Résumé de la conférence du 19 février 2013 par le Professeur Christophe Louvet sur le cancer du pancréas Monsieur le Professeur LOUVET excuse son collègue chirurgien le Professeur GAYET empêché de venir ce soir en raison d’un problème d’avion qui le retient en Allemagne. Le cancer du pancréas est relativement fréquent avec 9 000 nouveaux cas par an et particulièrement grave (moins de 10% de survie à 5 ans). Le pancréas est situé profondément dans l’abdomen et les premiers symptômes qui attirent l’attention surviennent lorsque le cancer est déjà étendu (jaunisse dans les cancers de la tête, douleurs dans les cancers du corps et de la queue du pancréas). La survenue d’un diabète, de troubles digestifs, d’un amaigrissement doivent également alarmer. Le pancréas a deux fonctions : la sécrétion de suc pancréatique pour la digestion des graisses, la sécrétion d’insuline pour éviter le diabète. Les tumeurs neuro-endocrines et les lymphomes sont très rares, on ne parlera que de l’adénocarcinome pancréatique (95% des tumeurs du pancréas). L’examen de dépistage est le scanner mais il ne permet pas d’affirmer qu’il s’agit d’un cancer. Une preuve histologique est indispensable. La biopsie est difficile et dangereuse avec des risques de fistules. On utilise actuellement l’écho-endoscopie gastrique qui permet d’examiner le pancréas, de voir la tumeur et de la ponctionner à l’aiguille fine. La mise en évidence dans le sang ou les urines d’une mutation du gène KRAS est un argument complémentaire en faveur du cancer (mutation présente dans 90% des cancers du pancréas). Lorsque le cancer est confirmé, le premier problème qui se pose est de savoir si le traitement chirurgical retirant la totalité de la tumeur est possible, d’ou la nécessité d’un bilan très complet d’extension. Si la tumeur ne peut pas être retirée dans son ensemble, on ne fait pas de traitement chirurgical. Seulement 15% des cancers du pancréas diagnostiqués sont accessibles à la chirurgie. Suivant la localisation de la tumeur, l’intervention sera une duodéno-pancréatectomie céphalique si la tumeur est à droite (tête), une spléno-pancréatectomie caudale si la tumeur est à gauche (queue), une pancréatectomie totale si la tumeur est pluri-focale ce qui entraine obligatoirement un diabète insulinodépendant. C’est une chirurgie difficile avec des risques de fistules digestives. Elle doit être faite par des chirurgiens expérimentés dans un centre comportant une réanimation chirurgicale. Sur le plan pronostique, il est important de savoir si les marges d’exérèses sont saines ou contiennent des cellules tumorales. L’utilisation d’encre de chine de différentes couleurs (jaune pour le rétro péritoine, rouge pour les artères, bleu pour les veines) permet un repérage précis pour l’examen anatomo-pathologique. La chirurgie par coelioscopie est possible dans des centres spécialisés. Après la chirurgie, une chimiothérapie adjuvante est devenue un standard thérapeutique améliorant le pronostic du simple au double. Les formes graves du cancer du pancréas sont les formes localement avancées sans métastases à distance et les formes avec métastases à distance. Dans les formes localement avancées on peut proposer une radiothérapie. Une étude en cours compare la radio-chimiothérapie à la chimiothérapie seule. La radiothérapie ne semble pas apporter un bénéfice évident complémentaire. Le but du traitement médical est de contrôler aussi longtemps que possible la croissance tumorale permettant de transformer ce cancer, qui ne durait que quelques mois, en une maladie chronique qui peut durer plusieurs années. Les chimiothérapies utilisées furent d’abord la gemcitabine puis une association plus efficace de plusieurs drogues : le FOLFIRINOX (comportant acide folique, fluorouracile, irinotecan, oxaliplatine). La tolérance est moins bonne. La voie du hérisson a été décrite à la suite de la découverte d’une mouche avec une peau recouverte d’aiguilles (ressemblant à un hérisson) en rapport avec un gène muté, le gène Sonic. La cyclopamine isolée d’une plante inhibe le gène Sonic. Cette plante mangée par les moutons entrainait la naissance d’agneau avec un seul œil (cyclope). Chez la souris avec une greffe de tumeur pancréatique, l’injection de cyclopamine inhibe la prolifération tumorale. La gemcitabine a besoin pour agir d’une part de transporteurs pour rentrer dans la cellule hENT1 et hCNT3 et d’autre part d’activateur intra-cellulaire dCK. Les courbes de survie avec des taux de transporteurs élevés sont bien meilleurs que celles avec des transporteurs bas. Dans une population traitée par la gemcitabine, la survie est meilleure également si le taux de dCK est élevé. Les taux de transporteurs et d’activateur ne modifient pas les courbes de survie dans une population non traitée par la gemcitabine. Le Taxol est aussi utilisé. Lorsqu’il est incorporé dans l’albumine, il est plus efficace car le vecteur albumine facilite l’entrée du Taxol dans la tumeur. La présence de protéine stromale SPARC dans le cancer du pancréas est associée à un moins bon pronostic. L’association Paclitaxel (Taxol) albumine et gemcitabine est meilleure que la gemcitabine seule. Elle pourrait renverser le mauvais pronostic de la présence de protéine SPARC. Une bonne nouvelle pour conclure : la création d’une base de données mondiales à la Mayo Clinic réunissant tous les essais valables sur le cancer du pancréas pour faciliter les études ultérieures. Le responsable de cette base de données est le Pr LOUVET.