1.4 Classification des groupes commutatifs de type finis

20 CHAPITRE 1. GROUPES
1.4 Classification des groupes commutatifs de type
finis
1.4.1 Les groupes cycliques
Dans ce paragraphe, on donne la classification de tous les groupes ab´eliens avec
une partie g´en´eratrice finie. D’abord on donne quelques propri´et´es g´en´erales des
groupes cycliques, les d´emonstrations ´etant laiss´ees comme exercices. Rappelez-
vous qu’un groupe cyclique est un groupe qui est engendr´e par un seul ´el´ement.
Th´eor`eme 1.45 (Classifications des groupes cycliques).Chaque groupe cyclique
infini est isomorphe `a (C,·)
=(Z,+).
Chaque groupe cyclique fini d’ordre nest isomorphe `a (Cn,·)
=(Zn,+).
Par cons´equent, deux groupes cycliques sont isomorphes si et seulement s’ils ont
le mˆeme ordre. Tous les groupes cycliques sont ab´eliens.
Proposition 1.46 (Sous-groupes des groupes cycliques).
(i) Chaque sous-groupe d’un groupe cyclique est un groupe cyclique.
(ii) Soit G="g#, un groupe cyclique d’ordre net soit kun nombre entier. Alors
l’ordre du sous-groupe cyclique !gk"Gest n
PGCD(k,n).
(iii) Soit Gun groupe cyclique engendr´e par g, alors Gest aussi engendr´e par
chaque gktel que PGCD(k, n) = 1.
(iv) Soit Gun groupe cyclique d’ordre n. Si dest un diviseur de n. Alors Ga
exactement un sous-groupe d’ordre d, c’est `a dire !gn/d". En outre, il y a
exactement dsolutions `a l’´equation xd=eGet celles-ci sont exactement les
´el´ements de !gn/d".
Remarquons que la proposition pr´ec´edente implique que l’ordre d’un sous-
groupe d’un groupe cyclique Gest un diviseur de l’ordre de G, un fait qui suit
aussi du Th´eor`eme de Lagrange.
Proposition 1.47 (Groupes cycliques et des morphismes).Soit Gun groupe arbi-
traire et φ:CnGun morphisme de groupes. Alors, Imφest un groupe cyclique
isomorphe `a Ck, avec kun diviseur de n.
L’int´erˆet des groupes cycliques est qu’ils apparaissent souvent, par exemple
comme le groupe additif d’un corps fini. Ils nous permettent aussi de construire
des structures plus complexes, comme des corps finis, qu’on va ´etudier plus tard.
Comme application on donne d´ej`a la proposition suivante.
Proposition 1.48. Soit Cnun groupe cyclique. Alors
Aut (Cn)
={gkCn|PGCD(n, k)=1}.
En particulier, si pest un nombre premier, Zpest un corps commutatif.
1.4. GROUPES COMMUTATIVES DE TYPE FINIS 21
D´emonstration. Soit gCnun g´en´erateur et consid´erons φEnd(Cn). Alors,
φ(g)=gapour un certain a{1, . . . , n}qu’on d´enote dans ce cas φ=φa.
Observons que φaest un automorphisme si et seulement si φa(g) est un g´en´erateur
de Cn, donc si et seulement si PGCD(a, n) = 1. Donc Aut (Cn)
={xCn|est un
g´en´erateur de Cn}={ga|PGCD(a, n) = 1}.
Supposons maintenant que pest un nombre premier. Alors, Aut (Cp)={gi|i=
1, . . . , p 1}={φi|i=1...,p1}.
φiφj(g)=gji =φji(g)=φij(g).
De plus, puisque ga=gbsi et seulement si ab(mod p), on trouve que la mul-
tiplication modulo pdonne une structure de groupe commutatif sur l’ensemble
{1, . . . , p 1}. Par ailleurs, faisons l’identification (Cp,·)
=(Zp,+) = ({¯
0,¯
1,...,
p1},+), et Aut (Zp)={1, . . . , p 1}. Ecrivons i·¯apour calculer l’image d’un
´element ¯aZpsous l’automorphisme iAut (Zp). Alors, on trouve que φi
Aut (Cp) est un morphisme, c’est-`a-dire,
φi(gagb)=φi(ga)φi(gb)
qui s’exprime comme
i·a+¯
b)=i·¯a+i·¯
b,
ce qui signifie que ·est distributive par rapport `a + dans Zp. Donc si on identifie
iAut (Zp) avec ¯
iZp, on trouve que Zpest un corps commutatif.
Lemme 1.49. Soient Get Hdeux groupes finis tels que |G|=|H|. Alors un
morphisme de groupes f:GHest un monomorphisme si et seulement si fest
un ´epimorphisme (si et seulement si fest un isomorphisme).
D´emonstration. En vertu du premier th´eor`eme d’isomorphisme, on obtient que
|G|=|Ker f||Im f|.
Alors le r´esultat suit facilement de la Proposition 1.27.
Proposition 1.50. (i) Soit PGCD(n, k)=1. Alors Cn×Ck
=Cnk.
(ii) Soit nNet n=pn1
1pn2
2· · · pnk
kla d´ecomposition en produit de facteurs
premiers de n. Alors
Cn
=Cpn1
1×Cpn2
2×· · · ×Cpnk
k.
D´emonstration. On d´emontre seulement (i), la deuxi`eme partie suit par r´ep´etition.
Comme les deux groupes contiennent le mˆeme nombre d’´el´ements, il sut de
d´emontrer qu’il existe un monomorphisme θ:Cnk Cn×Ck(en utilisant
22 CHAPITRE 1. GROUPES
Lemme 1.49). Alors, soit a(respectivement bet c) un g´en´erateur de Cn(resp.
Cket Cnk) et d´efinissons
θ(ci) = (ai,b
i),
pour iN. Il est clair que θest un morphisme de groupes. En outre, ai=e
et bi=eest ´equivalent `a i0(mod n) et i0(mod k). Comme net ksont
relativement premiers, il suit que i0(mod nk), et θest injective.
1.4.2 Le th´eor`eme fondamental des groupes ab´eliens finis
Notation 1.51. Soit Gun groupe de type fini. On d´enote par d(G) le nombre
cardinal minimal d’un ensemble g´en´erateur de G. Remarquons que d(G) existe et
est fini.
Th´eor`eme 1.52 (th´eor`eme fondamental - premi`ere version).Soit (G, +) un groupe
commutatif fini. Alors il existe une unique suite (d1,d
2, . . . , dd(G)), telle que dj+1
divise djpour tout jentier entre 1et d(G)1, pour laquelle on a l’isomorphisme,
G
=(Z/d1Z)×(Z/d2Z)×· · · ×(Z/dd(G)Z)
D´emonstration. Si d(G) = 1, l’assertion est ´evidente. Pour la suite, raisonnons par
induction. Supposons d`es lors que d(G)=s2 et que le th´eor`eme est satisfait
pour tout G#avec d(G#)<s.
On commence par construire un groupe Cmet un morphisme G
=Cm×G#.
Soit mle plus petit nombre entier strictement positif, tel qu’il existe sg´en´erateurs
g1, . . . , gsqui satisfont la relation (remarquez qu’on utilise la notation additive
pour G)
mg1+a2g2+. . . +asgs=0,a
iZ.(1.3)
Remarque :mest bien d´efini : si on prend comme co´ecient de chaque g´en´erateur
son ordre, il est toujours possible de trouver une relation de ce type pour chaque
collection de g´en´erateurs. Donc, en particulier, mest au maximum l’ordre d’un
´el´ement (un g´en´erateur) de G. On prouvera qu’il existe toujours un ´el´ement (un
g´en´erateur) de Gqui a comme ordre exactement m.
Divisons aipar mpour i=2, . . . , s, c’est-`a-dire, ai=mqi+ri, ou 0 ri<m.
D´efinissons
h1=g1+q2g2+. . . qsgs.
On peut v´erifier (exercice !) que (h1,g
2, . . . , gs) est de nouveau une partie g´en´eratrice
pour G. Alors, on trouve
(1.3) = mg1+(mq2+r2)g2+. . . +(mqs+rs)gs
=m(g1+q2g2+. . . +qsgs)+r2g2+. . . +rsqs
=mh1+r2g2+. . . +rsqs
1.4. GROUPES COMMUTATIVES DE TYPE FINIS 23
Comme m>0 ´etait minimal dans (1.3), on trouve que ri= 0 pour i=2,...s, et
alors, mh1= 0, c’est-`a-dire, ord(h1)=m.
On d´efinit l’application
θ:"h1#×"g2, . . . , g2#→G, (a, b),→ θ(a, b)=a+b.
Il est clair que θest un morphisme de groupes. De plus, θest surjective car Gest
engendr´e par h1,g
2, . . . , gs. Supposons que (a, b)Ker θ, avec a=lh1,0l < m
et b=#ibigi. Alors lh1+#ibigi= 0. La minimalit´e de mnous donne que l= 0,
donc a= 0 et aussi b= 0, donc Ker θest trivial et θest aussi injective, donc un
isomorphisme.
A ce stade, on a d´emontr´e que
G
=(Z/mZ)×G#.
L’argument d’induction implique que
G
=(Z/mZ)×(Z/d2Z)×· · · ×(Z/dd(G!)Z)
ou di|di+1 pour 2 i<d(G#). Par construction, on sait que d(G#)=d(G)1.
D´emontrons que mest un diviseur de d2. Soit h2en g´en´erateur de Cd2G. Alors
mh1+d2h2= 0. Si on divise d2par m, c’est `a dire, d2=e2m+f2,0f2<m, on
obtient
m(h1+e2h2)+f2h2+ (0g3+. . . +0gs)=0,
et ceci est en contradiction avec la minimalit´e de msi f2.= 0.
On finit cette preuve en contrˆolant l’unicit´e. Le nombre mdans la construction
ci-dessus est unique, ´etant donn´es le groupe Get G
=Cm×G#, pour un certain
groupe G#. Ce groupe G#est de nouveau unique `a isomorphisme pr`es, car G#
=
G/Cm(voir Exemple 1.31(5)). Donc par induction, toute la suite (m, d2, . . . , ds)
est unique.
Remarque 1.53. Par construction, le nombre d1est le “plus petit ordre” d’un
g´en´erateur de G. Il peut exister des ´el´ements avec un plus petit ordre dans G. Par
exemple, si d1est paire, d1=2d#
1et Cd1="g1#, alors ord(gd!
1
1)=2<d
1.
Le nombre dd(G)a un interpr´etation plus exacte. C’est l’ordre le plus grand d’un
g´en´erateur de G, qui l’ordre le plus grand parmi tous les ordres d’´el´ements de G.
De plus, cet ordre est un multiple de l’ordre de chaque ´el´ement dans G. On appelle
ce nombre l’exposant de G. En g´en´eral, on definit l’exposant d’un groupe Gcomme
le plus petit nombre nN0, s’il existe, tel que
gn=eG,gG.
De mani`ere ´equivalente, l’exposant est le plus petit commun multiple des ordres
des ´el´ements si tous ces ordres sont finis et admettent un majorant commun, et
l’infini sinon.
24 CHAPITRE 1. GROUPES
L’exposant d’un groupe fini est n´ecessairement fini : c’est mˆeme un diviseur de
l’ordre du groupe. En eet, dans un groupe fini, l’ordre de chaque ´el´ement divise
l’ordre du groupe d’apr`es le th´eor`eme de Lagrange.
Tout groupe ab´elien d’exposant fini contient au moins un ´el´ement dont l’ordre
est ´egal `a l’exposant du groupe. En eet, dans un groupe ab´elien, l’ensemble des
ordres des ´el´ements est stable par PPCM, donc si cet ensemble poss`ede un maxi-
mum, cet ordre est multiple de tous les autres.
Corollaire 1.54 (theor`eme fondamental - deuxi`eme version).Chaque groupe ab´elien
fini Gest isomorphe `a un produit direct des groupes cyclique d’ordre un puissance
d’un nombre premier.
G
=Cq1×Cq2×···×Cqk,
ou qi=pni
iet piest un nombre premier pour i=1, . . . , k.
D´emonstration. Suit du Th´eor`eme 1.52 et Proposition 1.50.
Corollaire 1.55. Soient Kun corps commutatif et Gun sous-groupe fini du groupe
multiplicatif de K. Alors Gest cyclique.
En particulier, Z
p,·
=Cp1.
D´emonstration. Par le th´eor`eme fundamental et pas la Remarque 1.53, on sait que
gdd(G)= 1 pour tout gG. Mais l’equation xdd(G)= 1 a au plus dd(G)solutions en
K. Donc la d´ecomposition de Gconsiste en un groupe cyclique CdG.
Le dernier resultat n’est plus valable pour les corps non-commutatifs. Par
exemple, le groupe multiplicatif du corps des quaternions H, not´e par Q8, n’est
pas cyclique.
1.4.3 Groupes ab´eliens de type fini
D´efinition 1.56. Soit Gun groupe et gG. On dit que gest de torsion si l’ordre
de gest fini. La torsion Tde Gest le sous-ensemble de tous les ´el´ements de torsion.
On dit que Gest sans torsion si la torsion de Gne contient que l’´el´ement neutre.
Un groupe Gest appel´e un groupe de torsion si Gest ´egal `a sa torsion.
Par example, (Q/Z,+) est un groupe de torsion, et (Z,+) est un groupe sans
torsion.
Proposition 1.57. Soit Gun groupe ab´elien, alors la torsion Tde Gest un sous-
groupe de G.
D´emonstration. Clairement, eGT. Consid`ere deux ´el´ements de torsion, g, h G,
avec o(g)=net o(h)=m. Soit k=PPCM(n, m). Alors,
(gh1)k=gk(hk)1=eG,
et alors Test un sous-groupe par la Proposition 1.14.
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