La Révolution industrielle

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Séminaire d’Histoire économique
« [La Révolution
Industrielle]
cette rupture dans l'histoire d'une société lorsque la croissance devient sa condition normale »
W. W. Rostow
Professeur :
Jean-Christian Lambelet
Assistante :
Ana Cristina Molina
Vincent Charpilloz - Julien Guyot – Andreas Fuster - Olivier Perrinjaquet
Mai 2003
Histoire économique
La Révolution industrielle
1
0 Table des matières
0
Table des matières ......................................................................................................... 1
1
Introduction .................................................................................................................... 2
2
Vision classique de la Révolution Industrielle ................................................................. 3
2.1
3
What occurred during the Industrial Revolution? .................................................... 4
2.1.1
The Demographic Revolution ............................................................................. 5
2.1.2
The Agricultural Revolution ................................................................................ 8
2.1.3
The Commercial Revolution ............................................................................... 9
2.1.4
The Transport revolution ...................................................................................11
2.1.5
The Cotton Industry...........................................................................................12
2.1.6
The Iron Industry ...............................................................................................14
2.2
Préconditions à la révolution industrielle ...............................................................15
2.3
Avantages géographiques ....................................................................................18
Révolution ou tempête dans un verre d’eau ? ...............................................................21
3.1
En général ............................................................................................................21
3.2
La critique de Crafts – pondération et interprétation ..............................................22
3.2.1
3.3
Révision des conclusions ..................................................................................25
Analyse statistique du produit intérieur but ............................................................25
3.3.1
Le produit intérieur brut per capita .....................................................................26
3.3.2
Test statistique d'une rupture structurelle ..........................................................27
3.4
3.4.1
La critique de la critique ou quand Ricardo devient Salomon ................................30
Mais le débat n'est pas terminé .........................................................................33
4
Conclusion ....................................................................................................................34
5
Bibliographie .................................................................................................................35
6
Tables des illustrations et tableaux ................................................................................36
7
Annex: Major Inventions and Innovation during the IR. ..................................................37
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Histoire économique
La Révolution industrielle
2
1 Introduction
L’Homme partage avec le perroquet la particularité de parler de choses qu’il ne connaît pas :
que devrait faire le Prince Charles ? Dans combien de temps se terminera la guerre ? Quel
temps fera-t-il demain ? Et la liste n’est pas exhaustive. Pourtant les erreurs commises ne
sont pas de même nature : d’un côté nous avons les spéculations hasardeuses de
personnes ne connaissant rien à un sujet, de l’autre les vérités prédites sur la base
d'informations partielles ou incertaines.
Le thème que nous allons traiter dans cet exposé relève de la seconde catégorie. « La
Révolution industrielle ? Bien sûr que je sais ce que c’est : l’Angleterre, le 18e siècle, la
machine à vapeur». Certes, tout cela a bien existé. Mais quels furent les véritables
changements, leur ampleur, leur impact économique et social ? C'est ce que nous allons
tenter de présenter dans ce travail.
Dans un premier temps, nous nous attacherons à décrire l’acception usuelle de la Révolution
Industrielle. Quand est-elle apparue ? Quel fut l’enchaînement des inventions, leur diffusion
et leurs conséquences structurelles ? Afin de simplifier notre analyse, nous ne considérerons
que le cas anglais, ou presque, étant postulé qu’il fut le plus significatif : « l’Angleterre est à
la Révolution Industrielle ce que les balcons fleuris de géraniums sont à Grimentz »1. Aux
mots, nous joindrons les chiffres montrant comment la Grande-Bretagne changea
profondément à cette période.
Ensuite, nous présenterons les critiques qui ont été adressées à cette modélisation de
l’histoire. Un peu comme des parents annonçant à leur enfant que le Père Noël n’existe pas,
nous vous montrerons que la Révolution Industrielle ne peut pas être considérée comme une
véritable cassure de l’histoire. "Depuis la fin du 18e siècle, statisticiens et historiens se sont
efforcés d'apporter des correctifs aux données chiffrées accessibles, et de reconstituer par
extrapolations parfois téméraires des séries statistiques incomplètes ou manquantes,
d'établir des bases sures pour mesurer la croissance économique de la Révolution
Industrielle à leur époque."2 Nous remettrons également en cause les dates du « décollage »
de la production anglaise, de même que nous relativiserons les taux de croissance des
différentes variables fondamentales. Nous procéderons ensuite à une analyse statistique
d’une série de données sur le produit intérieur brut de l’Angleterre de la fin du 13e au début
du 19e. Nous verrons si nos maigres connaissances économétriques peuvent soutenir l’une
des thèses présentées ci-dessus ou si nous devrons nous résigner à fournir une réponse de
Normand.
1
2
Proverbe local.
R. Marx
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Histoire économique
La Révolution industrielle
3
Précisons tout de suite que cette critique de la Révolution Industrielle est essentiellement
une querelle de chiffres. Les aspects qualitatifs présentés restent valables et ce serait faire
preuve mauvaise foi que de prétendre que nos sociétés étaient les mêmes avant et après le
18e. Ceci nous amènera à exposer une critique de la critique prenant comme base un
modèle ricardien des échanges.
2 Vision classique de la Révolution Industrielle
Cette première partie de notre séminaire va essentiellement chercher à cerner les nombreux
aspects de ce qu'a été la révolution industrielle en Grande-Bretagne dans la deuxième partie
du XVIIIème siècle et dans le début du XIXème.
Ce sujet a été étudié par de nombreux auteurs depuis plus d'un siècle. Ainsi, même si nous
allons nous restreindre dans cette première partie, à l'approche dite "classique" du
phénomène, il est important de préciser qu'il existe en son sein maintes controverses et
courants différents. Beaucoup d'historiens ont débattu longuement de différents aspects de
cette révolution notamment de ses causes et de son importance. Certains auteurs allèrent
même jusqu'à renier la notion de révolution, considérant les progrès prodigieux réalisés
durant cette époque comme la continuation normale d'une évolution linéaire.
En fait, la notion même de révolution industrielle peut prêter à confusion. Pour l'éclaircir, il
faut garder à l'esprit que l'économie est rarement dramatique, soudaine ou héroïque.
L'origine du terme "révolution industrielle" est à mettre au crédit de deux économistes
francophones, le Belge Natalis de Briavoinne et le Français Jerôme-Adolphe Blanqui dans
les années 1830. La notion "révolutionnaire" de l'expression fût utilisée pour faire allusion à
la révolution française et souligner ainsi la manière dont les deux phénomènes ont changé
de manière fondamentale le mode de vie dans leurs pays respectifs3. Une révolution désigne
usuellement un changement rapide et brutal, alors que le phénomène que nous étudions
s'étend sur plusieurs décennies, les dates habituellement avancées pour son début et sa fin
étant 1760 et 1830. Il s'agit donc de prendre un peu de recul et de repositionner cette étape
importante dans une perspective de long terme ou historique. Pour illustrer les mutations
profondes et rapides qui se produisirent durant cette période, R. Marx4 compare le progrès
accompli en septante ans à celui réalisé en plus d'un millénaire et demi, à savoir depuis
l'époque des Romains.
Se référer aussi à la définition de Landes, qui utilise le terme dans sa définition première, à savoir la rotation d’un sphère.
"La révolution industrielle en Grande-Bretagne", 1970. Les informations complètes concernant les ouvrages étant donné dans
la bibliographie à la fin du présent séminaire.
3
4
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Cependant, le fait que le terme de "révolution industrielle" émerge si tard des traités
d'histoire nous permet d'avancer que malgré la représentation que l'on peut en avoir, les
hommes l’ayant vécue ne s'en sont pas rendu compte vraiment. Il faut attendre Marx et les
marxistes et l'élaboration de leur théorie sur le "factory system" anglais ou de "modern
industry" pour qu'il y ait une prise de conscience des bouleversements qu'a provoqués la RI.
2.1 What occurred during the Industrial Revolution?
There were numerous and far-reaching changes that occurred in English history prior to the
Industrial Revolution, but these are completely eclipsed by the irreversible transformation
and evolution of the English society between the years 1760 and 1830. The only epoch that
can be compared in magnitude to the fundamental change of the human condition is the
Neolithic Age, which man discovered how to become a settled agriculturist and herdsman
instead of a hunter or nomad. The Industrial Revolution basically created the kind of society,
which seems so commonplace and normal to us. It offered to men, for the first time in history,
the way toward controlling their environment instead of being at its mercy.
In the current world it is taken for granted that if a nation is to become prosperous and
powerful it must have an industrial revolution. The Western and some Eastern societies
followed the British lead in the nineteenth and twentieth centuries, and the concept of an
industrial revolution is now accepted as a definite phase in the life of modern nations. The
British Industrial Revolution stands out because it was the first one in history. The exact
reason why this metamorphosis of the economy and society started in Britain continues to
puzzle historians, but they have reached the consensus that it was very complex and
interlocking changes which defy any single-cause explanation.
Agriculture was the dominant part of the economy before 1760 in England, with a small
population, a low standard of living for the majority of the people, a hierarchical social
system, and an aristocratic oligarchy in political control. England became, as a result of the
Industrial Revolution, a nation dependent on her manufacturing and extractive industries,
with a large population, great urban centres, vastly increased wealth, some of which slowly
trickled down to the lower classes, an increasing degree of social mobility, and political
democracy. Needless to say, the Industrial Revolution changed the English and
subsequently the entire world's way of life completely and in the most fundamental ways.
To avoid confusion and facilitate the understanding of the different aspects of the Industrial
Revolution, it is best to explain each separately, even though they were profoundly
interwoven and there was much interaction between them.
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La Révolution industrielle
Stuctur of em ployem ent in Britain
1890
1820
1700
0%
20%
40%
Agriculture
60%
Industry
80%
100%
Services
Stuctur of em ployem ent in Netherlands
1890
1820
1700
0%
20%
40%
Agriculture
60%
Industry
80%
100%
Services
Stuctur of em ployem ent in United States
1890
1820
0%
20%
40%
Agriculture
60%
Industry
80%
100%
Services
Figure 1: Structure de l'emploi en Angleterre, aux Pays-Bas et aux EU entre 1820 et 18905
The first four aspects are sub-revolutions: the demographic revolution, the agricultural
revolution, the commercial revolution, and the transport revolution. Following these four subrevolutions will be the two industries which more than any others first experienced the early
revolutionary changes in technology and economic structure that made Britain the workshop
of the world, the cotton and iron industry.
2.1.1
The Demographic Revolution
Associated with the Industrial Revolution was a demographic revolution whose mechanics
are not fully understood but there is one idea that is quite clear. One of the features that
distinguishes the modern industrial, or industrializing, economy from its predecessors in the
5
Maddison, A. "L’économie mondiale- une perspective millénaire"
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chain of economic development is that it involves sustained long-term growth in both
population and output. Growth of population depends essentially on the rate of natural
increase, which is the difference between birth rates and death rates. It is evident that a rise
of population will be due to either an increase in birth rate, a decrease in mortality, or
immigration. Immigration can be ruled out for the eighteenth century. The opposite occurred
since many Britons left to settle the new colonies or were forced to leave if they were
convicts. The fall in the death rate seems at present to be the most likely explanation of the
population explosion. Not necessarily because of improvement in medical treatment, but
rather a general improvement in standards of living. The infant mortality rate decreased
substantially. London was notorious for its high infant mortality; it has been estimated that
three-quarters of the children born there before 1760 died before they were ten.
Precise population statistics before the census of 1801 do not exist, and the official
registration of births and deaths was begun only in 1839. We have rough figures of
population from sources such as Gregory King at the end of the seventeenth century or
parish registers, which recorded baptisms, burials, and marriages. Nevertheless, the general
population trend is quite clear. Beginning about 1740 the population began to increase, and
continued this trend throughout the nineteenth and twentieth centuries. Previous to this
upsurge of population, there were sudden rises in population but they never lasted and were
quickly cancelled by a single peak in the death rate. This time the growth that we date from
the 1740’s was not reversed and it accelerated to unprecedented levels in the 1780’s. The
1801 census showed that the population of England and Wales had grown to nine million,
and by 1831 it was fourteen million. The acceleration of the rate of growth reached a peak in
the period 1811-21.
La population de l'Angleterre
20
15
10
5
17
00
17
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20
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30
17
40
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17
60
17
70
17
80
17
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18
01
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18
21
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41
18
51
0
-5
population en millions
Variation décennale en %
Figure 2: Population anglaise entre 17e et 18e siècles6
6
Marx, R. "La Révolution Industrielle en Grand-Bretagne"
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There are different hypothesis explaining the population growth. As it was aforementioned
the traditional explanation is that there was a fall in the death rate, but there are other
speculations such as an initiating rise in the birth rate and a compensatory adjustment to the
abnormally high mortality rate of the 1730’s. The acquirement of medical knowledge has
been discredited as a hypothesis since there has been no true evidence of medical progress
that could explain the connection between the Industrial revolution and the demographic
revolution. It seems that there was simply an amelioration of the standards of living, which
made people more resistant to infectious diseases consequently reducing the incidence of
epidemics.
There are many uncertainties of the factors that affected population growth but what does
seem to stand out fairly conclusively from the evidence and analyses carried out by
economic, social, and medical historians is that there was a sharp reduction in the death rate
dating from the decade or so before 1750, due almost certainly to a reduction in the
incidence of epidemics, and an increase in the birth rate in the period after 1750, due partly
to the secondary effects of the earlier reduction in infant mortality.
Another important facet of the demographic revolution is the pattern of output growth that
goes along with population growth. It seems that during the upsurge of population during the
1740’s there was also an upsurge of total output parallel to it. Total real output is estimated to
have been one percent per annum and accelerated even more during the 1780’s to 1.8 per
cent per annum. It’s reasonable to suppose that without the growth of output dating from the
1740’s the associated growth of population would have been checked by a rise in the death
rate due to declining standards of living. It is also reasonable to say that without the
population increase in the second half of the eighteenth century, the British economy would
have suffered from a lack of labour. The rising demand and prices characteristic of growing
population encouraged expansion and innovation.
During the demographic revolution there were certain events that held back to a certain
extent the population boom. During the last three of four decades of the eighteenth century
there was a peculiarly high incidence of bad harvests. The Seven Years War, the American
War of Independence and the French War all interrupted overseas trade and created
industrial and commercial distress and unemployment. Rise in money wages was slower
than increase in prices, poverty became a problem and food riots were common. Urban
death rates tend to be higher than rural death rates so with urbanization people’s
environment worsens, increasing the death rate. These events surface another subject of
controversy, did the standard of living actually rise and to what extent.
By the last decade of the eighteenth century, the growth of population was everywhere
evident and becoming a matter of concern. Reverend Thomas Malthus was one among the
most worried and feared that population growth would outrun the means of subsistence. In
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Histoire économique
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his Essay on the Principle of Population, he articulated the fears, concerns, and pessimism
of a great many people. With the advantage of hindsight, one knows that industrial growth
would ultimately dispel many of their fears, nevertheless making new ones.
One cannot oversimplify the causes of the Industrial Revolution because it would create a
fallacious notion of what it truly was. There were many other factors that fed the Industrial
Revolution. This certainly does not mean that the demographic revolution was not an integral
and indispensable part to it.
2.1.2
The Agricultural Revolution
Another subject of great debate is the role that an agricultural revolution plays in the
industrial revolution. The spectrum of opinions concerning this subject range from those who
believe that all that is required of agriculture is that it should efficiently contract and so
release labour and resources for modern industry and those who say that an agrarian
revolution in agricultural techniques and methods of organization is an indispensable
prerequisite to modernization of the manufacturing and transport industries. The agricultural
revolution was a slow process covering a long period of time. It has even been estimated that
the pace of advance of new methods was not more than a mile a year from their place of
origin.
There were four main characteristics of the British agricultural revolution. First of all there
was a transition from medieval open-fields cultivated in discontinuous strips by peasants to
farming in large-scale fused units. Secondly, there was an extension of arable land and the
adoption of intensive livestock husbandry. Thirdly, there was a transformation from a selfsubsistent village community who was at the mercy of weather conditions to a community of
agricultural labourers who depended on national and international markets. Fourthly, an
unprecedented increase in the output produced per unit of the full-time labour force in
agriculture. There were three developments of the British agrarian revolution which are
interesting to examine; the adoption of new techniques of production, enclosure, and
changes in entrepreneurial attitudes.
Constant tillage, new crop rotations and a closer association of crops and stock were the
main new methods that characterized the agrarian revolution. Jethro Tull’s technique of
drilling wheat and roots in straight lines sufficiently far apart to permit a horse-drawn hoe to
cultivate rows between them was the basis of the novel modus operandi of constant tillage.
The seed drill was publicized extensively in the 1730’s and made more efficient by the
Rotherham triangular plough, which allowed a rapid and effective turning of the soil. In the
1780’s experimental threshing machines were being made, separating grain from straw
mechanically. Manual labour was largely reduced thanks to these innovations. It is important
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Histoire économique
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to have in mind that the propagation of these new methods were very slow. For example it
took until the 1820’s for the Rotherham plough to be used efficiently in most regions.
Innovations sometimes only worked for a specific type of soil and idle in other places.
The Enclosure Acts also had an effect on the agricultural revolution. It is believed that the
rural poor were negatively affected by these consolidations of land. The price of corn had an
important role to play in the eagerness of landlords to consolidate and the readiness of
peasants to give up their land. During the first half of the eighteenth century crop prices were
high and peasant were more reluctant to give up their land but after Waterloo, the price of
corn plunged, and only large landowners could survive. Thanks partly to the movement
towards enclosure starting with the General Enclosure Act of 1801, more agricultural
techniques were developed, and a reservoir of cheap labour was created.
It is possible to say that the most important factor of the agrarian revolution was the human
factor. The people who were making the decisions had a desire to improve their methods of
cultivation and structure. It is important to know that the changes occurring in manufacturing
and commerce were essentially the same as in agriculture. Production was made for a
national and international market, economic specialization was becoming more and more
common, and there was an application of technological advancements. The price of corn had
a large effect on these developments which were gradual. There was a craze for
improvement in the agricultural sector. Aristocracy, clergy, politicians, and landowners were
all feverishly investing for more progress in this sector. Farming societies and associations
were established to facilitate the exchange of ideas and innovation. The Board of Agriculture
was created in 1793 to further spread the new knowledge.
The evolution of agriculture inflated purchasing power for the products of British industry,
provided a considerable part of the capital required to finance industrialization, and carried
much of the burden of the State during the various wars. As we have seen, the agricultural
revolution was contemporaneous to the industrial revolution rather than preceding it.
2.1.3
The Commercial Revolution
Britain’s strategically favourable position allowed it to exploit the opportunities open to it from
international trade. The range of goods was widened and there was an increase in the value
of domestic output. Standard of living was progressed both quantitatively and qualitatively.
The natural resources in Britain were not by any means abundant giving it an incentive to
succeed in international trade. At the middle of the eighteenth century woollen textiles still
accounted for well over half the value of English domestic products. The Atlantic trade
extended the variety of products the English could trade with Europe (e.g. sugar, tobacco,
cotton, indigo, dyewoods). These new commodities, which were becoming necessities in
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Histoire économique
La Révolution industrielle
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Europe, were important because they increased British purchasing power on Europe. Britain
lacked essential products for the development of important sectors of the economy. Its major
export, woollen products, was near saturation. British trade in Europe would have suffered
substantially if not for these tropical commodities. Britain created a very complex and
profitable trade network between the West Indies, India, Africa and itself. In the half-century
ending in the early 1750’s the volume of English re-exports had increased by 90 percent. In
the next half century the re-export trade expanded more than twice as fast. On all the
transaction British merchants and shippers got 15 percent of the value of the goods imported
for re-export. British trade expanded due to four factors. They had a large capital in seamen
and navigators, the commercial advantage of a merchant class who was willing to take risks,
the financial institutions with credit centres, and Britain had a government who sympathized
and encouraged the mercantile classes to increase their wealth. By the middle of the
eighteenth century the commercial monopolies were becoming non-existent because
individual merchants could finance their voyages. The East India and Hudson Bay Company
still needed the financial support from collective institutions.
The new market in North America greatly affected the British trade network. At the end of
1750 there were one million residents in the North American colonies but by the end of the
War of Independence, there were three million residents. North American imports were
mainly acquired from Britain (e.g. by 1750 North America took eleven percent of British
domestic exports and Europe seventy-seven percent and by 1797 North American share
rose to thirty-two percent and the European share decreased to 30 percent).
London was the centre of the wide, intricate, multilateral network of world trade as well as the
centre of the national credit system. The richest countries in the world would use the financial
support that this British money market had to offer.
The change in the composition of the products being exported is more significant that the
volume of domestic products. There was a shift from primary products to manufactured
products and from the products of the old domestic type product to the new capitalistic
factory industry. In 1750 grain accounted for one fifth of the exports and by 1800 it was 4.5
percent. In 1750 woollen textiles accounted for 40 percent of exports and decreased to 28.5
percent in 1800 while cotton increased from insignificant quantities to 24 percent. The cotton
industry was heavily dependent on trade both for the new markets and for the import of the
raw materials.
There are essentially five ways in which the opening to international trade further propelled
the Industrial Revolution: the creation of a greater demand of British products, access to raw
materials which expanded the variety of products produced and the decreased the cost,
international trade provided poor, underdeveloped countries with the purchasing power to
buy British goods, it provided an economic surplus opening the possibility of investing in
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industrial expansion and agricultural improvement, and the expansion of international trade in
the eighteenth century was a prime cause of the growth of large towns and industrial centres
like London, Liverpool, Manchester, Birmingham, and Glasgow.
2.1.4
The Transport revolution
Three means of transport will be discussed: roads, canals, and dock-to-dock transport.
Before the industrialization of Britain, when domestic industry prevailed, and traffic in heavy
produce was limited and highly localized, there was no true need for advancements in
transportation. In the eighteenth century the English roads had the reputation of being
amongst the worst in Europe. Due to the increasing demands of better roads, in the first half
of the eighteenth century an annual average of about eight roads acts went through
Parliament. The annual average increased fivefold during the two decades ending in 1770,
dropped back slightly to about 37 Acts per annum in the next two decades and reached a
peak of over 55 Acts per annum in the twenty year period 1790-1810. These new roads
which benefited from new techniques of road-making, could bear heavy traffic over long
periods of time and were passable throughout an average British winter. The new techniques
were variations of the Roman road-making methods. With the advent of the motorcar at the
end of the nineteenth century, there was significant innovation in the road-making technique.
It was not until well into the nineteenth century, however, that the scientific road-making
methods developed by the road engineers of the time, Metcalf, Macadam and Telford, were
applied generally. Even though good roads were rare, the speed, regularity, and comfort of
travel increased remarkably. The journey from London to Birmingham took two days in the
1740s and took 19 hours by the 1780’s. In 1756 only one coach a day went between London
and Brighton, by 1811 there were twenty-eight coaches a day, and by 1820 a person had
1500 opportunities during one day of leaving London.
Water transport was the cheapest form of transport for voluminous, heavy, goods. Since no
part of the British Isles is more than 70 miles from the sea, and there were various lengthy
rivers present, its natural advantages were exploited to the fullest. Coastal shipping was the
main means of transport for massive, heavy commodities in the eighteenth century and
without it there could have been no large-scale heavy industry and no large towns.
Coast shipping was not revolutionized during the late eighteenth and early nineteenth
centuries but there was a revolution in the inland system of water navigation. The canals
provided the industrial revolution a steadfast, high-capacity, low-cost transport system. They
were part of the essence of the industrial revolution since they were man-made, scientific
knowledge was applied to practical engineering problems, and it was catered for a
producers’ market. There were two periods when the canal craze was significant: first in the
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1760’s and 1770’s with the success of the Duke Bridgewater’s Canal between Worsley coal
mine and Manchester and after the American War when canal building became a national
mania. The growth of towns was the main motive for the development of canal systems, the
same motive for the development of roads. Coal was the only form of fuel and more than half
of the Navigation Acts passed between 1758 and 1802 were concerned with the transport of
coal. A lot was invested in these inland navigation networks and by the 1830’s 20 million
pounds were used for this purpose. The true importance of the canal craze is that it provided
coal to people at a reasonable price, that the factory worker could warm his family and have
money left over to buy other British goods, and that people could have cooked meals
occasionally.
There was also a considerable amount of public expenditure on docks and harbours. It was
averaging over a million pounds per decade in the second and third decades of the
nineteenth century. The transport innovations of the period 1750-1830 were capital-intensive,
meaning that they required a relatively high input of capital per unit of output produced.
An efficient market requires an efficient transportation system. There must be a rapid and
free flow of information as well as things for an economy to prosper. It is this freedom of
communication that keeps prices down and facilitates the rapid spread of cost-reducing
innovations.
2.1.5
The Cotton Industry
The Cotton Industry was the first British industry to adopt labour-saving power-driven
machinery on a large scale and to produce for an international market. There is no doubt that
it became a model for other industries in the economy.
Textile manufacturers, more specifically woollen manufacture, constituted an important part
of the British national product for centuries. Sheep were very abundant on English pastures
and yielded a high-quality wool. During the 1760’s woollen goods had an export value of
about 5.5 million pounds per annum while the cotton sector had an export value of about
200,000 pounds.
The major textile inventions:
o
John Kay’s flying shuttle: introduced in the 1730’s and began to be adopted widely by
the cotton weavers in the 1750’s and 1760’s.
o
Paul’s carding machine, patented in 1748, and started being used generally in the
1760’s.
o
James Hargreaves’ spinning-jenny, invented in 1764 and patented in 1770.
o
Richard Arkwright’s water-frame, patented in 1769. It was the real onset of the
departure of domestic industry.
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Histoire économique
La Révolution industrielle
o
Samuel Crompton perfects the spinning mule in 1779.
o
Eli Whitney patents the cotton gin in 1793.
13
There was a large demand for textile products in the different world markets. There were
prizes being offered during the 1760’s for those who would increase the productivity of the
spinner and the quality of the yarn. It took three or four spinners to supply one weaver with
material by the traditional method, Kay’s fly-shuttle speeded up the weaver’s operations
creating an even more urgent need for improvements on the spinner. In 1770 Hargreaves’
patented the spinning-jenny which had immediate success. In its earliest form it contained
eight spindles, in the patented version of 1770 it had sixteen spindles, by 1784 the number
increased to eighty and by the end of the century the spinning-jennies could have up to one
hundred twenty spindles. A manufacturer of this era was quoted to have said, “From the year
1770 to 1788 a complete change had gradually effected in the spinning of yarns. That of
wool had disappeared altogether and that of linen was also nearly gone: cotton, cotton,
cotton was become the almost universal material for employment.
The invention that was the foundation of the revolution of the cotton industry was Arkwright’s
water-frame. The cotton cloth was much stronger creating a new product which was not a
linen-mixture. From the start, unlike the jenny, the waterframe was a factory machine. A few
years later Crompton’s mule combined the principles of the jenny with that of the waterframe
and produced a smoother and finer yarn. Between 1780 and 1800 there was an increase of
about eightfold in raw-cotton imports due to the faster methods of spinning and weaving. By
1812 one spinner could produce two hundred times what could have been produced before
the spinning-jenny. People began to crowd into town to work for the cotton industry and could
dedicate themselves fully to this job. The price of raw-cotton drastically decreased thanks to
Whitney-s ginning machine. The weaving section of the cotton industry didn't keep up with
the modernization of the other sections. It was not until 120’s to the 1840’s that the powerloom began to be introduced on a considerable scale.
The cotton industry accounted for four to five percent of the British national income in 1702
and by 1812 between seven and eight percent with 350,000 employees. By 1815 cotton
textiles accounted for forty percent of the value of British domestic exports and woollen
goods accounted for 18 percent. By 1830 it accounted for more than half the value of homeproduced exports. The price fell at a speed unprecedented in the history of manufacturing
industry, while quality rose. The new factory system did not immediately displace the old
domestic industry.
There are various hypotheses for why the cotton industry was so successful and developed
so rapidly. The domestic aspect of the cotton industry was a favourable factor. The tens of
thousands of little men who operated jennies and looms in extensions to their cottages
provided the industry with buildings and machinery which would have required major
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Histoire économique
La Révolution industrielle
14
investments by wealthy capitalists. The factors of production required for this type of industry
were abundant in Britain. There were a lot of weavers who needed jobs, and women and
children were part of the labour force. Since there were products similar to it already, it did
not have to create its own demand through changing tastes. The cotton industry being highly
localized, Lancashire being the home for the cotton industry, was favourable to it. Britain had
a monopoly of the cotton industry since nobody could compete with the low prices and high
quality.
2.1.6
The Iron Industry
The iron industry was the other major industry that was revolutionized in the last quarter of
the eighteenth century. It provided cheaply and abundantly the commodity, more than any
other single material except coal, modern industry was to depend for its essential equipment.
The iron industry was capitalistically organized so the structure did not change as it changed
in the cotton industry.
The iron industry in the first half of the eighteenth century was scattered, migratory, and
irregular in operation and most probably declining. The reason for the declining or stagnation
of the industry is the problems the industry faced with raw-materials. Iron-ore resources were
of very poor quality and the charcoal, the main fuel, was being exhausted. There were some
innovations but none solved the basic problems of the forging branch of the iron industry, the
branch, which produced bars intended for wrought-iron or steel.
The turning point of the iron industry was in 1775 when Watt’s steam engine made it possible
to apply increased power for blowing the blast furnace and mechanical power for forging.
The first steam-engine to be applied for purposes other than pumping water was installed at
the factory of John Wilkinson, the iron-master. The iron industry benefited immensely from
another invention. Henry Cort in 1783 patented a puddling and rolling process, which allowed
the large-scale production of bar-iron with coal-fuel, that it was possible to produce wroughtiron, at a price and quality which effectively killed the charcoal industry for all purposes
except high-grade steel. The Cort method was very important because British bar-iron was
cheaper because it used coal fuel instead of charcoal, it made native pig-iron as good as the
Swedish products, and consolidated the different processes (i.e. puddling, which is melting
and stirring, hammering and rolling).
By the first decade of the nineteenth century, the output of British pig-iron was at over a
million tons per annum while in 1760 it was 30,000 tons. It generated about six percent of
British national income in the first decade of the nineteenth century compared to one to two
percent in the 1760’s. Britain-s share of the world output of pig-iron grew from 19 percent in
1800 to 40 percent in 1820 and to 52 percent in 1840. Output increased radically after the
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Histoire économique
La Révolution industrielle
15
1780’s breakthroughs, during wartime there was a huge demand for iron products followed
by a depression, and then iron began to be used in increasing quantities to build bridges,
buildings, machinery, canal boats, water pipes, etc. The sector that demanded the most from
the iron industry was the railways. In the first quarter of the nineteenth century iron-railway
construction was not negligible, but was limited to small-scale localized railroads. During the
first 20 years of the nineteenth century nearly 200 or railroad travel was accessible to the
public and by 1847 there were 6500 miles of railroad being constructed. By the 1850’s the
skeleton of the British railroad was already laid down.
2.2 Préconditions à la révolution industrielle
L'étude des préconditions à la révolution industrielle a mobilisé beaucoup d'énergie de la part
d'économistes et d'historiens avides de trouver la "formule magique" permettant
d’industrialiser l'économie d'un pays à prédominance "agricole" . Pour ne citer que les plus
célèbres, P. Bairoch7 et W. Rostow8 cherchent à résoudre les problèmes de croissance et de
développements que rencontrent les pays sous-développés en se référant au "démarrage"
que connut la Grande-Bretagne à la fin du XVIIIème siècle.
Dans cette partie, nous allons revenir de manière plus précise sur quelques secteurs déjà
abordés précédemment pour essayer de rechercher de manière plus précise les causes de
la révolution industrielle. Il est important de préciser que malgré la présence d’éléments
décisifs tels que la sidérurgie, l'agriculture, la technologie, la multiplications des transports
intérieurs, le commerce avec l'Outre-mer, la révolution du coton ou la hausse
démographique, que la révolution n'est pas issue d'un seul d’entre eux. Elle est plutôt née de
leur conjonction. Le processus est donc d'une extrême complexité, la révolution industrielle
ayant également engendré d'autres évolutions, qui se poursuivent encore à l'heure actuelle
(techniques, sociales). Pour que la Grande-Bretagne ait bénéficié de l'essor qu'on lui connut
à cette époque, il aurait fallu qu'elle se construise, dans le court terme comme dans le long
terme, les inputs entraînant les outputs. Toutes ces données s'imbriquent : il faut donc
distinguer pour expliquer.
Cinquante ans avant la RI eut lieu en Grande-Bretagne une révolution agricole d'envergure.
Pour P. Bairoch, elle est le facteur clé qui va permettre par la suite le démarrage de la RI,
mais cette thèse ne fait pas l'unanimité. Ainsi, Habakkuk9 définit son rôle ainsi :
"l'augmentation de la production agricole ne doit pas être regardée comme une condition
préalable de la croissance et c'est pour cela qu'elle a accompagné plutôt que précédé
7
"Révolution industrielle et sous-développement"
"The stages of economics growth"
9
cité par Bairoch.
8
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Histoire économique
16
La Révolution industrielle
l'accélération de la croissance". Nous allons présenter rapidement ce que fût cette révolution
avant de nous étendre sur ses relations avec la RI.
Comme pour la RI, la Grande-Bretagne a joué un rôle pilote dans la révolution agricole. La
tendance de fond de cette révolution fût de remplacer la vision classique d'une agriculture de
subsistance par une imprégnation plus capitaliste. "Pour les partisans de l'agriculture
nouvelle, il était nécessaire, afin d'accroître les rendements agricoles, d'engager dans
l'agriculture de gros capitaux"10. Les maîtres mots du secteur deviennent ainsi rendement
d'échelle croissants, productivité et nouvelles techniques de production. Enumérons
brièvement les principaux progrès : élimination de la jachère, utilisation d'engrais,
augmentation des surfaces cultivées, développement de l'élevage, extension de l'usage du
cheval, amélioration de l'outillage, accélération des enclosures acts (privatisation des
pâturages communautaires)
Moyennes annuelles du commerce extérieur de blé et
de farines de l'Angleterre
(1.000 quarters)
16
97
17
00
17
10
17
20
17
30
17
40
17
50
17
60
17
70
17
80
17
90
18
00
18
10
18
20
18
30
2000
1500
1000
500
0
-500
-1000
-1500
-2000
Exportations
Importations
Solde
Figure 3: Moyennes annuels du commerce extérieur de blé et de farines d'Angleterre 11
Intéressons-nous maintenant au lien de causalité et aux interactions entre la révolution
industrielle (RI) et la révolution agricole (RA). D'abord en examinant le graphique ci-dessus,
nous pouvons identifier la période de la RA en analysant le niveau des exportations de blé,
qui connaissent une première augmentation aux alentours de 1700, puis une hausse plus
marquée dès 1720. Ces augmentations indiquent que les progrès effectués à ces périodes
permirent l'apparition d'un surplus agricole et son écoulement sur les marchés étrangers.
Pour la RI, les chiffres sont explicites. Son début (1760) correspond à une forte
augmentation des importations de blé et à une chute des exportations. Le solde qui devient
10
11
Iogna-Prat S. & Simond F.
Source: Bairoch "Révolution industrielle et sous-développement".
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Histoire économique
17
La Révolution industrielle
fortement négatif par la suite linvite à penser que la Grande-Bretagne, forte de sa rapide
croissance industrielle recentre son activité sur les produits manufacturiers, dont la valeur
ajoutée est nettement supérieure à celle de la production agricole. En se basant
essentiellement sur la thèse de Bairoch, fervent défenseur de la RA comme facteur essentiel
à la RI, on peut identifier deux secteurs industriels clés de la RI dont la RA a stimulé le
développement: l'industrie textile et la sidérurgie. Comme nous pouvons le voir sur le
graphique ci-dessous, la consommation de fer augmente de près de 70 % avant même le
début de la révolution industrielle.
Evaluation de la production, Importations, Exportations et
Consommation de fer brut en Angleterre
mil. tonnes
2500
2000
1500
1500
1000
900
560
500
0
38
1720
65
50
1740
1760
Production
110
1788
165
1796
Importations
565
185
1806 1825
1830
Exportations
1840
1850
1870
Consommation
Figure 4: Importations, exportations et consommation de fer en Angleterre12
De plus ni le chemin de fer (qui n'existait pas encore à cette époque), ni la guerre, ni
l'industrie navale (qui n'enregistre qu'une modique augmentation de 15% pendant ce laps de
temps), ne permettent d'expliquer ceci. Bairoch en conclut que cette évolution est une
conséquence directe de la RA et l'explique par quatre facteurs: une usure plus rapide de
l'outillage, une amélioration de l'outillage par le remplacement du bois par le fer, l'apparition
d'outillage nouveau et l'augmentation du nombre de chevaux dans l'agriculture (ferrage).
Dans un premier temps, cette augmentation de la demande provoqua un goulot
d'étranglement du côté de l'offre, forçant à l'importation et à l'innovation 13. Mais peu à peu,
cette poussée de la part du secteur agricole força l'industrie sidérurgique à s'améliorer,
induisant d'autres innovations dans des domaines différents mais non moins importants de
l'économie anglaise (transport maritime, industrie des machines,etc.).
12
13
Source: Bairoch, op. cit.
Plus de précision sous le chapitre "Avantages géographiques » du présent papier.
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Histoire économique
La Révolution industrielle
18
L'explication de Bairoch concernant l'implication de la RA dans l'essor de l'industrie textile
nous paraît plus discutable. L'idée principale est la suivante : les paysans ayant désormais
assez de ressources pour ne pas penser qu'à leur subsistance, ils utilisent ce qu'il leur reste
pour l'achat d'autres biens de consommation. "Et quoi de plus naturel, dans un pays
souffrant d'un climat passablement venteux et humide, que d'allouer une grande partie des
ressources à l'achat de nouveaux vêtements"14. Ensuite, la demande étant confrontée à une
offre rigide, une évolution semblable au secteur métallurgique permet à l'industrie britannique
de s'améliorer et de se retrouver au sommet mondial du secteur.
Nous pouvons également mentionner à ce stade le phénomène de proto-industrialisation, qui
désigne le fait qu'un paysan s'adonne à une activité annexe durant ses heures creuses, afin
d'accroître son revenu. Ce phénomène est à considérer à l'échelle régionale (car tributaire
des facteurs tels que le relief et les voies marchandes) et combine trois aspects principaux:
l'apparition d'une industrie rurale destinée à un marché en dehors de la région, la
participation de populations paysannes qui en retirent des ressources supplémentaires,
l'existence d'une agriculture commercialisée. A titre d'exemple nous pouvons citer le
développement de l'horlogerie dans le massif jurassien, qui illustre le fait que la protoindustrialisation est un phénomène favorable mais non suffisant au "décollage" industriel, la
région n'ayant pas connu très tôt sa révolution industrielle.
2.3 Avantages géographiques
La situation géographique de la Grande-Bretagne, ainsi que la composition de son
environnement, bien que n'étant pas des facteurs sine qua non de la RI, ont grandement
contribué à l'ampleur du phénomène dans cette région. Nous allons donc examiner chacune
de ces spécificités afin d'en analyser l'influence plus en détail.
Pour commencer, nous retrouvons un argument qui se rapproche de celui de Diamond
lorsqu'il analyse les avantages qui pourraient être à l'origine de l'actuelle "supériorité"
européenne: les kilomètres de côte au kilomètre carré. Dans le cas de la Grande-Bretagne,
aucun endroit ne se trouve éloigné de plus de 120km de la côte la plus proche. On imagine
les facilités pour le transport et l'écoulement des marchandises qu'entraîne cette particularité
géographique, le commerce maritime étant de loin le plus pratique et le moins cher.
La situation insulaire doublée d'une puissance maritime sans pareil dès 1700 ont
certainement protégé la Grande-Bretagne de la convoitise de ces voisins. En effet, dès 1700,
la supériorité maritime anglaise sur les autres nations fut éclatante. Cette situation lui permit
d'assurer sa sécurité nationale et de mener à bien ses objectifs en participant à des guerres
14
Iogna-Prat S. & Simond F.
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Histoire économique
La Révolution industrielle
19
pour des motifs commerciaux. Elle lui permit également d’éviter pour l’essentiel les
destructions et le bain de sang que fut l'aventure napoléonienne.
Deuxièmement, la Grande-Bretagne possède une grande superficie de terres agricoles, la
superficie totale du pays étant de 244 880 km2. Cela lui permit notamment d'utiliser
pleinement les avantages des nouvelles techniques agricoles et de procéder efficacement au
regroupement des domaines grâce, notamment, à une contribution de l'état. Au contraire, les
Pays-Bas, à l'époque également à la pointe du progrès, qui ne possèdent que 37 330 km 2
(chiffre actuel, celui de la période considéré étant sans doute encore inférieur) à disposition,
ce qui a dû se révéler trop étroit et ne leur permit pas d'accroître la productivité, malgré de
bonnes techniques agricoles.
Un autre argument de Diamond lorsqu'il essaie d'expliquer le développement de civilisations
et d'en déterminer les causes est celui du défi auquel ces civilisations ont dû faire face
initialement. Si l’on restreint l'analyse de Diamond au modèle anglais, on peut avancer
l’argument suivant pour expliquer l'essor rapide et l'abondance du charbon en GrandeBretagne au cours du XVIIIème siècle : la surexploitation des forêts au cours du XVIème siècle
entraîna une pénurie de bois dans la deuxième moitié de ce siècle (à titre de comparaison
30% de la superficie européenne était boisée contre seulement 4% en Grande-Bretagne).
Cette pénurie obligea les habitants à se tourner vers le charbon de terre (jusqu'à 1750, la
consommation de charbon à l'usage domestique pour le chauffage accapare la quasi-totalité
de la production). Ce phénomène constitua en soi une révolution énergétique, la population
anglaise étant obligée de ce tourner vers une énergie fossile, non renouvelable. Le secteur
métallurgie se tourna également vers cette source d'énergie dès 1709, avec la mise au point
du procédé de fabrication de la fonte au coke. Cette transition permit à la Grande-Bretagne
de résoudre le problème du goulet d'étranglement dans les produits métallurgiques et de
rompre sa dépendance envers la Suède et la Russie pour son approvisionnement. Les
innovations successives dans ce domaine entre les années 1709 et 1790 firent passer la
part de fonte produite dans des hauts-fourneaux utilisant le combustible charbon à 90% ne
laissant que 10% au bois. Les avantages principaux de ce "nouveau" combustible étaient
avant tout son prix à la mine et son faible coût de transport, ce qui le rendait supérieur au
bois dont le prix, suite à sa raréfaction, était soumis aux aléas de la conjoncture. Dès le
début de la révolution industrielle et jusqu'à l'apparition d'autres sources d'énergie au début
du XXème, l'économie anglaise, maîtresse du charbon, profita pleinement de la différence de
coût entre les deux sources d'énergies, et c'est sans doute une clé essentielle de la future
suprématie manufacturière et marchande qu'elle affirma peu à peu.
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Histoire économique
20
La Révolution industrielle
Production de charbon, Angleterre et Pays de Galle
(m illiers de tonnes anglaises)
180000
160000
140000
120000
100000
80000
60000
40000
20000
0
1550- 16801560 1690
1700
1750
1770
1780
1800
1829
1850
1880
1889
Figure 5: Production de charbon de l'Angleterre et du Pays de Galle15
Pour relever et donner une idée de l'importance que revêtit ce genre de facteurs, il suffit de
comparer la situation anglaise à celle de sa rivale principale. Le fait qu'en France, le potentiel
en bois fût nettement plus élevé ne contribua nullement à l'avantager. Ceci nourrit la
résistance au charbon, même lorsque son adoption devint inévitable pour des raisons
quantitatives. Au cours du XVIIIème, le développement de l'industrie et de sa consommation
en bois se heurta à la résistance des paysans soucieux de préserver leur combustible
indispensable pour passer l'hiver. Cette opposition donna naissance à de véritables
insurrections (notamment en 1731 et 1776) ainsi qu'à de nombreux procès qui entravèrent le
développement économique du pays. Il faut néanmoins préciser que ce phénomène n'est
pas uniquement le fruit d'une mauvaise volonté face à l'innovation de la part des Français. Il
faut le mettre en relation avec les spécificités du réseau de transports en France, qui rendait
les coûts de transport du charbon de la mine à son lieu de consommation nettement plus
élevé qu'en Angleterre. Une nouvelle fois, l'hypothèse que Diamond émet en insistant sur les
avantages d'une proportion élevée de côtes au km2 trouve ici une illustration : des ports
d'importance comme Rouen, Dunkerque ou Cherbourg préféraient acheter du charbon
anglais acheminé par voie maritime à moindre coût que le charbon produit sur le territoire
national ! Preuve en est l’évolution des exportations anglaises :
15
Source: Bairoch, op. cit.
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Histoire économique
21
La Révolution industrielle
Exportation de charbon, Angleterre et Pays de Galle
(m illiers de Winton Chaldrons soit ~1.3 tonnes anglaises)
300
250
200
150
100
50
0
1697
1700
1710
1720
1730
1740
1750
1760
1770
1780
1790
Figure 6: Exportations anglaises de charbon 16
3 Révolution ou tempête dans un verre d’eau ?
Dans ce chapitre, nous allons présenter la critique traditionnellement adressée à la vue
classique de la Révolution Industrielle. Dans un premier temps, nous nous baserons sur
différentes études considérées comme les références en la matière, notamment les écrits de
Crafts17 et Harley18. Ensuite, nous présenterons un argumentaire répondant à ce réquisitoire,
fondé sur une approche ricardienne de l'économie. Enfin, nous utiliserons nos maigres outils
statistiques, ainsi que des chiffre récemment révisés, pour justifier notre propre conclusion.
3.1 En général
Comme toute théorie, celle de la Révolution Industrielle est contestée. Les critiques
adressées ne nient pas les progrès faits dans la production industrielle, mais arguent que
ceux-ci ont eu un effet limité à quelques secteurs, notamment le coton et la métallurgie du
fer. Nous sommes familiers des querelles académiques, déchirant les chercheurs au travers
de textes virulents et prétendant à de meilleurs assises que les autres. Cette joute est saine
et permet souvent de faire avancer la recherche dans son ensemble. Pourtant, le cas de la
Révolution Industrielle tourne presque au règlement de compte à la John Wayne. La
multitude des textes publiés sur sujet déconcerte et il n’est pas facile d’apporter une
synthèse aux débats. Dans la partie qui va suivre, nous reprendrons la critique de Crafts19.
16
Source: Bairoch, op. cit.
N. F. R Crafts (1983), British Economic Growth, 1700-1831 : A Review of the Evidence, The Economic History Review,
Volume 36, Issue 2, pp. 177-199.
18 C. Knick Harley (1982), "British Industrialization Before 1841: the Journal of Economic History, Volume 42, Issue 2, pp. 267289.
19
N. F. R Crafts (1983), British Economic Growth, 1700-1831 : A Review of the Evidence, The Economic History Review,
Volume 36, Issue 2, pp. 177-199.
17
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Histoire économique
La Révolution industrielle
22
Précisons d’emblée que ce point de vue ne fait pas l’unanimité et que des auteurs dignes de
crédit, comme David Landes20, ne le partagent pas. Nous laissons donc au lecteur le soin de
juger par lui-même la validité des objections formulées ici.
Le grief fondamental adressé à la vue classique de la Révolution Industrielle porte sur les
chiffres utilisés. Comme nous allons le voir, les pondérations des différentes industries peut
conduire à des taux de croissance du produit intérieur brut nettement plus faibles que ceux
présentés traditionnellement. La révision de ces chiffres conduit à d’autres interprétations
des effets de cette révolution, notamment sur le niveau de vie des agents. Mais
commençons par le commencement et présentons le squelette du réquisitoire.
3.2 La critique de Crafts – pondération et interprétation
Si les populations occidentales souffrent de surcharge pondérale, l’analyse de la Révolution
Industrielle souffre de pondération. En effet, le grief émis à l’égard de la vue classique21 porte
avant tout sur l’utilisation de déflateurs inadéquats. Cet écueil est directement lié à la
pondération accordée aux différents secteurs de l’économie. Et c’est ici que le bât blesse.
Afin de mieux cerner les implications de ce problème, prenons un exemple simple.
L’économie anglaise est constituée de deux secteurs : les biscuits à la menthe et la bière.
Entre deux dates données, le taux de croissance de la production de biscuits est de 30%
alors que le brassage ne progresse que de 5%. Si l’on suppose que les biscuits constituent
80% du PIB de l’Angleterre, alors la croissance du pays durant le laps considéré sera de
25%. Mais soudain, d’autres sources nous font réviser nos pondérations et les biscuits
passent à 60% du PIB seulement. La croissance sera alors de 20% seulement, soit une
différence de 20%. Ramenons cela à des taux de croissance aux alentours de 5% et la
fragilité des conclusions des uns comme des autres apparaît clairement.
Un autre problème statistique est le changement des pondérations. Dans l’exemple
précédent, nous avons supposé que la part des deux industries restait constante durant la
période. Or, les chiffres disponibles pour le 18e siècle sont souvent donnés par décennie et
comme nous parlons de révolution, il y a fort à parier que ces pondérations connurent des
bouleversements. Un moyen de contourner ce problème est d’utiliser des indices Paasche,
Laspeyres ou Fisher. Mais qui se souvient d’un de ses cours de statistiques sait que ces
méthodes ont des biais, soit vers le futur, soit vers le passé.
Le tableau suivant montre clairement les divergences dans les estimations des différents
chercheurs:
20
Voir notamment David S. Landes (1998), Richesse et pauvreté des Nations, Albin Michel, p.258, note de bas de page 1 ou
« What Room for Accident in History » (1994), The Economic Historic Review, Volume 47, pp. 643 et suivantes.
21
Voir P. Deane et W. A. Cole (1962), « British Economic Growth, 1688-1959 », Cambridge.
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La Révolution industrielle
23
Tableau 1: Comparaison des estimations de la croissance dans l'industrie et le commerce 22
Quelles conclusions tirer de ces chiffres ? Selon Deane et Cole, la croissance dans ces deux
secteurs durant la période considérée comme étant celle de la Révolution Industrielle23 est
de près de 3% par année alors que l’estimation de Crafts tombe à 1.85, soit 1.6 fois moins.
Dès lors, l’hypothèse d’une croissance spectaculaire et généralisée de l’industrie est
sérieusement remise en cause et avec elle toute le paradigme d’un changement structurel à
cette période.
Présentons maintenant les comparaisons entre les estimations du revenu durant cette
période. Surpris vous étiez, surpris vous serez !
22
Source : Crafts, op. cit.
Y compris sur ce point, les chercheurs ne sont pas d’accord. Dans notre analyse statistique, nous considérerons la période
1760 à 1830, tel que le préconisent le Professeur Lambelet et Davis S. Landes.
23
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La Révolution industrielle
24
Tableau 2: Croissance du revenu national réel24
La considération la plus pessimiste Deane et Cole n’est que 2.86 supérieure à celle de
Crafts ! Pires encore sont les écarts au début du 19e siècle.
La principale différence se situe au niveau de la progression du secteur agricole. Les
estimations de Craft "nivellent" la progression proposée par les premiers chiffres de Deane et
Cole et par leurs révisions dans une moindre mesure. Son argument est le suivant: "si l’on
suppose que la consommation agricole a crû au même rythme que la population,
l’augmentation des revenus n’est pas explicable, à moins que les élasticités prix et revenu
soient nulles. Mais des estimations démentent cette absence de réactivité"25. L’estimation de
Crafts semble plus robuste sur ce point.
Un dernier aspect qu’il convient d’examiner est la progression de la consommation par tête.
En effet, on peut supposer que celle-ci est un bon estimateur de l'évolution du niveau de vie
des agents durant cette période et permet de juger de l’impact social de la Révolution
Industrielle.
24
25
Source : Crafts, op. cit.
Crafts, op. cit. p.188
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La Révolution industrielle
25
Tableau 3: Consommation réelle par tête26
L’écart est ici moins marqué même si toujours conséquent. C’est surtout sur le début du 18 e
siècle que les estimations diffèrent, période à laquelle les prix relatifs varièrent fortement.
Nous retombons donc sur notre problème de déflateurs. Mais changer des chiffres est une
chose, interpréter les conséquences de ces modifications en est une autre.
3.2.1
Révision des conclusions
Si les hypothèses de Crafts sont acceptées27, nous pouvons reformuler les principaux
aspects de la Révolution Industrielle. Le taux de croissance annuel de la production anglaise
fut de 1.32% (plutôt que 2.97) par année durant la période 1780-1801 et 1.97 entre 18011831 (3.06). L’économie dans son ensemble ne connut pas de décollage foudroyant durant
les derniers jours du 18e siècle. La productivité des facteurs ne crût que de 0.15% par année
de plus que lors de la période 1700-60 alors que la consommation par tête augmenta de 4%
à peine en vingt ans. Certes, mais nous n’avons toujours pas testé la validité de l’hypothèse
nulle !
3.3 Analyse statistique du produit intérieur but
Dans les sections qui précèdent, nous vous avons présenté le débat classique sur la
Révolution Industrielle. La critique de Crafts et de Harley peut sembler tatillonne, mais elle
eut le mérite de remettre en cause ce dogme ancré dans les idées depuis plusieurs
générations. Pour preuve, la déclaration de Landes: "J'avoue que la première fois que j'ai lu
cet article [n.d.r. celui de Crafts], je ne savais pas si j'avais affaire à une boutade ou à une
élucubration trop intelligente d'un licencié ou post-doctorant. Depuis, j'ai pris cette étude bien
plus au sérieux, notamment en raison de l'influence qu'elle eut sur d'autres"28. Dans cette
26
Source : Crafts, op. cit.
Nous travaillons donc ici sous H0 : Crafts a raison.
28
Davis S. Landes (1994), « What Room for Accident in History », The Economic Historic Review, Volume 47, pp. 643.
27
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Histoire économique
La Révolution industrielle
26
section, nous allons allier nos connaissances statistiques aux chiffres récents de Clark29 afin
d’apporter quelques conclusions personnelles.
3.3.1
Le produit intérieur brut per capita
Les méthodes de Clark comportent des hypothèses, comme toute procédure visant à
estimer des données lacunaires. Pourtant, notre jeunesse et notre vision positive de
l'évolution nous pousse à accorder plus de crédit aux données récentes qu'aux anciennes.
Ceci est un parti-pris, certes, mais l'évolution des moyens d'estimation et surtout les
comparaisons auxquelles s'adonne Clark nous permettent de soutenir notre hypothèse.
Commençons par observer l'évolution du taux de croissance du PIB entre 1260 et 1870:
Taux de croissance du PIB réel per capita en Angleterre entre 1260 et 1870
0.0300000
0.0200000
Taux annuel
0.0100000
-
-0.0100000
-0.0200000
12
70
12
90
13
10
13
30
13
50
13
70
13
90
14
10
14
30
14
50
14
70
14
90
15
10
15
30
15
50
15
70
15
90
16
10
16
30
16
50
16
70
16
90
17
10
17
30
17
50
17
70
17
90
18
10
18
30
18
50
-0.0300000
Figure 7: Taux de croissance du PIB réel anglais entre 1260 et 1870 30
La fin du 18e siècle ne semble pas différente des années précédentes, au contraire. Le 17e
siècle paraît plus prospère malgré les "mauvais temps des Stuart"(1603-1649)31 et la guerre
civile (1631-1649). Ces considérations corroborent bien celle émises par Clark. Ces
remarques semblent confirmées par le lissage de la série32. Grâce à celui-ci, les cycles à
haute fréquence (courts) sont éliminés pour ne laisser que la tendance générale. Jusqu'au
début du 17e siècle, les ondulations sont de plus grande ampleur, aussi bien positivement
29
G. Clark (2001), "The Secret History of the Industrial Revolution", Department of Economics, UCD.
Source: Clark, op. cit.
31
Expression reprise de Clark in op. cit.
32
filtre Hodrick-Prescott.
30
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Histoire économique
La Révolution industrielle
27
que négativement. Ce qui semble changer à partir du 18e, c'est la zone d'ondulation qui reste
positive durant plus de 100 ans. Pourtant ce phénomène prend sa source non pas en 1760
mais 70 ans plus tôt.
Comparons maintenant ces estimations à celles des auteurs précédemment cités:
Figure 8: comparaison des différentes séries
Ce graphique montre la clef de tous les débats, du moins à notre avis. En effet, la principale
différence d'estimation se situe au début de la période. Clark commence avec un PIB per
capita deux fois supérieur à celui Deane et Cole. Pas étonnant ensuite que les uns notent
une rupture, alors que les autres concluent à une continuité.
3.3.2
Test statistique d'une rupture structurelle
Nous allons maintenant tester deux choses: d'abord, s'il y a rupture de tendance autour de
1770, puis si la série des taux de croissance annuels est stable ou possède une racine
unitaire.
Le miracle informatique nous permet d'effectuer ces tests rapidement. Dans un premier
temps, nous régressons le PIB per capita sur une tendance linéaire (période 1600 à 1869).
Nous trouvons un coefficient de 0.14 (écart-type 0.00062) pour le temps. Ceci signifie que
chaque année, notre indice augmente de 0.14 points, pour se retrouver à 100 en 1869. Le
R2 s'élève 0.85, ce qui est satisfaisant. Toutefois, la prudence est de mise pour deux
raisons: premièrement, cette mesure est toujours assez élevée lorsqu'on analyse des séries
temporelles. Deuxièmement, les résidus ne semblent pas propres et un problème de variable
omise est certainement présent (il serait étonnant que le temps à lui seul explique la
production durant cette période). Enfin, notons une valeur épouvantable du Durbin-Watson,
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Histoire économique
28
La Révolution industrielle
qui se hisse péniblement 0.08. Pourtant, ceci ne doit pas nous alarmer puisque pour pouvoir
utiliser Eviews, nous sommes passés d'une série par décennie à une série annuelle, en
supposant le PIB constant durant la décennie. Il est donc naturel que les résidus de deux
années consécutives soient fortement corrélés33.
Cette estimation rudimentaire donne un résultat satisfaisant au vu du R2. Cependant, la
prudence est de mise et les séries temporelles donnent toujours de bons résultats à ce
niveau.
En comparant les valeurs réelles et estimées, on découvre un élément très parlant venant
appuyer l'hypothèse d'un décollage plus précoce :
100
90
80
15
70
10
60
5
50
0
-5
-10
1600
1650
1700
Residual
1750
Actual
1800
1850
Fitted
On voit que la droite estimée et supérieure aux vraies valeurs durant plus de cinquante ans
et ce durant la période supposée de la Révolution Industrielle. C'est donc au moment où l'on
devrait sous-estimer la production que nous sommes trop optimistes.
Une brève observation des résidus montre clairement qu'un facteur (au moins) est omis
durant cette période. Nous allons tenter d'y remédier en introduisant une variable muette
entre 1760 et 1830.
33
Pourtant, le problème n'est pas totalement résolu. En effet, une régression en utilisant les données pour 10 ans me donne
pas de meilleurs résultats.
Vincent Charpilloz - Julien Guyot – Andreas Fuster - Olivier Perrinjaquet
Histoire économique
29
La Révolution industrielle
110
100
90
80
70
60
10
50
5
0
-5
-10
1600
1650
1700
Residual
1750
Actual
1800
1850
Fitted
La variable muette "Révolution Industrielle" est significative à 1%34 et a un coefficient négatif
important. Cette rupture a eu influence fortement négative sur le PIB par tête. La rupture est
également confirmée par plusieurs tests de Chow appliqués aux différentes années35. Ces
maigres recherches semblent confirmer les conclusions de Clark à ce propos. En effet, ce
dernier postule que les principaux changements sont antérieurs à 1770 et que la période
1770-1820 est même caractérisée par un taux de croissance inférieur aux années
précédentes.
Ceci nous amène à tester la stationnarité des taux de croissance durant les mêmes deux
siècles. Ceci nous permettra de déterminer si ces coefficients sont stables durant cette
période ou si leur tendance est « explosive ». Pour ce faire, nous appliquons un test DickeyFuller dont l'hypothèse nulle est la non-stabilité d'une série. Nous rejetons cette hypothèse à
1%. La variable significative semble être la croissance de la décennie passée. Cet outil
statistique confirme une fois encore que la Révolution Industrielle s'apparente plutôt à
continuum qu'à une rupture abrupte.
Nos conclusions sont par conséquent similaires à celles de Clark. Rien d'étonnant
(et
heureusement) en somme, puisque nous avons utilisé les mêmes données. Nous allons les
résumer ici en quelques mots : premièrement, la croissance et la productivité durant la
Révolution Industrielle furent nettement inférieures à celles des estimations précédentes. Les
gains de productivité durant cette période sont surtout dus aux progrès du secteur textile.
Des taux de croissance modérés, en comparaison de ceux que nous connaissons, ne furent
atteints qu'à la fin du 19e. De plus, le produit intérieur par tête a crû à la même vitesse durant
la période des Stuart (1603-1649), la guerre civile et la Révolution Industrielle. Les
innovations de la Révolution Industrielle ne furent pas plus importantes que celles qui les
34
35
De plus, nous pouvons noter une forte augmentation du R2 qui passe à 0.92.
Un test Bai-Perron serait plus adapté, mais nous n'avons pas trouvé de détail à son sujet.
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Histoire économique
La Révolution industrielle
30
précédèrent mais des "accidents" démographiques et commerciaux ont multiplié leur
impact36.
Comme nous venons de le voir, la guerre des chiffres ne permet pas d’énoncer une vérité
incontestable. Toutes les hypothèses faites sont aussi justifiables que réfutables, sans que
l’on puisse apposer un CQFD à telle ou telle vision. C’est pourquoi nous avons jugé
important de conclure notre discussion par une étude se basant sur un modèle théorique
sous-jacent, nécessitant peu de chiffres, ou du moins peu de précision dans ceux-ci. Clé du
problème ? Peut-être pas, mais en tout cas argumentation intelligente et convaincante.
3.4 La critique de la critique ou quand Ricardo devient Salomon
David Landes critique fortement les « nouveaux » historiens de l’économie qui affirment que
la révolution industrielle anglaise ne fut rien de spectaculaire et que la plupart des secteurs
étaient en phase de stagnation pendant cette période. Selon lui, il n’y a aucune raison de
croire que les statistiques utilisées par ces chercheurs soient meilleures que les anciennes. Il
critique surtout la non prise en compte des changements de qualité des produits – pour les
chercheurs en question, le fer reste du fer, le coton du coton. Il conclut que « cela revient à
placer la charrue de l’histoire devant les bœufs, les résultats avant les données, l’imagination
avant l’expérience. Et c’est faux. »37
Par la suite, nous discuterons une étude conçue par Peter Temin du MIT, intitulée « Two
Views of the British Industrial Revolution ». L’idée de cette étude est la suivante : plutôt que
de se concentrer sur des séries de l’évolution de la productivité des facteurs dans différentes
industries (qui sont, comme évoqué plus haut, très difficiles à construire), l’auteur analyse les
données du commerce international de la Grande-Bretagne avec le reste du monde qui,
elles, sont disponibles.
Pour pouvoir décider quelle vue de la RI semble la plus juste, il utilise un modèle ricardien
des échanges. Comme on le sait, si un pays a un avantage comparatif dans la production
d'un bien, il devrait l’exporter. Dans le cas contraire, il l’importerait. Temin (en suivant Harley)
sépare l'économie en quatre groupes de biens pour son étude:
- les biens de l'industrie britannique "moderne" (coton, fer, etc.) pour lesquels tous les
auteurs sont d'accord que la Grande Bretagne a connu un fort avantage comparatif et les a
donc exportés ;
Certains comparent d’ailleurs l’invention du métier à tisser mécanique par exemple à celle de l’imprimerie. Les passage d’un
recopiage manuel à l’impression en série multiplia par un facteur extrêmement élevé la productivité de ce secteur. Pourtant, les
effets furent moindres en raison du peu d’importance des biens imprimés dans le produit intérieur des pays.
37
David S. Landes: „Richesse et pauvreté des nations“, p.260.
36
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Histoire économique
La Révolution industrielle
31
- les biens agricoles, où la Grande-Bretagne a un désavantage comparatif et les importe par
conséquent (bien que l'agriculture anglaise soit plus productive que l'agriculture
continentale) ; cf. Figure 3, page 16
- les services, qui ne sont pas échangés ;
- les autres produits manufacturés.
Et ce sont justement ces autres produits manufacturés qui permettent à l'auteur de voir
quelle vue de la RI est la plus justifiée. Selon l’approche classique, la productivité dans la
fabrication de ces autres biens a augmenté aussi, ce qui signifie qu'ils devraient être
exportés pendant toute la période de la RI (puisqu'ils étaient exportés avant). Cependant,
selon la vue de Crafts et Harley, ce secteur (ainsi que le secteur des services) n'a guère
connu d’augmentation de sa productivité, ce qui signifierait que l'avantage comparatif du
début de la période en question devrait s'effondrer au fil des années et que ces biens,
exportés au début de la période, devraient ne plus être échangés38 ou même importés. Les
estimations des croissances de la productivité des secteurs selon les différents auteurs sont
données dans le tableau suivant:
Tableau 4: Croissance de la productivité des différents secteurs de l'économie anglaise
Comme on le voit, les opinions des auteurs divergent surtout sur la croissance de la
productivité du secteur "résiduel" (autres produits manufacturés et services): Crafts et Harley
lui accordent une croissance de seulement 0.07 resp. 0.02 %/année. En conséquence : si le
secteur des autres biens manufacturés connaît une performance inférieure à l'agriculture sur
38
Ceci serait le cas si on prend en compte les coûts de transportation : si un pays n'a qu'une légère
avantage/désavantage, ce ne vaut pas la peine d'importer/exporter le bien en question
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Histoire économique
La Révolution industrielle
32
une période longue ce qui est le cas selon Crafts et Harley, ces biens devraient être importés
puisque les biens agricoles le sont.
Observons donc quelques dimensions du commerce britannique:
Tableau 5: Exportations britanniques du secteur manufacturé
La première ligne montre bien la position prédominante des biens manufacturés: leur part
dans les exportations totales varie entre 81 et 91%. De plus, l'importance croissante du coton
est évidente: son pourcentage dans les exportations de biens manufacturés passe de 18%
autour de 1795 à 49% 20 ans plus tard.
Mais l'information la plus importante pour nous est dans la dernière ligne du tableau: la part
du secteur "résiduel" dans les exportations des produits manufacturés. On voit qu'elle
connaît une diminution suite à l'importance croissante du coton; malgré tout, elle reste
positive.39 Après cette première vue qui favorise la vue "classique", l'auteur considère les
statistiques officielles de l'époque pour voir si les biens en question ont encore été exportés
vers la fin de la période de la RI, à savoir autour de 1850. Il trouve que les exportations du
secteur "résiduel" les plus importantes sont : les draps, outils ménagers et coutellerie,
articles en laiton et en cuivre, mercerie et produits en soie.40 Mais avant de conclure que ce
secteur n'a pas connu une croissance aussi basse que le prétendent Crafts et Harley, il faut
regarder les importations de ces biens: si celles-ci excèdent les exportations, la conclusion
changerait évidemment. Toutefois, ceci n'est pas le cas, à l'exception de la soie.
En conclusion et selon cette étude, il n'y a aucune indication permettant de dire que ces
biens n'ont plus été exportés à cause des progrès effectués dans l'industrie du cotton. Il
s'ensuit que la vue traditionnelle de la RI est plus adaptée que la nouvelle. Ou, selon Temin,
"Britain became the workshop of the world, not just the cotton factory of the world." 41
39
La question qu'on considère n'est pas "les exportations des autres produits manufacturés ont-elles diminué?" mais plutôt "estce que les autres produits manufacturés sont encore exportés?" = La Grande Bretagne a-t-elle gardé l’avantage comparatif
qu'elle avait avant la RI?
40
Temin énumère 33 produits du secteur résiduel qui ont été exportés en 1850
41
P. Temin (1997), "Two views...", p.80
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Histoire économique
La Révolution industrielle
3.4.1
33
Mais le débat n'est pas terminé
Harley et Crafts ont réagi à l'article de Temin en 2000. Ils ont publié un article où ils utilisent
un modèle d'équilibre général calculable (comme l'avait fait Harley avant) fondé sur des
rendements d’échelle décroissants dans le secteur de l’agriculture. Avec cette hypothèse, ils
arrivent à montrer que les données du commerce international de Temin ne seraient pas
incompatibles avec une stagnation du secteur résiduel. Leur thèse est "en gros" la suivante :
les importations de biens agricoles ont fortement augmenté à cause de la forte croissance
démographique et de la surface cultivable limitée (d’où les rendements d’échelle
décroissants). Pour financer ces importations, la Grande-Bretagne a exporté différents biens,
surtout du coton et du fer. Mais comme les volumes croissants ont mené à des chutes de
prix, les revenus des secteurs « modernisés » n’étaient pas suffisants. La Grande Bretagne
était obligée de continuer les exportations du secteur « non-modernisé » (selon
Harley&Crafts) bien qu’elle eût perdu son avantage comparatif. En plus, les « autres » biens
britanniques ont peut-être continué d’être exportés non pas en raison d’un avantage
comparatif quelconque, mais parce que les pays étrangers ne connaissaient pas de biens de
substitution. En plus, ils disent que même si Temin avait raison, cela ne changerait pas leur
vision des choses : les autres biens manufacturés ne représentaient que 9% du PIB tandis
que les services représentaient 41%. Le « test » de Temin ne peut pas être fait pour les
services car ils ne sont pas échangés. Donc même si le secteur des autres biens
manufacturés avait connu une croissance de sa productivité, il se peut que l’économie en
dehors du secteur « modernisé » et de l’agriculture n’ait connu qu’une croissance minime (cf.
Tableau 4 – « All others »).
Dans une réponse à cet article, Temin argumente que l’hypothèse des rendements d’échelle
décroissants dans l’agriculture n’est pas compatible avec l’évidence historique : selon la
plupart des estimations, l’offre de surface cultivable en Grande-Bretagne a augmenté de 1525% entre 1800 et 1850. Donc, selon lui, l’argument de Harley&Crafts ne tient pas : ce n’est
pas à cause des rendements décroissants que la Grande Bretagne a importé des produits
agricoles, mais à cause du désavantage comparatif (comme évoqué à la page précédente).
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Histoire économique
La Révolution industrielle
34
4 Conclusion
Tout au long de ce travail, nous nous sommes efforcés de vous apporter les clés de la
compréhension de ce phénomène que l'on croit si bien connaître. L'enchaînement des
inventions dans le secteur industriel ainsi que la mutation de la société anglaise durant cette
période sont indéniables. Pourtant, l'étude de chiffres ne laisse pas apparaître de rupture
abrupte et le mot « Révolution42 » semble devoir être abandonné.
Vous apporter une conclusion unilatérale serait forfanterie de notre part. Pour nous, la
Révolution Industrielle comporte deux volets. D'un côté, la description qualitative ne laisse
aucun doute sur l'existence du phénomène. La machine à vapeur, la "Jenny" et le coke
existent bel et bien ! D'un autre côté, l'analyse des données ne nous permet pas de trancher.
Que retenir donc de la Révolution Industrielle? Avant tout son formidable impact sur le
monde entier. L'industrialisation a radicalement changé les modes de production et les
mentalités. Le processus fut certes plus linéaire que ce que l'on a longtemps pu penser.
Pourtant, notre société actuelle porte encore les traces, parfois douloureuses (pensez aux
terrils du Nord de la France), des inventions techniques du 17e siècle.
42
Se référer à David. S. Landes in « Richesse et pauvreté des Nations » pour une discussion plus « ésotérique » de cette
querelle linguistique.
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Histoire économique
La Révolution industrielle
35
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Temin, Peter (2000), A Response to Harley and Crafts, Journal of Economic History, Vol.60,
No.3, pp. 842-846
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Histoire économique
La Révolution industrielle
36
6 Tables des illustrations et tableaux
Tableau 1: Comparaison des estimations de la croissance dans l'industrie et le commerce .23
Tableau 2: Croissance du revenu national réel .....................................................................24
Tableau 3: Consommation réelle par tête .............................................................................25
Tableau 4: Croissance de la productivité des différents secteurs de l'économie anglaise .....31
Tableau 5: Exportations britanniques du secteur manufacturé .............................................32
Figure 1: Structure de l'emploi en Angleterre, aux Pays-Bas et aux EU entre 1820 et 1890 .. 5
Figure 2: Population anglaise entre 17e et 18e siècles .......................................................... 6
Figure 3: Moyennes annuels du commerce extérieur de blé et de farines d'Angleterre ........16
Figure 4: Importations, exportations et consommation de fer en Angleterre .........................17
Figure 5: Production de charbon de l'Angleterre et du Pays de Galle ...................................20
Figure 6: Exportations anglaises de charbon ........................................................................21
Figure 7: Taux de croissance du PIB réel anglais entre 1260 et 1870 ..................................26
Figure 8: comparaison des différentes séries .......................................................................27
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Histoire économique
37
La Révolution industrielle
7 Annex: Major Inventions and Innovation during the IR.
1712: The Newcomen steam engine. The Newcomen Steam engine, the predecessor to
the Watt engine, is one of the most interesting pieces of technology developed during the
1700's..
1733: John Kay invents the flying shuttle. For centuries handloom weaving had been
carried out on the basis of the shuttle bearing the yarn being passed slowly and awkwardly
from one hand to the other. In 1733 John Kay patented his flying shuttle that dramatically
increased the speed of this process..
1759 : The first Canal Act is passed by the British Parliament leading to the construction of
a nationwide network of canals for the transport of industrial supplies and finished goods.
1777 Grand Trunk Canal is opened establishing a cross-England route connecting the
Mersey and Trent rivers and connecting the industrial midlands to the ports of Bristol and
Liverpool.
1789 Thames-Severn Canal links London with Bristol.
1764: James Hargreaves invents the spinning jenny.
1769: Richard Arkwright patents the water frame
1769: James Watt patents a series of improvements on the Newcomen engine making
it more efficient.
1779: Samuel Crompton perfects the spinning mule.
1783-4 Henry Cort took out patents for the processes he had developed which
improved the quality of bar iron.
1785: Edmund Cartwright patents a power loom.
1793: Eli Whitney patenets the cotton gin.
1807: Robert Fulton begins steamboat service on the Hudson River.
1830: George Stephenson begins rail service between Liverpool and London.
Number of patents sealed in each decades
18
30
18
10
17
90
17
70
17
50
17
30
17
10
16
90
16
70
16
50
16
30
2000
1800
1600
1400
1200
1000
800
600
400
200
0
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