1´
Enonc´
e du probl`
eme
Soit Eun corps de nombres. Pour tout sch´
ema s´
epar´
e de type fini Xsur E, A. Huber a
construit dans [13] une cat´
egorie Db
m(X, Q`)de complexes `-adiques mixtes horizontaux sur
X.1Intuitivement, on regarde la cat´
egorie des complexes `-adiques sur Xqui proviennent d’un
complexe `-adique constructible sur un mod`
ele de Xsur un ouvert Ude Spec(OE), o`
u dans
la d´
efinition de “constructible” on n’autorise que des strates lisses sur U. On peut d´
efinir une
notion de poids pour de tels complexes : on regarde leurs restrictions aux fibres au-dessus des
points ferm´
es de U, d’o`
u une notion d’objets purs. Les complexes mixtes sont comme d’habitude
ceux dont tous les faisceaux de cohomologie sont extensions successives de faisceaux purs. Noter
que l’on demande aussi que les morphismes dans Db
m(X, Q`)s’´
etendent `
a des mod`
eles au-dessus
d’un ouvert de Spec(OE). (Cela fait une diff´
erence, voir la fin de la section 1 de [13].)
D’apr`
es les sections 2 et 3 de [13], on dispose des 6 op´
erations sur les cat´
egories Db
m(X, Q`).
(On montrerait facilement que l’on dispose aussi des foncteurs cycles proches et cycles
´
evanescents.)
La cat´
egorie Db
m(X, Q`)est par ailleurs munie d’une t-structure perverse par [13] 2.5 et et
3.2, et on note Pervm(X)son coeur, c’est-`
a-dire la cat´
egorie des Q`-faisceaux pervers mixtes
horizontaux sur X.
Remarque 1.1 Lorsque l’on a besoin d’encadrer les poids (ou les degr´
es de cohomologie, ordi-
naire ou perverse) pour des objets de Db
m(X, Q`), on peut appliquer les r´
esultats de [5] pour les
cat´
egories de faisceaux `-adiques mixtes sur un sch´
ema sur un corps fini, et ce grˆ
ace qu th´
eor`
eme
de changement de base g´
en´
erique de Deligne (SGA 4 1/2 [Th. finitude] section 2). Cette m´
ethode
est en particulier utilis´
ee pour prouver 3.4 et 3.5 dans [13]. Dans la suite, on l’utilisera sans com-
mentaire particulier.
Enfin, on dispose de la notion de filtration par le poids sur un objet de Pervm(X)([13] 3.7).
Une telle filtration est n´
ecessairement unique si elle existe ([13] 3.8), mais elle n’existe pas
toujours. La sous-cat´
egorie pleine des objets de Pervm(X, Q`)admettant une filtration par le
poids est tout de mˆ
eme ab´
elienne, mais elle n’est ´
evidemment pas stable par extensions.
Or, c’est bien embˆ
etant car on voudrait appliquer les m´
ethodes de la section 3 de [16] pour
calculer des complexes d’intersections de vari´
et´
es sur E, et cela n’est pas possible si l’on n’a pas
de filtration par le poids sur les faisceaux pervers mixtes.
Le but de cette note est de proposer une solution, inspir´
ee par le fait, dˆ
u`
a Beilinson, que, dans
toutes les situations raisonnables (et tant que les coefficients sont un corps ou un anneau fini),
la cat´
egorie des “complexes de faisceaux” `
a laquelle on s’int´
eresse s’identifie naturellement `
a la
cat´
egorie d´
eriv´
ee born´
ee de son coeur pour la t-structure perverse autoduale. 2
1. On pourrait aussi utiliser comme coefficients Q`ou une extension finie de Q`. Cela ne changerait rien.
2. Il est probable que les m´
ethodes de Beilinson permettent de prouver le r´
esultat analogue pour Db
m(X, Q`).
Cependant, je n’ai pas v´
erifi´
e les d´
etails.
1
L’id´
ee est donc de remplacer Db
m(X, Q`)par la cat´
egorie d´
eriv´
ee (born´
ee) de la cat´
egorie
ab´
elienne des faisceaux pervers mixtes admettant une filtration par le poids. (C’est-`
a-dire de tuer
brutalement toutes les extensions qui nous embˆ
etent.) Le probl`
eme est alors de montrer que les
4 op´
erations se rel`
event `
a ces cat´
egories. Pour cela, on s’inspire largement de l’article [3] d´
ej`
a
cit´
e de Beilinson et du preprint [18] de M. Saito. En fait, cette note ne contient pas vraiment
de m´
ethodes nouvelles, son principal int´
erˆ
et consistant `
a exhiber des cat´
egories auxquelles les
m´
ethodes d´
ej`
a existantes peuvent s’appliquer pour donner des r´
esultats utiles.
Au passage, on en profite pour remplacer Epar n’importe quel corps de type fini sur son corps
premier. La section suivante est donc consacr´
ee `
a la g´
en´
eralisation naturelle des constructions de
A. Huber dans ce cas. 3
2 Complexes `-adiques horizontaux
Soit Eun corps de type fini sur son corps premier, et soit `un nombre premier inversible dans
E. (On ne suppose pas que Eest de caract´
eristique 0). Dans cette section, on veut g´
en´
eraliser
`
a ce cas les constructions des sections 1-3 de l’article [13] de A. Huber, dont on suivra le plus
possible les notations.
Dans la suite, tous les sch´
emas sur Eseront suppos´
es s´
epar´
es et de type fini.
On note Ul’ensemble ordonn´
e par inclusion des sous-alg`
ebres r´
eguli`
eres AEde type fini
sur Ztelles que E= Frac(A). Grˆ
ace au crit`
ere d’ouverture de Nagata (cf EGA IV 6.12.6), on a
E= lim
AU
A. On est donc dans le cadre ´
etudi´
e dans EGA IV 8.
Si AU, on dit qu’un sch´
ema sur Aest horizontal s’il est plat et de type fini sur A. Soit X
un sch´
ema sur E. On note UXla cat´
egorie des couples (A, XA, u), o`
uAUet XAest un
sch´
ema horizontal sur Aet uest un isomorphisme X
XAAE. (On omettra parfois udans
la notation.) Un morphisme (A, XA)(A0,XA0)est une inclusion AA0et un morphisme
XA0XAAA0qui fait commuter le diagramme ´
evident. Alors on a un isomorphisme
canonique (induit par les morphismes u)
X
lim
UX
XAAE.
Soient AUet Xun sch´
ema horizontal sur A. Soit Λ = Z/`mZ,Z`,Q`ou Q`. On note
Db
c(X,Λ) la cat´
egorie des Λ-complexes constructibles born´
es sur X, construite par Ekedahl (cf
[11] th´
eor`
eme 6.3).
D´
efinition 2.1 Soit Xun sch´
ema sur E. On note
Db
h(X, Λ) = 2 lim
UX
Db
c(XA,Λ)
3. Cette g´
en´
eralisation (en fait une version plus g´
en´
erale) est d´
ej`
a envisag´
ee dans l’article de Huber, cf. la re-
marque apr`
es la proposition 2.3 de [13].
2
pour Λ = Z/`mZou Z`, et
Db
h(X, Q`) = Db
h(X, Z`)Z`Q`.
On d´
efinit aussi de mani`
ere ´
evidente Db
m(X, Eλ)pour Eλune extension finie de Q`et
Db
m(X, Q`).
Remarque 2.2 Soit (A, XA, u)UX. Pour tout A0Utel que A0A, on note
XA0=XAAA0. Alors il est clair que
Db
h(X, Z`)=2lim
A0
Db
c(XA0,Z`).
En particulier, comme dans [13] 1.2, Db
h(X, Z`)a une structure naturelle de cat´
egorie triangul´
ee
et une t-structure induite par les t-structures canoniques des Db
c(XA0,Z`).
On dispose des 6 op´
erations sur les cat´
egories ci-dessus.
On note η:Db
h(X, Λ) Db
c(X, Λ) le foncteur exact induit par les foncteurs de changement
de base Db
c(XA,Λ) Db
c(X, Λ). Il est compatible aux 6 op´
erations.
La proposition 1.3 de [13] s’´
etend trivialement et donne :
Proposition 2.3 Soit Xun sch´
ema sur E. Le foncteur ηidentifie le coeur de la t-structure
canonique sur Db
h(X, Λ) avec la cat´
egorie des Λ-faisceaux constructibles sur Xqui s’´
etendent `
a
un XA, pour (A, XA)UX.
Un tel faisceau constructible est dit horizontal.
Notons de plus le lemme suivant :
Lemme 2.4 Soit F,Gdeux faisceaux constructibles horizontaux sur X. Alors le morphisme
Ext1
Db
h(X,Λ)(F,G)Ext1
Db
c(X,Λ)(F,G)
induit par ηest injectif.
D´
emonstration. C’est ´
evident quand on utilise la description des Ext1par les extensions.
On construit maintenant la t-structure perverse (autoduale) sur Db
h(X, Q`).
Soient AUet Xun sch´
ema horizontal sur A. On dit qu’une stratification de Xest
horizontale si toutes ses strates sont lisses sur A. Si KDb
c(X,Z`), alors il existe un ´
el´
ement
3
A0Ade Utel que K|XAA0soit constructible pour une stratification horizontale de XAA0
(cf le lemme 2.1 de [13]). Les constructions de la section 2 de [13] se g´
en´
eralisent et permettent
de d´
efinir la t-structure perverse autoduale sur Db
h(X, Q`), pour Xun sch´
ema de type fini sur E,
dont le coeur Pervh(X)est caract´
eris´
e de la mani`
ere habituelle (cf corollaire 2.6 de [13]). Les 4
op´
erations ont les mˆ
eme propri´
et´
es d’exactitude que dans [5] 4.1 et 4.2, et le th´
eor`
eme 4.3.1 de
[5] s’´
etend aussi (cf le th´
eor`
eme 2.7 de [13]), c’est-`
a-dire que :
(i) La cat´
egorie Pervh(X)est artinienne et noeth´
erienne.
(ii) Soit j:YXune immersion localement ferm´
ee, avec Yconnexe et lisse sur E. Soit
Lun faisceau `-adique lisse, simple et horizontal sur Y(c’est-`
a-dire venant par changement
de base d’un faisceau lisse sur un mod`
ele lisse de Ysur un AU). Alors j!(L[dim Y])
est un objet simple de Pervh(X). De plus, tous les objets simples de Pervh(X)sont de ce
type.
Notons que le foncteur η:Db
h(X, Q`)Db
c(X, Q`)est t-exact. Il induit donc un foncteur
exact η: Pervh(X)Perv(X)(o`
u la deuxi`
eme cat´
egorie est le coeur de la t-structure
perverse autoduale sur Db
c(X, Q`)4). Le lemme 2.12 de [13] dit que ce foncteur est fid`
ele. On a
en fait un r´
esultat plus fort :
Proposition 2.5 (i) Le foncteur η: Pervh(X)Perv(X)est pleinement fid`
ele, et
induit une ´
equivalence de Pervh(X)avec la sous-cat´
egorie pleine de Perv(X)dont
les objets sont les faisceaux pervers qui sont dans l’image essentielle d’un foncteur
Db
c(XA,Q`)Db
c(X, Q`), pour (A, XA)UX.
(ii) Pour tous K, L Pervh(X), le morphisme
Ext1(K, L)Ext1(ηK, ηL)
induit par ηest injectif.
Cette proposition sugg`
ere que l’on pourrait d´
efinir directement la cat´
egorie Pervh(X)
comme sous-cat´
egorie pleine de Perv(X), puis construire les 6 op´
erations sur les cat´
egories
DbPervh(X)en utilisant le th´
eor`
eme 3.2. Cela serait sans doute plus naturel, cependant cela ne
semble pas simplifier significativement les constructions.
D´
emonstration. Dans (i), la seule partie non ´
evidente est le pleine fid´
elit´
e de η.
On montre (i) et (ii) en mˆ
eme temps. On raisonne par r´
ecurrence noeth´
erienne sur X. Si Xest
de dimension 0, alors la t-structure perverse est la t-structure canonique, donc le r´
esultat est d´
ej`
a
connu.
On suppose que dim X > 0. Soient K, L Pervh(X). Il s’agit de montrer que le
morphisme injectif Hom(K, L)Hom(ηK, ηL)est surjectif et que le morphisme
Ext1(K, L)Ext1(ηK, ηL)est injectif. On raisonne par r´
ecurrence sur la longueur de
Ket de L.
4. Pour l’existence de cette t-structure, cf. le point (iv) du th´
eor`
eme 6.3 de [11].
4
Supposons que Ket Lsont simples. Alors ηKet ηLsont aussi simples et ont les mˆ
emes
supports que Ket L. On note Y1le support de K,Y2le support de L,Y=Y1Y2,i:YX
et j:XYXles inclusions. On a un triangle distingu´
e
RHom(iK, i!L)RHom(K, L)RHom(jK, jL)+1
.
Sur XY,jKet jLsont des faisceaux pervers de supports disjoints, donc
RHom(jK, jL) = 0. On en d´
eduit que Extk(K, L) = Extk(iK, i!L)pour tout k. On montre
de mˆ
eme le r´
esultat similaire pour ηKet ηL.
On suppose d’abord que Y1n’est pas contenu dans Y2. Alors Yest un ferm´
e propre de Y1,
donc iKet iηKsont concentr´
es en degr´
es pervers ≤ −1. Comme i!Let i!ηLsont concentr´
es
en degr´
es pervers 0, on trouve
Hom(K, L) = Hom(ηK, ηL)=0,
Ext1(K, L) = Hom(pH1iK, pH0i!L)
et
Ext1(ηK, ηL) = Hom(pH1iηK, pH0i!ηL).
La conclusion r´
esulte donc de l’hypoth`
ese de r´
ecurrence, appliqu´
ee aux faisceaux pervers
pH1iKet pH0i!Lsur Y.
Si Y2n’est pas contenu dans Y1, alors iKet iηKsont concentr´
es en degr´
es pervers 0, et
i!Let i!ηLsont concentr´
es en degr´
es pervers 1. On conclut de la mˆ
eme fac¸on.
On suppose finalement que Y1=Y2. Alors iKet i!Lsont pervers, et on peut supposer que
X=Y. Soient j:ZXune immersion ouverte, avec Zconnexe et lisse sur E, et L,L0
des faisceaux lisses simples horizontaux sur ztels que K=j!(L[d]) et L=j!L0[d], o`
u
d= dim Y. On a alors ηK=j!(ηL)[d]et ηL=j!(ηL0[d]). On note il’inclusion du
compl´
ementaire du Z. On a comme plus haut un triangle distingu´
e
RHom(iK, i!L)RHom(K, L)RHom(jK, jL)+1
.
Comme iK(resp. i!L) est concentr´
e en degr´
es pervers ≤ −1(resp. 1), on en d´
eduit que
Hom(K, L) = Hom(jK, jL) = Hom(L,L0)
et
Ext1(K, L)Ext1(jK, jL) = Ext1(L,L0).
De mˆ
eme pour ηKet ηL. La conclusion r´
esulte donc de la proposition 2.3 et du lemme 2.4.
Supposons maintenant qu’il existe une suite exacte 0K1KK20dans
Pervh(X)telle que le r´
esultat soit connu pour les paires (K1, L)et (K2, L), et montrons-le pour
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