilité de l’identité), ce qui ne répond pas à la question ; Ne répondre que par une dimension, celle du jeu, sans expliquer comment les autres se situent par rapport à la question de la moralité.