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Diversité des objets et des formes de l'action collective
Si depuis la révolution industrielle, l'essentiel des conflits étaient des conflits du travail, on
voit apparaître, surtout depuis les années 70, de nouvelles formes et objet de conflit. Ces
"nouveaux mouvements sociaux" se démarquent apparemment des mouvements
traditionnels par leurs acteurs, les valeurs qu'ils véhiculent et les formes concrètes qu'ils
prennent. Si on parle de "mouvements sociaux" plutôt que de "conflits", ce n'est pas que les
désaccords sont moins grands ou les protestations moins violentes, mais pour signifier que ces
mouvements ne sont plus forcément l'expression d'un groupe contre un autre groupe,
mais parfois l'expression du groupe s'adressant à la société tout entière. La plupart du
temps, l'objectif est de transformer les règles, les comportements et les valeurs de la société
sur un aspect particulier.
Pour étudier ces nouvelles formes de conflictualité, nous verrons d'abord ce que sont les
"Nouveaux Mouvements Sociaux", comment on peut les distinguer des conflits du travail
classiques. Nous demanderons ensuite si l'émergence de ces mouvements sociaux fait
disparaître les conflits du travail. Enfin, nous étudierons comment ces Nouveaux Mouvements
Sociaux participent à la transformation de la société.
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ACTIVITE : n°307 Illustration action collective et conflit social
1 - Les Nouveaux Mouvements Sociaux (NMS)
La première étape est de comprendre en quoi il y a eu transformation des conflits sociaux.
Puis, nous évoquerons deux exemples assez emblématiques de ces "Nouveaux Mouvements
Sociaux".
1.1 - On parle de "nouveaux" mouvements sociaux car ils sont menés par des
groupes définis hors de l'entreprise, sur des thèmes pas forcément liés au
travail, et avec des formes d'action nouvelles
Les NMS vont mettre en scène de nouveaux acteurs, porter sur de nouveaux enjeux, et utiliser
de nouvelles formes d'action et de revendication.
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Les NMS mettent en scène de nouveaux acteurs : les “ travailleurs ” ne sont plus les
seuls à manifester leur mécontentement. On voit aujourd'hui, les étudiants, les
chômeurs, les opposants à l'installation d'une décharge nucléaire, les femmes, les
Corses ou les homosexuels, par exemple, manifester leur mécontentement. Autrement
dit, des acteurs, qui peuvent être par ailleurs des travailleurs, ont fait irruption sur la
scène des conflits au nom d'intérêts non exclusivement matériels, post-matérialistes
comme le dit A.Touraine. Ces nouveaux acteurs se réunissent sur la base d'un rejet
commun d'une situation qu'ils jugent préjudiciable soit à leurs propres intérêts, soit
aux intérêts des générations futures (cas des écologistes, par exemple).
Les NMS portent sur de nouveaux objets de conflits, qui révèlent des valeurs
nouvelles. Ces nouveaux mouvements sociaux vont avoir pour objet, par exemple, la
défense de l'environnement, la réalisation de l'égalité entre hommes et femmes, la
défense des consommateurs. Derrière ces objets, apparaissent des valeurs altruistes :
c'est au nom d'une certaine idée de l'intérêt collectif, en particulier à long terme,
que les militants se mobilisent, mais c'est aussi au nom de la défense des minorités
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(les noirs, les homosexuels, …) ou de la défense des droits (mouvements des sans
papier, des sans logement, des sans …). Les plus grandes manifestations de ces
dernières années ont concerné la défense de l'école privée (en 1985), au nom des
valeurs religieuses, et la défense du service public (en 1995). Par l'affirmation de ces
valeurs nouvelles, le groupe cherche parfois à obtenir la reconnaissance d'une identité
particulière (pensez aux revendications régionalistes, par exemple).
Les NMS utilisent des formes d'action nouvelles : dans ces nouveaux conflits, la
grève traditionnelle n'est pas toujours possible. L'expression prendra donc des formes
différentes : boycott de certains produits, marches de protestation, barrages routiers,
occupations de locaux, destructions matérielles, grèves de la faim, sit-in, pétitions,
etc… Le registre est varié, mais vise souvent à occuper l'espace public de manière à
être visible et en particulier d'être médiatisé. Ces actions sont destinées à faire pression
sur les autorités politiques, seules habilitées à transformer les règles, et à prendre à
témoin le plus de citoyens possible. On peut aussi dire que la plupart de ces nouveaux
mouvements sociaux sont marqués par une méfiance vis-à -vis des organisations
traditionnelles (syndicats, partis politiques, par exemple) et de leurs méthodes, souvent
dénoncées comme centralisatrices et sclérosantes pour la spontanéité et l'initiative
individuelles.
ACTIVITE : n°320 Conflit social et nouveaux mouvements sociaux
1.2 - Un exemple de NMS : le féminisme
Le féminisme est un mouvement social extrêmement important dans nos sociétés parce que la
transformation du statut des femmes a profondément changé la société, et continue de le faire.
L'égalité entre hommes et femmes, même si elle est encore incomplète, est un changement
social majeur à l'échelle de l'histoire des sociétés humaines.
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L'histoire du mouvement. Il n'est pas récent et se retrouve dans tous les pays
développés. à l'origine, dès le 19ème siècle dans certains pays, la revendication est
essentiellement politique : il s'agit d'obtenir le droit de participer aux élections, d'être
considérées comme des êtres majeurs dans tous les sens du terme (juridique, en
particulier). Mais la revendication ne porte pas sur la façon dont la société a réglé le
partage des tâches et du pouvoir entre les sexes, à l'intérieur des familles en particulier.
Dans les années 1960, les revendications féministes vont changer complètement de
nature. Elles vont porter sur le droit à disposer de son corps (liberté de contraception et
d'avortement), sur la domination au travail et dans la famille (partage des tâches), sur
l'égalité des droits dans tous les domaines.
L'émergence de nouvelles solidarités et donc de nouveaux groupes sociaux. Ce
mouvement génère de nouvelles solidarités : alors que toutes les femmes sont loin
d'adhérer à des groupes féministes, les revendications féministes développent chez de
très nombreuses femmes le sentiment d'appartenance à un groupe dominé, qui doit se
défendre,. L'identité féminine est affirmée en tant que telle, et les conflits, quels qu'ils
soient, vont de plus en plus souvent être traversés par les revendications féministes.
La création de nouvelles règles sociales. Petit à petit, le mouvement féministe a
généré de nouvelles règles, en particulier juridiques : la législation a été transformée
dans de nombreux pays afin de garantir l'égalité des droits. La discrimination au
travail a été interdite, des nouvelles règles ont été adoptées dans le domaine du droit
de la famille (en particulier pour assurer l'égalité du père et de la mère vis-à -vis des
enfants). On sait bien cependant que passer des nouvelles règles à une nouvelle réalité
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nécessite parfois beaucoup de temps. C'est bien le cas dans ce domaine : l'égalité
affirmée sur le plan politique depuis 1946 en France n'a pas permis une meilleure
représentation des femmes à l'Assemblée nationale. La loi sur la parité, qui impose
une égalité de candidatures entre hommes et femmes, n'a pas sensiblement amélioré
les choses puisque le nombre de femmes élues n'a augmenté que de 8 ! Ces nouvelles
règles sont sous-tendues par une transformation des valeurs, même si elle est lente :
la domination masculine n'est plus jugée comme “ naturelle ” dans notre société.
2 - Est-ce la fin des conflits du travail ?
L'émergence des NMS et le déclin de la syndicalisation dont on a parlé dans la première
section de ce chapitre peuvent faire croire à une disparition des conflits sociaux traditionnels.
On assisterait en quelque sorte à une fin des conflits dans l'entreprise, et à un déplacement de
la conflictualité dans la société civile autour de thèmes plus universalistes, plus généraux,
voire plus abstraits, et en tout cas déconnectés de la structure des classes sociales. Nous allons
voir que cette analyse doit être pour le moins nuancée.
2.1 - Les NMS sont plus adaptés à nos sociétés individualistes, mondialisées, où
la place du travail se réduit
Plusieurs éléments peuvent expliquer la montée des NMS et le recul relatif des formes
traditionnelles de conflit social.
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La montée de l'individualisme contribue à ce que les individus se mobilisent de
plus en plus dans une démarche personnelle. Cela ne signifie pas qu'ils défendent
uniquement leur intérêt particulier, mais qu'ils n'agissent pas uniquement en fonction
de l'intérêt de leur groupe social. Le droit du travail encadre aujourd'hui assez
strictement les relations professionnelles, ce qui rend moins nécessaire la défense
collective des droits professionnels. De plus, l'expression de l'identité se fait plus
souvent hors du travail. Chacun souhaite construire son identité propre et revendique
qu'elle soit reconnue et prise en compte dans l'espace public, ce qui n'était pas le cas
auparavant. Ainsi, l'homosexualité a toujours existé mais le fait de vouloir que
l'homosexualité soit reconnue comme une composante “ officielle ”, publique, de
l'identité des individus est nouveau.
La mondialisation des échanges et des firmes peut aussi expliquer en partie
l'émergence des NMS. D'abord parce que la mondialisation génère des conflits
particuliers (remise en cause de la stratégie des firmes, par exemple par rapport aux
pays pauvres), mais aussi parce que le cadre national paraît parfois mal adapté pour
revendiquer : ainsi la lutte contre les OGM ou, de manière plus générale, la lutte pour
la protection de l'environnement, dépasse forcément le cadre national.
La place du travail dans la société se réduit et donc la solidarité se construit aussi
en dehors des relations au travail. Le temps de travail se réduit, tant au niveau de la
semaine que de la vie entière. En conséquence, puisque les individus vivent de plus en
plus en dehors du lieu de travail, ils construisent aussi de plus en plus de lien social sur
d'autres bases que le travail. En effet, la solidarité, si elle naît moins qu'avant des
rapports du travail, doit bien être construite quelque part, car une société, des
individus, ne sauraient vivre sans elle. Les individus vont de plus en plus choisir avec
qui ils vont construire ces liens sociaux : voisinage, associations, etc. Ceux-ci seront
donc davantage choisis que subis. C'est ainsi que l'on peut expliquer la vitalité de la
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vie associative. Les associations n'ont jamais été aussi nombreuses que ces dernières
années en France, et même si on doit relativiser les chiffres (car ils contiennent les
clubs sportifs qui connaissent un fort développement), ceux-ci sont significatifs d'une
nouvelle forme de lien social.
2.2 - Mais les NMS ne sont pas si "nouveaux" que ça, et ils se mêlent en fait
aux conflits traditionnels
Il serait dangereux de croire que les conflits sociaux avant 1968 étaient tous des conflits du
travail traditionnels dans leurs formes et circonscrits aux entreprises. On a vu plus haut que
les conflits traditionnels “ débordaient ” de l'entreprise et influençaient la société tout entière.
De même, les NMS influencent aussi les conflits du travail qui se renouvellent. C'est en fait
une modification en profondeur de la conflictualité sociale à laquelle on assiste.
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Il y a toujours eu des mouvements sociaux sans liens avec le travail. On peut se
rappeler que des mouvements interclassistes pour obtenir certains droits ou au
contraire pour supprimer certaines inégalités existent depuis longtemps : on peut
penser aux mouvements pour l'abolition de l'esclavage ou de la peine de mort, au
mouvement des suffragettes en Angleterre (début du 20ème siècle) pour obtenir le droit
de vote des femmes, par exemple.
Ces N.M.S., un peu à l'image du mouvement des travailleurs, sont peu à peu
reconnus institutionnellement (vous pouvez penser, par exemple, à la création d'un
ministère de l'environnement). Ainsi, de plus en plus souvent, même au niveau
international, dans les manifestations “ officielles ”, une place est donnée à la tribune
aux altermondialistes. Ou encore, la reconnaissance officielle de certains groupes
régionalistes, visible au fait que le gouvernement négocie des accords avec eux (en
dehors de toute représentativité politique, d'ailleurs). Autrement dit, on peut penser
que par certains côtés, ces mouvements s'institutionnalisent, comme l'ont fait les
syndicats de travailleurs dans leur temps.
Les conflits du travail reprennent certains aspects des NMS. En effet, on observe
ces dernières années un renouveau des conflits du travail, en particulier lié à la
fermeture ou à la réorganisation d'entreprises. Et un nouveau syndicat, Sud, plus
proche de ses adhérents et avec des formes d'action moins traditionnelles, se
développe dans plusieurs secteurs de l'activité. Cela montre que finalement, il y a
peut-être une certaine convergence de ces différentes formes de conflit. Et l'opposition
conflits traditionnels du travail / nouveaux mouvements sociaux est peut-être moins
pertinente qu'elle pouvait apparaître dans un premier temps.
2.3 - Nouveaux mouvements sociaux ou conflits du travail ? L'exemple de
l'altermondialisme
A travers l'exemple du mouvement des opposants à la mondialisation, on peut voir comment
NMS et conflits sociaux traditionnels se mélangent et se confondent.
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Définition de l'altermondialisme. On retient aujourd'hui de plus en plus l'appellation
“altermondialiste” (et non pas antimondialiste comme au début du mouvement à la fin
des années 90) pour signifier que le mouvement ne s'oppose pas à la mondialisation en
général, mais à la mondialisation telle qu'elle existe aujourd'hui – cette formulation
revendique donc une autre mondialisation. Ce mouvement est présent dans la plupart
des pays du monde. Son objet est clair : il s'oppose de manière explicite à la
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mondialisation telle qu'elle se développe aujourd'hui par l'action des firmes
transnationales et celle des organisations mondiales comme le F.M.I. ou la Banque
mondiale.
Quels sont les groupes sociaux en action ? Le mouvement altermondialiste est
structuré généralement autour d'associations qui ne prétendent pas représenter un
groupe social particulier (on peut penser par exemple à l'association ATTAC, qui est
emblématique de la lutte anti-mondialisation en France actuellement). On semble donc
loin des conflits sociaux tels qu'on les a décrits plus haut. Cependant, les choses ne
sont pas si tranchées. En effet, on retrouve dans la mouvance altermondialiste les
acteurs traditionnels des conflits sociaux. Ainsi, les syndicats sont souvent directement
partie prenante des associations altermondialiste, et en tout cas, les adhérents de ces
associations sont souvent des adhérents de syndicats ou de partis politiques
“traditionnels”. La collusion entre des associations comme ATTAC et la
Confédération paysanne de J.Bové est une bonne illustration de ce “recyclage” des
acteurs sociaux dans les NMS.
Au nom de quelles valeurs ? Manifestement, au nom de valeurs universalistes,
comme la protection de la dignité des personnes (par exemple, dans la lutte contre le
travail des enfants), protection de l'environnement pour les générations futures (dans la
lutte contre la déforestation sauvage au Brésil, par exemple) ou lutte contre les
inégalités générées par les stratégies de développement adoptées par les firmes
transnationales. On voit ici très clairement qu'un mouvement social peut chercher à
s'opposer à un changement social. Nous en reparlerons un peu plus loin. Mais
observons également que le mouvement altermondialiste réunit des revendications
extrêmement diverses dont certaines relèvent souvent de la défense d'intérêt de
groupes sociaux très “classiques” (par exemple, l'opposition d'agriculteurs aux
importations en provenance des pays pauvres). Le point commun est la dénonciation
du pouvoir jugé exorbitant des firmes transnationales : celles-ci, grâce à leur pouvoir
économique, imposent des décisions qui devraient relever, aux dires des
altermondialistes, du domaine politique et du débat démocratique.
Par quelles méthodes d'action ? Celles-ci sont aussi variées que les revendications.
Elles visent toujours à rendre les actions visibles, en particulier au niveau des médias,
de manière à informer le plus de monde possible. Notons qu'Internet joue un rôle de
plus en plus important dans le domaine de la popularisation de ces luttes (diffusion de
l'information sur de très nombreux sites, mais aussi actions collectives via le net :
signature de pétitions, blocage des sites officiels, etc.). On voit en tout cas ici
clairement l'influence des NMS dans le renouvellement et la diversification des formes
de revendications.
Ce mouvement altermondialiste a-t-il créé du changement social ? La réponse est
évidemment positive : par exemple, les firmes transnationales ont dû prendre en
compte les critiques sur le travail des enfants (certaines ont même réussi à en faire un
argument de vente dans leur publicité) et pour les enfants en question et leurs familles,
cela change évidemment quelque chose. Le mouvement altermondialiste a également
créé des solidarités transnationales, si l'on peut dire, et c'est aussi très nouveau, les
mouvements sociaux traditionnels se limitant pratiquement toujours au cadre national.
3 - Nouveaux mouvements sociaux et changement social
On a vu dans la première section que les conflits du travail avaient profondément transformé
l'entreprise, notamment en faisant émerger un droit du travail et en structurant les groupes
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sociaux en acteurs collectifs. Il faut s'interroger symétriquement sur l'effet que peuvent avoir
les NMS sur la société et sur les transformations qu'ils impulsent.
3.1 - Les NMS font apparaître de nouveaux conflits en remettant en cause la
légitimité d'inégalités qui étaient jusque là socialement acceptées
Les NMS renouvellent la conflictualité sociale en faisant apparaître de nouveaux thèmes de
discorde. Il s'agit en fait de dénoncer de nouvelles inégalités, mais plus sûrement encore de
dénoncer des inégalités dont la société s'accommodait jusque-là . C'est le cas bien
évidemment pour le féminisme : ce mouvement n'est pas apparu parce que la situation des
femmes s'est dégradée, mais bien parce que l'inégalité entre hommes et femmes a cessé d'être
tolérable aux yeux d'une frange croissante de la population. De même, l'altermondialisme s'en
prend à un processus de mondialisation qui était habituellement présentée comme inéluctable,
et presque “naturelle”.
C'est d'ailleurs plus généralement un critère de réussite d'un mouvement social : dans quelle
mesure arrive-t-il à faire perdre sa légitimité à l'inégalité qu'il dénonce, à la “transformer en
injustice” en quelque sorte. On peut ainsi remarquer que les mouvements en faveur des “sans
papiers”, par exemple, ont beaucoup plus de mal à faire admettre à la société française que les
droits des immigrés, a fortiori des immigrés clandestins, doivent être rapprochés des droits des
citoyens français.
3.2 - Les NMS font émerger de nouvelles valeurs et de nouvelles normes, voire
des modèles culturels alternatifs
Comment dénonce-t-on une inégalité ? Comment la fait-on passer pour une injustice ?
Toujours en faisant référence à des valeurs. Par exemple, le féminisme fait référence
explicitement à l'égalité pour dénoncer le sexisme de la société. S'il y a conflit, c'est que la ou
les valeurs mises en avant ne sont pas partagées par la société ou entrent en contradiction avec
une autre valeur de la société. Les NMS sont donc l'occasion d'une transformation culturelle
de la société, parce qu'ils bousculent et renouvellent son système de normes et de valeurs.
Pour reprendre encore l'exemple du féminisme, on a bien vu dans le débat autour de la loi sur
la parité en politique que deux valeurs s'opposaient : l'égalité entre les sexes et l'universalisme
politique (c'est-à -dire le fait qu'un citoyen français ne se définit pas par son sexe, son origine
ethnique, ou ses croyances religieuses). De même, dans le cas du PACS, on a assisté à un
conflit entre la revendication d'une reconnaissance des couples homosexuels au nom de
l'égalité (et aussi de l'universalisme dont on vient de parler), et une vision plus traditionnelle
(ce qui ne veut pas dire mauvaise !) de la famille, le débat étant focalisé sur l'homoparentalité.
3.3 - Les NMS essaient de déboucher sur une transformation de la société en
influençant les politiques publiques
Au-delà de la transformation de ses valeurs, les NMS agissent sur la société en faisant
modifier les lois, les règlements ou les décisions publiques, bref en changeant le
fonctionnement et l'organisation de la société. Les exemples abondent et l'on en a déjà cité
quelques-uns. Rappelons pêle-mêle la loi sur la parité, sur l'IVG, ou sur l'égalité
professionnelle entre hommes et femmes, le droit à la contraception, le PACS, l'abandon du
projet de canal Rhin-Rhône, l'interdiction des farines animales, etc.
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Cette action sur l'Etat, et plus généralement la sphère publique, pour transformer la société
pourrait paraître propre aux NMS, les conflits traditionnels agissant au niveau de l'entreprise
et aboutissant à des accords entre groupes sociaux limités à une entreprise ou une branche. En
fait, cette distinction est fausse. En effet, les conflits du travail se limitaient autrefois (en gros,
avant la seconde guerre mondiale) à l'entreprise ou la branche parce qu'il n'était pas admis que
l'Etat intervienne dans les relations au travail. Mais progressivement, et tout particulièrement
sous la pression des conflits sociaux, l'intervention étatique et réglementaire s'est développée,
notamment par le développement du droit du travail. D'ailleurs, les conflits du travail se
règlent aujourd'hui souvent par le recours à la loi : loi sur les 35 heures (ou sur leur
assouplissement !), loi sur les licenciements, etc. Les NMS profitent donc d'une possibilité
d'action sur la société qui s'est développée grâce aux conflits du travail. Il ne faut donc
pas opposer artificiellement les deux modes d'action.
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