FICHE SOCIOLOGIE : 2.2 La conflictualité sociale : pathologie, facteur de cohésion ou de moteur du changement social ? A- Qu’est-ce qu’un conflit social ? Un conflit social est la divergence d’intérêt et distribution inégale des ressources (matérielles ou symboliques) entre groupes sociaux. Ces divergences peuvent s’exprimer de différentes manières, ainsi il y a différents conflits sociaux qui peuvent être latents ou potentiels, du travail ou sociétaux. Un mouvement social est une entreprise collective de protestation et de contestation visant à imposer ou à empêcher des changements dans la structure sociale et/ou politique par le recours d’action collective. Une action est collective lorsqu’elle est concertée, organisée, consciente et volontaire de la part d’individus appartenant à un ou plusieurs groupes avec des objectifs communs. Cependant le conflit ne débouche pas nécessairement sur la mobilisation, comme le modèle Hirschman à propos des homosexuels dans les années 1970. Trois réactions sont possibles (les homosexuels étaient vu déviants car n’étaient pas aux normes et valeurs de la société à cette époque) : Loyauté – Fidélité (l’individu reconnaît la norme légitime, entre autre il se refoule pour être aux normes) ; la défection (l’individu a une double identité et pratique l’homosexualité en clandestinité pour échapper au contrôle social) et la fierté où l’individu assume sa différence, pouvant être lieu de protestation à différents degrés : provocateur (individuel, ne se cache pas mais ne fait pas rendre légitime sa pratique) et collective (militantisme). Olson décrit va faire apparaître le paradoxe de l’action collective : elle peut ne pas avoir lieu même si les individus ont conscience de leurs intérêts et sont mécontents de leur situation. Les individus dans une perspective individualiste se livrent à un calcul rationnel coût/avantage de l’action collective. De plus les acquis sociaux de l’action collective bénéficient à tous sans que l’on en ait payer le prix : d’où le phénomène du comportement du passager clandestin. Olson pense que la contrainte ou l’incitation peuvent déclencher l’action collective en réservant les bénéfices à ceux qui ont participé (sélection incentive). B- Le conflit est-il une pathologie sociale ? Selon Durkheim le conflit social est une menace pour la cohésion sociale. La division du travail qui doit assurer la solidarité par le phénomène d’interdépendance, poussée à l’excès peut conduire à un individualisme excessif et donc à un défaut d’intégration et de régulation. Parsons établit une comparaison entre le fonctionnement d’un corps et d’une société organique. Une pathologie d’un organe peut remettre en cause le bon fonctionnement du corps. Mais si le conflit est répétitif il faut le voir comme normal et non pathologique. Un conflit dit normal peut prendre des formes plus ou moins régulées, la classification d’un conflit comme normal peut être intégrateur lorsqu’il est institutionnalisé et valorisé, c’est le cas des conflits de la classe ouvrière. Ainsi selon Simmel puis Coser : le conflit renforce l’intégration d’un groupe. Car l’opposition avec un autre groupe social est un moyen de délimiter les caractéristiques d’un groupe et de délimiter les frontières. C’est le cas des syndicats qui permettent une meilleure entente entre les travailleurs et employeurs renforçant la cohésion sociale (délégués personnels, conventions collectives du travail en 1936). Les conflits sont institutionnalisés. Il existe une reconnaissance officielle entre les acteurs des conflits (association à la création de la Sécurité Sociale, droit du travail, répertoire légitime d’actions collectives). Le conflit produit des règles et renforce l’ordre social. Conflits dans les règles : régulés, routinisés (dans le cadre). Sur les règles : remise en cause du cadre, des lois électorales, scrutin ect.. (exemple : FN et les 500 signatures pour se présenter aux Présidentielles, les empêchant de participer dans le passé) C- Quelle est la place du conflit dans le changement social ? Marx a une conception des classes sociales dominants/dominés. Les détenteurs des propriétés de production dévalisent le travail (paysans, ouvriers…). La classe ouvrière dominée et exploitée par la minorité des classes bourgeoises (patrimoine capital). La lutte des classes est au cœur du changement social, les conflits du travail se sont institutionnalisés et la condition ouvrière s’est donc améliorée dans la paix. Dans les années 1960, Alain Touraine montre que dans les sociétés post-industrielles les conflits sont devenus post-matérialistes, c’est à dire plus de nature morale et altruiste que matérialiste. Ainsi il montre l’émergence de « Nouveaux Mouvements Sociaux » cherchant à imposer leurs valeurs à toute la société (Mariage Pour Tous, avortement contraception). Touraine nous montre qu’un mouvement social regroupe 3 principes : -un principe d’identité, acteurs devant se reconnaître un certains nombres d’orientations communes au nom desquelles ils se mobilisent. - d’opposition : lutte contre d’autres acteurs. -de totalité, cette lutte vise des enjeux sociétaux, dont les changements ont une globalité donc non sectoriels ou corporatistes. Becker lui, montre le rôle des entrepreneurs de morale, qui peuvent se mobiliser pour transformer les normes sociales, puis vont s’institutionnalisés une fois le combat terminé (Harlem Désir de SOS Racisme député PS ; lois mémorielles Taubira ou Gayssot). Ces nouveaux mouvements sociaux visent plus particulièrement à s’opposer à des transformations sociales jugées défavorables ou peu souhaitables pour certains acteurs (d’avantages de lutte pour la préservation des droits que la revendications de nouveaux : l’âge de retraite, salle de shoot). Un certains nombres de conflits prennent pour enjeux la résistance au changement, surtout lorsque ceux-ci s’incarnent dans la modernisation des entreprises ou de l’État, jugée « nécessaire » mais qui viendrait menacer le statut des personnes dans la société au travers du travail, ou sociétales jugées dangereuses (salle de shoot, manif pour tous). On appelle certains de ces défenseurs des intérêts individuels les « NIMBY » (Not In My Back Yard), pour préserver un cadre de vie. D- Les mutations des conflits sociaux. Dès la fin du XIX, d’autres mouvements apparaissent et qui sont moins matérialistes et n’ont pas pour seul objectif un meilleur partage des richesses crées. Ronald Inglehart souligne que les nouveaux mouvements sociaux apparus dans les années 1960 sont d’avantages post-matérialistes. Les conflits concerneraient moins ceux du travail (revenus, ressources, partages) ou le pouvoir que des questions liées à l’identité, la reconnaissance ou aux droits culturels. Ceci est dû au développement, la hausse du niveau d’instruction qui génère l’altruisme et la solidarité (aux générations futures pour l’écologie par exemple, ou l’égalité des genres ect). Ils se sont étendus jusqu’à la classe moyenne, mais aussi à des groupes sociaux. Cela ne veut pas forcément dire que les revendications matérialistes ont disparu, loin de là. Les NMS n’ont pas fait disparaître les conflits du travail, ils prennent une forme plus individualiste (SARKOZY : « Une grève ne fait plus un mouvement de panique » ; grace au service minimum). Les formes des conflits auraient ainsi changé, on observe une baisse du taux de syndicalisation, des nombres de grèves et de grévistes du fait du chômage croissant et de la précarité du travail. L’instabilité réduit l’adhésion aux syndicats. Des nouvelles formes d’actions apparaissent (débrayage, conflits sans arrêts de travail, pétitions). Cela ne veut pas forcément dire qu’il y a eu une amélioration dans les rapports au sein des entreprises. Les conflits ne peuvent pas s’exprimer dans des actions collectives dans certains cas. Les mouvements apparus dans les années 1960 utilisent d’avantage des actions non conventionnelles (mode d’action protestataire) : boycott, marches, grèves de la faim, ect.., dans les cas les plus extrêmes certains groupe faiblement intégrés et ne disposant pas de relais politico-médiatique utilisent la violence (émeutes).