Le jazz et l'orient
Résumé du cours, éléments essentiels
Au programme cinq oeuvres de cinq musiciens représentant le métissage entre la musique arabe et le jazz :
« We'll always care about you » de l’album «Diagnostic» d’Ibrahim Maalouf
« Mourir pour ton décolleté » issu de l’album «Songs for sad women» de Rabih Abouh Khalil
« Caress » de l’album éponyme de Marcel Khalifé
« Friggya » de l'album «Sira» de Jasser Haj Youssef
« Aurora » de l’album éponyme de Avishai Cohen
La musique orientale
L'Orient s'étend du proche Orient à l'extrême Orient mais les pièces au
programme évoquent principalement le Maghreb et le Proche Orient.
Caractéristiques :
1) Les instruments spécifiques
° le oud : Instrument à cordes pincées, sans frettes le plus répandu dans les pays arabes mais aussi
en Turquie, en Grèce, en Albanie et en Azerbaïdjan. Son nom vient de l'arabe "al-oud" signifiant
bois. Le plus souvent, il est pourvu de 5 cordes doubles (les choeurs) et d'un bourdon (corde grave
simple) qui sont frappés à l'aide d'un plectre en corne ou en plume. Son manche est aujourd'hui
dépourvu de frettes ce qui encourage l'utilisation de micro-intervalles. Sa caisse est constituée de
côtes de bois alternées et sa table pourvue de 3 rosaces: le soleil et les deux lunes. Le oud deviendra
le luth dans la musique médiévale occidentale.
° le violon :
Le rebab oriental, instrument à archet à 2 ou 3 cordes, va se rependre en occident au MoyenÂge, via l’Espagne. Il
va donner naissance au rebec, très utilisé au Moyen-Âge et à la Renaissance en Europe. Aux XVIe et XVIIe siècles,
le rebec va se perfectionner et va donner naissance, en Italie,
au violon. Le violon va alors se répandre dans toute l’Europe,
mais aussi dans le monde arabe, pour reléguer le rebab au
second plan. Le violon fait partie de l’orchestre traditionnel
arabe (takht). Il est traditionnellement joué sur le genou
gauche, mais, de nos jours, est souvent joué sur l’épaule, à
l’occidental. -> Les instruments sans frettes (violon et oud)
permettent de faire des 1/4 de tons, très utilisés dans la
musique orientale.
° le qânun : Le qanûn est un instrument à cordes pincées de la famille des cithares
sur table, très répandu dans les pays du Moyen-Orient ainsi qu'en Grèce, en Iran, en
Azerbaïdjan, et en Arménie. Le qanûn possède entre 63 et 84 cordes, regroupées par
2 ou 3. Des leviers, à gauche de l’instrumentiste, permettent de modifier la longueur
des cordes (pour atteindre les ¼ de ton ou des intervalles encore plus petits).
-> Dans la musique orientale, le oud et le qânun ne sont joués que mélodiquement, on ne fait jamais d'accords.
° la flûte nay : La flûte nay (ou ney) est une flûte oblique en roseau, dont les 1ère traces datent de
2800 av. J.C. De facture assez simple (un roseau évidé), ouverte aux deux extrémités, possédant
peu de trous (7 pour le nay arabe), la flûte nay demande donc à l’instrumentiste énormément de
technique pour la production du son et la justesse des notes (position des lèvres et de la langue,
inclinaison de la flûte, trous partiellement bouchés, etc.). De plus, comme les musiques arabes
n’utilisent pas le système tempéré, les flûtistes sont fréquemment amenés à changer de flûte au
cours des concerts, en fonction des tonalités des morceaux joués. La flûte nay existe en plusieurs
tailles (de 40cm à 90cm).
Le jazz et l'orient – Résumé du cours, éléments essentiels – session 2014/2015 – Odile SICK
Oud
Rebab Rebec Violon
Qânun
Nay
Fiche cours pour élève
° le riq est un petit tambourin, muni de 2 rangs de cymbalettes.
° la darbouka est la principale percussion du Maghreb et du Proche-Orient. C’est
un tambour, à la peau très tendue (peau animale ou plastique), traditionnellement en
terre cuite ou en céramique (de nos jours, souvent en métal).
Complémentaires l’un de l’autre, ils assurent, dans l’orchestre, l’assise rythmique,
par l’ utilisation de rythmes caractéristiques (et de variations). Les deux instruments permettent une
grande précision et une très grande virtuosité dans le jeu.
Le violon, l'oud, le qânun, la flûte nay, le riq et la darbouka font partie de l'orchestre traditionnel arabe : le
takht.
° le ghaita (ou mizmar) à rapprocher du duduk arménien (utilisé dans mourir pour
ton décolleté, pièce au programme) Instrument populaire d’origine Turque (appelé
Zurna en Turquie). Instrument à anche double, sans clés, de la famille des hautbois,
utilisé lors des fêtes, particulièrement les mariages.
° le bendir : Tambour sur cadre de facture assez simple, il assure la continuité des
rythmiques (ce n’est pas un instrument soliste comme la darbouka).
2) Les modes
La musique orientale est basée sur l'utilisation de modes, les « maqamat » ( = maqâm au pluriel). Un maqâm est
composé de plusieurs sous-ensemble de 3, 4 ou 5 notes (tricorde, tétracorde ou pentacorde) appelé "ajnas". Ces
ajnas ont la particularité de faire entendre parfois des 1/4 de tons. Exemple d'ajnas :
Pour construire un maqâm, on ajoute plusieurs ajnas. Il existe des centaines de maqamat mais seuls 20 à 30 sont le
plus utilisés. Ils résultent de la superposition de plusieurs ajnas. Chaque maqâm possède une couleur particulière.
Exemple de construction d’un maqam : Bayati + Rast = “Bayati Shuri”
3) L'improvisation
C'est très important dans la musique arabe (comme dans le jazz d'ailleurs). Le ou les musiciens choisissent un
maqâm , qui est autant une ambiance qu'un mode, et improvisent dessus, souvent de façon libre, sans pulsation.
C'est ce que l'on appelle les « taqasim » (= pluriel de taqsim). Dans ces passages, les mélodies sont très ornementées
(trilles, appogiatures, retard). -> se rapproche des arabesques dans l'art figuratif. Les voix orientales excellent dans
cet art ! -> dans trois des pièces au programme, on entend de beaux taqasim (au violon dans « Fryggia », au duduk
dans « Mourir pour ton décolleté » et au vibraphone dans « Caress»).
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Bendir
Ghaita
Darbouka
Riq
Bayati
Ajam Rast
Bayati Rast Bayati Shuri
4) Les rythmes
Le rythme est l’élément indispensable à toute ligne mélodique en musique arabe. Le principe fondamental
de la rythmique arabe est la périodicité. Les cycles qui se répètent ont la même durée et/ou accents. Les
battements forts et faibles seront joués avec la même succession, ce qui n’empêche pas les musiciens de
faire des variations rythmiques. L'accent fort ou grave est appelé doum , il est frappé au centre de la
membrane de l'instrument, en général avec la paume de la main. L'accent faible, tak, est frappé sur le bord
du tambour, avec les doigts. Le son est plus sec, plus aigu. Chaque formule rythmique porte un nom.
Comme pour les « maqamat » , les rythmes sont codifiés et répertoriés. Exemple :
5) Les formes les plus courantes
En musique arabe, on trouve généralement trois types de plan ou forme:
forme libre (successions de mélodies enchaînées librement par les musiciens)
forme rondo (alternance de couplets et de refrains)
forme strophique (successions de petites phrases bien distinctes qui forme une strophe qui se
répète à l’identique). On trouve beaucoup cette forme lorsqu’il y a un texte.
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L'orientalisme
Les compositeurs de musique savante occidentale (musique “classique” au sens large), ont depuis
longtemps é fascinés et attirés par “l’Orient”. De nombreuses oeuvres en témoignent (en peinture, en
littérature, en musique). Mais l’Orient en question est un Orient imaginaire (peu de connaissances
directes) qui se limite à une série de clichés censés l’évoquer. C’est ce que l’on a appelé l’orientalisme.
Quelques exemples :
Sonate pour piano n°11 (1780), “Alla Turca”, Rondo, W. A. Mozart.
Le Désert (1844), “Marche de la caravanne”, Félicien David.
Shéhérazade (1888), N. Rimski-Korsakov.
Concerto pour piano n°5 (1896), “l’Egyptien”, 2e mvt., C. Saint-Saens.
Pour évoquer l’Orient, les compositeurs ont souvent recours à la flûte, à la clarinette et au hautbois, à des
mélodies amples, très ornées (trilles, broderies) et souvent à l’intervalle de 2de augmentée (do - réb - mi -
fa). Mais globalement, la musique orientale est totalement “digérée” par la musique occidentale, il n’en
reste plus grand chose, juste une évocation lointaine. La musique reste écrite (pas d’improvisation), tonale,
polyphonique, non cyclique et les instruments sont occidentaux.
Dans le jazz, le même procédé va voir le jour. Avant les années 1970, l’Orient est intégré au jazz, comme
une couleur exotique, mais les fondamentaux du jazz (instruments, rythmes, harmonie) restent inchangés.
Le jazz et l'orient – Résumé du cours, éléments essentiels – session 2014/2015 – Odile SICK
Exemples :
Soudan, 1920, Original Dixieland Jazz Band.
Palesteena, 1920, Original Dixieland Jazz Band.
Caravan, 1937, Duke Ellington
Dans les années 60, deux musiciens noirs américains tentent de concilier jazz et musique orientale, c’est le
contrebassiste Ahmed Abdul MALIK et le saxophoniste Yussef Abdul LATIF. Ils improvisent un peu à la
manière orientale (modes) et introduisent des instruments d’origine arabe.
La fusion s’opère véritablement dans les années 70 avec des musiciens originaires de proche orient,
notamment Ziad RAHBANI, filsde la chanteuse libanaise Fairouz. Ecoute : « Abu Ali » (1978)
A partir des années 1990 le jazz oriental devient un style à part entière. Les différentes pièces au
programme du bac en sont la parfaite illustration ! Chacun des styles, jazz et musique orientale apportent
ses caractéristiques propres à ce nouveau courant.
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