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Maîtrise des Procédés en vue d’améliorer la qualité et la sécurité des aliments, Utilisation des OGM,
Analyse des risques en agroalimentaire.Ouagadougou, 8-11 Novembre 2005.
LES GRAINES DE HIBISCUS SABDARIFFA L.
FERMENTEES : UN CONDIMENT OUEST AFRICAIN,
RICHE EN PROTEINES ; POTENTIEL VEHICULE POUR
LA FORTIFICATION EN FER.
Marcel D. Bengaly *, Augustin B. Bereé, Alfred S. Traoré.
Centre de Recherche en Sciences Biologiques, Alimentaires et Nutritionnelles (CRSBAN) /UFR-SVT,
Université de Ouagadougou.03 BP 7131 Ouagadougou 03, Burkina Faso.
*Auteur correspondant : [email protected]
Mots Clés : Roselle ; Hibiscus ; fermentation ; Bi-Kalga ; protéines ; fer.
1. RESUME
Le Bi-Kalga est un condiment des sauces obtenu par fermentation naturelle des
graines de roselle (Hibiscus sabdariffa). Le procédé traditionnel de préparation consiste
à faire bouillir les graines de roselle pendant 10 heures environ, avant de les placer dans
un récipient hermétiquement fermé pour une fermentation spontanée de 72 heures.
L’analyse de la composition des graines et du produit fermenté montre un relèvement
des taux de protéines de 0,5%, tandis que les taux de glucides (25-30%) sont réduits
d’environ 10%. Le produit fermenté renferme 28-37% de protéines ainsi que les 9
aminoacides essentiels. L’élément minéral principal du Bi-Kalga est le potassium (3 %).
Il renferme très peu de fer (0,02%).
Trois Bacillus et un Staphylococcus sont couramment impliquées dans la fermentation
du Bi-Kalga. Deux Bacillus sont impliquées dans la fermentation initiale caractérisée
par l’excrétion d’exopolysaccharides et lipopeptides. La souche de Staphylococcus est
responsable de la genèse d’arômes spécifiques. L’excrétion de lipopeptides peut
expliquer l’utilisation de ce condiment comme désinfectant en médecine traditionnelle.
Le Bi-Kalga obtenu par fermentation contrôlé avec les 4 souches a une bonne aptitude à
déclencher la fermentation ; et peut de ce fait être utilisé comme un starter de faible
coût. L’ajout du sulfate de fer à 1000 ppm pendant la fermentation, précisément avant la
maturation n’affecte ni la croissance des bactéries fermentaires ni les qualités
organoleptiques du produit fini.
2. INTRODUCTION
Les malnutritions protéino-énergétiques et les carences en micronutriments
demeurent des problèmes de santé publiques dans la plupart des pays en développement
comme le Burkina où le taux d’anémie chez les femmes est estimé à 54% [1]. Le
principal facteur limitant l’accès aux aliments est la pauvreté des nations et des
individus. Aussi, les stratégies d’interventions doivent prendre en considération la
double nécessité d’équilibrer les rations par l’apport d’aliments économiquement
accessibles, et riches en protéines et micronutriments. Dans le contexte burkinabè, les
aliments végétaux sont les plus accessibles ; il se pose alors la question de
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biodisponibilité. Malheureusement, ni le disponible alimentaire, ni la performance des
animaux dans les pays sahéliens n’autorisent la bioconversion par la voie animale [2].
D’où l’intérêt de techniques culinaires simples et peu onoreuses comme la fermentation,
qui met à profit le métabolisme d’une véritable "machinerie" microbienne pour une
bioconversion des substrats végétaux.
C’est le cas de la fermentation des graines de Roselle (Hibiscus sabdariffa) qui permet
d’obtenir un condiment des sauces connu en Afrique de l’Ouest sous le nom de BiKalga au Burkina Faso, Datou au Mali, Dawadawa Botso ou Mari Mi au Niger….
En effet, la fermentation des graines de Roselle qui sont riches en protéines (25-30%)
[3] est un procédé pertinent pour l’obtention de substituts des viandes. De plus, ce
condiment traditionnellement utilisé dans le traitement des infections (vers,
diarrhées…), a des caractéristiques organoleptiques (goût, odeur et couleur) prononcés
qui autorisent sont utilisation comme aliment véhicule pour la fortification.
L’objectif de cette étude était de maîtriser et améliorer les techniques traditionnelles de
préparation de cette potentielle source de protéines pour l’alimentation humaine. Ainsi,
les procédés de préparation traditionnels ont été suivis, des échantillons prélevés et
analysés pour leur composition. Les microorganismes impliqués dans la fermentation
ont été isolés et caractérisés et de essais de fermentation et fortification au sulfate de fer
conduits.
3. MATERIEL ET METHODES
Les procédés traditionnels de fermentation du Bi-Kalga ont été suivi chez quatre
groupes ethniques (Bissa, Dafing, Mossi, Samo) ; et 18 échantillons de Bi-Kalga séché
ont été collectés pour analyse. Douze échantillons ainsi que les graines ayant servi à leur
production ont été collectés juste après fermentation.
La composition en macronutriments (protéines, glucides, lipides) a été déterminée selon
les méthodes AOCS [4] ; la composition en aminoacides par chromatographie d'échange
d'ions et les sels minéraux (Ca, Mg, Na, K, Fe) par spectrophotométrie d’absorption
atomique [4].
Les microorganismes impliqués dans la fermentation ont été isolés sur milieu gélosé
PCA à partir des échantillons collectés après fermentation. Les principales souches ont
été caractérisés par des tests morphologiques et métaboliques ; et utilisées dans des
essais de fermentation contrôlés. Le produit obtenu est utilisé comme "starter" pour des
essais de fermentation semi contrôlés avec fortification au sulfate de fer. La qualité
organoleptique des produits obtenus a été évaluée par un test A.O.S.T (Aspect, Odeur,
Saveurs, Texture) de type discriminatif [5]
4. RESULTATS ET DISCUSSION
4.1. Procédés traditionnels de fermentation et composition du Bi-Kalga
4.1.1 Procédés traditionnels de fermentation :
Au cours des procédés traditionnels de préparation du Bi-Kalga, les graines de roselle
dépelliculées par pilage sont mises à cuir pendant 10 heures environ en milieu potassé
(pH 8). Après cuisson, elles sont mises à fermenter pendant 72 heures dans des
récipients hermétiquement fermés. Les graines fermentées sont cuites à la vapeur,
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broyées et séchées pour obtenir le Bi-Kalga. Les procédés sont assez similaires chez ces
quatre groupes ethniques. La singularité des procédés appliqués chez les Dafing est le
broyage des graines avant la fermentation.
4.1.2 Composition du Bi-Kalga :
Le Bi-Kalga a une teneur moyenne en protéines de 35% (Tableau 1.) et renferme les 9
aminoacides essentiels. Il peut donc être considéré comme une source de protéines pour
l’alimentation humaine au même titre que le condiment obtenu par fermentation des
graines de Parkia biglobosa connu sous le nom de Soumbala, Iru ou Dawadawa [6].
Tableau 1. : Composition biochimique des échantillons de Bi-Kalga (graines de H.
sabdariffa fermentées) préparés selon les techniques traditionnelles Bissa, Dafing,
Mossi et Samo.
Bi-Kalga
Type Bissa (n=4)
Eau*
(%)
Cendres** Protéines** Lipides** Glucides**
(%)
(%)
(%)
(%)
10,9 ± 1,3 12,7 ± 0,4
34,4 ± 2,0 19,7 ± 1,2 17,9 ± 2,2
Type Dafing (n=4) 11,6 ± 1,6 9,6 ± 1,2
34,6 ± 2,6 20,0 ± 1,0 18,4 ± 2,7
Type Mossi (n=6) 10,6 ± 1,1 10,3 ± 1,7
34,0 ± 3,1 20,2 ± 1,2 18,5 ± 2,5
Type Samo (n=6)
33,0 ± 2,4 20,8 ± 1,0 19,1 ± 1,9
9,5 ± 1,8
9,2 ± 1,3
n = nombre échantillons ; * = % poids total ± déviation standard ; ** = % matières sèches ± déviation
standard
Les échantillons de graines de H. sabdariffa prélevés renferment en moyenne : 30% de
protéines, 20 % de lipides, 27 % de glucides et 10 % de sels minéraux. Une
comparaison avec la composition du produit fermenté montre que la fermentation
améliore les teneurs en protéines de l’ordre de 5% au dépend des glucides dont les
teneurs baisse de l’ordre de 10%.
Les taux de lipides ne subissent aucune évolution significative. Cela n’exclut pas
toutefois des changements des profils en acides gras [6]. Le principal sel minéral du BiKalga, est le potassium (3 %) qui est ajouté au cours de la préparation (Tableau 2). Il
renferme en outre du sodium (1%), magnésium (0,8%), calcium (0,6%)... Il est pauvre
en fer (0,02%).
4.2. Microorganismes fermentaires et essais de fermentation
4.2.1 Flore de fermentation
Trois Bacillus et un Staphylococcus ont été couramment isolées sur le Bi-Kalga collecté
juste après la fermentation ; et ont été assimilées à la flore de fermentation. Deux
Bacillus sont impliquées dans la fermentation initiale qui dure en moyenne 48 heures.
La première se caractérise par l’excrétion d’exopolysaccharides essentiels dans la
maturation du Bi-Kalga qui nécessite des conditions semi anaérobie. La seconde excrète
des lipopeptides aptes à inhiber la croissance Saccharomyces cerevisiaea. Ce
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phénomène d’antibiose peut expliquer l’élimination des levures sur le milieu de
fermentation, ainsi que l’utilisation du Bi-Kalga comme désinfectant par la médecine
traditionnelle au Burkina
Tableau 2. : Teneurs en cations des échantillons de Bi-Kalga (graines de H. sabdariffa
fermentées) préparés selon les techniques traditionnelles Bissa, Dafing, Mossi et Samo.
Bi-Kalga
Ca2+ Mg2+ Na+
K+ Fe2+
(mg/g) (mg/g) (mg/g) (mg/g) (mg/Kg)
Type Bissa (n=4)
8,21
9,82
23,64
Type Dafing (n=4)
6,52
6,81
11,14
29,54
117
Type Mossi (n=6)
7,04
9,15
9,01
28,12
153
Type Samo (n=6)
5,23
8,39
10,79
29,63
142
151
n = nombre échantillons.
En absence de la souche de Staphylococcus le produit obtenu n’a ni le goût, ni l’odeur
caractéristique du Bi-Kalga. Cette souche est probablement responsable de la genèse
des composés d’arômes qui intervient au cours de la maturation.
Figure 1. : Clichés de microscopie optique (18x100) des bactéries isolées des graines de
H. sabdariffa fermentées. Bacillus sp. (gauche) excrétant les exopolysaccharides
pendant la fermentation initiale. Bacillus sp. (milieu) responsable de l’excrétion de
lipopeptides pendant la fermentation initiale. Staphylococcus sp. (droite) excrétant les
composés d’arômes pendant la maturation.
4.2.1 Essais de fermentation-fortification :
Les essais de fermentation et fortification du Bi-Kalga ont été conduit selon le schéma
technologique présenté ci-dessous (Figure 2.). Ce procédé qui est une amélioration du
schéma traditionnel, se caractérise par la réduction du temps de cuisson de 10 heures à
30 minutes. Le processus de fermentation est maîtrisé par l’utilisation des souches pures
ou de produit issu de la fermentation contrôlée comme starter.
Le Bi-Kalga obtenu par fermentation contrôlé avec les 4 souches a une bonne aptitude à
déclencher la fermentation ; et peut de ce fait être utilisé comme un starter de faible
coût. L’ajout du sulfate de fer à 1000 ppm pendant la fermentation, précisément avant la
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coût. L’ajout du sulfate de fer à 1000 ppm pendant la fermentation, précisément avant la
Graines de Hibiscus sabdariffa
Pilage/ Vannage
Lavage
Graines de H.
sabdariffa
dépelliculées
Cuisson (10-12 heures)
à pH 8-9
Lavage/séchage
Concassage
Graines de H.
sabdariffa
Graines de H.
sabdariffa
Concassées
Cuisson sous pression
15bars (30 minutes)
à pH 8-9
Broyeur à couteaux
(Concassage)
Graines de H. sabdariffa cuites
(Eau ≈ 35-40%, pH 8)
Fermentation
naturelle (72
heures)
Ensemencement
Fermentation
(72 heures)
+ Fe2SO4
Autoclave
(Cuisson sous pression)
Graines fermentées = Bi-Kalga frais
Cuisson à la vapeur
Broyage/Séchage
Bi-Kalga
traditionnel
Bi-Kalga d’essais
(Starter)
Bi-Kalga à droite mis en sachet
pour la commercialisation
maturation n’affecte pas la croissance de la flore de fermentation. Au delà de 2000 ppm
la croissance de la souche de Staphylococcus semble favorisée ; ce qui peut affecter la
phase initiale où elle n’est pas impliquée. Le test organoleptique n’a permis de détecter
aucune différence significative entre le Bi-Kalga fortifié à 1000 ppm et celui de
préparation traditionnelle.
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5. CONCLUSION
La fermentation des graines de H. sabdariffa est un procédé d’intérêt pour
l’obtention d’un complément protéiné pour l’alimentation humaine. Il est
techniquement possible de modifier les procédés de préparation traditionnels sans
affecter de façon significative les qualités organoleptiques du condiment. Le goût
prononcé du Bi-Kalga, sa forte odeur ainsi que sa couleur noir autorise son utilisation
comme aliment véhicule pour la fortification en fer.
Références Bibliographiques
[1]. Mariko, S. INSD Enquête démographique et de santé 2003. ORC Macro,
Calverton Maryland, 2004, pp. 161-163.
[2] Calet, C. et Dronne, Y. In Godon, B. (Ed.) Protéines végétales. Lavoisier, Tec&doc,
Paris, 1996, pp. 2-54.
[3] El Adawi, T.A. et Khalil, A.H. J. Agric. Food. Chem. 42 (1994) 1896.
[4] American Oil Chemists Society. Official methods and recommended practics ; D.
Firetone: Washington DC, 1990.
[5] Huss, H.H. La qualité et son évolution dans le poisson frais ; FAO Document
technique , Rome, 1999.
[6] Odunfa, S.A. J. Food. Technol. 20 (1986) 295.
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